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16/05/2024 | FRANCE | N°21/07376

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 16 mai 2024, 21/07376


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à

























COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 16 MAI 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/07376 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PICH



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 13 décembre 2021

Tribunal judiciai

re de Montpellier - N° RG 18/02064



ordonnance du conseiller de la mise en état du 10 octobre 2022 prononçant la jonction de la procédure N° RG 22/00014 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PIMN sous le N°RG 21/07376





APPELANTES :



Sarl Céramique Languedocienne

société à responsabilité limitée au capital d...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 16 MAI 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/07376 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PICH

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 13 décembre 2021

Tribunal judiciaire de Montpellier - N° RG 18/02064

ordonnance du conseiller de la mise en état du 10 octobre 2022 prononçant la jonction de la procédure N° RG 22/00014 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PIMN sous le N°RG 21/07376

APPELANTES :

Sarl Céramique Languedocienne

société à responsabilité limitée au capital de 3000 euros inscrite au RCS de MONTPELLIER sous le numéro 511201790, dont le siège social est situé [Adresse 6] et prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es qualité audit siège

[Adresse 6]

Représentée par Me Marie-Laure MARLE-PLANTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

Autre qualité : Appelant dans 22/00014

Sarl Rodenas

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en

sa qualité audit siège social

[Adresse 4]

Représentée par Me Olivier GUERS substituant Me Clément BERMOND de la SCP VERBATEAM MONTPELLIER, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

Autre qualité : Intimé dans 22/00014

INTIMES :

Monsieur [U] [K]

né le 20 Mars 1957 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 5]

Représenté par Me Fabrice DI FRENNA de la société d'avocats INTERBARREAUX SANGUINEDE DI FRENNA & ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et par Me Christophe DEMARCQ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, de la société d'avocats INTERBARREAUX SANGUINEDE DI FRENNA & ASSOCIES, avocat plaidant

Autre qualité : Intimé dans 22/00014

Madame [M] [J] épouse [K]

née le 09 Novembre 1961 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représenté par Me Fabrice DI FRENNA de la société d'avocats INTERBARREAUX SANGUINEDE DI FRENNA & ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et par Me Christophe DEMARCQ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, de la société d'avocats INTERBARREAUX SANGUINEDE DI FRENNA & ASSOCIES, avocat plaidant

Autre qualité : Intimé dans 22/00014

S.a Aviva Assurance désormais dénommée S.a Abeille Iard et Santé

société anonyme au capital de 178 771 908,38 € immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° 306 522 665

prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège,

dont le siège social est [Adresse 2]

Représentée par Me Célia VILANOVA substituant sur l'audience Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CSA, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et par Me Emilie HUGON, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituant Me Aline BOUDAILLIEZ, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

Autre qualité : Intimé dans 22/00014

Sarl Céramique Languedocienne

société à responsabilité limitée au capital de 3000 euros inscrite au RCS de MONTPELLIER sous le numéro 511201790, dont le siège social est situé [Adresse 6] et prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es qualité audit siège

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Représentée par Me Marie-Laure MARLE-PLANTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

Autre qualité : Appelant dans 22/00014

Sarl Pro Ceram [P]

prise en la personne de son mandataire ad'hoc, Monsieur [H] [P]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

assigné à domicile le 10 février 2022

Autre qualité : Intimé dans 22/00014

Sarl Rodenas

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en

sa qualité audit siège social

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Olivier GUERS substituant Me Clément BERMOND de la SCP VERBATEAM MONTPELLIER, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

Autre qualité : Appelant dans 21/07376

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 MARS 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Henriane MILOT

ARRET :

- par défaut ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe BRUEY, Conseiller en remplacement de M.Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre empêché, en application de l'article 456 du code de procédure civile et par Mme Henriane MILOT, greffier

FAITS ET PROCÉDURE

M. [U] [K] et Mme [M] [J] épouse [K] ont confié à la Sarl Rodenas, assurée par Elite Insurance Company divers travaux d'aménagement dont la réfection d'une plage de piscine en partie immergée ainsi que la rénovation et l'extension d'un pool-house.

