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04/04/2024 | FRANCE | N°21/01915

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 04 avril 2024, 21/01915


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à



























COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



4e chambre civile



ARRET DU 04 AVRIL 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/01915 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O5UM



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 18 janvier 2021 <

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Tribunal judiciaire de BEZIERS - N° RG 19/01608





APPELANTE :



Caisse Régionale d'Assurance Mutuelles Agricoles Méditerranée sous l'enseigne Groupama Méditerranée immatriculée sous le numéro 379 834 906 du registre du commerce et des sociétés d'AIX EN PROVENCE agissant poursuites et diligences de ses représe...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 04 AVRIL 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/01915 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O5UM

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 18 janvier 2021

Tribunal judiciaire de BEZIERS - N° RG 19/01608

APPELANTE :

Caisse Régionale d'Assurance Mutuelles Agricoles Méditerranée sous l'enseigne Groupama Méditerranée immatriculée sous le numéro 379 834 906 du registre du commerce et des sociétés d'AIX EN PROVENCE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Marie CHAREAU, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituant Me Corinne PAQUETTE- DESSAIGNE de la SELARL JURIDIS-LR, avocat au barreau de BEZIERS, avocat postulant et plaidant

INTIME :

Monsieur [J] [C]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par Me Isabelle MERLY, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituant Me Delphine CAUSSE, avocat au barreau de BEZIERS, avocat postulant et plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 février 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Charlotte MONMOUSSEAU

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Charlotte MONMOUSSEAU, Greffière.

*

* *

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Le 27 février 2015, M. [J] [C] a conclu avec la société Caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Méditerranée (exerçant sous l'enseigne Groupama Méditerranée) un contrat « Energie Prévoyance » aux termes duquel il bénéficiait des garanties suivantes :

arrêt de travail : 40 € par jour sur trois ans avec une franchise de trente jours ;

rente invalidité : 40 € avec un seuil d'intervention de 33 % d'invalidité dans la limite de l'invalidité fonctionnelle et professionnelle.

Le 15 janvier 2015, M. [C] a rempli un questionnaire médical, dans lequel il a répondu par la négative à plusieurs questions, et notamment à la question : « Avez-vous eu au cours de votre vie une maladie des os et des articulations ' ex : douleurs lombaires, sciatique, hernie discale, traitement vertébral ».

En 2017, à la suite d'un arrêt de travail, il a déclaré un sinistre afin de bénéficier du versement d'indemnités journalières.

Le 28 novembre 2017, il a été examiné par le Docteur [X], dont le rapport d'expertise médicale amiable du 12 décembre 2017 a révélé l'existence d'un problème médical non déclaré lors de la souscription du contrat d'assurance.

Par courrier du 28 mai 2018, l'assureur a opposé à M.[C] la nullité du contrat d'assurance pour fausse déclaration dans le questionnaire de santé.

L'assureur a indemnisé M. [C] à hauteur de 13 780 €, pour la période de mai 2017 à novembre 2017, date à laquelle a cessé toute indemnisation.

M. [C] est en état d'invalidité depuis le 1er avril 2019 et son invalidité est devenue définitive et permanente le 1er novembre 2019.

C'est dans ce contexte que par acte du 29 juillet 2019, M.[J] [C] a assigné la société Groupama Méditerranée devant le tribunal de grande instance de Béziers aux fins de « valider et faire exécuter » le contrat litigieux.

Par jugement du 18 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Béziers a :

- condamné la société Groupama Méditerranée à payer à M.[C] les sommes de 28 820 € au titre de l'arrêt de travail subi et de 40 € par jour à compter du 1er novembre 2019 au titre de l'invalidité totale ;

- dit n'y avoir lieu à astreinte ;

- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

- débouté la société Groupama Méditerranée de sa demande reconventionnelle ;

- condamné la société Groupama Méditerranée aux dépens et à payer à M. [C] la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Groupama Méditerranée a relevé appel de la décision le 23 mars 2021.

