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06/06/2024 | FRANCE | N°22/01024

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 06 juin 2024, 22/01024


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à





























COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



4e chambre civile



ARRET DU 06 JUIN 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/01024 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PKKV



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 07 févrie

r 2022

Tribunal judiciaire de Béziers - N° RG 20/00518





APPELANTE :



Société SCM des radiologues du Bitterois immatriculée au RCS de Béziers sous le numéro 338 046 345 prise en la personne de son représentant légal en exercice

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Eric NEGRE substituant Me Marie Camille ...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 06 JUIN 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/01024 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PKKV

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 07 février 2022

Tribunal judiciaire de Béziers - N° RG 20/00518

APPELANTE :

Société SCM des radiologues du Bitterois immatriculée au RCS de Béziers sous le numéro 338 046 345 prise en la personne de son représentant légal en exercice

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Eric NEGRE substituant Me Marie Camille PEPRATX NEGRE de la SCP ERIC NEGRE, MARIE CAMILLE PEPRATX NEGRE, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant, et par Me Camille RUIZ GARCIA, avocat au barreau de BEZIERS, avocat plaidant

INTIMEE :

S.A.S. Secafi - société par actions simplifiée inscrite au RCS de Paris sous le n°312 938 483, représentée par son Président en exercice

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Emilie GUEGNIARD, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant, et par Me Karine THIEBAULT, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 avril 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Charlotte MONMOUSSEAU

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Charlotte MONMOUSSEAU, Greffière.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

En 2018, par procès-verbal, le comité social et économique (ci-après CSE) de la société civile de moyen des radiologues du Bitterois (ci-après SCM) a désigné la SAS Secafi, société d'expertise comptable, afin de procéder à une analyse de la société à l'occasion d'une fusion absorption du GIE NPIB par la SCM.

Le 9 avril 2019, par procès-verbal, le CSE de la SCM des radiologues du Bitterois a de nouveau désigné la SAS Secafi en vue de l'assister sur la situation économique et financière et sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi.

Le 27 mai 2019, la SAS Secafi a adressé à l'employeur sa lettre de mission.

Le 29 mai 2019, la SAS Secafi a sollicité le paiement d'un acompte à hauteur de 11 160 € TTC. L'employeur a procédé au paiement.

Le 21 janvier 2020, un rapport a été adressé au CSE et à l'employeur, et a été présenté en réunion organisée le même jour.

Le 6 février 2020, la SAS Secafi a adressé à l'employeur une facture de 23 120,52 €, pour un montant restant dû de 11960,52 €.

Contestant le coût de la mission, la SCM des radiologues du Bitterois a fait assigner la SAS Secafi par acte du 17 février 2020 et en a sollicité la nullité.

Par jugement contradictoire du 7 février 2022, le tribunal judiciaire de Béziers a :

Débouté la SCM des radiologues du Bitterois de sa demande principale ;

Fixé la réduction du prix de la mission confiée par lettre de mission du 27 mai 2019 à la somme de 7 931,04 € ;

Condamné la SCM des radiologues du Bitterois à payer à la SAS Secafi une somme de 4 029,48 € au titre du solde restant dû de la mission confiée par lettre de mission du 27 mai 2019;

Dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamné la SAS Secafi aux dépens de la présente instance

Le 22 février 2022, la SCM des radiologues du Bitterois a relevé appel de ce jugement.

PRÉTENTIONS

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 2 novembre 2022, la SCM des radiologues du Bitterois demande en substance à la cour de :

- Infirmer le jugement en ce qu'il a :

- Refusé de prononcer la nullité de la mission réalisée par la SAS Secafi et en ce qu'il a débouté la SCM de ses demandes à ce sujet ;

- Refusé de prononcer une réduction des honoraires au titre de l'analyse des orientations stratégiques effectuées de manières indues ;

- Refusé de procéder à une réduction des honoraires au titre de la qualité du rapport rendu, de la qualité des intervenants et en ce qu'il a débouté la SCM de sa demande au titre d'un article 700 du Code de procédure civile ;

- Confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé une réduction des honoraires à hauteur de 5,33 jours représentants 7931,04 € ;

