La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/04/2024 | FRANCE | N°21/06168

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 04 avril 2024, 21/06168


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



4e chambre civile



ARRET DU 04 AVRIL 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/06168 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PFYH



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 1

3 septembre 2021

Tribunal judiciaire de PERPIGNAN - N° RG 18/00558





APPELANTE :



S.A.S Abrisud, SAS au capital de 9 775 760 euros immatriculée au RCS d'Auch sous le numéro 397 909 938 prise en la personne de son représentant légal en exercice

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représentée par Me Fanny LAPORTE substituant Me Y...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 04 AVRIL 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/06168 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PFYH

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 13 septembre 2021

Tribunal judiciaire de PERPIGNAN - N° RG 18/00558

APPELANTE :

S.A.S Abrisud, SAS au capital de 9 775 760 euros immatriculée au RCS d'Auch sous le numéro 397 909 938 prise en la personne de son représentant légal en exercice

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représentée par Me Fanny LAPORTE substituant Me Yann GARRIGUE de la SELARL LX MONTPELLIER, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant, et Me Willy BITEAU, avocat au barreau de CARCASSONNE, avocat plaidant

INTIMEES :

Madame [H] [D]

née le 03 Septembre 1952 à [Localité 3]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentée par Me Nathalie PINHEIRO de la SCP LAFONT ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

Compagnie d'assurance Mutuelle Assurance des Travailleurs Mutualistes (Matmut) en qualité d'assureur de Madame [D]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Nathalie PINHEIRO de la SCP LAFONT ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 février 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Charlotte MONMOUSSEAU

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Charlotte MONMOUSSEAU, Greffière.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

Le 18 juin 2012, la société Abrisud a livré et posé chez Mme [H] [D] un abri de piscine motorisé moyennant le versement de la somme de 16 140 euros.

Le 3 février 2013, l'abri a été arraché par le vent.

Par courriers adressés à la société Abrisud les 24 avril 2013 et 28 janvier 2015, Mme [D] a mis en demeure la société Abrisud de l'indemniser de ses préjudices.

L'assureur de la société Abrisud, la société Generali, a accepté d'indemniser les conséquences dommageables causées aux barrières de sécurité de la piscine soit 1 080 euros mais pas les dégradations de l'abri.

Une expertise contradictoire amiable a été effectuée le 22 avril 2013.

Le 2 février 2018, Mme [D] et son assureur, la Matmut, ont fait assigner la société Abrisud et la société Generali Iard en vue d'être indemnisés.

Par jugement contradictoire rendu le 13 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Perpignan a :

- déclaré recevable l'action en justice engagée par Mme [D] et la société Matmut.

- dit que la société Abrisud est entièrement responsable du préjudice causé à Mme [D] par le sinistre ayant affecté son abri de piscine le 3 février 2013.

- condamné la société Abrisud à verser à Mme [D] :

$gt; 2 990 euros en indemnisation de son préjudice matériel résiduel, in solidum avec la société Generali Iard, cette dernière n'étant tenue qu'à hauteur de 1 080 euros,

$gt; 800 euros en indemnisation de son préjudice de jouissance.

- condamné la société Abrisud à verser à la société Matmut, subrogée dans les droits de Mme [D], une somme de 15 674 euros ;

- condamné la société Generali Iard à relever et garantir la société Abrisud de sa condamnation à indemniser le préjudice matériel subi par Mme [D] et ce, dans la limite de 1 080 euros ;

-ordonné l'exécution provisoire des précédents chefs de dispositif;

- condamné in solidum la société Abrisud et la société Generali Iard à payer à Mme [D] et la société Matmut une somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l'instance.

- débouté Mme [D], la société Matmut, la société Abrisud et la société Generali Iard de toute autre demande.

La société Abrisud a relevé appel de ce jugement le 20 octobre 2021.

PRÉTENTIONS

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 21 décembre 2023, la société Abrisud demande en substance à la cour d'infirmer le jugement et, statuant à nouveau, de :

- Juger irrecevables comme prescrites les demandes formulées par Mme [D] et la société Matmut et les débouter de l'ensemble de leurs demandes fins et conclusions.

