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16/05/2024 | FRANCE | N°21/07187

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 16 mai 2024, 21/07187


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à

























COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



4e chambre civile



ARRÊT DU 16 MAI 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/07187 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PHW4





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 25 novembre 2021 <

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Tribunal judiciaire de Montpellier - N° RG 21-000129





APPELANT :



Monsieur [G] [P] [R] [E]

né le 18 Mai 1957 à [Localité 5]

de nationalité Portugaise

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Stéphanie CAUMIL substituant Me Bénédicte WAROCQUIER de la SELARL SELARL SOCIETE D'AVOCAT WAROCQUIER, avocats a...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRÊT DU 16 MAI 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/07187 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PHW4

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 25 novembre 2021

Tribunal judiciaire de Montpellier - N° RG 21-000129

APPELANT :

Monsieur [G] [P] [R] [E]

né le 18 Mai 1957 à [Localité 5]

de nationalité Portugaise

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Stéphanie CAUMIL substituant Me Bénédicte WAROCQUIER de la SELARL SELARL SOCIETE D'AVOCAT WAROCQUIER, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant présent sur l'audience

INTIMEE :

Madame [D] [B]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Florent CLAPAREDE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant présent sur l'audience

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 MARS 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Henriane MILOT

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe BRUEY, conseiller en remplacement de Monsieur Philippe SOUBEYRAN, président de chambre empêché, en application de l'article 456 du code de procédure civile et par Mme Henriane MILOT, greffière

*

* *

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Le 2 novembre 2017, Mme [D] [B] a confié à M. [G] [P] [R] [E] les travaux de rénovation de son logement à [Localité 3], à hauteur de 30 956,63 € TTC.

Un procès-verbal de réception a été signé le 3 mai 2018, listant un certain nombre de réserves.

Un procès-verbal de constat d'huissier a été dressé.

Aucuns travaux supplémentaires n'ont été effectués par M.[P] [R] [E].

Le 6 mai 2018, M. [P] [R] [E] a transmis à Mme [B] une facture d'un montant de 8 743,68 € correspondant au solde restant dû pour les travaux.

Le 2 mai 2019, M. [P] [R] [E] a établi une facture rectificative de 8 101,08 €, déduction faite d'un certain nombre de travaux non réalisés.

Une mésentente est intervenue entre les parties, de sorte que les réserves n'ont pu être levées et que le montant de la facture a été contesté.

Dans ce contexte, M. [P] [R] [E] a assigné Mme [B] par acte du 4 février 2020. Toutefois, cette assignation a été déclarée caduque par ordonnance du président du tribunal judiciaire de Montpellier du 9 mars 2020 pour ne pas avoir été déposée au greffe au moins quinze jours avant la date d'audience, en contrariété avec l'article 754 du code de procédure civile.

Par acte du 14 janvier 2021, M. [P] [R] [E] a, une nouvelle fois, assigné Mme [B] devant le tribunal judiciaire de Montpellier, aux fins d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 8 101,08 €.

Par jugement contradictoire du 25 novembre 2021, le tribunal judiciaire de Montpellier a :

déclaré irrecevable l'action en paiement de M. [P] [R] [E],

débouté les parties du surplus de leurs demandes,

condamné M. [P] [R] [E] aux dépens,

rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

Le 14 décembre 2021, M. [P] [R] [E] a relevé appel de ce jugement.

Par uniques conclusions remises par voie électronique le 14 mars 2022, M. [P] [R] [E] demande à la cour, sur le fondement de l'article L. 218-2 du code de la consommation, des articles 2241 et suivants du code civil et des articles 1104, 1105 et 1792-6 du code civil, de :

infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

rejeter le motif d'irrecevabilité tiré de la prescription,

condamner Mme [B] à lui payer la somme de 8 101,08 €, assortie des intérêts depuis la mise en demeure du 18 septembre 2018,

condamner Mme [B] aux dépens et à lui payer la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

rejeter toute demande visant à écarter l'exécution provisoire.

Par uniques conclusions remises par voie électronique le 31 mars 2022, Mme [B] demande à la cour, sur le fondement de l'article L. 218-2 du code de la consommation, de :

confirmer le jugement,

Très subsidiairement,

débouter M. [P] [R] [E] de ses demandes et,

En toutes hypothèses,

condamner M. [P] [R] [E] aux dépens et à lui payer la somme de 1 000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture du 27 février 2024.

Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS :

Sur la prescription

L'article L 218-2 du code de la consommation énonce que l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans.

L'article 2224 du code civil indique, par ailleurs, que le délai de prescription court à compter du jour « où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ».

