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30/04/2024 | FRANCE | N°22/03488

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Chambre commerciale, 30 avril 2024, 22/03488


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

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COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



Chambre commerciale



ARRET DU 30 AVRIL 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/03488 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PPCQ





Décision déférée à la Cour :

Jug

ement du 1er JUIN 2022

TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER

N° RG 2021012331





APPELANT :



Monsieur [U], [I], [M] [H]

né le 24 Mai 1969 à [Localité 4] (34)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représenté par Me Jana KRATKA, avocat au barreau de MONTPELLIER







INTIMEE :



SARL L.B. AUTO prise en la per...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

Chambre commerciale

ARRET DU 30 AVRIL 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/03488 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PPCQ

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 1er JUIN 2022

TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER

N° RG 2021012331

APPELANT :

Monsieur [U], [I], [M] [H]

né le 24 Mai 1969 à [Localité 4] (34)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représenté par Me Jana KRATKA, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

SARL L.B. AUTO prise en la personne de son représentant légal en exercice

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Laurence Marie FOURRIER, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué sur l'audience par Me Thomas DES PREZ DE LA MORLAIS, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 13 Février 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 MARS 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre

Mme Anne-Claire BOURDON, conseillère

M. Thibault GRAFFIN, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Sabine MICHEL

ARRET :

- contradictoire,

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Mme Danielle DEMONT, présidente de chambre, et par Mme Audrey VALERO, greffière.

EXPOSE DU LITIGE :

Le 1er septembre 2017, M. [U] [H] a conclu un contrat d'agent commercial avec la SARL LB Auto, immatriculée au RCS de Montpellier et ayant comme activité principale le commerce de voitures et de véhicules automobiles légers.

Le 17 juin 2021, M. [H] a vainement signifié une sommation de faire à la société LB Auto aux fins d'être remboursé de la somme de 28 479,34 euros correspondant selon lui à une avance pour l'acquisition d'un véhicule Audi Q3 qui ne s'est en définitive pas réalisée.

A la requête de M. [H], le président du tribunal de commerce de Montpellier, par ordonnance du 8 juillet 2021, a enjoint à la société LB Auto de lui payer notamment la somme de 3 829, 34 euros en principal.

Le 3 août 2021, la société LB Auto a formé opposition.

Par ailleurs, le 13 septembre 2021, M. [H] a vainement mis en demeure la société LB Auto de lui régler son indemnité compensatrice de fin de contrat pour un montant de 97 783 euros ainsi que son indemnité de préavis de 3 mois d'un montant de 11 816,33 euros.

Par exploit d'huissier en date du 21 octobre 2021, M. [H] a fait assigner la société LB Auto devant le tribunal de commerce de Montpellier aux fins de paiement de ses indemnités compensatrice et de préavis ainsi que le reliquat de factures dues.

Le 19 novembre 2021, la jonction des deux procédures a été ordonnée.

Puis, par jugement du 1er juin 2022, le tribunal de commerce de Montpellier a :

- dit que le contrat d'agent commercial liant M. [H] et la société LB Auto a été rompu du fait de M. [H] pour faute grave,

- débouté M. [H] de l'ensemble de ses demandes et prétentions,

- débouté la société LB Auto de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné M. [H] à payer à la société LB Auto la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [H] aux entiers dépens dont frais de greffe liquidés et taxés à la somme de 104,97 euros toutes taxes comprises.

Par déclaration du 29 juin 2022, M. [U] [H] a relevé appel de ce jugement.

Par conclusions du 21 septembre 2022, il demande à la cour au visa des articles L. 134-12 et suivants du code de commerce et des articles 1240 et suivants du code civil, de :

- infirmer le jugement entrepris,

et, statuant à nouveau,

- condamner la société LB Auto à lui payer les sommes suivantes :

- la somme de 97 783 euros au titre de l'indemnité compensatrice en application des dispositions de l'article L.134-12 du code de commerce,

- la somme de 11 816,33 euros au titre de l'indemnité de préavis de 3 mois,

- la somme de 26 650 euros au titre de sa créance, le tout avec intérêts à compter de la mise en demeure reçue le 15 septembre 2021,

- la somme de 3 829,34 euros au titre des factures impayées n° 157, 165 et 152, avec intérêts à compter du 8 juillet 2021, outre les frais de 51,07 euros et dépens de 33,47 euros,

- tenant la résistance abusive de la société LB Auto, la condamner en outre à lui payer la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice,

- confirmer le jugement dont appel pour le reste,

- condamner la société LB Auto à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de son appel, M. [H] fait en substance valoir les moyens suivants :

- Le contrat d'agent commercial a été rompu uniquement à l'initiative de la société LB Auto et sans aucun motif.

