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19/06/2024 | FRANCE | N°23/02228

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre sociale, 19 juin 2024, 23/02228


Grosse + copie

délivrée le

à



COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



3e chambre sociale



ARRET DU 19 JUIN 2024



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/02228 - N° Portalis DBVK-V-B7H-PZW5



ARRET n° 24/965



Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 MARS 2023

POLE SOCIAL DU TJ DE MONTPELLIER

N° RG22/00264







APPELANTE :



Madame [K] [W] sous curatelle gérée par Monsieur [V] [C].

[Adresse 3]

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Représentant : Me Maxime MARTINEZ, avocat au barreau de MONTPELLIER









INTIMEE :



MAISON DEPARTEMENTALE DES PERSONNES HANDICAPEES DE L'HERAULT (MDPH 34)

[Adresse 1]

Direction juridique - BP 7353

[Loc...

Grosse + copie

délivrée le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre sociale

ARRET DU 19 JUIN 2024

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/02228 - N° Portalis DBVK-V-B7H-PZW5

ARRET n° 24/965

Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 MARS 2023

POLE SOCIAL DU TJ DE MONTPELLIER

N° RG22/00264

APPELANTE :

Madame [K] [W] sous curatelle gérée par Monsieur [V] [C].

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentant : Me Maxime MARTINEZ, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

MAISON DEPARTEMENTALE DES PERSONNES HANDICAPEES DE L'HERAULT (MDPH 34)

[Adresse 1]

Direction juridique - BP 7353

[Localité 2]

Non comparante

En application de l'article 937 du code de procédure civile, les parties ont été convoquées à l'audience.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 AVRIL 2024,en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Magali VENET, Conseillère, chargée du rapport.

Cette magistrate a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Magali VENET, Conseillère

Mme Anne MONNINI-MICHEL, Conseillère

Greffier, lors des débats : M. Philippe CLUZEL

ARRET :

- réputé contradictoire.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour ;

- signé par Monsieur Pascal MATHIS, Président et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.

*

* *

EXPOSÉ DU LITIGE

Par décision du 16 octobre 2020, la Maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault a accordé à Mme [K] [W], au titre de la prestation de compensation du handicap, une aide humaine à hauteur de 15 heures par jour.

Le 1er décembre 2020, Mme [P] [C] et M. [V] [C] , Mme [K] [W], assistée de ses curateurs M. [V] [C] et Mme [P] [O] épouse [C], a saisi le pôle social tribunal judiciaire de Montpellier d'un recours contre cette décision.

Par jugement du 19 octobre 2021, le tribunal a fixé la durée de l'aide humaine à hauteur de 24h par jour pour la période du 1er mai 2019 au 30 avril 2029.

Par courrier du 13 décembre 2021, Mme [W] a sollicité auprès de la MDPH de l'Hérault une réparation à hauteur de 49 245 euros au titre du préjudice que lui a personnellement causé la minoration du temps d'aide humaine qui lui a été accordé entre le 1er mai 2019 et le 1er novembre 2021.

Le 1er mars 2022, Mme [W] a adressé une requête au pôle social du tribunal judiciaire de Montpellier afin de contester le rejet tacite de la demande indemnitaire.

Par jugement du 23 mars 2023, le tribunal judiciaire de Montpellier a débouté Mme [W] de ses demandes.

Par déclaration du 25 avril 2023, Mme [W] a interjeté appel du jugement.

Elle demande à la cour de :

- condamner la MDPH de l'Hérault à lui verser la somme de 49 245 euros au titre de la réparation de ses préjudices moraux et des troubles dans ses conditions d'existence dont est à l'origine la décision du 16 octobre 2020 de la CDAPH réformée par jugement du tribunal judiciaire du 19 octobre 2021 ;

- condamner la MDPH de l'Hérault à verser à Mme [W] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La Maison des Personnes Handicapées de l'Hérault, bien que régulièrement convoquée et avisée, n'a pas comparu, ni personne pour elle, ni n'a sollicité de dispense de comparution.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application de l'article R.241-31 du code de l'action sociale et des familles, la MDPH est responsable des décisions rendues par la CDAPH . Pour engager cette responsabilité, il faut démontrer l'existence d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité.

En application de l'article L146-8 du code de l'action sociale et des familles, une équipe pluridisciplinaire évalue les besoins de compensation de la personne handicapée et son incapacité permanente sur la base de son projet de vie et de références définies par voie réglementaire et propose un plan personnalisé de compensation du handicap.

Elle entend, soit sur sa propre initiative, soit lorsqu'ils en font la demande, la personne handicapée, ses parents lorsqu'elle est mineure, ou son représentant légal. Dès lors qu'il est capable de discernement, l'enfant handicapé lui-même est entendu par l'équipe pluridisciplinaire.

L'équipe pluridisciplinaire se rend sur le lieu de vie de la personne soit sur sa propre initiative, soit à la demande de la personne handicapée. Lors de l'évaluation, la personne handicapée, ses parents ou son représentant légal peuvent être assistés par une personne de leur choix. La composition de l'équipe pluridisciplinaire peut varier en fonction de la nature du ou des handicaps de la personne handicapée dont elle évalue les besoins de compensation ou l'incapacité permanente.

