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29/05/2024 | FRANCE | N°18/02831

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre sociale, 29 mai 2024, 18/02831


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délivrées le

à



































3e chambre sociale



ARRÊT DU 29 Mai 2024





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/02831 - N° Portalis DBVK-V-B7C-NV3G



ARRÊT n°



Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 AVRIL 2018 TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE MONTPELLIER

N° RG21700498





APPELANTS :



Mon

sieur [B] [H]

[Adresse 9]

[Localité 7]

Représentant : Me Florence ROSE, avocat au barreau de MONTPELLIER

Madame [P] [W]

[Adresse 3],

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentant : Me Florence ROSE, avocat au barreau de MONTPELLIER

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Tot...

Grosse + copie

délivrées le

à

3e chambre sociale

ARRÊT DU 29 Mai 2024

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/02831 - N° Portalis DBVK-V-B7C-NV3G

ARRÊT n°

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 AVRIL 2018 TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE MONTPELLIER

N° RG21700498

APPELANTS :

Monsieur [B] [H]

[Adresse 9]

[Localité 7]

Représentant : Me Florence ROSE, avocat au barreau de MONTPELLIER

Madame [P] [W]

[Adresse 3],

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentant : Me Florence ROSE, avocat au barreau de MONTPELLIER

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C-34172-2023-10946 du 18/12/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

[12]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 5]

non comparante

INTIMEE :

CAF DE L'HERAULT

[Adresse 2]

[Localité 8]

Représentant : Me Camille CALAUDI de la SCP CALAUDI/BEAUREGARD/LEMOINE, avocat au barreau de MONTPELLIER

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 04 AVRIL 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller faisant fonction de Président

Mme Anne MONNINI-MICHEL, Conseillère

M. Patrick HIDALGO, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : M. Philippe CLUZEL

ARRÊT :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Pascal MATHIS, Président, et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.

*

* *

EXPOSÉ DU LITIGE

[1] M. [S] [E] et Mme [P] [W], née le 12 janvier 1972, se sont mariés courant 1994 et leur divorce a été prononcé le 1er septembre 2004. De cette union sont nés [F] le 2 juin 1997, [R] le 22 janvier 1999 et [K] le 6 septembre 2000.

[2] Le 28 février 2013, la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de l'Hérault a reconnu à Mme [P] [W] la qualité de travailleur handicapé du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2014. Cette décision a été renouvelée le 20 novembre 2014 pour une période allant du 1er octobre 2014 au 30 septembre 2018. Suivant jugement du 26 juin 2013, le juge des tutelles au tribunal d'instance de Sète a placé Mme [P] [W] sous curatelle simple pour une durée de 5 ans et a désigné M. [B] [H], né le 26 mars 1960, en qualité de curateur.

[3] Le 20 février 2014, la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de l'Hérault a accordé à M. [B] [H] la qualité de travailleur handicapé du 1er avril 2014 au 31 mars 2018 et a renouvelé son bénéfice de l'allocation aux adultes handicapés au visa d'un taux d'incapacité évalué entre 50 % et 79 % et d'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi concernant la période de 1er avril 2014 au 31 mars 2016.

[4] Le bénéfice de l'allocation aux adultes handicapés a été renouvelé au profit de Mme [P] [W] suivant décision du 20 novembre 2014 au visa d'un taux d'incapacité évalué entre 50 et 79 % et d'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi.

[5] Le 10 août 2016, Mme [P] [W] a été entendue au commissariat de police de [Localité 6] en ces termes :

« -Sur les faits :

