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25/04/2024 | FRANCE | N°21/04991

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 25 avril 2024, 21/04991


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à





























COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



4e chambre civile



ARRET DU 25 AVRIL 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/04991 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PDQE



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 18 janvie

r 2021

Tribunal judiciaire de NARBONNE - N° RG 11-19-000347





APPELANTE :



Madame [J] [P] veuve [V]

née le 19 Février 1947 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Pascal CLEMENT de la SELARL CLEMENT MALBEC CONQUET, avocat au barreau de NARBONNE, avocat postulant et...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 25 AVRIL 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/04991 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PDQE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 18 janvier 2021

Tribunal judiciaire de NARBONNE - N° RG 11-19-000347

APPELANTE :

Madame [J] [P] veuve [V]

née le 19 Février 1947 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Pascal CLEMENT de la SELARL CLEMENT MALBEC CONQUET, avocat au barreau de NARBONNE, avocat postulant et plaidant

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/011418 du 08/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

INTIMEE :

S.A.S. Les Bons Artisans Société par Actions Simplifiée, immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 753 805 035, prise en la personne de son représentant légal en exercice

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Muriel MIGNOT, avocat au barreau de NARBONNE, avocat postulant et plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 février 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Charlotte MONMOUSSEAU

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Charlotte MONMOUSSEAU, Greffière.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

La société Les Bons Artisans a établi le 12 mars 2018 à la demande de Mme [V] qui déplorait une fuite d'eau, un devis d'un montant de 1 277,38 euros.

Le 28 mars 2018, elle est intervenue au domicile de Mme [V] qui a remis à l'intervenant un chèque d'un montant de 1165,25 euros. Ce chèque étant revenu impayé, la société Les Bons Artisans a fait délivrer un commandement de payer à Mme [V] laquelle a fait assigner la société par acte en date du 9 mai 2019, aux fins d'obtenir la nullité du devis et l'indemnisation de son préjudice économique et moral.

Par jugement contradictoire en date du 18 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Narbonne a :

- rejeté toutes les demandes de Mme [V],

- condamné Mme [V] à payer à la société Les Bons Artisans les sommes de :

$gt; 1 165,25 euros en règlement de la prestation effectuée,

$gt; 311,04 euros en réparation des sommes inutilement engagées pour le recouvrement de la créance,

- rejeté la demande en dommages-intérêts pour procédure abusive formée par la Sas Les Bons Artisans,

- condamné Mme [V] à payer à la société Les Bons Artisans la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens qui seront liquidés selon les règles applicables à l'aide juridictionnelle.

Mme [V] a relevé appel de ce jugement le 3 août 2021.

PRÉTENTIONS

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 22 février 2022, Mme [V] demande en substance à la cour d'infirmer le jugement et de :

- Juger nul le devis ainsi que tout engagement contractuel à l'égard de la société Les Bons Artisans ;

- Condamner la société Les Bons Artisans à :

$gt; la restitution de l'intégralité des sommes qu'elle a versées à la société Les Bons Artisans au titre de l'exécution du jugement dont appel,

$gt; au paiement de dommages et intérêts au titre du préjudice économique et notamment pour avoir été inscrite au fichier des incidents de paiement, à hauteur de 1500 euros et au titre du préjudice moral à hauteur de 1500 euros,

- Subsidiairement, dire que la société Les Bons Artisans a commis une faute et la condamner au paiement de dommages et intérêts au titre du préjudice économique et notamment d'être inscrite au fichier des incidents de paiement à hauteur de 1500 euros et au titre du préjudice moral à hauteur de 1500 euros,

- En toute hypothèse, condamner la société Les Bons Artisans au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens et rejeter son appel incident.

Par uniques conclusions remises par voie électronique le 8 décembre 2021, la société Les Bons Artisans demande en substance à la cour de débouter Mme [V] de l'ensemble de ses demandes, confirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à lui régler les sommes de 1161,25 euros et 311,04 euros, l'infirmer pour le restant et, statuant à nouveau, de la condamner aux sommes suivantes :

$gt; 1 000 euros de dommages intérêts pour procédure abusive en raison du préjudice d'image,

$gt; 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 30 janvier 2024.