La société Pro Ceram [P] assurée auprès de la compagnie Aviva devenue Abeille Iard et Santé est intervenue en qualité de sous-traitant chargée de la pose du carrelage lequel a été fourni par la société Céramique Languedocienne.

Les travaux ont été achevés au mois de juin 2015 .

Déplorant un phénomène de glissance du carrelage, ils ont retenu le solde du prix d'un montant de 17950,35 euros et obtenu en référé l'organisation d'une expertise dont le rapport a été déposé le 13 septembre 2017.

Suivant actes en date du 28 mars 2018, ils ont fait assigner en paiement la Sarl Rodenas et la compagnie Elite Insurance sur le fondement des dispositions des articles 1147 et 1615 du code civil.

Par actes d'huissier en date des 7 et 8 mai 2018, la Sarl Rodenas a appelé en garantie la société Aviva et la société Pro Ceram [P].

L'expert a déposé son rapport le 13 septembre 2017.

La compagnie d'assurance Elite Insurance, assureur de la société Rodenas, ayant été placée sous administration judiciaire à effet du 11 décembre 2019 et l'administrateur de la compagnie ayant fait part de la cessation des effets des contrats d'assurance construction souscrits en France, les époux [K] se sont désistés de leurs demandes formées à l'encontre de cette compagnie.

Suivant jugement réputé contradictoire en date du 13 décembre 2021, le tribunal judiciaire de Montpellier a :

- condamné les sociétés Rodenas et Céramique du Languedoc à payer in solidum aux époux [K], la somme de 47 570 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement au titre du préjudice occasionné par les plages et parties immergées de leur piscine,

- condamné les sociétés Rodenas, Céramiques du Languedoc et Pro Ceram [P] à payer in solidum aux époux [K], avec les mêmes intérêts la somme de 7 093,40 euros,

- condamné la compagnie Aviva in solidum sur cette somme à concurrence de 6 384,06 euros,

- condamné la compagnie Elite Insurance Company Limited à garantir la compagnie Aviva à concurrence de 67 %,

- condamné les sociétés Rodenas, Céramiques du Languedoc et Pro Ceram [P] à payer in solidum aux époux [K] avec les mêmes intérêts la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens comprenant les frais de référé expertise,

- dit que dans les rapports entre codébiteurs in solidum les responsabilités et garanties respectives seront réparties ainsi qu'il suit :

$gt; Condamnation pour 47 570 euros :

Sarl Céramiques du Languedoc 75 %

Sarl Rodenas 25 %,

$gt; Condamnations pour 7 093,40 euros et 4 000 euros au titre de l'article 700 :

Sarl Céramiques du Languedoc 67 %

Sarl Rodenas 18 %

Sarl Pro Ceram [P] et compagnie Aviva 15 %

$gt; Condamnation aux dépens

Sarl Céramiques du Languedoc 67 %

Sarl Rodenas 18 %

Sarl Pro Ceram [P] et compagnie Aviva 15 %

- rejeté toute autre demande.

La Sarl Rodenas et la Sarl Céramique Languedocienne ont respectivement relevé appel de ce jugement les 23 décembre 2021 et 3 janvier 2022.

PRÉTENTIONS

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 25 novembre 2022, la Sarl Rodenas demande en substance à la cour :

- d'infirmer le jugement,

- débouter les époux [K] de l'intégralité de leurs demandes telles que dirigées à son encontre,

- à défaut, condamner solidairement les sociétés Céramique Languedocienne, Pro Ceram [P], Aviva assurances à la relever et garantir de l'intégralité des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre et, en tout état de cause de condamner les époux [K] à lui payer les sommes de :

- 17 950,35 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 7 octobre 2015 et capitalisation de ceux-ci dans les conditions prévues par la loi au titre du solde du coût des travaux,

- 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens en ceux compris ceux afférents aux procédures de référé et les honoraires de l'expert judiciaire.

