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17/06/2024 | FRANCE | N°24/00416

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Rétentions, 17 juin 2024, 24/00416


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 24/00416 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QIZB



O R D O N N A N C E N° 2024 - 426

du 17 Juin 2024

SUR LE CONTROLE DE LA REGULARITE D'UNE DECISION DE PLACEMENT EN RETENTION ET SUR LA PROLONGATION D'UNE MESURE DE RETENTION ADMINISTRATIVE

ET

SUR REQUÊTE DE L'ETRANGER EN CONTESTATION DU PLACEMENT EN RETENTION ADMINISTRATIVE



dans l'affaire entre,



D'UNE PART :



Monsieur [C] [E]

né le 06 Janvier 2004 à [Localité 3] OU [Localité 5] (GUINEE)

de nationalité Gui

néenne



retenu au centre de rétention de [Localité 6] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire



Comparant et assisté ...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 24/00416 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QIZB

O R D O N N A N C E N° 2024 - 426

du 17 Juin 2024

SUR LE CONTROLE DE LA REGULARITE D'UNE DECISION DE PLACEMENT EN RETENTION ET SUR LA PROLONGATION D'UNE MESURE DE RETENTION ADMINISTRATIVE

ET

SUR REQUÊTE DE L'ETRANGER EN CONTESTATION DU PLACEMENT EN RETENTION ADMINISTRATIVE

dans l'affaire entre,

D'UNE PART :

Monsieur [C] [E]

né le 06 Janvier 2004 à [Localité 3] OU [Localité 5] (GUINEE)

de nationalité Guinéenne

retenu au centre de rétention de [Localité 6] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire

Comparant et assisté par Maître Drissia BOUAZAOUI, avocat commis d'office

et en présence de [L] [R], interprète assermenté en langue guinéenne,

Appelant,

D'AUTRE PART :

1°) MONSIEUR LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE

[Adresse 2]

[Localité 1]

Non représenté,

2°) MINISTERE PUBLIC

Non représenté

Nous, Sylvie BOGE conseiller à la cour d'appel de Montpellier, délégué par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Alexandra LLINARES, greffier,

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Vu les dispositions des articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'arrêté du 23 décembre de MONSIEUR LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE portant obligation de quitter le territoire national sans délai pris à l'encontre de Monsieur [C] [E] ;

Vu la décision de placement en rétention administrative du 11 juin 2024 de Monsieur [C] [E] pendant 48 heures dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;

Vu la requête de Monsieur [C] [E] en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative en date du 12 juin 2024 ;

Vu la requête de MONSIEUR LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE en date du 13 juin 2024 tendant à la prolongation de la rétention de Monsieur [C] [E] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée vingt-huit jours ;

Vu l'ordonnance du 13 Juin 2024 à 17 h 23 notifiée le même jour à la même heure, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Perpignan qui a :

- rejeté la requête en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative formée par Monsieur [C] [E],

- ordonné la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [C] [E] , pour une durée de vingt-huit jours ;

Vu la déclaration d'appel faite le 14 Juin 2024 par Monsieur [C] [E] du centre de rétention administrative de [Localité 6], transmise au greffe de la cour d'appel de Montpellier le même jour à 12 h 15,

Vu l'appel téléphonique du 14 Juin 2024 à la coordination pénale afin de désignation d'un avocat commis d'office pour l'audience de 17 Juin 2024 à 09 H 30

Vu les courriels adressés le 14 Juin 2024 à MONSIEUR LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE, à l'intéressé, à son conseil et au Ministère Public les informant que l'audience sera tenue le 17 Juin 2024 à 09 H 30,

L'avocat et l'appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, dans le box dédié de l'accueil de la cour d'appel de Montpellier, les portes de la salle étant fermées pour assurer la confidentialité de l'entretien, en la seule présence de l'interprète et ce, sur le temps de l'audience fixée, avec l'accord du délégué du premier président de la cour d'appel de Montpellier

L'audience publique initialement fixée à 09 H 30 a commencé à 10 H 05.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Assisté de [L] [R], interprète, Monsieur [C] [E] confirme son identité telle que mentionnée dans l'ordonnance entreprise et déclare sur transcription du greffier à l'audience : 'Je m'appelle [C] [E], je suis né le 06 Janvier 2004 à [Localité 5] (GUINEE). Je n'ai pas de passeport.'

L'avocat, Me Drissia BOUAZAOUI développe les moyens de l'appel formé contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui a prolongé le maintien en rétention de l'étranger.

- la notification des droits était incomplète, ne comportant pas les coordonnées du consulat de Guinée, ce qui a porté grief à Monsieur en l'empêchant d'exercer immédiatement ses droits.

- absence de prise en compte de la situation personnelle. Monsieur est en France depuis 2020, il était mineur à son arrivée et a été pris en charge par l'ASE. Il a un parcours professionnel, a fait des formations, il a un CAP de peintre en bâtiment. Jusqu'en août 2023, il a eu un titre de séjour mais n'a pas pu le renouveler, étant allé voir sa mère en Italie. Il est totalement inconnu des services de police.

- demande mise en liberté (pas de demande d'assignation à résidence).

Assisté de [L] [R], interprète, Monsieur [C] [E] a eu la parole en dernier et et a déclaré sur transcription du greffier à l'audience : 'je n'ai pas respecté l'assignation à résidence parce que j'avais perdu tous les documents disant où je devais aller signer. J'avais peur d'aller à la police. J'ai rendez-vous avec mon éducatrice pour signer un contrat, avec ça je pourrai demander un titre de séjour.'