- La société LB Auto ne peut s'exonérer du paiement d'indemnités prévues en cas de rupture du contrat puisqu'il n'a commis aucun manquement dans le cadre de l'exécution de son mandat et que la société était satisfaite de ses prestations.

- La société LB Auto ne lui jamais fait part de reproches ; elle est défaillante à rapporter la preuve d'une quelconque faute de sa part et l'a congédié oralement sans lui adresser de lettre de résiliation.

- En rompant son contrat de façon brutale et vexatoire, il a subi un préjudice moral qui se doit d'être indemnisé par la société LB Auto.

- Selon les dispositions de l'article L. 134-12 du code de commerce, il est en droit de percevoir une indemnité égale au montant des commissions perçues au cours des deux dernières années, soit un total de 97 783 euros.

- Selon les dispositions de l'article L. 134-11 du code de commerce, il est en droit de percevoir une indemnité de préavis égale à trois mois de commissions, soit 11 816,33 euros.

- Il justifie avoir réglé à la société LB Auto une avance de 24 650 euros qui ne lui a jamais été remboursée, correspondant à un virement de 22 000 euros réalisé le 23 juin 2017 sur le compte bancaire de la société et à un chèque de 2 650 euros débité le 19 juillet 2017, pour la vente d'un véhicule à Mme [H] qui ne s'est finalement pas réalisée.

- La société LB Auto lui doit également 3 829,64 euros au titre des factures n°152, 157 et 165.

- La société LB Auto est défaillante à rapporter la preuve d'être créancière d'une dette d'un montant de 35 042 euros.

Par conclusions du 4 octobre 2022, formant appel incident, la société LB Auto demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris ;

- débouter M. [H] de l'intégralité de ses demandes ;

à titre reconventionnel,

- infirmer le jugement en ce qu'il « déboute la société LB Auto de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles ; »

- condamner M. [H] au paiement de la somme de 35 042 euros ;

à titre accessoire, et en tout état de cause,

- le condamner au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La société LB Auto expose en substance les moyens suivants :

- En application des dispositions de l'article L. 134-12 du code de commerce, la faute grave de l'agent commercial entraîne la privation pour ce dernier du droit à l'indemnité compensatrice de fin de contrat ;

- La faute grave est celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêts communs et rend impossible le maintien du lien contractuel ;

- Or, en l'espèce, M. [H] a commis des fautes professionnelles entre 2019 et 2021 dans l'exécution de son mandat et dans la vente de véhicules qui ont conduit à des procédures judiciaires pour un montant de 194 558,70 euros ;

- C'est ce motif qui a conduit à la résiliation du contrat d'agent commercial de M. [H] ;

- En outre, à la suite de l'annulation d'une vente d'un véhicule consécutive au comportement fautif de M. [H], ce dernier a subitement disparu du jour au lendemain au mois de mars 2021 ;

- Il résulte des décomptes de son expert-comptable qu'elle ne lui est nullement redevable de la somme de 24 650 euros.

L'ordonnance de clôture est datée du 13 février 2024.

MOTIFS :

Sur l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 8 juillet 2021

Le tribunal de commerce de Béziers a omis de statuer sur les effets de l'opposition qui a été formée dans les délais légaux par la société LB Auto le 3 août 2021 à l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 8 juillet 2021 et qui lui a été signifiée le 28 juillet 2021.

L'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer du 8 juillet 2021 formée par la société LB Auto sera déclarée recevable et l'ordonnance sera mise à néant.

Il sera en conséquence ajouté au jugement dont appel.

Sur les indemnités compensatrice de fin de contrat et de préavis

Selon les dispositions des articles L.134-12 et L.134-13 du code de commerce, en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi, cependant la réparation n'est pas due lorsque la cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial.

Il résulte de ces textes que la faute grave est celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et qui rend impossible le maintien du lien contractuel, excluant le bénéfice d'une indemnité compensatrice du préjudice subi en cas de cessation du contrat d'agent commercial.

Par ailleurs, les rapports entre l'agent commercial et le mandant sont régis par une obligation de loyauté et un devoir d'information selon les dispositions de l'article L.134-4 du code précité.

En outre, l'agent commercial qui a commis un manquement grave, antérieurement à la rupture du contrat, dont il n'a pas été fait état dans la lettre de résiliation et qui a été découvert postérieurement à celle-ci par le mandant, de sorte qu'il n'a pas provoqué la rupture, ne peut être privé de son droit à indemnité (en ce sens, Com., 16 novembre 2022, n° 21-17.423).

En l'espèce, il convient de constater que le contrat d'agent commercial liant M. [H] à la société LB Auto n'a jamais été expressément résilié.

Les parties s'accordent sur le fait que leur collaboration a cessé subitement au mois de mars 2021, pour des motifs sur lesquels elles s'opposent, chacune imputant à l'autre l'origine de la fin de leur collaboration.