L'équipe pluridisciplinaire sollicite, en tant que de besoin et lorsque les personnes concernées en font la demande, le concours des établissements ou services visés au 11° du I de l'article L. 312-1 ou des centres désignés en qualité de centres de référence pour une maladie rare ou un groupe de maladies rares.

En l'espèce, Mme [K] [W] sollicite, la condamnation de la MDPH de l'Hérault à lui verser la somme de 49 250 euros en réparation du préjudice résultant de l'erreur d'appréciation dans ses besoins d'aide humaine commise par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées. Elle estime avoir subi, en raison de cette sous évaluation de ses besoins en aide humaine, un préjudice moral ainsi qu'un trouble dans ses conditions d'existence.

Elle conteste avoir entravé le processus de décision tendant à réévaluer ses besoins en aide humaine , et précise au contraire que l'équipe pluridisciplinaire de la MDPH a établi ses besoins sans demander à la visiter ou à la recevoir.

Pour rejeter sa demande, le tribunal a statué ainsi:

'La MDPH soutient que les aidants familiaux et co-curateurs de Mme [W]'opposent de longue date au bon déroulement de cette démarche d'élaboration du plan de compensation et ses modifications dans le temps.

La MDPH indique , et ce n'est pas contesté, que la dernière participation sans réticence de Mme [W] et ses aidants familiaux et curateurs aux travaux de l'équipe pluridisciplinaire remonte au mois de janvier 2017.

Mme [W] par ses co curateurs allègue une défiance ancienne à l'égardde la CDAPH pour réfuser de participer pleinement à la procédure d'évaluation des besoins prévus par la loi.

Si l'épuisement des aidants peut expliquer un sentiment d'incompréhension de leurs difficultés, voire de colère, il y a lieu de dire que le refus de participer aux travaux d'inventaire et d'analyse des besoins, qui est une décision de Mme [W] et ses aidants et co curateurs, affecte nécessairement, et pour une raison qui ne leur est pas imputable, le diagnostic de la CDAPH et les décisions consécutives de la MDPH.

Il y a lieu pour ce motif de débouter Mme [W] de sa demande de dommages intérêt à défaut de faute prouvée de la MDPH de l'Herault dont le processus de décision, défini par le code de l'action sociale et des familles , a été entravée par l'obstruction de ses co-curateurs'

SUR CE :

Il ressort des éléments de la procédure que :

- par décision du TCI de Montpellier du 16 mars 2017, les besoins en aide humaine de Mme [W] ont été fixés à 15 heures quotidiennes sur la période du 1er janvier 2015 au 31 octobre 2020.

- en mai 2019, au regard de l'aggravation des pathologies de Mme [W], M. [V] [C], curateur a sollicité la MDPH afin que celle-ci réévalue ses besoins en aide humaine.

- Le 5 juin 2019, la MDPH a accusé réception de la demande de la requérante et indiqué qu'à cette date le dossier de demande était déclaré complet.

- Le 27 août 2019, la MDPH a adressé à la requérante la proposition élaborée par l'équipe pluridiscipliaire (PPC) établissant un besoin de PCH inchangé, soit 15h par jour.

- Le 4 septembre 2019 le co-curateur de Mme [W] a demandé à pouvoir présenter ses observations devant la CDAPH , à la suite de quoi la MDPH l'a informé que le dossier serait évoquée à l'audience du 7 octobre 2019.

- Par courrier du 8 octobre 2019, la CDAPH a confirmé la non réévaluation des besoins en aide humaine.

- Le 05 novembre 2019, les requérants ont saisi la MDPH d'un recours administratif préalable obligatoire; par décision du 13 mars 2020 la MDPH adressait un PPC emportant rejet de la demande de réévaluation du quantum d'aide humaine .

Suite au recours contre cette décision, la CDAPH de l'Hérault a attribué à Mme [W] au titre de la prestation de compensation du handicap 15h d'aide humaine par jour, à la suite de quoi les requérants ont saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Montpellier qui part jugement du 19 octobre 2021 a fixé la temps d'aide humaine à 24h par jour.

Il ressort de ces éléments que suite à la demande de réévaluation de mai 2019, l'équipe pluridisciplinaire n'a formalisé aucune demande tendant à rencontrer Mme [W] à laquelle cette dernière ou ses curateurs se seraient opposés. De plus, ces derniers ont transmis avec célérité les documents nécessaires à l'élaboration du dossier . Il ne peut ainsi leur être reproché une quelconque obstruction à la procédure d'évaluation des besoins prévus par la loi.

Par ailleurs, en sous-évaluant les besoins en aide humaine de Mme [W] , l'intimée a commis une faute en privant celle-ci de l'assistance permanente (24h/24) d'aidants dont elle avait besoin, lui occasionnant ainsi des troubles dans ses conditions d'existence ainsi qu'un préjudice moral.

Il convient en conséquence d'indemniser les préjudices subis en lui octroyant la somme de 10000 euros; la décision sera infirmée en ce sens.

L'équité commande de rejeter la demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Montpellier le 23 mars 2023 en ce qu'il a débouté Mme [W] de sa demande de dommages intérêts,

Statuant à nouveau,

Condamne la Maison départementale des Personnes Handicapées de l'Hérault à verser à Mme [K] [W] la somme de 10 000 euros de dommages intérêts

Rejette la demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la MDPH de l'Hérault aux dépens de la procédure.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 23/02228
Date de la décision : 19/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-19;23.02228 ?
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