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23/05/2024 | FRANCE | N°21/02070

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 23 mai 2024, 21/02070


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à





























COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



4e chambre civile



ARRET DU 23 MAI 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/02070 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O55D



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 07 janvier

2021

Tribunal judiciaire de Carcassonne

N° RG 12/01572





APPELANTE :



Madame [Z] [U] prise tant en son nom personnel qu'en sa qualité de co-liquidatrice amiable de la SCP de Directeurs de Laboratoire d'Analyses de Biologie Médicale [U]-[L], Société en liquidation amiable

née le 14 Janvier 1946 à [Localité 10] ...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 23 MAI 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/02070 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O55D

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 07 janvier 2021

Tribunal judiciaire de Carcassonne

N° RG 12/01572

APPELANTE :

Madame [Z] [U] prise tant en son nom personnel qu'en sa qualité de co-liquidatrice amiable de la SCP de Directeurs de Laboratoire d'Analyses de Biologie Médicale [U]-[L], Société en liquidation amiable

née le 14 Janvier 1946 à [Localité 10] (11)

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentée par Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CSA, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

INTIMES :

Monsieur [W] [L]

né le 11 Avril 1965 à [Localité 4]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représenté par Me Emily APOLLIS de la SELARL SAFRAN AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant, et par Me Serge MEGNIN de la SCP DE MARION GAJA-LAVOYE-CLAIN-DOMENECH-MEGNIN, avocat au barreau de CARCASSONNE, avocat plaidant

S.E.L.A.S. Centre de Biologie du Languedoc Société d'exercice libéral par actions simplifiées, immatriculée au RCS de NARBONNE, sous le numéro 321 795 585, agissant poursuites et diligences de son représentant légal

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Guillaume REY substituant Me Fabrice BABOIN de la SELAS PVB AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant présent sur l'audience

S.C.P [U]-[L] SCP de Directeurs de Laboratoire d'Analyses de Biologie Médicale [U]-[L] société en liquidation amiable représentée par l'un de ses liquidateurs Mr [W] [L] domicilié ès-qualités au siège social

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Emily APOLLIS de la SELARL SAFRAN AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant, et par Me Serge MEGNIN de la SCP DE MARION GAJA-LAVOYE-CLAIN-DOMENECH-MEGNIN, avocat au barreau de CARCASSONNE, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 avril 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Charlotte MONMOUSSEAU

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Charlotte MONMOUSSEAU, Greffière.

*

* *

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

La société civile professionnelle (SCP) de directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale [U]-[L] (ci-après SCP [U]-[L]), inscrite au registre du commerce et des sociétés de Carcassonne sous le numéro 561 850 140, avec un capital social de 22 867,35 €, était détenue à 50 % chacun par ses deux associés, Mme [Z] [U] et M. [W] [L]. Cette société exploitait le « laboratoire d'analyse Blanc » et exerçait son activité à [Localité 4], [Adresse 3].

Par acte sous seing privé du 1er janvier 2009, la SCP [U]-[L], représentée par ses deux co-gérants Mme [Z] [U] et M. [W] [L], a cédé le « laboratoire d'analyse Blanc » à la SELARL Qualibio, créée par M. [L], pour un prix de 2 752 450 €.

Suivant délibération de l'assemblée générale extraordinaire des associés du 1er janvier 2009, il a été décidé de procéder à la dissolution amiable de la SCP [U]-[L] à compter du 31 décembre 2008, les deux associés étant nommés en qualité de liquidateurs amiables.

Un arrêté des comptes de la SCP [U]-[L] a été établi par le cabinet d'expertise comptable Severac au 31 décembre 2008. Cet arrêté fait ressortir :

un trop perçu de Mme [Z] [U] d'un montant de 135442,73 € ;

un solde à recevoir au bénéfice de M. [W] [L] de 40 923,58 €.

Le 28 avril 2009, à l'occasion d'une assemblée générale, les associés ne sont pas parvenus à s'accorder sur les comptes de liquidation, Mme [Z] [U] reprochant à M. [W] [L] le manque d'explication sur les comptes établis.