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 24 février 2024, la Sarl Céramique Languedocienne demande en substance à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il est entré en voie de condamnation à son encontre, et à titre subsidiaire de:

-cantonner à 5 % sa part de responsabilité, y compris au titre des dépens et des frais irrépétibles,

- cantonner à la somme de 13 260 euros TTC l'assiette pouvant servir de base à une éventuelle condamnation,

- à titre très subsidiaire, débouter la Sa Abeille Iard et santé et la société Rodenas de leurs demandes de relevé et garantie à son encontre,

- les condamner in solidum à la relever et garantir pour toutes sommes qui auraient été mises à sa charge au-delà de 5 %, y compris du chef éventuel des dépens et frais irrépétibles et, en tout état de cause,

- débouter les époux [K] de leur appel incident, condamner tout succombant à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Par uniques conclusions remises par voie électronique le 1er juin 2022, les époux [K] demandent en substance à la cour d'infirmer le jugement concernant l'évaluation de leur préjudice de jouissance et de :

- Juger qu'il peut être évalué à 150 euros par mois pendant une période de 5 mois par an de 2015 à 2022 soit la somme de 5 250 euros,

- Condamner in solidum les sociétés Rodenas et Céramique Languedocienne au paiement de cette somme de 5 250 euros,

- Subsidiairement, confirmer l'évaluation retenue par le jugement au titre du préjudice de jouissance, actualisée au jour de la décision,

- Confirmer le jugement sur l'ensemble des autres points et notamment les condamnations prononcées au titre de leur préjudice matériel, des frais au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.

- Y ajoutant, juger que les condamnations prononcées au titre des travaux de réparation seront indexées sur l'indice BT01 à compte du dépôt du rapport d'expertise en date du 13 septembre 2017.

- En tout état de cause, débouter l'ensemble des parties de leurs demandes formulées à leur encontre ;

- Condamner solidairement les sociétés Rodenas et Céramique languedocienne au paiement de la somme de 4 000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, tenant la procédure d'appel qu'ils ont initiée.

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 10 août 2022, la Sa Abeille Iard et Santé demande en substance à la cour de :

- Confirmer le jugement s'agissant des condamnations des seules sociétés Rodenas et Céramique Languedocienne à la somme de 47 570 euros au titre du préjudice occasionné par les plages et parties immergés de la piscine et, subsidiairement, si une condamnation devait intervenir à l'encontre de la compagnie Abeille sur ce chef, les condamner in solidum à la relever et garantie de toute condamnation ;

- Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné les seules sociétés Rodenas et Céramique Languedocienne à un préjudice de jouissance et très subsidiairement, si une condamnation devait intervenir à l'encontre de la compagnie Abeille sur ce chef, les condamner in solidum à la relever et garantie de toute condamnation ;

- Confirmer le jugement en ce qu'il a jugé la concluante fondée à opposer aux tiers et à son assuré s'agissant d'une garantie facultative, ses plafonds de garantie et sa franchise contractuelle à revaloriser selon indice BT01 fixée à 10 % du montant des conséquences dommageables du sinistre avec un minimum de 500 euros et un maximum de 2500 euros par sinistre ;

- A titre d'appelant incident, infirmer le jugement s'agissant des condamnations à l'encontre de la société Pro Ceram et la société Abeille et, statuant à nouveau, de :

- Prononcer purement et simplement la mise hors de cause de la compagnie Abeille ;

- Débouter les sociétés Rodenas et Céramique Languedocienne de leur appel et de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre ;

- Les condamner in solidum, et tout succombant, à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

- Subsidiairement sur la responsabilité décennale, exclure sa garantie, débouter les sociétés Rodenas et Céramique Languedocienne de leur appel et de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre et les condamner in solidum, et tout succombant, à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

- Infiniment subsidiairement,

- Limiter en conséquence sa condamnation aux travaux de reprise du carrelage portant sur le pool house ;

- Limiter la responsabilité de la société Pro Ceram à 15% des conséquences dommageables s'agissant du sinistre portant sur le carrelage du pool house, soit 1 223 euros HT ;

- Condamner in solidum les sociétés Rodenas et Céramique Languedocienne à la relever et garantir à hauteur de 85 % des conséquences dommageables du sinistre et de toute condamnation prononcée à son encontre s'agissant du pool house ;

- En toute hypothèse, les condamner in solidum à relever et garantir intégralement la compagnie de toute condamnation prononcée à son encontre s'agissant des plages de la piscine;

- Juger qu'elle sera tenue aux frais irrépétibles et dépens dans les mêmes proportions qu'au principal,

- Rejeter toutes demandes plus amples ou contraires.

