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20/06/2024 | FRANCE | N°24/00433

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Rétentions, 20 juin 2024, 24/00433


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 24/00433 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QI4Q



O R D O N N A N C E N° 2024 - 444

du 20 Juin 2024

SUR SECONDE PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE



dans l'affaire entre,



D'UNE PART :



Monsieur X se disant [S] [H]

né le 01 Juillet 1986 à [Localité 2] (TUNISIE)

de nationalité Tunisienne



retenu au centre de rétention de [Localité 4] dans les locaux ne relevant pas de l'administratio

n pénitentiaire,



Comparant et assisté de Maître Emilie PASCAL LABROT, avocat commis d'office



Appelant,



D'AUTRE PART :



1°) MONSIEUR LE...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 24/00433 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QI4Q

O R D O N N A N C E N° 2024 - 444

du 20 Juin 2024

SUR SECONDE PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE

dans l'affaire entre,

D'UNE PART :

Monsieur X se disant [S] [H]

né le 01 Juillet 1986 à [Localité 2] (TUNISIE)

de nationalité Tunisienne

retenu au centre de rétention de [Localité 4] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,

Comparant et assisté de Maître Emilie PASCAL LABROT, avocat commis d'office

Appelant,

D'AUTRE PART :

1°) MONSIEUR LE PREFET DU VAR

[Adresse 1]

[Localité 5]

Non représenté

2°) MINISTERE PUBLIC

Non représenté

Nous, Sylvie BOGE conseiller à la cour d'appel de Montpellier, délégué par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Alexandra LLINARES, greffière,

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Vu l'arrêté du 16 mai 2024 de MONSIEUR LE PREFET DU VAR qui a fait obligation à Monsieur X se disant [S] [H] de quitter le territoire français avec interdiction de retour de 5 ans et a ordonné sa rétention administrative pendant 48 heures dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,

Vu la décision du tribunal administratif de Montpellier du 21 mai 2024 annulant l'interdiction de retour,

Vu l'ordonnance du 20 mai 2024 notifiée le même jour du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Perpignan qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de vingt-huit jours,

Vu la saisine de MONSIEUR LE PREFET DU VAR en date du 16 juin 2024 pour obtenir une seconde prolongation de la rétention de cet étranger,

Vu l'ordonnance du 17 juin 2024 à 18 h 47 notifiée le même jour à la même heure du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Perpignan qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de trente jours,

Vu la déclaration d'appel faite le 18 Juin 2024 par Monsieur X se disant [S] [H] du centre de rétention administrative de [Localité 4], transmise au greffe de la cour d'appel de Montpellier le même jour à 16 h 36,

Vu l'appel téléphonique du 18 Juin 2024 à la coordination pénale afin de désignation d'un avocat commis d'office pour l'audience de 20 Juin 2024 à 09 H 30 .

Vu les courriels adressés le 18 Juin 2024 à MONSIEUR LE PREFET DU VAR, à l'intéressé, à son conseil et au Ministère Public les informant que l'audience sera tenue le 20 Juin 2024 à 09 H 30,

L'avocat et l'appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, dans le box dédié de l'accueil de la cour d'appel de Montpellier, les portes de la salle étant fermées pour assurer la confidentialité de l'entretien et ce, sur le temps de l'audience fixée, avec l'accord du délégué du premier président de la cour d'appel de Montpellier.

L'audience publique initialement fixée à 09 H 30 a commencé à 11 h 04.

PRETENTIONS DES PARTIES

Monsieur X se disant [S] [H] confirme son identité telle que mentionnée dans l'ordonnance entreprise et déclare sur transcription du greffier à l'audience : 'Je m'appelle [S] [H], je suis né le 01 Juillet 1986 à [Localité 2] (TUNISIE), je suis de nationalité tunisienne.'

L'avocat, Me Emilie PASCAL LABROT développe les moyens de l'appel formé contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui a prolongé le maintien en rétention de l'étranger. Le tribunal administratif a maintenu l'OQTF mais annulé l'interdiction de retour de 5 ans.

- abandonne le moyen tiré de l'absence de registre actualisé.

- défaut de pièces utiles : le préfet se fonde sur de prétendus problèmes techniques ayant empêché Monsieur d'être présenté au consul de Tunisie mais rien dans le dossier ne le prouve. Le Préfet aurait pu être rapidement présenté physiquement à son consulat. Dans cette procédure, nous n'avons que des allégations de la préfecture.

Monsieur X se disant [S] [H] déclare sur transcription du greffier à l'audience : les 5 et 12 juin, il ya effectivement eu des problèmes techniques avec la visio, j'étais effectivement présent en salle de visio mais ça n'a pas fonctionné.

L'avocat, Me Emilie PASCAL LABROT, en ses observations : cela n'empêche pas le fait que le préfet aurait pu présenter physiquement le retenu et rien ne justifie la tardiveté de l'entretien prévu maitenant le 26 juin, toujours en visio. Les diligences sont manifestement tardives puisqu'un mois de rétention s'est déjà écoulé sans que Monsieur ne soit présenté à son consulat.

Demande remise en liberté.

Monsieur le représentant de MONSIEUR LE PREFET DU VAR ne comparait pas mais a fait parvenir un mémoire tendant à voir confirmer l'ordonnance déférée.

Monsieur X se disant [S] [H] a eu la parole en dernier et a déclaré sur transcription du greffier à l'audience : 'je sais que je dois quitter le territoire français mais je sais aussi que je pourrai refaire très vite une demande de visa pour revenir légalement puisque l'interdiction de séjour a été annulée par le tribunal.'