C'est dans ce contexte que par acte du 22 octobre 2012, la SCP [U]-[L] représentée par M. [L] en sa qualité de co-liquidateur amiable, a assigné Mme [U] devant le tribunal de grande instance de Carcassonne pour la voir condamner à lui payer la somme de 135 442,73 € au titre du trop-perçu.

Par ordonnance du 12 septembre 2013, une expertise judiciaire a été ordonnée par le juge des référés de Carcassonne à la demande de Mme [U], agissant en sa qualité de co-liquidatrice de la SCP.

M. [X] [R], expert-comptable, a déposé son rapport le 20 avril 2014.

Le 30 mai 2017, par jugement avant dire droit, le tribunal de grande instance de Carcassonne a fait injonction à la SCP [U]-[L] d'appeler en la cause la SELARL Qualibio.

La SELAS Centre de Biologie du Languedoc, venant aux droits de la société Qualibio par suite de fusion-absorption, est intervenue volontairement.

Par jugement contradictoire du 7 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Carcassonne a :

Déclaré recevable l'intervention volontaire de M. [L] en son nom personnel ;

Déclaré recevable l'intervention volontaire de Mme [U] en qualité de co-liquidatrice amiable de la SCP [U]-[L] ;

Condamné Mme [U] à payer à la SCP [U]-[L] la somme de 125 991,30 € ;

Condamné M. [L] à payer à la SCP [U]-[L] la somme de 29 002, 77 € ;

Débouté les parties de l'ensemble de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;

Condamné M. [U] en son nom personnel et M. [L] en son nom personnel, à supporter chacun la moitié des dépens de la présente instance ;

Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

Le 29 mars 2021, Mme [U] tant à titre personnel qu'en sa qualité de co-liquidatrice amiable de la SCP [U]-[L], a relevé appel de cette décision.

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 29 février 2024, Mme [Z] [U], prise tant en son nom personnel qu'en sa qualité de co-liquidatrice amiable de la SCP [U]-[L], société en liquidation amiable, demande à la cour de :

Déclarer l'appel recevable et bien fondé,

Réformer le jugement déféré en ce qu'il a condamné Mme [U] à payer à la SCP [U]-[L] la somme de 125991,30 € et l'a déboutée de l'ensemble de ses autres demandes, plus amples ou contraires ;

Juger que l'actif a été sous-évalué ;

Réintégrer à l'actif la somme de 76 995,91 € et celle de 152450 € ;

Juger que le dépôt de garantie de 152 450 € doit être restitué Mme [U] prise en sa qualité de co-liquidatrice amiable de la SCP de Directeurs de laboratoire d'analyses de biologie médicale [U]-[L], société en liquidation amiable, conformément aux clauses du contrat ;

Juger que la somme de 152 450 € ayant été versée du compte de la SCP [U] [L] il appartient à cette dernière et doit donc lui être restitué en la personne de sa co-liquidatrice amiable de la SCP de Directeurs de Laboratoire d'Analyses de Biologie Médicale [U]-[L], société en liquidation amiable, conformément aux clauses du contrat ;

Juger que les dispositions relatives aux indemnités de fin de carrière interdisent de les provisionner pour charges, en ce qu'elles sont hypothétiques car tous les salariés ne restent pas dans l'entreprise jusqu'à la retraite ;

Juger que l'analyse de l'acte de cession, montre, s'il en est besoin, qu'il n'est sujet à aucune interprétation puisqu'au jour de la cession les indemnités de départ à la retraite ne sont pas dues puisque les salariés ne sont pas encore partis et qu'il s'agit de charges hypothétiques qui ne peuvent grever le bilan comptable et ce faisant, infirmer de ce chef le jugement déféré et sortir du passif l'indemnité de fin de carrière des salariées telle que provisionnée et la réintégrant au bénéfice ;

Juger en toute hypothèse, qu'elle ne peut être à la charge du cédant donc de la SCP en liquidation et infirmer de ce chef le jugement déféré ;

Faire injonction à la SELAS Centre de Biologie du Languedoc venant aux droits de la société Qualibio et à M.[L] de produire un état d'impayés au 31 décembre 2019 pour vérifier et justifier avec l'état fourni au 31 décembre 2018 ;

