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16/05/2024 | FRANCE | N°21/07440

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 16 mai 2024, 21/07440


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à

























COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



4e chambre civile



ARRÊT DU 16 MAI 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/07440 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PIGH





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 12 novembre 2021 <

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Tribunal judiciaire de Montpellier - N° RG 19/03166





APPELANT :



Monsieur [U] [P] [L]

né le 16 Novembre 1982 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Anouk AYRAL, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et par Me Sabrina FAVIER, avocat au barreau de C...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRÊT DU 16 MAI 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/07440 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PIGH

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 12 novembre 2021

Tribunal judiciaire de Montpellier - N° RG 19/03166

APPELANT :

Monsieur [U] [P] [L]

né le 16 Novembre 1982 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Anouk AYRAL, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et par Me Sabrina FAVIER, avocat au barreau de CARPENTRAS, avocat plaidant

INTIMEE :

Sas Ji Engineering anciennement dénommée Motortech [Localité 4]

Société par actions simplifiée au capital de 7500,00 € immatriculée au RCS de MONTPELLIER sous le n° 808 810 964

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

dont le siège social est [Adresse 2]

Représentée par Me Erwan AUBE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et par Me Norjihane EL HOUSSALI, avocat au barreau de NIMES substituant Me Jérôme BRENNER, avocat au barreau de NIMES, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 MARS 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Henriane MILOT

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe BRUEY, Conseiller en remplacement de M.Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre empêché, en application de l'article 456 du code de procédure civile et par Mme Henriane MILOT, greffier

*

* *

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Le 23 juin 2018, M. [U] [L] a acquis un véhicule de marque Land Rover modèle Range Rover d'occasion de 30 800 km auprès de la Sarl Pelletier, pour la somme de 96 000 euros.

Le 18 août 2018, M. [U] [L] a confié ce véhicule à la SAS Motortech (qui devriendra par la suite SAS Ji Engineering) pour que soit effectuée une conversion du moteur lui permettant de rouler au bioéthanol.

Le même jour, la société Motortech a édité une facture pour un montant de 890 euros détaillant les deux actions réalisées, à savoir :

Conversion + reprogrammation (E85+) ;

Passage au banc de puissance.

Le 4 septembre 2018, M. [L] a fait réaliser par la société PLS des opérations d'entretien et de révision du véhicule.

Le 12 septembre 2018, le véhicule est tombé en panne et a été conduit à la société PLS pour réparer une crevaison. Il s'est mis à fumer au niveau du moteur qui n'a plus redémarré.

Le 20 septembre 2018, la société Motortech s'est rendue dans les ateliers du garage PLS pour réimplanter le programme d'origine. Le moteur n'a pas redémarré.

Le véhicule a été remorqué jusqu'aux ateliers de la société Auto Real Catalogne, concessionnaire Land Rover.

Le 5 novembre 2018, la société Auto Real Catalogne a établi un devis pour un montant de 34 068,62 euros au titre du remplacement du moteur, du compresseur et des deux catalyseurs.

M. [L] a fait diligenter une expertise amiable contradictoire. Dans son rapport du 20 mars 2019, l'expert amiable, Monsieur [W] [K] (KPI expertise 66), a imputé les désordres constatés à l'intervention de la société Motortech (Ji Engineering).

C'est dans ces circonstances que, par acte du 6 juin 2019, M.[L] a assigné la société Motortech (Ji Engineering) devant le tribunal de grande instance de Montpellier en indemnisation de son préjudice.

Par jugement du 12 novembre 2021, le tribunal judiciaire de Montpellier a :

débouté M. [L] de ses demandes,

condamné M. [L] aux dépens et à payer la société Motortech (Ji Engineering) la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Le 27 décembre 2021, M. [L] a relevé appel de ce jugement.

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 8 décembre 2023, M. [U] [L] demande à la cour, sur le fondement de l'article 1231-1 du code civil, des articles R. 321-16 et R. 322-8 du code de la route et de l'arrêté du 30 novembre 2017 relatif aux conditions d'homologation et d'installation des dispositifs de conversion des véhicules à motorisation essence en motorisation à carburant modulable essence - superéthanol E85, de:

infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes,

Et, statuant à nouveau,

Juger que la société Ji Engineering a usé d'un procédé interdit par la règlementation relative à la conversion au bioéthanol en reprogrammant le véhicule,

Juger que a société Ji Engineering a violé son devoir d'information et de conseil,

Juger que a société Ji Engineering a outrepassé son mandat en opérant une augmentation de puissance du véhicule litigieux,

Juger que la cause des désordres constatés sur le véhicule est l'intervention non réglementaire de la société Ji Engineering,

Par conséquent,

condamner la société Ji Engineering à lui payer les sommes suivantes :

34 068,62 € au titre du remplacement du moteur,

3 680 € au titre du préjudice de jouissance,

3 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 9 novembre 2023, la société Ji Engineering demande à la cour, sur le fondement des articles 1231-1 et suivants du code civil et de l'article 1353 du code civil, de :

confirmer le jugement,

débouter M. [L] de l'ensemble de ses demandes,

condamner M. [L] à supporter les honoraires d'expert engagés par la société Ji Engineering,

condamner M. [L] aux dépens et à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture du 27 février 2024.

Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS :

Sur la responsabilité de la société Ji Engineering

L'article 1231-1 du code civil dispose que : « Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure ».

Sur le fondement de ce texte, M. [U] [L] soutient que la cause de la destruction de son moteur est liée avec la reprogrammation opérée par la société Ji Engineering pour convertir son véhicule au bioéthanol E85 et poursuit l'indemnisation de son préjudice qu'il estime lié à la faute contractuelle de cette société.

