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04/04/2024 | FRANCE | N°21/06552

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 04 avril 2024, 21/06552


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à





























COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



4e chambre civile



ARRET DU 04 AVRIL 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/06552 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PGPO



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 21 octobr

e 2021

Tribunal judiciaire de PERPIGNAN - N° RG 19/01144





APPELANTE :



Mademoiselle [Y] [N]

née le 23 Novembre 1990 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Alice JACOUTOT substituant Me Rémy SAGARD de la SCP SAGARD - CODERCH-HERRE ET ASSOCIES, avocats au barreau d...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 04 AVRIL 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/06552 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PGPO

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 21 octobre 2021

Tribunal judiciaire de PERPIGNAN - N° RG 19/01144

APPELANTE :

Mademoiselle [Y] [N]

née le 23 Novembre 1990 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Alice JACOUTOT substituant Me Rémy SAGARD de la SCP SAGARD - CODERCH-HERRE ET ASSOCIES, avocats au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant et plaidant

INTIMES :

Madame [O] [F] épouse [K]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Virginie MATAS-GUILLOUF, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant et plaidant

Maître [S] [E] notaire associé de la SCP Sarda-Spiteri-Xabe-Poirier-[E]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représenté par Me Marjorie AGIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituant Me Raymond ESCALE de la SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE- KNOEPFFLER-HUOT- PIRET-JOUBES, avocat au barreau de PYRENEES- ORIENTALES, avocat postulant et plaidant

S.C.P. Sarda-Spiteri-Xabe-Poirier-[E] - la Société Civile Professionnelle Sarda-Spiteri-Xabe-Poirier-[E] sise à [Adresse 6] et pour elle son représentant légal en exercice domicilié es qualité audit siège social

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentée par Me Marjorie AGIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituant Me Raymond ESCALE de la SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE- KNOEPFFLER-HUOT- PIRET-JOUBES, avocat au barreau de PYRENEES- ORIENTALES, avocat postulant et plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 février 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Charlotte MONMOUSSEAU

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Charlotte MONMOUSSEAU, Greffière.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant acte reçu par Maître [S] [E], notaire, le 25 avril 2018, Mme [F], exerçant la profession de sage-femme, a cédé à Mme [Y] [N] sa patientèle dépendant de son établissement situé à [Localité 7] incluant le droit de présentation de la clientèle, le matériel et le mobilier servant à l'exploitation du cabinet moyennant une indemnité de 25 000 euros s'appliquant :

$gt; aux éléments incorporels pour 22 062,59 euros,

$gt; au matériel pour 2 937,41 euros.

Par lettre recommandée datée du 4 octobre 2018, Mme [N] a sollicité auprès de Mme [F] l'annulation de la vente aux motifs notamment que le prix de cession a été calculé en fonction d'un chiffre d'affaires réalisé sur les deux cabinets de [Localité 7] et [Localité 5], ce qu'elle ignorait.

Par acte en date du 1er avril 2019, Mme [N] a fait assigner Mme [F] devant le tribunal de grande instance de Perpignan pour voir prononcer la nullité de la vente, sur le fondement du dol.

Par actes en date du 17 décembre 2019, Mme [F] a fait assigner en intervention forcée Maître [E] et la société civile professionnelle (Scp) de notaires Sarda - Spiteri - Xabe - Poirier - [E] devant le même tribunal afin, dans le cas où l'annulation de l'acte de cession de 25 avril 2018 serait prononcée, de les déclarer solidairement responsables sur le fondement de l'article 1240 du code civil des conséquences dommageables qu'elle a subis du fait de leurs manquements professionnels.

Par jugement contradictoire en date du 21 octobre 2021, le tribunal judiciaire de Perpignan a :

- débouté Mme [N] de l'intégralité de ses prétentions à l'encontre de Mme [F] ;

- dit que l'appel en garantie par Mme [F] de Maître [S] [E] et de la Scp Sarda - Spiteri - Xabe - Poirier - [E] est devenu sans objet ;

- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

- condamné Mme [N] à payer à Mme [F] la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [N] à payer à Maître [E] et la Scp Sarda - Spiteri - Xabe - Poirier - [E] la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamné Mme [N] aux entiers dépens.

Mme [N] a relevé appel de ce jugement le 10 novembre 2021.