Assortir cette injonction d'une astreinte comminatoire et non définitive de 200 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir et se réserver la liquidation de l'astreinte ainsi ordonnée ;

Subsidiairement,

Enjoindre sous astreinte à la SELAS Centre de Biologie du Languedoc venant aux droits de la société Qualibio de produire les bulletins de salaire et de sortie des salariés concernés par l'indemnité de fin carrière afin de vérifier les paiements prétendument effectués ;

Assortir cette injonction d'une astreinte comminatoire et non définitive de 200 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir et se réserver la liquidation de l'astreinte ainsi ordonnée.

Ce faisant,

Condamner la SELAS Centre de biologie du Languedoc venant aux droits de la société Qualibio à payer à Mme [U] prise en sa qualité de co-liquidatrice amiable de la SCP de Directeurs de laboratoire d'analyse de biologie médicale [U]-[L], société en liquidation amiable la somme de 152 450 € ;

Juger que Mme [U] est créancière de la SCP de Directeurs de laboratoire d'analyses de biologie médicale [U]-[L], société en liquidation amiable de 9122,63€ ;

Partant, condamner la SCP de Directeurs de Laboratoire d'analyses de biologie médicale [U]-[L], société en liquidation amiable, à lui payer la somme de 9 122,63 € ;

Réformer le jugement déféré en ce qu'il a condamné M.[L] à payer à la SCP [U]-[L] la somme de 29 002,77 €.

Ce faisant,

Condamner M. [L] à payer à la SCP de Directeurs de Laboratoire d'Analyses de Biologie médicale [U]-[L], société en liquidation amiable prise en la personne de Mme [U] ès qualités, la somme de 34 752,77 € ;

Débouter M. [L] tant à titre personnel qu'ès qualités et la SELAS Centre de biologie du Languedoc de toutes leurs demandes ;

Y ajoutant,

Allouer à Mme [U] la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Condamner M. [L] et la SELAS Centre de Biologie du Languedoc aux dépens de l'instance dont distraction au profit de l'avocat soussigné par application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 4 mars 2024, M. [W] [L] et la SCP de directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale [U]-[L] demandent à la cour de :

Confirmant le jugement, juger que le dépôt de garantie a été intégré et a augmenté la valeur des éléments incorporels qui a été payée par la SELARL Qualibio lors de la cession et, en conséquence, débouter Mme [U] de sa demande de voir condamner la SELARL Centre de biologie du Languedoc à payer à ce titre la somme de 152 540 € et de sa demande de voir cette somme réintégrée à l'actif ;

Débouter Mme [U] de sa demande tendant à réintégrer à l'actif de la liquidation une somme de 76 995,91 € qui correspondrait au différentiel entre le montant des sommes facturées par la SCP et le montant des sommes perçues ;

Débouter de la même façon Mme [U] de sa demande tendant à ce qu'il soit fait injonction sous astreinte à M.[L] de produire un état d'impayés au 31 décembre 2009, cette demande étant aussi inutile qu'infondée en ce qu'elle méconnaît les conclusions précisément étayées de l'expert judiciaire sur ce point ;

Juger qu'au titre de la fixation du solde des opérations entre associés, il convient d'intégrer le retraitement opéré par l'expert judiciaire de 25 842 € au titre de la provision sur indemnités de départ à la retraite dans le cadre du calcul du résultat du bilan de liquidation provisoire ;

Juger qu'au titre du résultat du bilan de la liquidation provisoire et de la fixation du solde des opérations entre associés, il convient d'intégrer :

le retraitement opéré par l'expert judiciaire de 25842€ au titre de la provision sur indemnités de départ à la retraite dans le cadre du calcul du résultat du bilan de liquidation provisoire ;

le retraitement en négatif opéré par l'expert judiciaire de la somme de 13 246 € au titre de la provision réalisée pour congés payés.

Confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions concernant la créance invoquée par Mme [U] sur la SCP [U]-[L] ;

Réformer le jugement dont appel et statuant à nouveau,

Juger que sur le montant total des prélèvements reçus par M. [L] (1 641 171,07 € le 31 décembre 2008 et 8 versements de 15 244,90 € de janvier à août 2009) doit être déduit le remboursement de la somme de 35 300, 92 € effectué le 4 septembre 2009 ;

Juger qu'ainsi, a été versé par la SCP [U]-[L] à M.[L] la somme totale de 1 727 829,35 € et à Mme [U] la somme totale de 1 863 272,80 € ;

Par suite,

Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné Mme [U] à payer à la SCP [U]-[L], société en cours de liquidation amiable, la somme de 125 991,30 € ;

Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné M.[L] à payer à la SCP [U]-[L] la somme de 29 002,77 € et, statuant à nouveau, juger que M. [L] est créancier de la liquidation de la SCP [U]-[L] de la somme de 6 298,15 € ;

En tout état de cause,

Débouter Mme [U] de l'ensemble de ses demandes dirigées tant contre la SCP [U]-[L] que contre M.[L] personnellement ;

Débouter plus largement Mme [U] de toutes ses demandes, fins et prétentions ;

Condamner Mme [U] à leur payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner Mme [U] aux dépens d'appel, dont distraction au profit de la SELARL Safran avocats, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 3 mai 2023, la SELAS Centre de Biologie du Languedoc demande à la cour, sur le fondement de l'ancien article 1134 du code civil, des articles 232, 246, 696 et 700 du Code de procédure civile, de:

Confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

Débouter la SCP [U]-[L] et Mme [U] de toute demande, fin et prétention à l'encontre de la société Centre de biologie du Languedoc venant aux droits de la société Qualibio ;

Condamner Mme [U] à payer à la SELAS Centre de Biologie du Languedoc venant aux droits de la société Qualibio la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance, en ce compris les frais d'expertise.

Vu l'ordonnance de clôture du 12 mars 2024.

Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

A titre liminaire, la convention de cession étant du 1er janvier 2009, il y a lieu de préciser qu'il sera fait application des dispositions du code civil dans leur version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve de l'obligation.

Mme [Z] [U] et M. [W] [L] s'opposent sur les comptes de liquidation de la SCP [U]-[L], dont ils étaient associés : Mme [Z] [U] a, en effet, refusé en avril 2009 d'approuver les comptes de liquidation préparés par le comptable, reprochant à M. [L] d'avoir sous-évalué l'actif de la SCP et d'en avoir surévalué le passif.

L'originalité du litige tient à ce que chacun des deux anciens associés, aujourd'hui liquidateurs amiables, agit tant à titre personnel, qu'au nom de la SCP [U]-[L].

Sur le dépôt de garantie

Le point de fixation majeur de ce litige est relatif au statut du « dépôt de garantie » d'un montant de 152 450 euros versé le 30 septembre 2003 par la SCP [U]-[L] à la clinique SAS Clinique du [9] pour garantir la bonne exécution des engagements contenus dans le contrat d'exercice privilégié passé entre ces deux sociétés.

Les parties s'opposent sur la question de savoir si ce versement constitue un élément d'actif de la SCP [U]-[L], étant observé que :

Mme [Z] [U], comme l'expert judiciaire, conclut que la somme litigieuse doit être restituée à la SCP [U]-[L] par la SEL Qualibio (désormais SELAS Centre de Biologie du Languedoc) ;

M. [W] [L] estime, comme le tribunal, que le dépôt de garantie est une composante du « contrat clinique » faisant partie intégrante des éléments incorporels cédés par la SCP [U]-[L] à la SEL Qualibio dans le contrat de cession du 1er janvier 2009, et qui n'a donc pas à être restitué.

