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13/06/2024 | FRANCE | N°22/00893

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 13 juin 2024, 22/00893


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à



























COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



4e chambre civile



ARRET DU 13 JUIN 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/00893 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PKCI



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 20 janvier 2022 r>
Tribunal judiciaire de Carcassonne - N° RG 17/00840





APPELANT :



Maître [O] [G] ès qualités de liquidateur judiciaire de la Mutuelle des Transports Assurances (MTA), Société d'assurance mutuelle à cotisations variables, régie par le Code des Assurances, immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 324 167 139, ay...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 13 JUIN 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/00893 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PKCI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 20 janvier 2022

Tribunal judiciaire de Carcassonne - N° RG 17/00840

APPELANT :

Maître [O] [G] ès qualités de liquidateur judiciaire de la Mutuelle des Transports Assurances (MTA), Société d'assurance mutuelle à cotisations variables, régie par le Code des Assurances, immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 324 167 139, ayant son siège à [Localité 4], [Adresse 2],

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Virginie BERTRAN, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant, substituant sur l'audience la STREAM SCP, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

S.A.S. Languedoc Location - S.A.S immatriculée au RCS Carcassonne sous le numéro B 309 025 112, prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 6]

[Localité 1]

Représentée par Me Caroline TREZEGUET de la SCP DORIA AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant, substituant sur l'audience Me Xavier LAURENT de la SELAS LCA Associés, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 avril 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Charlotte MONMOUSSEAU

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, prévu le 6 juin 2024 et prorogé au 13 juin 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Charlotte MONMOUSSEAU, Greffière.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

La SA Languedoc Location, qui a pour activité la location de véhicules à des particuliers et professionnels, a souscrit un contrat d'assurance auprès de la Mutuelle des Transports Assurances visant la couverture des véhicules utilisés dans le cadre de son activité.

Le contrat d'assurance a pris effet le 1er août 2012.

Le 15 décembre 2015, à la suite d'une décision du conseil d'administration, la Mutuelle des Transports Assurances (ci-après la mutuelle) a décidé de procéder à un appel de cotisations complémentaires auprès de ses sociétaires.

Elle a réclamé par lettre recommandée avec accusé de réception le 7 janvier 2016 à la SA Languedoc Location, trois appels de cotisations complémentaires, au titre du contrat susvisé:

pour l'exercice 2012 : 5 118,66 € TTC

pour l'exercice 2013 : 10 220,90 € TTC

La mutuelle a mis en demeure la SA Languedoc Location d'avoir à régulariser sa situation par lettre recommandée avec avis de réception en date du 23 juin 2016.

Le 1er décembre 2016, par jugement du tribunal de commerce de Paris, la Mutuelle des Transports Assurances a été placée en liquidation judiciaire et Me [O] [G], mandataire judiciaire, a été désignée en qualité de liquidateur.

Le 27 mars 2017, la mutuelle a adressé à son assuré un avis d'échéance en décompte des cotisations dues portant mention de la déduction opérée au titre 5 sinistres représentant un total de 2032,30 €, de telle sorte que la créance de l'assureur a été réduite à due concurrence de ce montant à la somme 13 307,26 €.

C'est dans ce contexte que par acte du 7 août 2017, la mutuelle, représentée par son liquidateur Me [G], a fait assigner la SA Languedoc Location afin de voir condamner cette dernière à lui payer la somme due au titre des cotisations complémentaires.

Par jugement contradictoire du 20 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Carcassonne a :

- déclaré non prescrite l'action engagée par Me [G], es-qualité de liquidateur judiciaire de la société Mutuelle des Transports Assurances ;

- débouté Me [G], es-qualité de liquidateur judiciaire de la société Mutuelle des Transports Assurances de ses demandes de condamnations formées à l'encontre de la SA Languedoc Location;

-débouté les parties de l'ensemble de leurs demandes plus amples, autres ou contraires ;

- condamné Me [G], es-qualité de liquidateur judiciaire de la société Mutuelle des Transports Assurances aux entiers dépens de l'instance avec distraction au profit de la SELAS Chopin Pepin en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Me [G], es-qualité de liquidateur judiciaire de la société Mutuelle des Transports Assurances (ci-après Me [G]), a relevé appel de ce jugement le 14 février 2022.