Le conseiller indique que l'affaire est mise en délibéré et que la décision sera notifiée par les soins du Directeur du centre de rétention de [Localité 6] avec l'assistance d'un interprète en langue guinéenne à la demande de l'étranger retenu.

SUR QUOI

Sur la recevabilité de l'appel

Le 14 Juin 2024, à 12h15, Monsieur [C] [E] a formalisé appel motivé de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Perpignan du 13 Juin 2024 notifiée à 17h23, soit dans les 24 heures de la notification de l'ordonnance querellée, qu'ainsi l'appel est recevable en application des articles R 743-10 et R743-11 du CESEDA.

Sur l'appel

Sur la nullité de la notification des droits en rétention

L'article L.744-4 du CESEDA dispose :

'L'étranger placé en rétention est informé dans les meilleurs délais qu'il bénéficie, dans le lieu de rétention, du droit de demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil et d'un médecin, et qu'il peut communiquer avec son consulat et toute personne de son choix. Ces informations lui sont communiquées dans une langue qu'il comprend.

Les modalités selon lesquelles s'exerce l'assistance de ces intervenants sont précisées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d'Etat.'

Ce texte n'impose pas de préciser les coordonnées du consulat dont l'intéressé est suseptible de relever.

En l'espèce, la notification des droits informe l'intéressé de son droit de communiquer avec son consulat et la représentation diplomatique de son pays.

Cette mention remplit les exigences de l'article susvisé, étant précisé au surplus que l'intéressé peut communiquer, avec l'assistance de l'association FORUM REFUGIES, avec les autorités consulaires dont il relève.

L'exception de nullité sera donc rejetée.

Sur la contestation de l'arrêté de placement en rétention

ll résulte des articles L. 741-1 et L. 731-1 du CESEDA, tels que modifiés par la loi n°2024~42 du 26 janvier 2024, que l'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de 48 heures, l'étranger qui fait l`objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français prise moins de trois ans auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé, lorsqu'iI ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécuticn de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision, étant précisé que le risque de soustraction est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3 ou au regard de la menace pour l'ordre public que l'étranger représente.

L'arrêté doit expliciter la raison ou les raisons pour lesquelles la personne a été placée en rétention au regard d'éléments factuels pertinents liés à la situation individuelle et personnelle de l'intéressé et ce, au jour où l'autorité administrative prend sa décision, sans avoir à relater avec exhaustivité l'intégralité des allégations de la personne concernée.

L'intéressé fait valoir un défaut d'exament individuel et sérieux de sa situation personnelle et une insuffisance de motivation et erreur d'appréciation de la menace pour l'ordre public.

S'agissant des éléments allégués par l'intéressé sur sa vie personnelle concernant sa durée de séjour en France depuis 2020, son arrivée sur le territoire français mineur à 16 ans, son suivi par l'ASE, son insertion professionnelle, l'absence de famille dans son pays d'origine, c'est par des motifs pertinents qui ne sont pas critiqués dans la déclaration d'appel que le premier juge a rejeté ce moyen : il relève d'une part, que l'administration a fondé sa décision de placement en rétention administrative sur l'absence de garanties de représentation du retenu en raison du défaut de document d'identité, de résidence stable et effective sur le territoire français (il se déclare sans domicile fixe à [Localité 4]) et du non respect des deux décisions d'assignation à résidence des 15 février 2024 et 29 mars 2024 ainsi que sur ses déclarations sur sa vie personnelle lors de sa garde à vue, d'autre part, que sous le couvert d'une contestation de la rétention, le retenu conteste en réalité son éloignement pour des motifs liés à sa situation personnelle.

Or il résulte d'une jurisprudence constante, rendue au visa de la loi des 16-24 août 1790, du décret du 16 fructidor an III et du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le juge administratif est seul compétent pour connaître de la légalité des décisions relatives au séjour et à l'éloignement, quand bien même leur illégalité serait invoquée par voie d'exception à l'occasion de la contestation, devant le juge judiciaire, de la décision de placement en rétention (1re Civ., 27 septembre 2017, pourvoi n° 17-10.207, Bull. 2017, I, n° 201).

Le juge judiciaire n'est donc pas compétent pour recevoir un moyen contestant en réalité la décision administrative de renvoi vers son pays, étant précisé au surplus que la juridiction administrative a rejeté le 28 décembre 2023. son recours contre cette décision..

La déclaration d'appel critique le motif du placement en rétention portant sur la menace à l'ordre public, or ce motif n'est pas retenu par l'administration préfectorale dont la décision est fondée sur l'absence de garanties de représentation.Ce moyen sans lien avec le dossier est dès lors irrecevable.

La décision de placement en rétention n'est dès lors pas entachée d'une erreur d'appréciation et d'un défaut de motivation.

Ce moyen sera rejeté.

Sur la demande d'assignation à résidence

L'article L 743-13 du CESEDA' dispose:' «'Le juge des libertés et de la détention peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.

L'assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution.

Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L. 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.'»

En l'espèce, l'intéressé ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure qui est considéré comme établi au visa des articles L 612-2 et L 612-3 du ceseda.Au surplus, il ne dispose pas de document d'identité.

L'assignation à résidence ne peut être ordonnée.

En l'absence de toute illégalité susceptible d'affecter les conditions (découlant du droit de l'Union) de légalité de la rétention, et à défaut d'autres moyens présentés en appel, il y a lieu de confirmer la décision déferée.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement,

Déclarons l'appel recevable,

Confirmons la décision déférée,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l'article R 743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile,

Fait à Montpellier, au palais de justice, le 17 Juin 2024 à 10 h 37.

Le greffier, Le magistrat délégué,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Rétentions
Numéro d'arrêt : 24/00416
Date de la décision : 17/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-17;24.00416 ?
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