PRÉTENTIONS

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 30 octobre 2023, Mme [N] demande en substance à la cour d'infirmer le jugement et, statuant à nouveau, de :

- Juger que Mme [F] a commis un dol à son détriment ayant vicié son consentement.

- Prononcé l'annulation de l'acte de cession du 25 avril 2018.

- Condamner Mme [F] à lui payer les sommes suivantes :

$gt; 25 000 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 25 avril 2018, au titre de l'indemnité versée en contrepartie de la cession ;

$gt; 1 160 euros correspondant aux frais d'acte notarié ;

$gt; 406,76 euros au titre de l'indemnité de remboursement anticipé, outre 50 euros au titre de frais de dossier, soit 456,76 euros ;

$gt; 1 256,97 euros au titre des intérêts d'emprunt payés jusqu'au remboursement ;

$gt; 840 euros correspondant aux frais de dossier pour la souscription de la police d'assurance ;

$gt; 5 000 euros en indemnisation de son préjudice moral.

- Donner acte que Mme [N] tient à la disposition de Mme [F] le mobilier cédé.

- Condamner Mme [F] à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance, et 2 500 euros pour l'instance d'appel, outre le paiement des entiers dépens, dont distraction au profit des avocats de la cause.

Par uniques conclusions remises par voie électronique le 22 mars 2022, Mme [F] demande en substance à la cour de confirmer le jugement et de condamner Mme [N] à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance et 2 500 euros pour l'instance en appel, outre le paiement des entiers dépens incluant le timbre fiscal de 225 euros ; subsidiairement, dans l'hypothèse où la cour d'appel réformerait le jugement, déclarer Maître [S] [E] et la Scp solidairement responsables des conséquences dommageables qu'elle a subies du fait de leurs manquements professionnels et les condamner solidairement à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance et 2 500 euros pour l'instance en appel, outre le paiement des entiers dépens en ce compris le timbre fiscal.

Par uniques conclusions remises par voie électronique 18 mars 2022, Maître [E] et la Scp Sarda - Spiteri - Xabe - Poirier - [E] entendent voir confirmer le jugement et débouter les parties des demandes dirigées à leur encontre et condamner tout succombant à verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en ce qui concerne les frais irrépétibles d'appel, outre le paiement des entiers dépens de première instance et d'appel.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 17 janvier 2024,

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS :

Mme [N] fonde son action en nullité du contrat de cession de patientèle sur le dol.

L'article 1137 du code civil dispose que : « le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manoeuvres ou des mensonges. Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie. Néanmoins ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation. »

Par application de l'article 1353 du code civil, il appartient au contractant qui invoque le dol de rapporter la preuve de ce qu'il est caractérisé.

Le manquement à une obligation pré-contractuelle d'information, à le supposer établi, ne peut suffire à caractériser un dol par réticence, si ne s'y ajoute la constatation du caractère intentionnel de ce manquement et d'une erreur déterminante provoquée par celui-ci (Cass. com., 28 juin 2005, n° 03-16.794).

En l'espèce, Mme [N] soutient en substance que l'évaluation du prix de cession du cabinet sis à [Localité 7] lui a été présentée par sa venderesse comme étant basée sur un chiffre d'affaires moyen de 55 574 euros lequel correspondait en réalité aux deux cabinets, celui objet de la cession et celui sis à [Localité 5], dont l'exploitation a été conservée par Mme [F] ce que cette dernière s'est gardée de lui préciser, s'abstenant de lui communiquer également les bilans et les trois derniers exercices comptables contrairement à ce qu'elle affirme, ajoutant que ce chiffre d'affaires était de surcroît réalisé en grande partie grâce à des activités non conventionnées telle que l'homéopathie pratiquée par Mme [F]. Elle précise que contrairement aux énonciations du jugement entrepris, elle était bien novice dans la profession et s'installait pour la première fois à son compte.

Mme [F] soutient que le dol n'est pas établi, qu'était annexé à l'acte de cession un document établi par les parties aux termes duquel les chiffres d'affaires réalisés au titre des années 2015, 2016 et 2017 et la liste du matériel étaient précisés ; qu'il a été pratiqué pour fixer le prix de cession une décôte de plus de la moitié du chiffre d'affaire, ajoute que Mme [N] était bien en possession des derniers bilans en dépit du fait que le notaire ne les a pas annexés à l'acte, que Mme [N] était d'autant plus informée de ce que le chiffre d'affaires était commun aux deux cabinets qu'elle avait effectué des remplacements pour le compte de sa consoeur au cabinet d'[Localité 5] courant janvier 2018 et conclu avec celle-ci un contrat de collaboration libérale précisant bien que Mme [F] exerçait son activité depuis le cabinet principal de [Localité 7] et un cabinet secondaire sis à [Localité 5].