PRÉTENTIONS

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 18 octobre 2022, Me [G] demande en substance à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevable son action à l'encontre de la SAS Languedoc Location, mais l'infirmer en ce qu'il a débouté de ses demandes dirigées contre ladite SAS, et statuant à nouveau, de :

Condamner la SAS Languedoc Location à payer à Me [G] la somme en principal de 13 307, 26 euros au titre des cotisations complémentaires, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 7 janvier 2016 qui seront capitalisés dans les termes des articles 1154 (ancien) et 1343-2 (nouveau) du code civil ;

Condamner la SAS Languedoc Location à payer à Me [G] la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Par uniques conclusions remises par voie électronique le 21 juillet 2022, la SAS Languedoc Location demande en substance à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré non prescrite l'action engagée par Me [G], mais le confirmer en ce qu'il a débouté ce dernier de l'ensemble de ses demandes contre la SAS, y ajoutant :

Condamner Me [G] à payer à la SAS Languedoc Location la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner Me [G], aux entiers dépens dont recouvrement par la SCP Doria avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture du 13 mars 2024.

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS :

- Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en paiement

La SA Languedoc Location maintient en cause d'appel le moyen écarté en première instance tiré de l'irrecevabilité de l'action en paiement introduite à son encontre du fait de la prescription, au motif que les cotisations appelées au titre des exercices 2011 à 2013 ont fait l'objet d'un appel par la Mutuelle plus de deux ans après la clôture des exercices concernés en dépit de la connaissance qu'elle avait, dès l'arrêté des comptes 2013 en début du premier semestre 2014, de ce que sa situation financière justifiait potentiellement l'application des dispositions de l'article R322-71 du code des assurances.

L'article L.221-11 du code de la mutualité dispose notamment que « toutes actions dérivant des opérations régies par le présent titre sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance (...) ».

L'article L.114-1 du code des assurances dans sa rédaction applicable à l'espèce visée expressément par les conditions générales produites par la Mutuelle régit la prescription dans les mêmes termes et conditions.

Selon l'article R322-71 du code des assurances, le sociétaire d'une société d'assurance mutuelle ne peut être tenu au-delà du montant maximal de cotisation indiqué dans sa police dans le cas d'une société à cotisations variables. Ce montant maximal ne peut être inférieur à une fois et demie le montant de la cotisation normale nécessaire pour faire face aux charges probables résultant des sinistres et aux frais de gestion. Les fractions du montant maximal de cotisation que les sociétaires peuvent, le cas échéant, avoir à verser en sus de la cotisation normale, sont fixées par le conseil d'administration.

Il en résulte que la cotisation appelée pour un exercice n'étant que provisoire, le conseil d'administration d'une société à cotisations variables peut user de la faculté qui lui est ainsi reconnue pour les exercices antérieurs à la résiliation du contrat (Civ 1 ère., 25 mars 1991, pourvoi n 89-19.782, Bull. 1991, I, n 104).

La décision du conseil d'administration, qui peut être prise à tout moment, constitue le point de départ de la prescription biennale de l'action en paiement de la cotisation complémentaire prévue par le premier de ces textes, la date de résiliation du contrat d'assurance étant indifférente ( Civ.1 ère, 15 janvier 2002, pourvoi n 99-11.704, Bull. 2002, I, n 10).

Au cas d'espèce, l'action en paiement introduite le 7 août 2017 à l'encontre de la société Languedoc Location par la Mutuelle des Transports porte sur une demande en paiement d'un complément de cotisations fondée sur une décision prise le 15 décembre 2015 par M. [I], administrateur provisoire de la mutuelle désigné en cette qualité le 10 juillet 2015 par application des dispositions de l'article L612-34 du code monétaire et financier par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ci-après l'Acpr).

Ayant été introduite dans le délai de deux ans à compter de l'événement qui lui a donné naissance, cette action est donc bien recevable et le jugement sera confirmé sur ce point.

- Sur le bien-fondé de l'action en paiement

La société Languedoc Location a bien adhéré à la Mutuelle des Transports Assurances suivant contrat signé le 25 octobre 2012 faisant expressément référence aux conditions générales et spéciales des 16 mars 2010 et 1er avril 2010 qui y sont jointes de sorte que ces dernières lui sont opposables.

La Mutuelle fait grief au jugement déféré de l'avoir déboutée de sa demande en paiement au motif qu'elle ne justifiait pas de son bien-fondé tant dans son principe que dans son montant au regard des pièces produites dont le premier juge pour la débouter de ses demandes a considéré qu'elles avaient été établies unilatéralement sans être validées par un commissaire aux comptes ou toute autre autorité compétente.

La société Languedoc Location fait valoir en substance quant à elle à l'appui de son appel incident :

- qu'en vertu de l'article 10 des statuts de la Mutuelle, le rappel de cotisations doit émaner du conseil d'administration alors qu'en l'espèce cette décision a été prise par M. [I] administrateur provisoire dont la décision de l'Acpr qui l'a nommé ne définit pas la mission ce qui rend la décision du dit administrateur provisoire sans effet à l'égard des sociétaires.