Aucune faute n'a été reprochée à M. [H] par la société LB Auto pour mettre fin à son contrat, laquelle n'a pas davantage pris l'initiative d'adresser à ce dernier une lettre de résiliation en invoquant des fautes.

Ce n'est que dans des correspondances postérieures, notamment au mois d'octobre 2021 et en prenant acte de la résiliation de facto du contrat d'agent commercial, que la société LB Auto a évoqué des fautes que M. [H] aurait commises durant l'exécution de son contrat pour refuser ses demandes indemnitaires.

En conséquence, M. [H] ne saurait être privé de son indemnité compensatrice de fin de contrat.

Le jugement sera réformé.

Il résulte des pièces produites par M. [H] que ce dernier a perçu au titre de ses commissions en 2019 la somme de 58 064 euros et en 2020 celle de 39 719 euros, soit une somme totale de 97 783 euros qui sera en conséquence retenue au titre de son indemnité compensatrice de fin de contrat due par la société LB Auto et correspondant à deux années de commissions.

En outre, la durée de son contrat étant de plus de trois années, M. [H] a droit à trois mois de préavis par application des dispositions de l'article L.134-11 du code de commerce, soit la somme de 11 813,49 euros.

Le jugement sera réformé et la société LB Auto sera condamnée à payer à M. [H] la somme de 109 596,49 euros.

Sur les autres demandes

Sur les sommes de 24 650 et 35 042 euros sollicitées par les parties

M. [H] sollicite le remboursement par la société LB Auto d'une somme de 24 650 euros qu'il soutient être une avance qu'il aurait faite pour l'acquisition d'un véhicule pour le compte de son épouse.

Il justifie à ce titre qu'il a effectué le 23 juin 2017 d'une part un virement d'un montant de 22 000 euros sur le compte de la société LB Auto, et d'autre part un paiement par chèque de 2 650 euros le 19 juillet suivant.

Cependant, en dehors de leurs relations issues de l'exécution du contrat d'agent commercial, M. [H] et la société LB Auto collaboraient également pour l'acquisition par moitié chacun de véhicules auprès de différents fournisseurs que la société LB Auto revendait ensuite avec la collaboration de M. [H] en sa qualité d'agent commercial.

La forme juridique de l'activité de M. [H] pour ces opérations n'est pas connue, les pièces de la société LB Auto mentionnant l'existence d'une société [H] auto à propos de laquelle M. [H] reste taisant, qui n'est nullement partie à la présente instance, lesquelles opérations ne relèvent en aucune manière de l'exécution de son contrat d'agent commercial.

À ce titre, chacune des parties produit différents tableaux faisant apparaître de nombreux mouvements débiteurs et créditeurs, correspondant à des opérations portant sur différents véhicules, et qui selon M. [H] conduisent en définitive à un solde créditeur à son profit d'un montant de 24 650 euros, quand pour la société LB Auto ces opérations aboutissent à un solde créditeur à son profit de 35 042 euros.

Eu égard à ces éléments, M. [H] ne justifiant nullement des conditions de l'exercice de cette activité d'achat et de vente de véhicules en coopération avec la société LB Auto, il sera débouté de sa demande de remboursement de la somme de 24 650 euros, de même que la société LB Auto le sera également s'agissant du paiement par M. [H] de celle de 35 042 euros.

Sur le paiement des factures sollicité par M. [H]

M. [H] sollicite le paiement de trois factures établies au titre de ses commissions d'agent commercial pour des ventes effectuées avant la cessation de son activité pour un montant total de 3 829,34 euros, dont il justifie du bien-fondé, de sorte que la société LB Auto sera condamnée à lui payer cette somme assortie des intérêts à compter du 8 juillet 2021.

Sur les dommages-intérêts sollicités par M. [H]

M. [H] sera débouté de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive à défaut de démontrer la faute de la société LB Auto dans le refus du paiement par cette dernière des sommes sollicitées dans le contexte de leurs désaccords.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et ajoutant,

Déclare recevable l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer du 8 juillet 2021 formée par la société LB Auto,

Met à néant ladite ordonnance,

Condamne la S.A.R.L LB Auto à payer à M. [U] [H] la somme de 3829,34 euros au titre de ses factures, assortie des intérêts au taux légal à compter du 8 juillet 2021,

Condamne la S.A.R.L LB Auto à payer à M. [U] [H] la somme de 109 596,49 euros au titre de ses indemnités compensatrices de fin de contrat et de préavis,

Déboute M. [U] [H] et la S.A.R.L LB Auto du surplus de leurs demandes,

Condamne la S.A.R.L LB Auto aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais relatifs à la procédure d'injonction de payer, ainsi qu'à payer à M. [U] [H] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

le greffier, le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 22/03488
Date de la décision : 30/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-30;22.03488 ?
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