La société Pro Ceram qui s'est vu signifier :

- le 10 février 2022, la déclaration d'appel de la société Rodenas à domicile,

- le 2 mars 2022, les conclusions de la société Rodenas par dépôt étude,

- le 14 juin 2022, les conclusions de la Sa Abeille par dépôt étude,

n'a pas constitué avocat.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 27 février 2024.

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

La cour observe à titre liminaire être saisie du fait de l'appel principal des sociétés Rodenas et Céramique Languedocienne et de l'appel incident interjeté par la société Abeille Iard assureur de la société Pro Ceram [P] de l'examen du bien-fondé de la mise en jeu de la responsabilité de ces trois sociétés.

La Société Rodenas fait en substance grief au premier juge de l'avoir condamnée à payer aux époux [K] les sommes de 470570 euros et de 7093,40 euros au titre de la réfection des plages de la piscine et du pool-house alors que les intimés ne rapportent la preuve ni d'une faute, qu'elle soit contractuelle ou délictuelle, ni celle d'un préjudice, l'expertise judiciaire ayant établi d'une part l'absence de force obligatoire des normes de glissance invoquées par les époux [K] et d'autre part l'absence de glissance du carrelage posé dans le pool-house.

Elle ajoute que les dispositions de l'article 1792 du code civil relatives à la responsabilité décennale invoquées à titre subsidiaire par les époux [K] n'ont pas vocation à s'appliquer dès lors que les désordres allégués ne portent pas atteinte à la solidité de l'ouvrage et que les travaux n'ont pas fait l'objet d'une réception.

A titre subsidiaire, elle entend être relevée et garantie de toutes condamnations prononcées à son encontre par la société Céramique Languedocienne auprès de laquelle les époux [K] ont choisi le carrelage litigieux, cette société ayant à leur égard un devoir d'information et de conseil, de même que par la société Pro Ceram [P] ayant posé le carrelage ainsi que son assureur, cette société étant tenue à son égard d'une obligation de conseil.

La société Céramique Languedocienne conclut à l'infirmation du jugement litigieux en ce que le premier juge l'a condamnée sur le double fondement des dispositions des articles 1147 et 1382 ancien du code civil alors d'une part qu'elle n'a aucune relation contractuelle avec les époux [K], et que dans l'hypothèse ou ceux-ci entendent se fonder sur une action directe entre acquéreurs successifs, elle n'est tenue d'aucun devoir de conseil à l'égard de la société Rodenas en sa qualité de professionnelle de la construction.

Elle ajoute qu'en tout état de cause, tant sur le fondement contractuel que délictuel, aucune faute n'est démontrée par les intimés au regard des observations expertales, et pas davantage sur le fondement de l'article 1615 du code civil précisant avoir conseillé correctement Mme [K] venue personnellement choisir le carrelage et qui a préféré opter, s'agissant du pool-house, pour le carrelage objet du litige plutôt que sa version anti-dérapante plus difficile à entretenir.

Elle indique enfin que les demandes ne sauraient davantage aboutir sur le fondement de l'article 1792 du code civil dès lors qu'elle n'est pas constructeur d'ouvrage et qu'au surplus les travaux n'ont jamais fait l'objet d'une réception.

La société Abeille Iard et santé anciennement Aviva, assureur de la société Pro Ceram chargée de la pose du carrelage litigieux fait grief au premier juge d'être entrée en voie de condamnation à l'égard de son assurée au titre de la réfection du carrelage du pool-house sur le double fondement contractuel et délictuel alors qu'aucune faute n'est démontrée à l'encontre de son assurée étant observé que celle-ci n'était pas tenue d'une obligation de conseil n'ayant qu'une mission de pose, et qu'aucune glissance n'a été caractérisée par l'expert s'agissant du pool-house de sorte que la responsabilité de la société Pro Ceram ne peut être engagée.