Il sera observé à titre liminaire que le contrat de cession contient une clause intitulée « conclusion du contrat » aux termes de laquelle les parties déclarent que les dispositions de ce contrat ont été, en respect des dispositions impératives de l'article 1104 du code civil, négociées de bonne foi et qu'en application de celles de l'article 1112-1 du même code, toutes les informations connues de l'une dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre ont été révélées. Elles affirment que le présent contrat reflète l'équilibre voulu par chacune d'elles.

Ainsi que relevé à bon droit par le premier juge, Mme [N] échoue à démontrer d'une part qu'elle ignorait que le chiffre d'affaire moyen de 55 574 euros recouvrait les deux cabinets alors qu'elle était informée de l'existence d'un deuxième cabinet dont la cédante conservait la gestion ainsi que stipulé dans l'acte, et qu'avant que de conclure, la cessionnaire avait effectué des remplacements de sa consoeur ainsi qu'en attestent le courrier adressé à Mme [N] par l'ordre des sages-femmes le 3 avril 2018 faisant état d'un remplacement de Mme [F] le 4 avril 2018 ce courrier ne visant pas exclusivement le cabinet objet de la cession, et surtout le contrat de collaboration conclu entre les parties le 4 avril 2018 par lequel notamment Mme [F] s'engageait à apporter à Mme [N] conseils et informations tant sur le plan de sa pratique professionnelle, que sur la gestion du cabinet.

Ce contrat de collaboration précisait en son article 5 que Mme [F] exerçait son activité depuis le cabinet principal de [Localité 7] objet de la cession, et un cabinet secondaire sis à [Localité 5], et indiquait en outre que Mme [F] permettait et facilitait à Mme [N] l'accès aux dossiers de ses patientes que cette dernière était amenée à suivre, disposition qui informait clairement Mme [N] de l'existence de deux cabinets et qui aurait pu la conduire à affiner ses informations relativement au volume de la patientèle du cabinet qu'elle projetait d'acquérir.

Il était en effet tout à fait loisible à Mme [N] de mettre à profit cette période de collaboration pour affiner sa connaissance du volume d'activité du cabinet qu'elle projetait d'acquérir et solliciter en particulier tous les bilans comptables propres à ce cabinet, notamment celui de 2017, étant observé qu'elle n'allègue pas les avoir sollicités en se heurtant à un refus de Mme [F].

Son affirmation selon laquelle elle ignorait que le chiffre d'affaires annoncé était en partie le fruit d'activités non conventionnées pratiquées par Mme [F] ce que celle-ci lui aurait caché, telle l'homéopathie, ne résiste pas aux éléments qu'elle verse elle-même aux débats en pièce n° 3 s'agissant d'une information trouvée par elle sur le site internet de sa consoeur mentionnant précisément qu'elle pratiquait l'homéopathie.

La cour observe également que Mme [N] a mis un terme à l'exploitation du cabinet objet de la cession pour exercer sa pratique en qualité de salariée au bout de cinq mois seulement, et que cette courte période d'exploitation du cabinet cédé ne lui a pas permis de comparer utilement le chiffre d'affaires réalisée par elle à celui annuel réalisée précédemment par sa consoeur, la nature même de cette activité professionnelle nécessitant un temps d'exercice plus long que d'autres pour se faire connaître et apprécié de sa patientèle.

Enfin, outre qu'elle échoue à démontrer la réalité de manoeuvres ou réticences intentionnelles, elle ne rapporte pas davantage la preuve de ce que les renseignements prétendument éludés l'auraient conduite à refuser de contracter s'agissant notamment du prix d'acquisition.

Mme [N] étant déboutée de l'intégralité de des demandes, son appel en garantie de la Scp de notaires est devenu sans objet.

Il suit de ces considérations, que le jugement entrepris confirmé en toutes ses dispositions.

Partie succombante, Mme [N] sera condamnée aux dépens d'appel par application de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Condamne Mme [N] aux dépens d'appel.

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/06552
Date de la décision : 04/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-04;21.06552 ?
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