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS :

- sur les demandes principales :

$gt; sur la nullité du devis

Mme [V] poursuit à titre principal en cause d'appel le moyen écarté par le premier juge tiré de la nullité du devis fondée sur les dispositions des articles L111-1 et L111-2 du code de la consommation, soutenant en tout état de cause ne pas l'avoir accepté ou ne l'avoir accepté que sous la contrainte tenant l'urgence de la situation.

L'intimée lui oppose la parfaite validité du devis qui contient l'ensemble des mentions prétendument omises telles la dénomination et le siège social de l'entreprise ainsi que les conditions générales de vente, fait valoir que ce devis n'est nullement un catalogue de services ainsi que soutenu par l'appelante, ses mentions étant destinées à permettre au technicien, une fois sur place, d'être seul juge des moyens adaptés à mettre en place afin de remédier aux désordres.

Elle fait valoir en outre que l'acceptation du client n'a pas nécessairement à se traduire par la signature du devis et qu'en l'espèce, Mme [V] a accepté le devis par message texte du 27 mars 2018 ajoutant qu'il a également été convenu qu'elle règlerait la prestation dès son achèvement sans acompte préalable compte tenu de l'urgence de la situation.

L'article L111-1 2° du code de la consommation dispose qu'avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, entre autres informations, celle relative au prix du bien ou du service, en application des articles L112-1 à L112-4 dudit code.

Aux termes de l'article L112-1, tout vendeur de produit ou tout prestataire de services informe le consommateur, par voie de marquage, d'étiquetage, d'affichage ou par tout autre procédé approprié, sur les prix et les conditions particulières de la vente et de l'exécution des services, selon des modalités fixées par arrêtés du ministre chargé de l'économie, après consultation du Conseil national de la consommation.

L'arrêté du 24 janvier 2017 pris en application des dispositions sus-visées entré en vigueur le 1er avril 2017 et relatif à la publicité des prix des prestations de dépannage, de réparation et d'entretien dans le secteur du bâtiment et de l'équipement de la maison, et applicable notamment aux travaux de plomberie dispose en son article 4 II :

« Lorsque le contrat est conclu hors établissement au sens de l'article L. 221-1, le devis détaillé revêt la forme du contrat déterminé aux articles L. 221-5 et L. 221-9 du code de la consommation.

Pour l'application de l'article L. 111-1 (2°) relatif à l'information sur les prix, il comporte :

- le décompte détaillé, en quantité et en prix de chaque prestation, en particulier le taux horaire de main d''uvre et le temps estimé ou, le cas échéant, le montant forfaitaire de chaque prestation ;

- la dénomination des produits et matériels nécessaires à l'opération prévue et leur prix unitaire ainsi que, le cas échéant la désignation de l'unité à laquelle il s'applique et la quantité prévue;

- le cas échéant, les frais de déplacement.»

Or, le devis litigieux ainsi rédigé-

« Techniques d'investigation susceptibles d'être

utilisées à l'initiative du technicien 896,25€ HT

1-Mise en pression des circuits (azote

hydrogéné)

2- Exploration vidéo. Inspection, par une

caméra endoscopique

3- Détection acoustique

4- Insufflation d'azote hydrogéné

5- détection visuelle des infiltrations aux

points de fuite par un liquide de couleur

6- mesures des taux d'humidité.

7- Thermographie

8- Traçage électromagnétique

Intervention pour une durée maximum de 3h 265€ HT

Mise en place des techniques d'investigation

de recherche de fuite non destructive.

La société Edison Services garantit à ses

clients la compétence de ses techniciens et la

performance de ses outils.

Le technicien est seul juge des moyens à

mettre en oeuvre. Nous n'avons pas d'obligation de résultat.

Faute de résultat probant, nous pouvons

émettre des hypothèses et des suppositions sans que

celles-ci puissent être retournées contre nous »-

- ne détaille ni le coût unitaire de chacune des prestations susceptibles d'être utilisée, ni celui des matériaux et produits utilisés, alors qu'à l'évidence le coût d'une simple détection visuelle ne saurait équivaloir celui de l'insufflation d'azote hydrogéné.