Le conseiller indique que l'affaire est mise en délibéré et que la décision sera notifiée par les soins du Directeur du centre de rétention de [Localité 4].

SUR QUOI

Sur la recevabilité de l'appel

Le 18 Juin 2024, à 16 h 36, Monsieur X se disant [S] [H] a formalisé appel motivé de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Perpignan du 17 Juin 2024 notifiée à 18 h 47, soit dans les 24 heures de la notification de l'ordonnance querellée, qu'ainsi l'appel est recevable en application des articles R 743-10 et R743-11 du CESEDA.

Sur l'appel

Sur l'irrecevabilité de la requête préfectorale

L'article R. 743-2 du CESEDA dispose que : « à peine d'irrecevabilité, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l'étranger ou son représentant ou par l'autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention. Lorsque la requête est formée par l'autorité administrative, elle est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l'article L. 744-2 ».

Les textes ne précisent pas les pièces justificatives utiles devant accompagner la requête, à l'exception de la copie du registre actualisé.

Il s'agit des pièces nécessaires à l'appréciation par le juge des libertés et de la détention des éléments de fait et de droit dont l'examen lui permet d'exercer pleinement ses pouvoirs.

Contrairement à ce que soutient l'intéressé, la copie du registre actualisé avec indication du maintien en rétention est annexée à la requête.

Monsieur X se disant [S] [H] soutient également qu'aucun justificatif quant aux dysfonctionnements du dispositif de visio-conférence employés pour les visites consulaires n'est annexé à la requête et qu'il s'agit d'une pièce utile.

La préfecture joint les courriels constatant les dysfonctionnements techniques. Ces pièces suffisent à apprécier les éléments de fait nécessaires au contrôle du juge des libertés et de la détention et aucune pièce justificative utile n'est manquante.

L'exception d'irrecevabilité est rejetée.

Sur le défaut de diligences

Il appartient au juge des libertés et de la détention, en application de l'article L741-3 du CESEDA, de rechercher concrètement les diligences accomplies par l'administration pour permettre que l'étranger ne soit maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ.

S'il n'y a pas lieu d'imposer la réalisation d'actes sans véritable effectivité, tels que des relances auprès des consulats, dès lors que celle-ci ne dispose d'aucun pouvoir de contrainte sur les autorités consulaires (1re Civ., 9 juin 2010, pourvoi n° 09-12.165), en revanche le juge est tenu de vérifier que les autorités étrangères ont été requises de manière effective. Il n'appartient pas au juge de déterminer l'ordre de traitement des dossiers par le consulat, mais seulement de vérifier que l'administration a permis au consulat d'exercer les diligences requises.

La survenue de circonstances imprévisibles, insurmontables et extérieures peut justifier le report de diligences à la condition que les pièces du dossier permettent au juge d'apprécier ces circonstances.

En l'espèce, dès le 16 mai 2024, l'administration a saisi les autorités consulaires tunisiennes aux fins d'identification, ce qui n'est pas contesté. La présentation en vue d'une audition avec le consulat de [Localité 5] a été fixée au 5 juin 2024 par visioconférence. En raison des problèmes techniques du centre de rétention de [Localité 4], cette audition n'a pu avoir lieu et a été reportée dès le 5 juin 2024 au 12 juin 2024 au centre de rétention de [Localité 3] où le retenu a été conduit. Le 12 juin 2024, l'audition a été annulée suite à l'impossibilité de se connecter à la visioconférence et reportée au 26 juin 2024.

Dans ses observations reçues le 20 juin 2024 à 9 heures 38 et versées au débat, la préfecture explique n'avoir aucun document émanant du consulat de Tunisie, qui procède à trois auditions par semaine concernant les personnes en CRA, et que les places pour le 19 juin 2024 étant toutes prises, la première disponibilité était le 26 juin 2024. Elle adresse les courriels justifiant que l'audition consulaire de trois personnes retenues étaient déjà programmées le 19 juin 2024.

Cependant, l'administration n'explique pas pour quel motif une escorte n'a pu être organisée afin de permettre l'audition de l'intéressé au consulat de Tunisie à [Localité 5]. Elle ne justifie pas de circonstances imprévisibles, insurmontables et extérieures justifiant que le défaut d'escorte soit constitutif d'un cas de force majeure empêchant l'administration d'agir.

Le délai de 14 jours qui sépare l'annulation de la seconde audition consulaire de la nouvelle audition est en outre un délai incertain à ce jour en cas de nouveau dysfonctionnement technique de la visioconférence.

Il se déduit de l'allongement de 14 jours de la rétention, du seul fait d'une carence de l'Etat dans l'organisation d'une escorte devant suppléer les défaillances techniques à deux reprises du système de visioconférence, non justifiée par des circonstances imprévisibles, insurmontables et extérieures, d'une part, que l'administration n'a pas accompli les diligences permettant que l'étranger ne soit maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ et, d'autre part, que ce défaut de diligence porte nécessairement atteinte à ses droits.

Il y a donc lieu d'infirmer l'ordonnance critiquée et de rejeter la requête en prolongation présentée par le préfet.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement,

Déclarons l'appel recevable,

Infirmons la décision déférée,

Et statuant à nouveau,

Rejetons la requête du préfet,

Disons n'y avoir lieu à prolongation de la rétention administrative de Monsieur X se disant [S] [H],

Lui rappelons qu'il a l'obligation de quitter le territoire national,

Ordonnons la notification immédiate de la décision au Procureur Général,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l'article R 743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile,

Fait à Montpellier, au palais de justice, le 20 Juin 2024 à 12 h 28.

Le greffier, Le magistrat délégué,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Rétentions
Numéro d'arrêt : 24/00433
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;24.00433 ?
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