Je suis divorcée de M. [E] [S] depuis 2004. Je l'ai rencontré à l'âge de mes 17 ans à l'école. Nous nous sommes mariés en 1994. Nous avons eu trois enfants : [F] [E] née le 02/06/1997 ; [R] [E] né le 22/01/1999 et [K] [E] né le 06/09/2000. Mon mari a commencé à être violent avec moi dès la naissance de notre premier enfant à savoir il m'insultait et me frappait. Il m'interdisait même de voir mes parents. J'avais peur de lui et je n'ai jamais fait de dépôt de plainte. Ces violences physiques et verbales ont continué jusqu'à notre divorce et je n'ai jamais déposé plainte par crainte de représailles. Mon mari avait une relation extra conjugale. Il voulait vivre avec moi et voir sa maîtresse quand il voulait. J'ai refusé cette situation et [S] a demandé le divorce. Divorce qui a été prononcé en 2004. Nous avons établi une garde partagée, car nous habitions tous les deux à Villereyrac. Mes parents ont saisi le juge des tutelles et j'ai été placée sous curatelle, car je suis très fragile psychologiquement. Je suis devenue dépressive à cause de mon ex-mari. Mon curateur est un ami de la famille à savoir M. [H] [B]. Je suis sous curatelle depuis le 26/06/2013. J'ai déménagé sur [Localité 6], en avril 2014, car mon ex-mari me menaçait de me prendre nos enfants un par un et m'injuriait à chaque fois qu'il me croissait sur [Localité 7]. Les enfants sont restés avec leur père sur [Localité 7]. Je pensais avoir plus de tranquillité sur [Localité 6]. Mais à chaque fois que j'ai des courses à faire, je croise [S] et ce dernier m'insulte et me menace de mort en ces mots « je vais te faire la peau, je vais te crever !!! », « t'es morte, t'es qu'une connasse ».

Question : Pourquoi M. [E] [S] vous insulte et vous menace '

R/ Nous ne nous sommes jamais bien entendus. Je suis incapable de vous dire pourquoi il se déplace de [Localité 7] jusqu'à [Localité 6] juste pour me menacer de mort. En juin 2016, j'ai croisé [S] dans le centre-ville de [Localité 6]. J'étais toute seule. [S] est venu vers moi et m'a dit « t'es une conne, je ne te laisserais jamais tranquille, je vais te choper (te frapper) ».

Question : Suite à votre divorce avez-vous déposé des plaintes pour des faits de menaces et injures '

Oui. J'ai déposé, après mon divorce, plusieurs fois des plaintes à la gendarmerie de [Localité 11] pour ces faits mais cela n'a jamais abouti. M. [E] [S] continue à me menacer et m'insulter. Actuellement j'ai peur de sortir seule sur [Localité 6] car [S] est toujours derrière moi. Je précise que depuis le mois de juin 2016, M. [E] [S] n'est pas venu m'importuner sur [Localité 6] et ne m'a pas menacé. [S] me menace quand il tombe sur moi au hasard. Nous ne nous sommes pas croisés depuis juin 2016. Je veux que M. [E] me laisse tranquille, qu'il ne s'approche plus de moi. Chacun doit faire sa vie. Je précise que M. [E] [S] demeure au [Adresse 1]. Je ne connais pas son numéro de téléphone. Je prends connaissance de me faire assister d'une association d'aide aux victimes et celle de me constituer parte civile. Je dépose plainte contre [E] [S] pour des faits de menace de violences ['] »

[6] Le 31 août 2016, deux rapports d'enquête étaient dressés par le contrôleur de la CAF de l'Hérault en ces termes :

« Argumentaire :

J'ai informé M. [H] de l'objet de ma visite, et des démarches effectuées, desquelles il ressort : Qu'il est toujours locataire en titre du logement sis [Adresse 9], [Localité 7], à jour de ses loyers. Que les loyers sont réglés au propriétaire, par chèque bancaire, émis par Mme [W] [P] ; Qu'il est de notoriété sur la commune de [Localité 7] que M. [H], bien que toujours locataire du bien sis sur la commune, ne l'occupe pas depuis longtemps, et qu'il vit depuis « avec sa compagne », à [Localité 6] ; Que les relevés de consommation d'énergie, réclamés auprès du fournisseur dans le cadre du droit de communication, font apparaître une baisse notable de la consommation, depuis 01/2015 pour le logement précité ; Que M. [H] fait adresser son courrier (compte bancaire, relevés [10]) à l'adresse de Mme [W] ; Que l'enquête de voisinage au domicile de Mme [W] confirme la présence d'un couple à l'adresse ; Que la boîte à lettres de Mme [W] compte une plaque, au nom de M. [H] ; Qu'enfin les services de la police nationale de [Localité 6] ont relevé plusieurs déclarations de main courante, sur lesquelles M. [H] se déclare domicilié à l'adresse de Mme [W], est noté comme le beau-père de l'enfant de Mme [W] ([F]), et déclare également « ma compagne et moi-même n'avons plus de courrier dans la boîte à lettres ». M. [H] déclare être le curateur de Mme [W] et produit à cet effet, une ordonnance sur requête du 06/05/2013 dont copie produite au dossier. Questionné, M. [H] répondra sans pouvoir le justifier et sans que la police municipale de [Localité 7] n'ait pu le confirmer, que M. [E] [sic] est victime de menaces de la part l'ex-conjoint de Mme [W]. Il déclare que la porte d'entrée de son logement a été détériorée à la voiture par ce dernier. M. [Y] à ma demande, répondra qu'il n'a pas déposé plainte à ce sujet, pas plus que le propriétaire du bien. M. [Y] déclare que pour cette raison, il ne peut occuper de façon effective son logement. Questionné sur le paiement par Mme [W] des loyers de [Localité 7], M. [Y] explique qu'il a dû aider financièrement Mme [W] pour les gros achats de type mobilier ou électroménager, et qu'en remboursement, elle établit chaque mois un chèque au propriétaire, en paiement des loyers du logement de [Localité 7].