Le contrat clinique du 30 septembre 2003 passé entre la SAS clinique du [9] et le « laboratoire blanc » (SCP [U]-[L]) prévoit, aux articles suivants, que :

Article 1er : Le laboratoire s'engage à faire toutes les analyses de biologie médicale qui pourront lui être demandées par la clinique ;

Article 7 : « Le présent contrat est conclu pour une période de 7 ans qui commencera à courir à compter du jour de l'ouverture, la date à prendre en compte sera celle de la conformité établie par l'autorité sanitaire (...). Si les parties désirent, à l'issue de cette période de 7 ans poursuivre leur relations, elles devront établir une nouvelle convention. »;

article 10 : « Le présent contrat est conclu « intuitu personae ». Il est incessible » ;

article 11 : « Le LABORATOIRE verse la somme de 152 450 (cent cinquante deux mille quatre cent cinquante) euros sur un compte ouvert au Crédit Lyonnais au nom de la CLINIQUE pour garantir la bonne exécution des engagements énoncés ci-dessus. Cette somme sera conservée par la CLINIQUE pendant toute la durée du présent contrat et de ses renouvellements, et ne sera pas productive d'intérêt ni garantie.

Elle sera restituée au LABORATOIRE pour le même montant au jour de la fin du présent contrat, pour quelque cause qu'elle intervienne ».

Le contrat du 1er janvier 2009 passé entre la SCP [U]-[L] et la SELARL Qualibio (désormais SELAS Centre de Biologie du Languedoc) stipule, quant à lui, que :

En pages 5 et 11, le « contrat clinique » du 30 septembre 2003 constitue l'un des éléments incorporels faisant partie de la cession ;

En page 5, la clinique a « concédé à compter du 2 janvier 2007, au seul laboratoire, l'exercice privilégié de la biologie médicale dans les locaux situés à [Localité 4] [Localité 7] [Localité 8] », dans lesquels la clinique du [9] exerce ses activités de réadaptation fonctionnelle ;

En page 6, le présent contrat est conclu « intuitu personae» ; il est incessible ;

En page 6, « Le laboratoire a versé la somme de 152 450 €, sur un compte ouvert au CREDIT LYONNAIS au nom de la clinique pour garantir la bonne exécution des engagements énoncés ci-dessus. Cette somme sera conservée par la clinique pendant toute la durée du présent contrat et des renouvellements et ne sera pas productive d'intérêt ni garantie. Elle sera restituée au laboratoire pour le même montant au jour de la fin du présent contrat pour quelque cause qu'elle intervienne ».

Page 7 : « Dès avant la signature des présentes, Monsieur [L] s'est rapproché de la société « SAS clinique du [9] » afin d'obtenir la conclusion d'un nouveau contrat. Aussi, il a été convenu qu'un nouveau contrat sera conclu entre la société « SAS clinique du [9] » et le cessionnaire au cours du premier trimestre 2009 ».

Au regard des stipultations contractuelles telles qu'elles viennent d'être rappelées, il est évident que le « contrat clinique » qualifié d'« incessible » dans le « contrat clinique » du 30 septembre 2003 ne pouvait faire l'objet d'une cession, d'autant que la SAS clinique du [9], partie prenante du contrat du 30 septembre 2003 n'était, en revanche, pas partie à la convention de cession du 1er janvier 2009 passé entre la SCP [U]-[L] et la SELARL Qualibio (désormais SELAS Centre de Biologie du Languedoc).

Il est rappelé que l'article 1165, ancien, du code civil dispose que : « Les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l'article 1121 ». Cette règle d'« effet relatif » des contrats interdit, en principe, d'imposer à un tiers des droits ou des obligations créés par un contrat auquel il n'était pas partie.

Par ailleurs, l'article 1156, ancien, du code civil dispose que: « On doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes ».

La SAS clinique du [9] n'ayant pas été appelée en la cause, on ignore le devenir du « dépôt de garantie » :

a-t-il été restitué peu après la cession à la SELAS Centre de Biologie du Languedoc lors de la signature d'une nouvelle convention '

a-t-il été restitué le 2 janvier 2014 (au terme de la période de 7 ans visée au contrat) à la SELAS Centre de Biologie du Languedoc '

est-il toujours entre les mains de la SAS clinique du [9] '

En tout état de cause, dans ses rapports avec la SELARL Qualibio (désormais SELAS Centre de Biologie du Languedoc), la SCP [U]-[L] a commis une faute en lui cédant un contrat pourtant qualifié d'« incessible » ; elle ne peut donc, aujourd'hui, se prévaloir de ses propres turpitudes et apparaît mal fondée à se prévaloir de cette incessibilité contractuelle pour solliciter le remboursement du « dépôt de garantie ».