Il résulte de ce texte les principes suivants :

En l'absence de précision sur le point de départ du délai spécial de 2 ans de l'article L 218-2 du code de la consommation, il est jugé qu'il se situe au jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer l'action concernée (1ère Civ., 16 avril 2015, pourvoi n° 13-24.024, Bull. 2015, 1, n° 100) ;

Pour déterminer le point de départ du délai de prescription de l'action en paiement de travaux et services, il y a lieu de prendre en compte la date de la connaissance des faits qui permet au professionnel d'exercer son action, laquelle est caractérisée, hormis les cas où le contrat ou la loi en disposent autrement, par « l'achèvement des travaux » ou « l'exécution des prestations », cette circonstance rendant sa créance exigible (3e Civ., 1er mars 2023, pourvoi n°21-23.176).

La Cour de cassation a récemment abandonné sa jurisprudence qui fixait le point de départ du délai de prescription au « jour de l'établissement de la facture », puisque ce critère présentait l'inconvénient de mettre entre les mains du créancier le départ de la prescription. Le point de départ désormais retenu est celui de « l'achèvement des travaux » ou de « l'exécution des prestations », qui correspond au moment où l'obligation de paiement devient exigible (Com., 26 février 2020, pourvoi n°18-25.036).

Toutefois, la Cour de cassation a également précisé, dans une autre affaire, que dès lors que l'application de la jurisprudence nouvelle aboutirait à priver le professionnel d'accès au juge, il est justifié de faire exception au principe de cette application immédiate, et de prendre en compte la date d'établissement de la facture comme constituant le point de départ de la prescription au jour de l'assignation des consommateurs (Cass., Civ. 1e, 19 mai 2021, n° 20-12.520).

En l'espèce, il n'est pas contesté que l'action en paiement de M. [P] [R] [E], professionnel, envers Mme [B], consommateur, se prescrit par deux ans, conformément à l'article L 218-2 du code de la consommation précité.

Le procès-verbal de réception a été signé le 3 mai 2018, avec réserves.

M. [P] [R] [E] a émis une facture le 6 mai 2018.

Le délai de prescription biennale a commencé à courir le 3 mai 2018, jour de l'achèvement des travaux, et au plus tard, le 6 mai 2018, jour de l'édition de la facture.

C'est à tort que M. [P] [R] [E] soutient que le point de départ du délai de prescription doit être fixé à la levée des réserves (qui n'est jamais intervenue dans ce dossier) ou à la date d'expiration de la garantie de parfait achèvement. En effet, il est constant qu'il a cessé définitivement d'intervenir sur le chantier a compter du 3 mai 2018. C'est donc à cette date qu'il « a connu ou aurait dû connaître » que l'achèvement des travaux devait entraîner une obligation en paiement de Mme [B]. M.[P] [R] [E] lui a fait parvenir une facture le 6 mai 2018, date du point de départ du délai de la prescription biennale.

L'édition d'une 2ème facture rectifiée le 2 mai 2019 ne saurait refaire partir un délai de prescription de 2 ans alors que cette facture est relative aux mêmes travaux et que M. [P] [R] [E] n'est pas de nouveau intervenu sur le chantier entre les deux factures.

Enfin, M. [P] [R] [E] ne saurait se prévaloir légitimement de l'effet interruptif de la première assignation du 4 février 2020 puisqu'elle a été déclarée caduque par ordonnance du 9 mars 2020 du président du tribunal judiciaire de Montpellier en application de l'article 754 du code de procédure civile.

En effet, l'Assemblée plénière de la Cour de cassation, le 3 avril 1987 a jugé « qu'une assignation dont la caducité a été constatée n'a pu interrompre le cours de la prescription ; que dès lors, la cour d'appel, qui a relevé que la seconde assignation avait été délivrée hors du délai légal en a justement déduit que l'action était prescrite » (Cass. ass. plén., 3 avr. 1987).

Ainsi, la première assignation du 4 février 2020 devenue caduque n'a eu aucun effet interruptif de prescription.

La deuxième assignation du 14 janvier 2021, postérieure à l'expiration du délai de prescription (qui s'achevait le 6 mai 2020, soit 2 ans après l'édition de la facture du 6 mai 2018), n'a pu avoir aucun effet interruptif de celle-ci.

L'action en paiement est donc prescrite.

Il convient, en conséquence, de confirmer le jugement qui a déclaré irrecevable l'action en paiement de M. [P] [R] [E] à l'encontre de Mme [B].

Sur la demande reconventionnelle

L'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages-intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol. Par ailleurs, pour prononcer une condamnation sur ce fondement, il serait nécessaire d'apprécier un préjudice qui ne serait pas déjà réparé par les condamnations sur les dépens ou au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

En l'espèce, aucun élément de la procédure ne permet de déterminer un abus de son droit d'agir en justice de la part de M.[P] [R] [E].

En conséquence, Mme [B] sera déboutée de ce chef.

Sur les demandes accessoires

Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées.

Partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, M. [P] [R] [E] supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute Mme [B] de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

Condamne M. [P] [R] [E] aux dépens d'appel,

Condamne M. [P] [R] [E] à payer à Mme [B] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

LE GREFFIER P/LE PRESIDENT EMPÊCHÉ

LE CONSEILLER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/07187
Date de la décision : 16/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-16;21.07187 ?
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