- que la Mutuelle ne justifie pas du groupement auquel la société Languedoc Location appartient, ni du montant des cotisations supplémentaires qui lui est réclamé,

- que la Mutuelle ne justifie pas de la réalité de pertes enregistrées au titre des exercices 2011 et 2013 alors que l'activité de la Mutuelle est fortement réassurée et absorbe a minima 2/3 des pertes techniques,

- qu'en réalité, les demandes formulées par la Mutuelle ne correspond pas à des charges résultant des sinistres et frais de gestion mais sont destinées à restaurer sa marge de solvabilité ainsi que mis en évidence par l'ordre du jour de l'assemblée générale de 2015 et de la décision de l'Acpr du 23 août 2016 ayant abouti au retrait d'agrément de la Mutuelle.

Ceci étant exposé, seront rappelées s'agissant du bien-fondé du principe même de l'appel de cotisations supplémentaires, les dispositions précédemment citées de l'article R 322-71 du code des assurances reprises à l'article 10 des statuts de la Mutuelle, permettant au conseil d'administration de la société d'assurance de procéder à un appel de cotisation complémentaire pour couvrir ses charges lorsque les cotisations appelées et encaissées ne permettent pas de faire face aux charges des sinistres et des frais de gestion, la cotisation complémentaire étant due quelle que soit la situation des sociétaires y compris ceux dont le contrat a été résilié.

S'agissant de la régularité de la décision d'appel de ces cotisations complémentaires, l'article 612-34 du code monétaire et financier dispose que l'Acpr peut désigner un administrateur provisoire auprès d'une personne qu'elle contrôle, auquel sont transférés tous les pouvoirs d'administration de direction, et de représentation de la personne morale de sorte que M. [I], auteur de la décision contestée du 15 décembre 2015, désigné administrateur provisoire de la mutuelle par décision de cette autorité le 10 juillet 2015 avait bien qualité à la prendre en lieu et place du conseil d'administration ainsi que jugé à bon droit par le tribunal.

La cour considère également à l'instar du premier juge comme justifiée par l'article 11 des statuts de la mutuelle, la répartition des sociétaires en groupement et l'appartenance de la société Languedoc au groupement des loueurs de véhicules, cette répartition ayant été agréée par le conseil d'administration de la Mutuelle le 30 novembre 2000.

La réalité de la situation déficitaire du groupement des loueurs de véhicules durant les trois exercices 2011, 2012 et 2013 est jugée par la cour également suffisamment établie par la production aux débats en pièces 9, 10 et 11 du dossier de l'appelant des rapports du conseil d'administration présentés aux assemblées générales des 20 juin 2012 au titre de l'exercice 2011, du 27 juin 2013 au titre de l'exercice 2012 et du 30 juin 2014 au titre de l'exercice 2013 ces assemblées générales ayant approuvé les comptes de chacun de ces exercices par ailleurs certifiés par le commissaire au compte de la Mutuelle M. [L].

Dès lors, le rappel de cotisations au titre de ces exercices est justifié en son principe, la pièce 15 produite par la Mutuelle justifiant en outre du bien-fondé de son montant, le rapport sinistres / cotisations du groupement des « loueurs de véhicules » étant au titre des exercices considérés de 84 % et justifiant un taux de rappel de 15 %, la société Languedoc ne démontrant pas en quoi ce rappel effectué au titre de ces trois périodes était abusif ou détourné des objectifs fixés par les statuts de la Mutuelle.

Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a débouté Me [G] es-qualité de liquidateur judiciaire de la Mutuelle de ses demandes en paiement, la société Languedoc Location étant par suite condamnée à lui payer la somme de 13 307, 26 euros au titre des cotisations complémentaires, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 7 janvier 2016, la capitalisation des intérêts étant en outre ordonnée dans les termes de l'article 1343-2 du code civil.

Partie succombante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, la société Languedoc Location sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a déclaré recevable l'action en paiement engagée par Me [O] [G] es-qualité de liquidateur judiciaire de la Mutuelle des Transports Assurances à l'encontre de la société Languedoc Location,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société Languedoc Location à payer à Me [O] [G] es-qualité de liquidateur judiciaire de la Mutuelle des Transports Assurances la somme de 13 307, 26 euros au titre des cotisations complémentaires, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 7 janvier 2016 avec capitalisation des intérêts dus pour une année entière dans les termes de l'article 1343-2 du code civil.

Condamne la société Languedoc Location aux dépens d'appel.

La condamne à payer à Me [O] [G] es-qualité de liquidateur judiciaire de la Mutuelle des Transports Assurances la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/00893
Date de la décision : 13/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-13;22.00893 ?
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