Vu ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 30 juillet 2021, aux termes desquelles la société Groupama Méditerranée demande à la cour, sur le fondement de l'article L 113-8 du code des assurances, de :

Réformer le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau,

à titre principal, juger que le contrat de prévoyance est nul,

débouter M. [C] de l'ensemble de ses demandes,

condamner M. [C] à lui restituer la somme de 13 780 € au titre des indemnités journalières perçues,

A titre subsidiaire,

Dire que la condamnation au titre de la garantie arrêt de travail ne saurait être supérieure à la somme de 14 100 €,

En tout état de cause,

Condamner M. [C] aux dépens dont distraction au profit de la SELARL APAP et associés et à lui payer la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Vu ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 18 août 2021, aux termes desquelles M. [J] [C] demande à la cour de :

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

condamné la société Groupama Méditerranée à l'indemniser au titre de l'arrêt de travail et au titre de l'invalidité totale,

rejeté la demande en nullité du contrat de prévoyance,

débouté de sa demande en restitution des sommes versées au titre du contrat de prévoyance

L'infirmer en ce qu'il a rejeté sa demande d'indemnisation au titre de son préjudice financier,

Statuant à nouveau,

Condamner la société Groupama Méditerranée à lui payer la somme de 20 000 € en indemnisation de son préjudice financier,

Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

Condamner la société Groupama Méditerranée aux dépens et à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture du 13 juin 2023.

MOTIFS :

Sur la nullité du contrat d'assurance et la fausse déclaration intentionnelle

L'article L113-2 2° du code des assurances dispose que : « L'assuré est obligé (...) de répondre exactement aux questions posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel l'assureur l'interroge lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l'assureur les risques qu'il prend en charge ».

L'article L. 113-8 du Code des assurances ajoute que : «Indépendamment des causes ordinaires de nullité, et sous réserve des dispositions de l'article L. 132-26, le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre (...) ».

L'article L. 112-3 du même code ajoute que « Lorsque, avant la conclusion du contrat, l'assureur a posé des questions par écrit à l'assuré, notamment par un formulaire de déclaration du risque ou par tout autre moyen, il ne peut se prévaloir du fait qu'une question exprimée en termes généraux n'a reçu qu'une réponse imprécise ».

Sur le fondement de ces textes, il est de principe que :

La sanction édictée par l'article L. 113-8 suppose, pour être prononcée, l'existence d'une réticence de l'assuré ou d'une fausse déclaration de sa part, faite de mauvaise foi, dans l'intention de tromper l'assureur et de nature à changer l'objet du risque ou à le diminuer dans l'esprit de l'assureur, l'ensemble de ces conditions devant être réuni pour que le contrat puisse être annulé.

L'exactitude et la sincérité des déclarations faites par l'assuré s'apprécient en fonction des questions posées, l'assuré n'étant pas tenu de déclarer des circonstances ou des faits qu'aucune question précise ne le conduit à révéler.

Les juges du fond apprécient aussi souverainement le caractère précis d'une question posée, sous réserve de ne pas dénaturer les termes du contrat (Cass. 2ème Civ., 3 mars 2016, n° 15-12.464).

En l'espèce, la question posée dans le questionnaire de santé établi par la société Groupama Méditerranée est ambiguë, dès lors que le terme de « maladie des os et des articulations » est mal approprié pour définir un « mal de dos ».

En effet, le « mal de dos » ne désigne pas une maladie en particulier, mais un ensemble de symptômes qui peuvent avoir de multiples causes, graves ou non, aiguës ou chroniques, inflammatoires ou mécaniques.

Dès lors, le premier juge, par des motifs pertinents et adaptés que la cour adopte a justement retenu que les termes « maladie des os et des articulations » ne permettent pas de façon claire et précise de connaître la nature, l'intensité et la fréquence nécessaire pour que les douleurs lombaires atteignent le stade d'une « maladie ». La majorité des maux de dos sont « communs », c'est-à-dire qu'ils ne sont pas liés à une maladie grave sous-jacente.

Il résulte des éléments médicaux produits au débat (en particulier le certificat médical du docteur [K] [O], médecin spécialiste des pathologies du dos), que M. [J] [C] a subi de manière croissante des « lombalgies assez modérées » dues à son métier de maçon.

Ces constats sont compatibles avec les affirmations de M.[C] qui expose n'avoir jamais suivi de traitement médical ni de prise en charge particulière au sujet de ses lombalgies.

L'existence de douleurs lombaires chroniques invalidantes, manifestement constitutives d'une maladie des os ou des articulations, n'est attestée qu'à la suite de l'opération du genou courant 2017 qui a généré un déséquilibre dorsal.

Ainsi, ces éléments mettent en évidence que Monsieur [C] au moment où il a rempli le questionnaire en 2015 a pu considérer de bonne foi que les lombalgies modérées dont il souffrait ne constituaient pas une « maladie des os ou des articulations ».

Il n'a donc pas commis de fausse déclaration intentionnelle en répondant négativement à la question posée de manière ambiguë sur l'existence d'une maladie des os ou des articulations.