- Subsidiairement, les débouter de toute demande dont le montant excéderait les sommes de 4 842 euros au titre du préjudice lié à la dégradation de l'abri de piscine en litige et 103,63 euros au titre de la clôture détériorée.

- Ordonner en tout état de cause que le montant des éventuelles condamnations sera limité à de plus justes proportions que celles qui ont été retenues par le tribunal judiciaire de Perpignan ou sollicitées par les intimées.

- Les condamner in solidum, en tout état de cause, à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de ses frais irrépétibles, outre le paiement des dépens de première instance et d'appel.

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 12 décembre 2023, Mme [D] et son assureur, la compagnie d'assurance Matmut, demandent en substance à la cour de confirmer le jugement et, y ajoutant, de condamner la société Abrisud à leur payer une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre leur condamnation aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct au profit de la Scp Lafont & Associés en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 17 janvier 2024,

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS :

- sur la recevabilité des demandes

Conformément aux dispositions de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

L'action des requérants est fondée sur le non-respect du devoir de conseil et de l'obligation de délivrance conforme en ce que la société Abrisud n'aurait pas informé sa cliente de ce que la conception et les matériaux de l'abri vendu n'étaient pas compatibles avec la force des vents traversant habituellement le département des Pyrénées Orientales et sur la méconnaissance des normes applicables aux surcharges climatiques telles que la neige et le vent.

Or, ainsi que jugé à bon droit par le tribunal judiciaire de Perpignan, ce n'est que le jour du sinistre survenu le 3 février 2013 que Mme [D] a été en mesure de connaître les éléments de fait à savoir l'éventuel défaut de résistance au vent de l'installation, de nature à fonder ses moyens de droit.

Dès lors, l'action engagée par Mme [D] et son assureur le 2 février 2018 est recevable et le jugement sera confirmé sur ce point.

- sur le fond

Mme [D] fonde son action sur le fait que la société Abrisud aurait manqué à son obligation d'information et de conseil en ce qu'elle aurait dû lui proposer un abri capable de résister au fort vent traversant le lieu d'implantation de la piscine faisant observer que la notice d'utilisation de l'installation ne prévoit pas une limite d'utilisation à des vents de plus de 100 km/h et qu'elle n'avait pas connaissance des normes que devait respecter Abrisud.

Elle se fonde sur un rapport d'expertise amiable qui établirait l'inadéquation de l'abri vendu à la force habituelle du vent dans sa région et invoque en outre les règles NV 65 applicables depuis le 1 er mars 2020 relatives aux valeurs des surcharges climatiques s'imposant aux vendeurs professionnels.

La société Abrisud lui oppose qu'elle ne rapporte pas la preuve de ses allégations relativement au défaut de résistance de l'abri à des vents supérieurs à 100 km/h, souligne l'absence de force probante du rapport d'expertise invoqué par les intimées établi par un salarié de la Matmut laquelle est partie au procès et qui ne peut démontrer que le sinistre est dû à une faute d'Abrisud.

Elle invoque les dispositions du manuel d'utilisation que Madame [D] a reconnu avoir reçu et notamment ses recommandations relatives à la vérification mensuelle de la fixation et de verrouillage des mollettes et à l'interdiction d'ouverture de l'abri en cas de vent, seul le défaut de fixation de deux des cinq modules pouvant expliquer le sinistre alors qu'à la même période plusieurs dizaines d'abris installés dans le même département ont résisté à la tempête survenue le même jour.

S'agissant du moyen tiré du non-respect de la norme NV 65 imposant une résistance aux vents supérieurs à 100 km/h, Abrisud fait valoir que cette norme a été retirée le 28 avril 2010 soit antérieurement au contrat liant les parties et qu'en tout état de cause, elle ne concernait que les effets de la neige et du vent sur les constructions et les structures légères non bâties.

