ARRÊT n°
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4e chambre civile
ARRET DU 25 AVRIL 2024
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 21/06844 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PHBS
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 08 novembre 2021
Juge des Contentieux de la Protection de Montpellier
N° RG 1121001060
APPELANTE :
S.A. Creatis
immatriculée au RCS de LILLE METROPOLE sous le n°419446034,agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au siège social
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représentée par Me Arnaud DUBOIS substituant Me Sandy RAMAHANDRIARIVELO de la SCP RAMAHANDRIARIVELO - DUBOIS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant
INTIME :
Monsieur [V] [I]
né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 6]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 2]
assigné par acte remis à étude le 14 janvier 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Février 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M.Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre
M. Philippe BRUEY, Conseiller
Mme Marie-José FRANCO, Conseillère
Greffier lors des débats : Mme Henriane MILOT
ARRET :
- par défaut ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Henriane MILOT, Greffier.
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FAITS ET PROCÉDURE
Le 4 septembre 2012, la SA Creatis a consenti à M. [V] [I] et Mme [J] [O] un regroupement de crédits d'un montant de 55.800 € remboursable en 144 échéances de 637,85 € hors assurance taux débiteur de 9,09 % l'an.
Le 29 décembre 2015, la Commission de surendettement des particuliers de l'Hérault a déclaré recevable le dossier déposé par M. [I] et Mme [O].
Le 23 juin 2016, la Commission de surendettement a imposé un rééchelonnement des créances sur une durée de 59 mois avec déblocage de l'épargne salariée de Mme [O] affecté à la première mensualité. Par jugement en date du 20 décembre 2016, le tribunal d'instance de Montpellier a confirmé ces mesures.
Le 27 juin 2017, M. [I] a déposé un second dossier de surendettement, lequel a été déclaré recevable.
Le 26 septembre 2017, la Commission de surendettement a imposé un rééchelonnement des dettes sur une durée de 84 mois avec effacement partiel de certaines d'entre elles. Ces mesures ont été confirmées par jugement en date du 16 avril 2018.
A compter du 30 juillet 2020, M. [I] a cessé d'honorer les échéances du prêt.
Par courrier en date du 8 décembre 2020, la société Creatis a mis en demeure M. [I] de satisfaire ses obligations de remboursement.
Le 2 mars 2021, par lettre recommandée avec accusé de réception, la société Creatis a prononcé la déchéance du terme.
C'est dans ce contexte que par acte en date du 5 mai 2021, la SA Creatis a assigné M. [I] aux fins de constater la déchéance du terme et partant obtenir paiement des sommes dues.
Par jugement contradictoire, rendu sous le bénéfice de l'exécution provisoire, en date du 8 novembre 2021, le tribunal judiciaire de Montpellier a :
- Déclaré irrecevable l'action de la SA Creatis ;
- Condamné la SA Creatis aux dépens ;
- Débouté la SA Creatis de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
Le 25 novembre 2021, la société Creatis a relevé appel de ce jugement.
PRÉTENTIONS
Par uniques conclusions remises par voie électronique le 12 janvier 2022, la société Creatis demande en substance à la cour de réformer totalement le jugement, et statuant à nouveau, de :
- Dire au visa de l'article L.311-52 du code de la consommation qu'au vu des réaménagements successifs, l'action de la société Creatis intervient dans le délai biennal, de sorte qu'elle est recevable.
- Constater la déchéance du terme et en tant que de besoin prononcer la résiliation judiciaire du contrat pour défaut de paiement des échéances à bonne date, déclarant l'action recevable.
- Condamner M. [I] à payer à la SA Creatis la somme principale de 50.979,91 €, avec les intérêts de retard au taux contractuel de 9,09 % l'an depuis le 2 mars 2021, date de la mise en demeure et à défaut de l'assignation, et jusqu'à parfait paiement ; hors l'indemnité contractuelle et légale de 8 % qui portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, et à défaut de l'assignation et jusqu'à parfait paiement.
- Subsidiairement, condamner M. [I] à payer à la SA Creatis la somme de 29.648,05 € correspondant à la différence entre les montants financés pour 55.800€ et les règlements reçus pour 26.151,95 € ; cette somme produisant intérêts au taux légal depuis la mise en demeure et jusqu'à parfait paiement.
- Condamner M. [I] à payer à la SA Creatis la somme de 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et celle de 1.000 € sur le même fondement en cause d'appel, outre les entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de l'avocat soussigné.
Le 14 janvier 2022, la société Creatis a fait signifier à M.[I], la déclaration d'appel ainsi que les conclusions par remise dépôt étude.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 30 janvier 2024.
Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur la recevabilité de l'action de la société Creatis
Selon les dispositions de l'article L.311-52 du code de la consommation dans sa rédaction applicable en l'espèce,
'Le tribunal d'instance connaît des litiges nés de l'application du présent chapitre. Les actions en paiement engagées devant lui à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est caractérisé par :
- le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme ;
- ou le premier incident de paiement non régularisé ;
- ou le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d'un contrat de crédit renouvelable ;
- ou le dépassement, au sens du 11° de l'article L. 311-1, non régularisé à l'issue du délai prévu à l'article L. 311-47.