Conclusion :

Situation non-conforme :

' adresse

' situation familiale

Les informations recueillies établissent la notoriété de la communauté de vie existante entre Mme [W] et M. [Y]. La date de début retenue est le 01/01/2015 et correspond à la baisse importante de consommation d'énergie relevée. M. [Y] est avisé de l'indu d'AL à venir, la condition d'occupation n'étant pas remplie. Indu à notifier à l'allocataire et non au bailleur. »

« Argumentaire :

L'entretien du 18/08/2016 se déroulera en présence de tiers (fils de Mme et une amie de celui-ci), l'entretien du 30/08/2016 se déroulera en présence de la mère de Mme, à chaque fois avec l'accord préalable de Mme [W]. Lors des deux entretiens, M. [H] [B] était présent, en qualité de curateur, vu l'ordonnance de saisine sur requête du 29/04/2013, annexée au dossier. J'ai informé Mme [W] et M. [H] de l'objet de ma visite, et de mes démarches préalables, desquelles il ressort : Que M. [H] est administrativement domicilié à l'adresse de Mme [W], pour ses comptes bancaires, ainsi que pour l'EDF ; Qu'il est notoirement connu sur la commune de [Localité 7] (mairie, police municipale et propriétaire du logement), toujours locataire sur la commune, mais n'occupant pas son logement et « vivant avec sa compagne », sur la commune de [Localité 6]. Que les loyers de M. [H] sont réglés par chèque, émis par Mme [W]. Que le relevé de consommation d'énergie, fourni à ma demande dans le cadre du droit de communication, fait apparaître, une baisse notable de la consommation d'énergie, depuis le 01/01/2015. Que les services de police de la ville de [Localité 6], ont relevé des déclarations de main-courante, sur lesquelles, M. se déclare domicilié à l'adresse de Mme [W], est noté comme le beau-père de l'enfant [F], et qu'il a déclaré « ma compagne et moi-même ne recevons plus de courrier » ; Que l'enquête de voisinage dans la résidence de Mme [W] confirme la présence d'un couple à l'adresse de Mme [W]. L'ensemble de ces éléments établit la notoriété de la communauté de vie existant entre Mme [W] et M. [H]. La communauté financière a également été révélée, puisque c'est Mme [W] qui règle les loyers de M. [Y]. Questionnés sur ce fait, M. [Y] répondra qu'il contribue financièrement à l'entretien de Mme [W]. Il déclare qu'il a acheté pour Mme [W] du mobilier et de l'électroménager, et qu'il se fait rembourser par le paiement du loyer de [Localité 7], par Mme [W]. M. [Y] déclare qu'il ne peut occuper son logement de [Localité 7], en raison de menaces qu'il a reçues de l'ex-conjoint de Mme [W], sans pouvoir le justifier, et sans que les services de police municipale de [Localité 7] n'aient pu confirmer les faits. Il déclare que la porte d'entrée de son logement a été détériorée à la voiture par l'ex conjoint de Mme [W]. M. [H] répondra, à ma demande qu'il n'a pas déposé plainte à ce sujet, pas plus que le propriétaire du bien. Mme [W] est seule locataire en titre de son logement, et s'acquitte seule du loyer et des charges y afférent.