Ce devis ne précise pas davantage le temps estimé de chacune des interventions susceptibles d'être employées, ni le taux horaire de main-d'oeuvre, ni le coût des frais de déplacement.

Et surtout, il ne constitue pas réellement un devis, à savoir une estimation détaillée et suffisamment précise des travaux à réaliser pour répondre aux besoins du client et au contexte spécifique des désordres à réparer, mais consiste en une information générale des tarifs pratiqués par la société, de sorte qu'il ne répond pas aux exigences des dispositions sus-visées destinées à informer précisément le consommateur avant qu'il ne contracte sur le prix de la prestation, et lui permettre de comparer ensuite utilement la facture présentée par le professionnel au titre des travaux effectivement réalisés avec l'estimation préalable de leur coût.

Il sera surabondamment observé que si, comme l'indique la société, il appartient au technicien une fois sur place de décider du moyen le plus adapté pour répondre aux désordres, rien n'interdisait en l'espèce au technicien intervenu au domicile de Mme [V] de lui préciser davantage à quelles techniques il allait devoir recourir, d'en préciser leur coût ou du moins son mode de calcul, dès lors qu'il ressort du rapport d'intervention produit par la société que la nature des travaux à réaliser, et de fait effectivement réalisés, à savoir le débouchage manuel par extraction de cheveux, a pu être déterminée dès un simple examen visuel.

Il résulte de ces considérations que la décision du premier juge ayant estimé que le devis satisfaisait à l'exigence de l'article L111-1 relative à l'information du prix du service sera infirmée, et que la cour, statuant à nouveau, prononcera la nullité du devis du 12 mars 2018 et, par suite, du contrat formé par son acceptation et déboutera la société Les Bons Artisans de ses demandes en paiement au titre de la prestation et des frais de recouvrement, décision qui emportera l'obligation pour la société de restituer à Mme [V] l'intégralité des sommes qui lui ont été versées par celle-ci au titre de l'exécution du jugement déféré.

Par suite, seront également infirmées les dispositions du jugement déféré ayant condamné Mme [V] aux dépens et à payer à la société Les Bons Artisans la somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles.

$gt; sur les demandes indemnitaires :

Mme [V] ne justifiant ni de la réalité de son inscription au fichier des incidents de paiements, ni d'un rapport de causal direct entre cette éventuelle inscription avec la nullité du contrat conclu avec l'intimée, sera déboutée de sa demande indemnitaire au titre d'un préjudice économique.

La cour la déboutera également de sa demande indemnitaire fondée sur un préjudice moral qu'elle fonde sur le fait pour la société de lui avoir demandé de procéder au règlement immédiat du coût de la prestation, ce fait n'étant pas celui retenu par la cour pour prononcer la nullité du contrat.

Le jugement déféré sera en conséquence confirmé de ces chefs.

- sur la demande indemnitaire reconventionnelle :

L'intimée sera nécessairement déboutée de sa demande indemnitaire formée au titre du caractère prétendument abusif de la procédure engagée par Mme [V] dès lors qu'il a été fait droit aux demandes de celle-ci.

Partie succombante en cause d'appel, la société Les Bons Artisans sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel par application de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- condamné Mme [V] à payer à la société Les Bons Artisans les sommes de 1165,25 euros et de 311,04 euros.

- condamné Mme [V] aux dépens et à payer à la société Les Bons Artisans la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant,

Prononce la nullité du devis établi le 12 mars 2018 et du contrat liant les parties,

Déboute la société Les Bons Artisans de ses demandes principales en paiement,

La condamne à restituer à Mme [V] les sommes versées par elle en exécution du jugement déféré,

Condamne la société Les Bons Artisans aux dépens de première instance,

Dit n'y avoir lieu à condamnation de Mme [V] au titre des frais irrépétibles de première instance.

Confirme le jugement pour le surplus.

Condamne la société Les Bons Artisans aux dépens d'appel.

La condamne à payer à Mme [V] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/04991
Date de la décision : 25/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-25;21.04991 ?
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