Par conséquent, à titre principal :

- Déclarer nulle la mission d'expertise comptable menée par le cabinet Secafi à défaut d'intervention d'un expert-comptable dans le cadre de la mission confiée par le CSE, et par conséquent, juger qu'aucun honoraire ne saurait être réclamé par le cabinet Secafi au titre de sa mission ;

- Condamner la SAS Secafi au remboursement de la provision indûment perçue à concurrence de 11 160 € TTC;

- Débouter la SAS Secafi de sa demande en paiement de la somme de 11 960,52 € correspondant au solde d'honoraires des frais d'expertise pour le compte du CSE au titre de sa désignation pour l'analyse de la situation économique et financière de l'entreprise ;

A titre subsidiaire :

- Constater que la mission de la SAS Secafi est circonscrite par le procès-verbal de la désignation du CSE du 9 avril 2019 ;

- Déclarer que la SAS Secafi excède la mission confiée par le CSE en qu'elle a analysé les orientations stratégiques de l'entreprise alors qu'elle n'était pas mandatée à cette fin. Fixer la réduction du prix au titre des orientations stratégiques à hauteur de 5 208 € TTC représentant 3,5 jours de travail ;

- Juger que le cabinet Secafi avait déjà connaissance de l'ensemble des données au titre des années 2016 et 2017 suite à sa précédente désignation justifiant une baisse de temps d'intervention et d'analyse des données. Partant, fixer la réduction du prix des honoraires, au titre de la connaissance acquise lors de la précédente expertise, à hauteur de 7 931,04 € représentant 5,33 jours de travail ;

- Déclarer que les temps passés et facturés par la SAS Secafi sont manifestement excessifs et sans correspondance avec la réalité de la mission ;

- Juger qu'après réduction des honoraires au titre de la connaissance acquise lors de la précédente expertise (-5.33j) ainsi que la réduction des honoraires au titre de l'analyse des orientations stratégiques (-3,5 j), il y a lieu d'opérer une réduction des honoraires au regard de la qualité des intervenants. Juger que la demande d'honoraires de la SAS Secafi ne fait figurer aucune différenciation selon la qualité de l'intervenant ;

- Juger que l'honoraire devra être réduit à juste concurrence de la réalité et de l'effectivité de la mission. Par conséquent, juger que seuls 6,17 jours de travail peuvent être facturés pour un montant total de 7 650,80 € ;

- Fixer à 300 € HT soit 360 € TTC le taux journalier qui sera appliqué à défaut pour la SAS Secafi de produire les temps passés par chaque collaborateur intervenant dans le cadre de la présente mission ;

- Fixer que l'honoraire de la SAS Secafi pour les comptes de l'exercice 2018 sera fixé à 1 851 € HT soit 2 221,20 € TTC;

- Par conséquent, condamner la SAS Secafi au remboursement de la somme de 8 938,80 € de trop versé par provision par la SCM, et dire n'y avoir lieu à paiement complémentaire ;

- En tout état de cause, condamner la SAS Secafi au paiement de la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec droit de recouvrement direct en application de l'article 699 du Code de procédure civile. Débouter la SAS Secafi de sa demande en paiement de la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et la débouter de sa demande consistant à laisser à la charge de la SCM les dépens de l'instance.

Par uniques conclusions remises par voie électronique le 8 août 2022, la SAS Secafi demande en substance à la cour de :

- Débouter la SCM de l'intégralité de ses demandes ;

- Condamner la SCM à payer à la SAS Secafi la somme de 11960,52 € correspondant au solde d'honoraires et de frais qu'elle reste lui devoir à raison des travaux d'expertise réalisés pour le compte du CSE, après déduction de l'acompte déjà réglé ;

- Condamner la SCM à verser à la SAS Secafi la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Vu l'ordonnance de clôture du 13 mars 2024.

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la nullité de la mission d'expertise

La SCM reproche au premier juge de ne pas avoir retenu la nullité de la mission de l'expertise alors que, selon elle, la SAS Secafi n'aurait pas procédé à l'analyse effective des comptes par un expert-comptable, fondée sur l'absence de désignation d'un expert dans la lettre de mission, d'un défaut de signature dans le rapport final et d'élément factuel matériellement vérifiable.

Conformément aux dispositions de l'article L. 2315-88 du code du travail, le comité social et économique peut décider de recourir à un expert-comptable en vue de la consultation sur la situation économique et financière de l'entreprise.

Le guide des missions de l'expert-comptable auprès du CSE pose une règle déontologique, selon laquelle en présence d'une société d'expertise comptable désignée, celle-ci doit dès le démarrage de la mission, procéder à la désignation de l'expert-comptable qui en assumera la responsabilité, et informer le CSE et son président de cette désignation dans la lettre de mission.

La lettre de mission du 27 mai 2019 ne comporte aucune désignation de l'expert-comptable en charge de la consultation. Elle mentionne : '3.1 Equipe : la responsabilité opérationnelle de la mission sera assurée par [F] [S]. Il est également indiqué que Mme [S] sera assitée de Mme [M] [D], assistante administrative.' Il n'est pas prétendu que Mme [S] a la qualité d'expert-comptable, son curriculum vitae démontrant l'inverse.

Le cabinet Secafi connaît parfaitement ses obligations en la matière puisque dans la précédente lettre de mission du 22 mai 2018, il était mentionné que l'intervention était opérée sous responsabilité de [N] [L], expert-comptable, en coordination avec... la responsabilité opérationnelle de la mission étant assurée par [F] [S].

Contrairement à ce qu'a indiqué le premier juge, le rapport final du 21 janvier 2020, ne contient pas la signature de l'expert-comptable. Il porte uniquement mention du nom dactylographié de [N] [L].

Rien dans le rapport ou dans une pièce extérieure ne permet d'établir une participation effective de [N] [L].

L'attestation qu'il rédige le 10 mars 2021 selon laquelle, alors salarié du cabinet Secafi, il a assuré la supervision du dossier Imagerie du Grand Biterrois au titre des lettres de mission en 2018 et 2019), n'est rien d'autre qu'une attestation faite à soi-même puisqu'il est établi que [N] [L] est désormais Directeur général de Secafi et ne peut donc emporter la conviction de la cour quant à une quelconque participation de sa part à l'expertise en l'absence du moindre indice la corroborant.

Ainsi, rien ne permet de considérer que le cabinet Secafi a procédé à l'expertise pour laquelle il était missionné en tant qu'expert-comptable, conformément aux règles légales édictées au code du travail et aux règles déontologiques applicables en la matière.

Si les articles L.2315-88 et suivants du code du travail confient une telle mission au seul expert-comptable, lequel accède aux mêmes documents que le commissaire aux comptes, il ne s'agit pas d'un simple formalisme mais bien d'une garantie de compétence de fond, les membres du comité et l'employeur disposant alors d'un exposé et d'une analyse loyaux et sincères des éléments nécessaires à la compréhension des comptes et à l'appréciation de la situation de l'entreprise.

Le rapport dressé dans les circonstances de l'espèce qui échappent à toute exigence de validité encourt en conséquence la nullité, de telle sorte qu'aucun paiement d'une mission non accomplie ne peut être réclamé. Le cabinet Secafi sera condamné à restituer la somme de 11 160 € qui lui a été versée et sera débouté de l'intégralité de ses demandes.

Le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions.

Partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, le cabinet Secafi supportera les dépens de première instance et d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile pour ces derniers.

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Prononce la nullité du rapport sur la situation économique et sociale de l'entreprise et sur les orientation stratégiques au tire des comptes de l'exercice 2018.

Déboute en conséquence la SAS Secafi de l'ensemble de ses demandes,

Condamne la SAS Secafi à restituer à la SCM des radiologues du Biterrois la somme de 11 160 €.

Condamne la SAS Secafi aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés directement par la SCP Negre-Petratx-Negre, avocats, sur son affirmation de droit.

Condamne la SAS Secafi à payer à la SCM des radiologues du Bitterois la somme de 5000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/01024
Date de la décision : 06/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-06;22.01024 ?
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