Conclusion :

Situation non conforme :

' situation familiale

' situation des enfants ou autres personnes présents au foyer

' ressources annuelles

Les informations recueillies établissent la notoriété de la communauté de vie existante entre Mme [W] et M. [H]. La date de début de vie commune retenue est le 01/01/2015 et correspond à la baisse constatée de la consommation d'énergie pour le logement de M. [Y]. Exclure l'enfant [F] du calcul des droits de Mme [W] depuis le 01/05/2016 Retenir le retour au foyer de Mme de l'enfant [R], en date du 01/08/2016. ».

[7] Le 13 octobre 2016, la CAF de l'Hérault a notifié à M. [B] [H] un trop-perçu de prestations d'un montant total de 8 682,57 € se décomposant ainsi :

' 2 122,08 € au titre de l'aide au logement familial,

' 3 586,04 € au titre de l'aide au logement social,

' 2 387,65 € au titre de l'allocation adulte handicapé,

'    586,80 € au titre de l'allocation de soutien familial.

[8] Le 19 octobre 2016, la CAF de l'Hérault a notifié à Mme [P] [W] un trop-perçu d'un montant de 1 005,47 € correspondant à des prestations familiales perçues au titre des personnes isolées pour la période du 1er juillet 2015 au 30 avril 2016 ainsi que le transfert de son dossier d'allocataire sur le dossier de M. [B] [H] sous le même numéro d'allocataire réclamant aux deux la somme de 6 696,33 €.

[9] M. [B] [H] a formé recours administratif préalable obligatoire le 26 octobre 2016 et Mme [P] [W] le 9 novembre 2016.

[10] Le 3 janvier 2017, la CAF a notifié à Mme [P] [W] une pénalité administrative d'un montant de 640 €.

[11] Mme [P] [W] a formé un recours amiable le 30 janvier 2017.

[12] Contestant les sommes réclamées la CAF en raison d'une vie maritale et se plaignant d'un rejet implicite de leur recours, Mme [P] [W] et M. [B] [H] ont saisi le 22 mars 2017 de deux recours distincts le président du tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Hérault.

[13] Formant les mêmes contestations, mais cette fois au fond, Mme [P] [W] et M. [B] [H] ont saisi les 20 et 22 mars 2017 de deux recours distincts le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Hérault.

[14] La commission de recours amiable de la CAF s'est prononcée ainsi le 23 mai 2017 concernant Mme [P] [W] et les prestations d'ALF et d'ALS :

« Objet : contestation de la vie maritale retenue à compter du 01/2015

Faits :

' couple, madame sans activité et monsieur handicapé.

' le 31/08/2016 le contrôleur dans son rapport d'enquête conclut à une communauté d'intérêt avec le curateur de madame depuis 01/2015. En effet, un faisceau d'éléments concordants lui permettent d'arriver à cette conclusion ; vie maritale notoire (mairie, police municipale, propriétaire du logement, voisins). Paiement du loyer de monsieur par madame, domiciliation des comptes bancaires de monsieur à l'adresse de madame, baisse constatée de la consommation d'énergie pour le logement de monsieur à compter de 01/2015.

' la commission fraude du 28/10/2016 prononce une pénalité de 640 € du fait du caractère intentionnel des fausses déclarations effectuées par monsieur qui se déclare isolé en 01/2016 sous son ancien matricule.

' cette analyse est confirmée par cette même commission suite à une contestation du rapport de contrôle.

Stricte application de la législation. Voir commission APL et CRA.

Solde du 01/01/2015 au 30/06/2015 : 1 522,08 € et de 01/07/2015 au 31/08/2016 : 3 586,04 €.

Décision de la commission : Rejet »

[15] Le 5 octobre 2017, le juge des tutelles au tribunal d'instance de Sète a désigné l'UDAF de l'Hérault en qualité de curateur ad hoc de Mme [P] [W] avec pour mission de l'assister et de la représenter dans tous les actes de la procédure introduite devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Montpellier à l'encontre des décisions de la CAF du 19 octobre 2016 et du 3 janvier 2017. Le juge des tutelles a retenu l'existence d'une opposition d'intérêts entre Mme [P] [W] et son curateur M. [B] [H].