La particularité de ce dossier est double :

Elle tient, tout d'abord, à ce que la société Ji Engineering dénie avoir la qualité de garagiste ; elle produit aux débats son extrait K-bis qui expose que son activité est la « vente de solutions pour l'informatique et l'électronique automobiles, l'achat la revente et [la] reprise de tous véhicules d'occasion (véhicules familiaux, véhicules utilitaires...), [la] vente de tous produits et accessoires automobiles et toutes activités liées » ;

Par ailleurs, la société Ji Engineering expose n'effectuer aucune intervention mécanique sur le véhicule ; elle explique que son intervention consiste en une reprogrammation qui vise à modifier des réglages informatiques du véhicule. Autrement dit, son intervention ne consiste pas, à proprement parler, en une réparation du véhicule.

Que la société Ji Engineering soit tenue à une obligation de moyens ou à une obligation de résultat (responsabilité de plein droit pesant sur les garagistes), il appartient en tout état de cause à M. [U] [L] de démontrer que le dommage subi par son véhicule trouve son origine dans l'élément sur lequel la société Ji Engineering devait intervenir.

M. [U] [L] verse au débat un rapport d'expertise amiable contradictoire du 20 mars 2019 de Monsieur [W] [K] (KPI expertise 66) qui conclut que :

Il existe un « défaut de programmation de la cartographie du calculateur moteur » qui a conduit à une « surchauffe importante et généralisée du moteur suite à une combustion anormale » (page 17/19) ;

Les dommages ne sont pas consécutifs à un défaut de lubrification ;

Ils ne sont pas en relation avec l'intervention de PLS pour l'entretien du moteur à la suite de l'intervention de la société Motortech ;

En revanche, l'intervention de la société Motortech a entraîné des défauts de conformité :

Source d'énergie modifiée (FE) et non conforme au certificat d'immatriculation (ES) ;

Puissance maximale modifiée et non conforme au certificat d'immatriculation ;

Cartographie non approuvée par le constructeur.

Ce type de transformation « peut » être à l'origine d'une surchauffe du moteur en raison des modifications des températures de combustion (page 18/19) ;

De plus, la société Motortech « aurait » réimplanté la cartographie d'origine après l'apparition des désordres, « empêchant » par la même de vérifier la pertinence des modifications apportées initialement (page 18/19) ;

Le lien de causalité est établi entre l'intervention non conforme de la société Motortech et les désordres constatés (page 19/19).

Tout d'abord, il y a lieu de rappeler que la cour ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties, peu important qu'elle l'ait été en présence de celles-ci (Civ, 2ème, 13 septembre 2018 n°17-20.099).

Ensuite, la cour ne peut que constater que le rapport d'expertise non judiciaire de Monsieur [W] [K] (KPI expertise 66) comprend des termes contradictoires puisqu'il expose, à la fois que l'expert n'a pas été en mesure de vérifier la pertinence des modifications des réglages informatiques du véhicule, tout en indiquant que ces modifications sont à l'origine de la destruction de son moteur.

Cette difficulté est d'autant plus importante qu'un autre garagiste est intervenu sur le moteur dans les jours précédents le sinistre, à savoir la société PLS qui a procédé à des opérations d'entretien et de révision du véhicule le 4 septembre 2018 (soit seulement 8 jours et 578 km avant la panne). Or, le rapport d'expertise amiable de Monsieur [W] [K] (KPI expertise 66) est plus que succinct pour écarter la responsabilité de ce garagiste.

En outre, cette même société PLS est également intervenue sur le moteur le jour de la panne. A cet égard, la société Ji Engineering produit un « rapport d'expertise sur pièces » du 8 novembre 2023 non contradictoire de M. [T] [F] qui insiste sur le fait que le moteur fonctionnait jusqu'à l'intervention de la société PLS et qui reproche à l'expertise de Monsieur [W] [K] (KPI expertise 66) de ne pas avoir exclu la piste d'une éventuelle manipulation intempestive du moteur par cette société pouvant être à l'origine du dommage.

Ainsi, les développements de Monsieur [L] sur l'interdiction du procédé de reprogrammation du calculateur opéré par la société Ji Engineering sont vains, puisque même à supposer que l'intervention était interdite, il n'est pas démontré qu'il y ait un lien de causalité avec la destruction du moteur. Le même raisonnement vaut pour l'éventuel manquement au devoir d'information et de conseil de la société Ji Engineering, tout comme pour l'exécution de travaux non commandés (augmentation de puissance du véhicule).

En définitive, il doit être constaté que M. [U] [L] échoue à rapporter la preuve de la responsabilité de la société Motortech (Ji Engineering) dans la destruction du moteur du véhicule. En l'absence de démonstration du lien de causalité entre l'intervention de cette société et le sinistre, il ne saurait y avoir lieu à dommages et intérêts. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [U] [L] de ses demandes. Pour les mêmes raisons, il y a également lieu de le débouter de sa demande en paiement au titre d'un prétendu trouble de jouissance.

Sur la demande reconventionnelle relative aux honoraires d'expert

Il convient de débouter la société Ji Engineering de sa demande reconventionnelle -non chiffrée- de condamnation de Monsieur [L] concernant les honoraires d'expertise engagés par elle alors que ces frais relèvent de sa propre responsabilité.

Sur les demandes accessoires

Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées.

Partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, M. [U] [L] supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute la société Ji Engineering de sa demande concernant les honoraires d'expertise,

Condamne M. [U] [L] aux dépens d'appel,

Condamne M. [U] [L] à payer à la société Ji Engineering une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

LE GREFFIER P/LE PRESIDENT EMPÊCHÉ

LE CONSEILLER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/07440
Date de la décision : 16/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-16;21.07440 ?
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