Lorsque les modalités de règlement des échéances impayées ont fait l'objet d'un réaménagement ou d'un rééchelonnement, le point de départ du délai de forclusion est le premier incident non régularisé intervenu après le premier aménagement ou rééchelonnement conclu entre les intéressés ou après adoption du plan conventionnel de redressement prévu à l'article L. 331-6 ou après décision de la commission imposant les mesures prévues à l'article L. 331-7 ou la décision du juge de l'exécution homologuant les mesures prévues à l'article L. 331-7-1.'
Il résulte des articles L. 311-52, alinéa 2, du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 et L. 331-7 du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, que la décision par laquelle la commission de surendettement recommande l'adoption de mesures de désendettement n'étant pas au nombre des événements visés à l'article L. 311-52 précité, le point de départ du délai de forclusion est reporté, dans ce cas, au premier incident de paiement non régularisé intervenu après la décision du juge conférant force exécutoire aux mesures. (2e Civ., 8 juin 2023, pourvoi n°21-17.735).
Il résulte de la combinaison des articles L. 331-7, neuvième alinéa, et L. 311-52 du code de la consommation, dans leur rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 que la demande du débiteur adressée à la commission de surendettement de recommander des mesures de redressement, après échec de la tentative de conciliation, interrompt le délai de forclusion prévu au second texte. (1re Civ., 20 mai 2020, pourvoi n° 18-26.777).
Il résulte de la chronologie factuelle ci-dessus énoncée et de l'historique des mouvements enregistrés par le prêt qu'il était à jour des échéances mensuelles au mois de mai 2015, qu'il a fait l'objet d'un premier plan de surendettement en date du 23 juin 2016 avec apurement sur 59 mois avec confirmation des mesures imposées par jugement du tribunal d'instance de Montpellier du 20 décembre 2016, un premier impayé non régularisé intervenant en mars 2017, d'un deuxième plan de rééchelonnement sur 84 mois en date du 29 septembre 2017 confirmé par jugement du tribunal d'instance de Montpellier du 16 avril 2018, d'un troisième plan de rééchelonnement, amiable, prescrivant à compter du 30 avril 2020 le règlement d'une échéance de 70,07€ suivie de 65 mensualités de 401,32€, la première échéance impayée se trouvant alors au 30 juillet 2020.
Ainsi, le tribunal d'instance de Montpellier ayant imposé les mesures recommandées par la commission le 23 juin 2016 par son jugement du 20 décembre 2016, le point de départ du délai de forclusion se situe à cette dernière date de telle sorte que le délai pour agir était reporté à deux ans suivant le premier incident de paiement non régularisé suivant cette date.
Un seul versement de 823,33€ en application de ces mesures imposées est intervenu le 11 avril 2017, régularisant l'échéance du 28 février 2017.
Le délai de forclusion a alors été interrompu par la nouvelle saisine de la commission de surendettement par M. [I] le 15 mai 2017. Son point de départ a ensuite été reporté au 16 avril 2018, date de la décision du tribunal d'instance confirmant les mesures imposées le 29 septembre 2017.
M. [I] a déposé un nouveau dossier le 27 août 2019, dans le nouveau délai de deux ans courant à compter du 16 avril 2018, interrompant à nouveau le délai de forclusion.
En assignant en paiement le 5 mai 2021, la société Creatis a donc agi dans le délai de l'article L. 311-52 du code de la consommation, interrompu à deux reprises et le jugement sera infirmé en ce qu'il l'a déclarée irrecevable en son action.
Sur la demande en paiement
Il résulte de l'offre acceptée le 4 septembre 2012, de la fiche d'informations précontractuelles dite FIPEN, de la fiche de dialogue et des pièces justificatives de solvabilité, de la consultation du FICP, de l'historique des mouvements enregistrés par le crédit, du décompte de créance au 12 avril 2021, de la mise en demeure en date du 8 décembre 2020 invitant M. [I] à régulariser l'arriéré de 418,50€ dans le délai raisonnable de 15 jours, suivie de la mise en demeure du 2 mars 2021 prononçant la déchéance du terme que la créance de la société Creatis est fondée tant dans son principe que dans son quantum, dans les proportions fixées au dispositif ci-dessous.
La demande de capitalisation des intérêts fondée sur un texte général se heurte aux dispositions spéciales des articles L311-23 et suivants du code de la consommation et sera rejetée.
Partie perdante, M. [I] supportera les dépens de première instance et d'appel avec distraction pour ceux-ci au profit de l'avocat qui en affirme son droit.
PAR CES MOTIFS
statuant par défaut
Infirme le jugement en toutes ses dispositions
Statuant à nouveau
Condamne M. [V] [I] à payer à la société Creatis la somme de 50979,91€ avec intérêts au taux contractuel de 9,09% l'an depuis le 02 mars 2021 sur 47203,62€ et au taux légal sur le solde de 3776,29€.
Déboute la société Creatis du surplus de ses demandes.
Condamne M. [V] [I] aux dépens de première instance et d'appel, distraits pour ces derniers au profit de l'avocat qui en affirme son droit à recouvrement.
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT