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25/04/2024 | FRANCE | N°21/06488

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 25 avril 2024, 21/06488


ARRÊT n°



































Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



4e chambre civile



ARRET DU 25 AVRIL 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/06488 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PGLV





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 21 octobre 2021

Tribunal judiciai

re de Perpignan - N° RG 20/00376





APPELANTE :



La société anonyme coopérative de banque populaire à capital variable Banque Populaire du Sud,

immatriculée au RCS de PERPIGNAN sous le

n°554 200 808, dont le siège est [Adresse 3] à [Localité 4], et pour elle son représentant légal en exercice y...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 25 AVRIL 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/06488 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PGLV

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 21 octobre 2021

Tribunal judiciaire de Perpignan - N° RG 20/00376

APPELANTE :

La société anonyme coopérative de banque populaire à capital variable Banque Populaire du Sud,

immatriculée au RCS de PERPIGNAN sous le

n°554 200 808, dont le siège est [Adresse 3] à [Localité 4], et pour elle son représentant légal en exercice y domicilié es qualité

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Marjorie AGIER, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Harald KNOEPFFLER de la SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE- KNOEPFFLER-HUOT-PIRET-JOUBES, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant et plaidant

INTIMEE :

Madame [E] [V]

née le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentée par Me David DUPETIT de la SCP GIPULO - DUPETIT - MURCIA, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant et plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Février 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie-José FRANCO, Conseillère, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Henriane MILOT

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Henriane MILOT, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant acte notarié en date du 23 avril 2004, la SCI Marijo a vendu aux époux [I] [K] et [E] [V] un bien immobilier sis à [Localité 5] (66).

Pour les besoins de cette acquisition, la société Banque Populaire du Sud (ci-après la Banque) a consenti à M. [K] et Mme [V], coemprunteurs, un prêt immobilier d'un montant de 129.500 euros remboursable en 240 mensualités au taux d'intérêt nominal de 5% l'an.

L'acte notarié portait mention de ce que la créance de la banque était garantie par:

- un privilège du prêteur de deniers sur l'immeuble objet de la vente

- une assurance décès-invalidité « D.I.T» 100% sur la tête de M.[K]

-une assurance « D.I.T» 100% sur la tête de Mme [V].

Le 14 juillet 2017, les époux [K]-[V] ont accepté un avenant au contrat de prêt portant sur la renégociation du taux d'intérêt modifié à 1,10%.

M. [K] est décédé le [Date décès 2] 2018.

Le 7 août 2019 la Banque a écrit au notaire chargé du règlement de la succession de M. [K], pour lui indiquer que ce dernier n'était plus assuré auprès de la compagnie d'assurance MMA faute de paiement des cotisations depuis le 9 mars 2009.

Par le même courrier, la Banque a proposé de rembourser les cotisations indûment perçues par ses soins à hauteur de 8.294,48 euros au titre de l'assurance.

Le 13 décembre 2019, par lettre recommandée avec avis de réception, le conseil de Mme [V] a adressé à la Banque le contrat d'assurance groupe souscrit auprès de la compagnie d'assurance Axa pour couvrir notamment le risque décès moyennant un prélèvement mensuel de 90,66 euros correspondant aux cotisations d'assurance des deux emprunteurs et mis en demeure la banque de régler les échéances de remboursement du prêt.

Le 18 décembre 2019, la société Banque Populaire du sud a mis en demeure les héritiers de M. [K] d'avoir à régulariser les échéances impayées.

C'est dans ce contexte que par acte en date du 4 février 2020, Mme [V] a fait assigner la Banque populaire du sud en responsabilité et réparation de ses préjudices.

Par jugement contradictoire, rendu sous le bénéfice de l'exécution provisoire, en date du 21 octobre 2021, le tribunal judiciaire de Perpignan a :

- Dis que la responsabilité contractuelle de la société Banque populaire du sud est engagée à l'égard de [E] [V];

- Condamné la société Banque populaire du sud à payer à [E] [V] la somme de 30.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- Débouté [E] [V] de sa demande indemnitaire au titre du préjudice de jouissance ;

- Rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

- Condamné la société Banque populaire du sud à payer à [E] [V] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné la société Banque populaire du sud aux dépens.

Le 8 novembre 2021, la Banque populaire du sud a relevé appel de ce jugement.

PRÉTENTIONS

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 18 juillet 2022, la Banque populaire du sud demande en substance à la cour de réformer le jugement en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau, de :

- Débouter Mme [V] de l'intégralité de ses demandes ;

- Subsidiairement, fixer l'indemnisation de Mme [V] à hauteur de 4.857,70 euros.

- Débouter Mme [V] du surplus de ses demandes;

- En tout état de cause, condamner Mme [V] à payer à la Banque populaire du sud la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

- Condamner sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, le requis à rembourser à la requérante toutes sommes qui pourraient être mises à sa charge en application du décret n°2001-212 du 8 mars 2001 portant fixation du tarif des Huissiers de justice en matière civile et commerciale et relatif à la détermination du droit proportionnel de recouvrement et d'encaissement mis à la charge des créanciers.

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 28 avril 2022, Mme [V] demande en substance à la cour de confirmer le jugement notamment en ce qu'il a reconnu la faute de la Banque populaire du sud à son égard, et en conséquence, de :

- Juger recevable son appel incident limité au chef de jugement concernant le montant de l'indemnité mise à la charge de la Banque populaire du sud en réparation du préjudice causé. Réformer le jugement dont appel sur ce point ;

- Condamner la Banque populaire du Sud à lui payer la somme de 48.841,66 euros à titre de dommages et intérêts outre intérêts au taux légal depuis le 11 décembre 2019, date de la mise en demeure ;

- condamner la Banque populaire à payer à Mme [V] une indemnité complémentaire de 800 euros par mois depuis novembre 2018 au titre de l'indemnisation préjudice de jouissance lié à l'impossibilité d'usage du bien immobilier.

- Condamner la Banque populaire du sud à payer à Mme [V] une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens d'instance.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 22 janvier 2024.

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

- Sur l'obligation de conseil et d'information du banquier

Il est de jurisprudence établie que pèse sur le banquier sur le fondement des dispositions de l'article 1147 du code civil ancien applicable à l'espèce une obligation d'information et de mise en garde de l'emprunteur lorsqu'il consent à ce dernier un prêt sous la condition qu'il soit assorti d'une assurance destinée à garantir, en cas de survenance de divers risques, l'exécution de tout ou partie de ses engagements.

Il doit notamment informer les co-emprunteurs sur les risques inhérents au fait que l'un d'eux ne bénéficie pas de la garantie (C.Cass 1ère Civ 15 mars 2017 n°16-12979) et doit répondre du fait qu'il a créé dans l'esprit des emprunteurs l'illusion que l'un et l'autre étaient couverts ( C.Cass. 1ère 28 janvier 1992 n°89-14075).

Au cas d'espèce, il est acquis que l'acte notarié de prêt souscrit par les époux [K] - [V] auprès de la Banque Populaire du Sud le 23 avril 2004 d'un montant de 129500 euros rappelait à l'article 2 que la créance de la banque était garantie outre par le privilège du prêteur de deniers sur l'immeuble objet de la vente, par une assurance décès et incapacité de travail 100% couvrant chacun des co-emprunteurs moyennant une cotisation mensuelle de 90,66 euros, l'article 3 de l'acte précisant que la mise à disposition des fonds était subordonnée à la réalisation des conditions visées à l'article précédent et qu'il n'est pas contesté par la banque que cette cotisation d'assurance a été régulièrement payée par les emprunteurs en même temps que l'échéance de remboursement du prêt de sorte que c'est un montant total de 8294,48 euros qui a été réglé par ces derniers au titre de cette assurance.

La Banque soutient qu'en dépit de ces éléments de nature à convaincre les co-emprunteurs qu'ils bénéficiaient bien d'une assurance, ils auraient en réalité été parfaitement informés avant même la signature de l'offre de prêt de l'impossibilité pour M.[K] de bénéficier de l'assurance -groupe.

La banque ne rapporte cependant pas la preuve de ce que le courrier qu'elle produit au soutien de cette assertion et que lui a adressé le 8 avril 2004 la société Neptune Prévoyance par lequel cette assurance lui indique que l'admission à l'assurance de M.[K] a été refusée pour raisons médicales, a été porté à la connaissance des emprunteurs.

La banque invoque également le fait que M. [K] ne pouvait ignorer avoir souscrit à la suite du refus opposé par Neptune Assurance un contrat décès - invalidité auprès de la société Agir avec effet au 25 juin 2004, contrat qui aurait été résilié le 9 mars 2009 pour défaut de paiement des cotisations.

Mais outre qu'elle n'établit pas que ce contrat a bien été souscrit par M. [K], se bornant à produire un exemplaire d'un contrat non signé par ce dernier, le ferait-elle, elle échoue à démontrer que Mme [V] a été informée de la souscription de cette police et surtout de sa résiliation le 16 décembre 2008, la banque se bornant à produire un courrier que lui a adressé MMA le 9 mars 2009 dont elle ne justifie pas qu'il a été également adressé aux emprunteurs, et ces derniers n'ayant pas davantage été informés de l'absence de garantie du risque décès de M. [K] lors de la signature le 5 juillet 2017 de l'avenant au contrat de prêt portant renégociation du taux d'intérêt alors même que cet avenant mentionnait encore dans le tableau d'amortissement une cotisation d'assurance d'un montant inchangé de 90,66 euros et précisait que cet avenant n'entraînait pas novation au contrat principal et que toutes les autres clauses et conditions contenues dans l'acte initial étaient maintenues.

Et la banque ne peut sérieusement soutenir n'avoir commis aucune faute lors de la signature de cet avenant au motif que « si elle avait été informée du défaut d'assurance de M. [K], elle aurait alors refusé la signature de cet avenant à de meilleures conditions financières pour Mme [V]...» alors qu'elle invoque dans ces mêmes écritures, courrier à l'appui (sa pièce N° 4), que le contrat MMA de M. [K] a été résilié le 16 décembre 2008.

Il résulte de l'ensemble de ces considérations que conformément à ce que jugé à bon droit par le tribunal judiciaire de Perpignan, la banque a manqué à son obligation d'information, de conseil et de mise en garde relativement au défaut d'assurance de M. [K] et de ses conséquences, tant au stade de la conclusion du contrat de prêt en omettant d'informer les co-emprunteurs que M. [K] ne pouvait bénéficier de l'assurance décès-invalidité du groupe Banque Populaire du Sud, qu'au cours de son exécution en n'informant pas Mme [V] de la résiliation du contrat d'assurance relatif à son conjoint à le supposer réellement souscrit auprès de la société MMA, ni au mois de mars 2009, ni lors de la signature de l'avenant en 2017.

C'est également à bon droit que le premier juge a considéré que Mme [V] a subi un préjudice en lien avec ces fautes dès lors qu'au décès de M. [K] survenu le [Date décès 2] 2018, elle n'a pu faire face seule au remboursement du prêt ni bénéficier de l'assurance-décès, préjudice qui s'analyse en sa perte d'une chance de bénéficier de la prise en charge du capital restant dû au jour du décès qui s'élevait à 48577 euros et que le premier juge a justement évalué à hauteur de 30000 euros de sorte que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné la Banque Populaire du sud à payer cette somme à Mme [V].

La cour confirmera également le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande indemnitaire fondée sur le trouble de jouissance du bien immobilier indivis au motif que les héritiers n'ont pu prendre partie sur leur option successorale en retenant comme le premier juge que Mme [V] ne justifie pas de la réalité de cette privation de jouissance du bien indivis .

Partie succombante, la Banque Populaire du sud sera condamnée aux dépens d'appel par application de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS:

Statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la Banque Populaire du sud aux dépens d'appel.

La condamne à payer à Mme [E] [V] la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/06488
Date de la décision : 25/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-25;21.06488 ?
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