Elle ajoute qu'en l'absence de réception des travaux, et de désordres de nature décennale elle ne saurait être sollicitée au titre de cette garantie.

A titre subsidiaire, elle soutient que la police souscrite par son assurée ne couvre que sa responsabilité civile au titre des dommages causés aux tiers et des frais de recherche des désordres et non sa responsabilité contractuelle ou délictuelle au titre des désordres.

Les époux [K] réitèrent quant à eux leurs prétentions initiales les fondant en cause d'appel à titre principal sur le manquement à l'obligation de conseil des sociétés Rodenas et Céramique Languedocienne ajoutant à l'encontre de cette dernière le non-respect des dispositions des articles 1615 et 1602 du code civil et à titre subsidiaire celles de l'article 1382 du code civil si la juridiction devait considérer qu'elle ne peut agir sur le fondement contractuel , le tiers à un contrat pouvant invoquer sur le fondement délictuel un manquement contractuel.

Ils s'appuient en substance sur les observations de l'expert aux termes desquelles le carrelage posé sur les plages de la piscine devait être de la classe C et s'est avéré ressortir en réalité de classe B, l'expert ayant également relevé la glissance effective des carrelages, celui posé sur le sol du pool-house étant quant à lui d'une catégorie non-conforme aux normes.

Ils invoquent à titre subsidiaire les dispositions de l'article 1792 du code civil faisant valoir que les travaux ont été reçus avec réserve le 15 juin 2015 et que les désordres sont de nature décennale.

Ils font valoir enfin l'exception d'inexécution pour conclure au débouté de la demande reconventionnelle de la société Rodenas en paiement de la somme de 17950,35 euros au titre du solde du coût du marché.

Sur ce, la cour rappelle que la mise en oeuvre des responsabilités contractuelle et délictuelle fondées sur les dispositions des articles 1147 et 1382 du code civil ancien applicable à l'espèce invoquées à titre principal par les époux [K] leur impose de démontrer l'existence d'une faute imputable aux sociétés intervenues au titre du carrelage litigieux, et d'un préjudice en lien de causalité avec celle-ci.

Or il résulte des observations de l'expert non contestées par les époux [K] les éléments d'information objectifs suivants :

- le carrelage litigieux a remplacé un revêtement en pierres du Lot ayant une résistance à la glissance supérieure à tout type de carrelage, l'expert précisant « Il est évident que la réalisation des plages en carrelage ne permet pas d'obtenir la même résistance à la glissance» ,

- la norme XP P 05-011 à laquelle se réfère l'expert qui définit les classes des locaux en fonction de leur résistance à la glissance a été mise au point en 2005 et était expérimentale jusqu'au 31 décembre 2008 et s'appréciait auparavant à partir de la norme allemande DIN.

- il résulte de cette classification que les carrelages posés sur les zones immergées et les plages de piscine doivent être de classe C ou B selon la pente des plages et leur immersion,

- l'expert ne disposant pas lors de l'ouverture de ses opérations de la fiche technique du carrelage « You Lotus Tono C50 » posé sur les plages de la piscine, a fait réaliser avec l'accord des parties, l'analyse de la valeur de sa résistance à la glissance laquelle a démontré qu'il correspondait à la classe C de sorte qu'en dépit des mentions portées sur la fiche technique de ce produit obtenue ultérieurement par l'expert indiquant qu'il était de niveau B , ce carrelage correspondait bien en réalité aux exigences de ces normes.

- le carrelage « Plank W 20 120» posé sur le sol du pool-house est de classe A.

Si l'expert indique avoir subjectivement pu ressentir « qu'il existe une sensation non négligeable de glissance des carrelages posés sur les plages de la piscine, il n'a relevé aucune sensation de glissance sur le carrelage revêtant le pool-house et a en outre observé que de nombreux meubles sont présents dans ce local qui constituent autant d'appuis potentiels permettant en outre de ralentir fortement les déplacements.