Pour accueillir la demande de Mme [D] et de son assureur la société Matmut, le premier juge s'est fondé, ainsi que les intimés le sollicitent de la cour, sur l'expertise amiable produite par ces derniers dont les observations tendent à établir que la conception et les matériaux employés étaient inadaptés à la violence des éléments climatiques dans le département des Pyrénées Orientales.

Or, il est d'une part de jurisprudence établie que le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties (Ch. mixte. 28 septembre 2012, pourvoi n° 11-18.710 ; Com., 5 octobre 2022, pourvoi n° 20-18.709 ).

Et en l'espèce, les intimées ne produisent aucun élément de preuve de nature à corroborer l'expertise réalisée non seulement à la requête de la Matmut mais par un agent de cette compagnie d'assurance, ainsi que le révèlent les mentions de la pièce n°4-3 produite par les intimées de sorte qu'aucune valeur probante ne pourra être reconnue à cette expertise.

La cour observe d'autre part que les énonciations de ce rapport, qui se limitent à relever un épisode de vent de 113 km/h lors du sinistre, à constater que les chevilles de fixation au sol de l'abri sont cassées, et que les modules envolés ont causé des dommages aux barrières de sécurité de la piscine, ne permettent pas d'établir les causes du sinistre et en particulier les motifs de la rupture des chevilles, l'intervenant n'ayant pas étayé son affirmation selon laquelle le choix des matériaux employés en serait la cause, de sorte que cette expertise ne serait, à la supposer recevable, d'aucun intérêt quant à la mise en évidence des causes de l'arrachage de l'abri aucune ne pouvant être exclue, pas même celle liée à son utilisation non-conforme aux consignes de l'installateur.

Sur ce point, l'appelante justifie, quant à elle, avoir respecté son obligation d'information et de conseil par la production d'un document contractuel signé par Mme [D] qui mentionne page 15 « Toutes les consignes d'utilisation doivent impérativement être respectées pour assurer la sécurité de votre abri et éviter tout risque de détérioration : ... il est interdit d'ouvrir l'abri en cas de vent... en position fermée, il est impératif de vérifier chaque mois le vérouillage de toutes les fixations. En effet par grand vent, les vibrations provoquées peuvent dévisser les mollettes ».

Elle justifie également par la production de relevés effectués par Méteo France dans la station implantée sur la commune de [Localité 2] située à une vingtaine de kilomètres de la commune du Soler lieu d'installation de l'abri litigieux, de la survenue d'épisodes venteux réguliers antérieurement au sinistre avec des vitesses enregistrées équivalentes, voire plus importantes encore que celle relevée le 3 février 2013 notamment les 28 octobre 2012, 28 novembre 2012, 8 décembre 2012, ce qui contredit l'allégation de Mme [D] selon laquelle Abrisud lui aurait livré et installé un bien non-conforme aux contraintes météorologiques locales.

Il suit de l'ensemble de ces considérations que Mme [D] et son assureur échouent à rapporter la preuve d'un manquement de la société Abrisud dans l'exécution de ses obligations contractuelles de sorte que la cour ne pourra qu'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la société Abrisud responsable du préjudice causé à Mme [D] par le sinistre ayant affecté son abri piscine, l'a condamnée à indemniser les préjudices matériel et de jouissance et condamné la société Generali Iard à la relever et garantir de la condamnation relative au préjudice de jouissance à concurrence de 1080 euros et condamné in solidum la société Abrisud et la société Generali Iard à payer à Mme [D] et la société Matmut une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l'instance.

Statuant à nouveau de ces chefs, la cour déboutera Mme [D] et la société Matmut de l'ensemble de leurs demandes et les condamnera aux dépens de première instance et d'appel par application de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré l'action de Mme [D] et la Matmut recevable.

L'infirme pour le surplus.

Statuant à nouveau,

Déboute Mme [D] et la Matmut de l'ensemble de leurs demandes,

Condamne in solidum Mme [D] et la société Matmut aux dépens de première instance et d'appel.

Les condamne in solidum à payer à la société Abrisud la somme de 2500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/06168
Date de la décision : 04/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-04;21.06168 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award