[16] Le président du tribunal des affaires de sécurité sociale, statuant en la forme des référés, par décision rendue le 17 avril 2018, a :

ordonné la jonction des recours sous le n° 21700501 ;

au principal, renvoyé les parties à mieux se pourvoir ainsi qu'elles aviseront, mais dès à présent, vu l'existence de contestations sérieuse ;

dit n'y avoir lieu à référé ;

dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

[17] Cette décision a été notifiée le 3 mai 2018 à Mme [P] [W] et à M. [B] [H] qui en ont interjeté appel suivant déclaration du 7 juin 2018.

[18] Le tribunal des affaires de sécurité sociale, par jugement rendu le 17 avril 2018, a :

ordonné la jonction des recours susvisés sous le n° 21700498 ;

reçu Mme [P] [W] et M. [B] [H] en leurs recours mais les a dits non-fondés ;

confirmé les décisions entreprises par la caisse ;

condamné solidairement Mme [P] [W] et M. [B] [H] au remboursement de la somme de 5 108,12 € au titre du solde des indus sur prestations ;

condamné solidairement Mme [P] [W] et M. [B] [H] au paiement de la somme de 480 € au titre du solde de la pénalité financière.

[19] Par lettre du 25 octobre 2023, l'UDAF de l'Hérault a indiqué ne pas disposer de mandat de protection concernant Mme [P] [W].

[20] Suivant arrêt du 14 février 2024, la cour de céans a :

prononcé la jonction du dossier n° RG 18/02942 relatif à l'appel de l'ordonnance de référé au dossier n° RG 18/02831 relatif à l'appel du jugement au fond ;

ordonné la réouverture des débats ;

renvoyé la cause à l'audience du 4 avril 2024 pour y être plaidée afin de permettre à Mme [P] [W] de justifier de sa capacité à ester seule en justice par la production d'une copie récente d'acte de naissance ainsi que d'une copie d'un extrait conservé au répertoire civil (à demander au moyen du formulaire Cerfa n° 13485*02) ou d'une décision de mainlevée ;

sursis à statuer pour le surplus ;

réservé les dépens.

[21] Vu les écritures déposées à l'audience et soutenues par leur conseil aux termes desquelles M. [B] [H] et Mme [P] [W] demandent à la cour de :

déclarer leur appel recevable et bien-fondé ;

infirmer le jugement entrepris du 17 avril 2018 ;

dire infondées les décisions d'indu de la CAF du 13 octobre et 19 octobre 2016 confirmées par la commission de recours amiable d'un montant de 6 696,33 € ;

dire infondée la décision de pénalité du 3 janvier 2017 d'un montant de 640 € ;

dire qu'il n'y a pas lieu à condamnation solidaire au paiement de la somme de 5 108,12 € au titre du solde de l'indu et de 480 € au titre du solde de la pénalité ;

débouter la CAF de ses prétentions ;

laisser les dépens à la charge de la CAF ;

condamner la CAF à payer à Maître Florence ROSE la somme de 2 000 € au titre des frais non-compris dans les dépens sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi du 31 juillet 1991.

[22] Vu les écritures déposées à l'audience et reprises par son conseil selon lesquelles la CAF de l'Hérault demande à la cour de :

confirmer l'ensemble du dispositif du jugement entrepris du 17 avril 2018 ;

débouter les appelants de l'ensemble de leurs demandes ;

condamner les appelants au paiement de la somme de 1 500 € au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

[23] Bien que régulièrement convoquée, l'UDAF de l'Hérault n'a pas comparu.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1/ Sur la capacité de Mme [P] [W]

[24] Mme [P] [W] indique qu'elle ne fait plus l'objet d'une mesure de protection et l'UDAF affirme par lettre du 25 octobre 2023 qu'elle ne dispose pas de mandat à son profit. L'appelante produit un avis de fin de mesure de protection daté du 10 juillet 2018 ainsi qu'une attestation faisant état de l'absence de transcription. Au vu de ces éléments, la cour retient que Mme [P] [W] a retrouvé la pleine capacité d'ester en justice.

2/ Sur la vie commune

[25] Les appelants contestent toute vie commune. Ils expliquent que M. [B] [H] a été le curateur de Mme [P] [W] du 26 juin 2013 au 26 juin 2018 et que c'est ainsi que le premier à assisté la seconde dans la gestion de ses biens et de sa personne ce qui ne peut s'assimiler à une vie commune, les comptes bancaires du curateur et de la majeure protégée étant distincts. Ils reprochent à l'agent enquêteur de ne pas établir le paiement des loyers de l'un par l'autre, de ne pas préciser comment il a pu se convaincre qu'il serait de notoriété sur la commune que Monsieur vivrait avec sa compagne à [Localité 6]. Ils font encore grief à la caisse de ne pas produire les relevés de consommations d'énergie alors qu'ils produisent ces documents dont ils déduisent une absence de modification significative et durable de l'occupation du logement. Les appelants font valoir à l'inverse qu'ils justifient occuper chacun un logement distinct dans une commune distincte. Monsieur explique qu'il réside parfois à [Localité 6] chez son fils ce qui explique une certaine irrégularité dans les consommations d'énergie afférentes à son domicile propre. Les appelants justifient qu'ils disposent chacun d'un compte bancaire propre. Ils expliquent que les relations habituelles entre eux relevées par le juge des tutelles tiennent à l'amitié de longue date qui unit Monsieur au père de Madame.

[26] La caisse répond que le fils de Monsieur n'a pu héberger son père avant le 1er octobre 2016 alors qu'antérieurement à cette date il résidait lui-même chez Madame. Elle fait particulièrement valoir que la police de [Localité 7], la mairie de [Localité 7] et le propriétaire de [Localité 7] ont indiqué que Monsieur vivait avec sa compagne à [Localité 6]. Pour le surplus, la caisse reprend en substance les éléments relevés dans les deux rapports d'enquête précités.

[27] La cour retient que la vie maritale se trouve caractérisée par une communauté de vie et d'intérêts économiques présentant stabilité et continuité. En l'espèce, la situation des intéressés mêle deux handicaps différents à une fragilité psychologique et présente à ce titre des singularités dont il doit être tenu compte pour l'appréciation d'une communauté de vie et d'intérêts économique, en particulier au regard de la curatelle de Madame exercée par Monsieur. Il n'apparaît pas que les présentations de cette situation complexe par des services de polices sous des formes variables allant de concubinage à la simple mesure de protection apportent des éléments pertinents pour établir l'effectivité d'une vie commune. De la même manière, rien ne permet d'expliquer la connaissance que des personnes résidant ou travaillant à [Localité 7] pourrait avoir de l'existence menée par les appelants à [Localité 6]. Aucun élément du dossier ne permet d'écarter les affirmations de Monsieur selon lesquelles il se rendait à [Localité 6] principalement pour voir son fils et non Madame, même si son fils résidait chez Madame. Des constatations personnelles de l'agent enquêteur et des éléments produits relatifs aux existences des appelants, marquées par d'importantes difficultés sociales et personnelles, la cour ne trouve pas matière à se convaincre ni d'une continuité et d'une stabilité factuelle des relations et pas plus d'un dessein de vie commune qui ne se serait trouvé entravé que par les aléas de la vie. Les éléments de proximité et de solidarité relevés, comme les paiements effectués, s'expliquent suffisamment par la mesure de curatelle confiée dans un contexte de proximité des familles de Monsieur et de Madame. En conséquence, la communauté de vie entre les appelants n'apparaît pas caractérisée durant la période concernée par la procédure et la caisse sera déboutée de l'ensemble de ses demandes.

3/ Sur les autres demandes

[28] Il convient d'allouer à Maître Florence ROSE la somme de 2 000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de celles de l'article 37 de la loi du 31 juillet 1991. La caisse supportera la charge des dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme l'ordonnance rendue par le président du tribunal des affaires de sécurité sociale, statuant en la forme des référés le 17 avril 2018 en toutes ses dispositions.

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné la jonction des recours sous le n° 21700498 et en ce qu'il a reçu Mme [P] [W] et M. [B] [H] en leurs recours.

L'infirme pour le surplus.

Statuant à nouveau,

Déboute la CAF de l'Hérault de toutes ses demandes.

Condamne la CAF de l'Hérault à payer à Maître Florence ROSE la somme de 2 000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Condamne la CAF de l'Hérault aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18/02831
Date de la décision : 29/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-29;18.02831 ?
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