Même si le contrat de cession n'est pas explicite à ce sujet, il apparaît que la commune intention de la SCP [U]-[L] et de la SELARL Qualibio (désormais SELAS Centre de Biologie du Languedoc) était que le dépôt de garantie soit remboursé à cette deuxième société, puisqu'il est indiqué que le dépôt sera restitué au « laboratoire » qui fait lui-même l'objet d'une cession par le contrat du 1er janvier 2009.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [U] prise en sa qualité de co-liquidatrice amiable de la SCP [U]-[L], de sa demande de restitution de la somme de 152 450 €.

La somme relative au dépôt de garantie n'a pas à être maintenue à l'actif de la SCP [U]-[L].

Il y a donc également lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a jugé qu'aucun retraitement ne sera opéré au titre du dépôt de garantie dans le cadre des opérations de liquidation.

Sur la sous-évaluation de l'actif de la SCP

Madame [U] fait valoir que la société Qualibio (désormais SELAS Centre de Biologie du Languedoc) aurait perçu, après la cession du 1er janvier 2009, des honoraires correspondant à des prestations effectuées avant la cession par la SCP [U]-[L]. Elle critique, notamment, des remises de fond d'un montant important au premier trimestre 2009.

Toutefois, quant aux éléments de faits invoqués par elle au soutien de sa démonstration, il ne peut qu'être souligné le caractère hypothétique des assertions, Madame [U] multipliant les formules dubitatives à l'encontre de M. [L] (« Il semble », « soupçons », « plus probable », « incohérences »).

Plutôt que de paraphraser les premiers juges qui ont procédé à une exacte analyse des éléments de l'espèce, la cour en adoptera les motifs, étant rappelé à Madame [U] que ni le juge ni l'expert judiciaire ne sont tenus de suivre les parties dans le détail de leur argumentation.

Mme [U] sera également déboutée de sa demande, présentée pour la première fois en appel, d'injonction de produire un état d'impayés au 31 décembre 2009, qui n'est pas pertinente pour la solution du litige.

Sur la sur-évaluation du passif de la SCP

- Sur la provision sur indemnités de départ à la retraite (indemnité de fin de carrière)

Madame [U] fait valoir que cette provision n'a pas lieu d'être puisqu'elle considère, à l'inverse de l'expert judiciaire, que l'acte de cession, tel qu'il est rédigé, ne laisse pas à la charge du cédant d'hypothétiques indemnités de départ à la retraite qui ne sont pas dues au jour de la cession, mais bien plus tard au jour où le salarié fait valoir ses droits à la retraite.

Toutefois, l'acte de cession du 1er janvier 2009 prévoit que le cédant doit supporter « au prorata de sa durée d'exploitation [...] toutes sommes dues au personnel à un titre quelconque ainsi que toutes charges s'y rapportant ». Parmi ces charges figurent les indemnités de départ à la retraite, sommes dues au personnel au prorata de sa durée d'exploitation.

L'expert a explicité le calcul de cette provision et le retraitement opéré.

Il y a lieu, par ailleurs, de rejeter la demande d'injonction de production des bulletins de salaire et de sortie des salariés concernés par l'indemnité de fin de carrière qui est inopérante. En effet, la provision est constituée en prévision d'une charge qui n'est pas effective à la clôture de l'exercice, mais qui est probable. Dans le cas de la liquidation litigieuse, il convient de se placer à la date du 31 décembre 2008 pour déterminer le montant à provisionner, peu important que les indemnités aient été versées par la suite, ou non.

Il en résulte que Madame [U] sera déboutée de sa contestation formée de ce chef et que le jugement sera confirmé.

- Sur la créance invoquée par Madame [U] sur la SCP [U] [L]

La cour adopte les motifs par lesquels le premier juge a exactement retenu que Madame [U] ne justifie aucunement d'avoir procédé au règlement de la consignation sur ses deniers propres.