En l'absence de démonstration d'une fausse déclaration, il ne saurait y avoir nullité du contrat d'assurance.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la société Groupama Méditerranée de sa demande à ce titre.

Sur le quantum des sommes sollicitées

Le contrat souscrit le 27 février 2015 par M. [J] [C] prévoit :

en cas d'arrêt de travail, une indemnisation de 40 € par jour sur trois ans avec une franchise de trente jours ;

en cas de rente invalidité, une indemnisation de 40 € avec un seuil d'intervention de « 33 % » d'invalidité dans la limite de l'invalidité fonctionnelle et professionnelle.

Les conditions générales de ce contrat prévoient que le versement des indemnités journalières cesse : « lorsque votre état de santé étant considéré comme stabilisé, une date de consolidation pouvant être fixée, vous n'êtes plus reconnu en arrêt de travail par notre Médecin-conseil (soit parce que vous êtes invalide, soit parce que vous êtes apte à reprendre votre activité professionnelle, même partiellement) » (page 10 des conditions générales).

En l'espèce, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Languedoc-Roussillon a fait parvenir à M. [J] [C] :

la « notification de pension d'incapacité partielle au métier à effet du 1er avril 2019 » au taux de 30 % ;

la « notification de pension d'invalidité totale et définitive à effet du 1er novembre 2019 » au taux de 50 %.

C'est donc à juste titre que la société Groupama Méditerranée sollicite à titre subsidiaire, la réduction du quantum de condamnation compte tenu de ce que le tribunal a indemnisé M.[C] au titre de l'arrêt de travail au-delà du 1er avril 2019, alors qu'il a été consolidé à cette date.

Il convient donc de ramener son indemnisation au titre de l'arrêt de travail à la somme de 40 € x 727 jours (nombre de jours écoulés entre le 3 avril 2017, date de l'arrêt de travail et le 31 mars 2019, veille de la consolidation) - [( 40 € x 30 jours) + 13 780 € (indemnités journalières déjà perçues)] = 14 100 euros.

Contrairement à ce que réclame M. [C] -qui se fonde à tort sur une notification de décision de la MDPH pour l'allocation adulte handicapé-, il ne peut prétendre à l'indemnisation au titre de l'invalidité entre le 1er avril et le 1er novembre 2019, alors que son taux d'invalidité était fixé provisoirement à 30 % par la CPAM, soit en-deçà du seuil d'intervention de 33 %.

En revanche, c'est à bon droit que le premier juge a condamné la société Groupama Méditerranée à lui payer, au titre de l'invalidité totale, la somme de 40 € par jour à compter du 1er novembre 2019, le taux de sa pension ayant été porté à 50 % à compter de cette date, soit au-delà du seuil des 33 % contractuels.

Il y a donc lieu de condamner la société Groupama Méditerranée à payer à M. [C] les sommes de 14 100 euros au titre de l'arrêt de travail subi et de 40 € par jour à compter du 1er novembre 2019 au titre de l'invalidité totale.

Sur la demande d'indemnisation au titre du préjudice financier

Il y a lieu de rejeter la demande de dommage-intérêts à l'encontre de la société Groupama Méditerranée en l'absence de lien de causalité direct entre le refus de prise en charge de l'assureur et les différents préjudices invoqués par Monsieur [C]. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur l'exécution provisoire

Aux termes de l'article 500 du code de procédure civile, a force de chose jugée le jugement qui n'est susceptible d'aucun recours suspensif d'exécution, ce qui est le cas d'un arrêt de cour d'appel, rendant sans objet la demande relative à voir ordonner l'exécution provisoire du présent arrêt.

Sur les demandes accessoires

Succombant pour l'essentiel dans ses prétentions, la société Groupama Méditerranée supportera les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- condamné la société Groupama Méditerranée à payer à M.[C] les sommes de 28 820 € au titre de l'arrêt de travail subi et de 40 € par jour à compter du 1er novembre 2019 au titre de l'invalidité totale,

statuant à nouveau de ces chefs,

Condamne la société Groupama Méditerranée à payer à M.[J] [C] les sommes de 14 100 euros au titre de l'arrêt de travail subi et de 40 € par jour à compter du 1er novembre 2019 au titre de l'invalidité totale,

Confirme le jugement pour le surplus ;

Y ajoutant,

Condamne la société Groupama Méditerranée aux dépens d'appel,

Condamne la société Groupama Méditerranée à payer à M.[J] [C] une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/01915
Date de la décision : 04/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-04;21.01915 ?
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