La cour ne trouve dans ces observations aucun élément de permettant d'établir une quelconque faute des sociétés Rodenas et Céramique Languedoc dans leur obligation d'information et de conseil s'agissant du choix du carrelage des plages de piscine qui respectait la norme alors communément admise par les professionnels, ni s'agissant du pool-house, au titre de laquelle le tribunal a retenu outre la responsabilité des deux premières, celle de la société Pro Ceram [P] alors qu'aucun phénomène de glissance n'est retenu par l'expert et qu'il ressort des photographies annexées à son rapport qu'il s'agit d'un espace relativement restreint, garni de nombreux meubles et que l'accès à cet espace étant rehaussé d'une marche, il n'est pas dans la continuité directe des plages de la piscine, et les époux [K] ne produisent aucun élément de nature à établir que le carrelage de cet espace présente un risque de glissance avéré de sorte qu'aucun préjudice en lien avec le choix d'un carrelage non-conforme à la norme n'est établi s'agissant du pool-house.

Aucun caractère probant ne ressort davantage des observations de l'huissier mandaté par les époux [K] aux termes desquelles leur fils « alors qu'il vient du gazon, s'élance sur la plage pour entrer dans la piscine...glisse de façon importante comme s'il était sur une piste de ski ou une patinoire», le fait de «s'élancer» sur la plage d'une piscine n'étant pas conforme à un usage normalement prudent et attendu d'un tel espace.

Il résulte de ces considérations que s'il peut être admis que les époux [K] ont pu en toute logique demander la fourniture d'un carrelage «non-glissant», ils ne rapportent pas la preuve que les carrelages posés ne correspondaient pas à ce critère, l'un en raison du fait qu'il était conforme à la classification la plus haute en terme de glissance, l'autre parce que la preuve de sa glissance réelle et de sa non-conformité à la configuration des lieux n'est pas rapportée, étant de surcroît rappelé l'observation de l'expert suivant laquelle aucun carrelage ne pouvait égaler la résistance à la glissance des pierres du Lot qui garnissaient précédemment ces espaces.

Les dispositions de l'article 1792 du code civil relatives à la garantie décennale invoquées à titre subsidiaire par les époux [K] à l'encontre des société Rodenas et Céramique Languedocienne ne leur permettront pas davantage d'obtenir leur condamnation dès lors que la mise en oeuvre de ces dispositions exige une réception des travaux, fût-elle avec réserves, et qu'ainsi que relevé par l'expert, il n'existe aucun procès-verbal de réception et que le mémoire définitif adressé par la société Rodenas aux époux [K] le 15 juin 2015 n'a pas été payé du fait des désordres invoqués.

Il suit de l'ensemble de ces considérations que le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a considéré comme étant établie la responsabilité des trois sociétés à l'égard des époux [K] et les a condamnées à les indemniser et que la cour, statuant à nouveau, déboutera ces derniers de l'ensemble de leurs demandes.

Il suit également de la décision de la cour que les époux [K] sont mal fondés à invoquer l'exception d'inexécution pour justifier le non-paiement du solde de la facture récapitulative émise par la société Rodenas le 15 juin 2015 au titre de laquelle il reste devoir la somme de 17950, 35 euros de sorte qu'ils seront condamnés à lui payer cette somme outre intérêts au taux légal à compter du 4 octobre 2021 date de sa demande reconventionnelle formulée en première instance, à défaut de production d'une mise en demeure antérieure, la capitalisation annuelle des intérêts étant ordonnée.

Parties succombantes, les époux [K] seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel par application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS:

Statuant par arrêt prononcé par défaut

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Déboute les époux [K] de l'ensemble de leurs demandes,

Dit n'y avoir lieu en conséquence à condamnation subséquente des assureurs respectifs des parties.

Condamne les époux [K] à payer à la société Rodenas la somme de 17950,35 euros outre intérêts au taux légal à compter du 4 octobre 2021 avec capitalisation des intérêts dus pour une année entière.

Les condamne aux dépens de première instance,

Y ajoutant,

Les condamne aux dépens d'appel.

Les condamne à payer à la société Rodenas et à la société Céramique Languedocienne chacune la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre des frais irrépétibles en faveur de la société Abeille Iard.

LE GREFFIER P/LE PRESIDENT EMPECHE

LE CONSEILLER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/07376
Date de la décision : 16/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-16;21.07376 ?
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