- Sur la somme payée à la CPAM

Les calculs opérés par le premier juge seront adoptés, étant observé que Mme [U] ne rapporte pas la preuve du paiement sur ses deniers personnels de la somme de 1 216,89 € qui aurait été réalisé en exécution de la décision rendue par le tribunal de grande instance de Carcassonne, cette somme ayant été réglé par virement du donneur d'ordre Laboratoire Blanc.

- Sur les sommes prélevées par les anciens associés

Madame [U] ne conteste pas avoir prélevé la somme de 1 863 272,80 euros.

Concernant Monsieur [L], le premier juge a retenu qu'il ressort du grand livre général de la SCP pour l'exercice du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011, qu'il avait perçu une somme totale de 1 763 130,27 €, à savoir un prélèvement de 1 641 171,07€ et huit versements de 15 244,90 € de janvier à août 2009.

Toutefois, Monsieur [L] fait, à juste titre, observer qu'il n'a pas été tenu compte de ce qu'il avait versé par chèque la somme de 35 300,92 € de son compte personnel vers le compte de la SCP le 4 septembre 2011 (pièce n° 31).

Ainsi, ce n'est pas une somme totale de 1 763 130,27 € que Monsieur [L] a perçue, mais une somme de (1 763 130,27 ' 35 300,92), soit 1 727 829,35 €.

Le jugement dont appel sera infirmé sur ce point.

Sur les comptes de liquidation

Au regard des conclusions du rapport d'expertise et de l'ensemble de ce qui précède, le solde des comptes de liquidation de la SCP [U]-[L] s'établit comme suit :

Résultat au bilan de liquidation provisoire : 3 455 659 €

Retraitement du dépôt Clinique du [9] : 0 €

Retraitement provision congés payés : - 13 246 €

Retraitement provision départ à la retraite : + 25 842€

Résultat du bilan de liquidation retraité : 3 468 255 €

Le solde à répartir aux associés ressort à 3 468 255 € à répartir à parts égales de 1 734 127,50 €.

- Solde pour Mme [Z] [U] :

Affectation du résultat 2008 : 1 734 127,50 €

Prélèvement au 31/12/2008 : - 487 047,80 €

Prélèvement du 07/02/2009 : - 1 376 225 €

Remboursement moitié de la somme payée à la CPAM sur ses deniers : + 3 154 €

Solde dû par Mme [U] à la SCP : 125 991,30 €.

- Solde pour M. [L] :

Affectation résultat 2008 : 1 734 127,50 €

Somme perçue par M. [L] : 1 727 829,35 €

Solde en faveur de M. [L] : 6 298,15 €

Il convient, en conséquence, de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Madame [U] à payer à la SCP [U]-[L] la somme de 125 991,30 €.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné M. [L] à payer à cette société la somme de 29 002,77 euros. Il y a lieu, au contraire, de juger que M. [L] est créancier à l'égard de la liquidation de la SCP [U]-[L] de la somme de 6 298,15€.

Sur les demandes accessoires

Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées.

Partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, Mme [Z] [U] supportera les dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile par les avocats en ayant fait la demande.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Déboute Mme [U] de sa demande d'injonction de production d'un état d'impayés au 31 décembre 2009 ;

Déboute Mme [U] de sa demande d'injonction de production des bulletins de salaire et de sortie des salariés ;

Infirme le jugement en ce qu'il a condamné M. [L] à payer à la SCP [U]-[L] la somme de 29 002, 77 € ;

Confirme le jugement pour le surplus, notamment en ce qu'il condamné Madame [U] à payer à la SCP [U]-[L] la somme de 125 991,30 € ;

Y ajoutant,

Juge que M. [L] est créancier de la liquidation de la SCP [U]-[L] de la somme de 6 298,15 € ;

Condamne Mme [Z] [U] aux dépens d'appel, distraits au profit des avocats en ayant fait la demande ;

Condamne Mme [Z] [U] à payer à M. [L] une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel ;

Condamne Mme [Z] [U] à payer à la SELAS Centre de Biologie du Languedoc une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/02070
Date de la décision : 23/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-23;21.02070 ?
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