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04/04/2024 | FRANCE | N°20/05787

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 04 avril 2024, 20/05787


ARRÊT n°





























Grosse + copie

délivrées le

à









COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRÊT DU 04 AVRIL 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/05787 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OZOE



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 15 octobre 2020

Tribunal judiciaire de Perpignan - N° RG 17/04015



APPELANTS :

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Monsieur [H] [T]

né le [Date naissance 7] 1970 à [Localité 11]

[Adresse 4]

Représenté par Me Andie FULACHIER substituant Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL & ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et par Me François CAULET, avocat au ba...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRÊT DU 04 AVRIL 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/05787 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OZOE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 15 octobre 2020

Tribunal judiciaire de Perpignan - N° RG 17/04015

APPELANTS :

Monsieur [H] [T]

né le [Date naissance 7] 1970 à [Localité 11]

[Adresse 4]

Représenté par Me Andie FULACHIER substituant Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL & ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et par Me François CAULET, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat plaidant

Madame [S] [T]

née le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 11]

[Adresse 2]

Représenté par Me Andie FULACHIER substituant Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL & ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et par Me François CAULET, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat plaidant

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/003431 du 31/03/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de [Localité 9])

Madame [P] [L]

née le [Date naissance 3] 1944 à [Localité 12]

et décédée le [Date décès 5] 2021

INTIMEE :

S.A.S. Mcs et Associes

Société par actions simplifiée au capital de 12.922.642,84 euros, inscrite au RCS de PARIS sous le numéro B334537 06, dont le siège social est [Adresse 6], agissant par son représentant légal domicilié audit siège en cette qualité venant aux droits de la Banque Populaire du Sud, en vertu d'un acte de cession de créances, en date du 27 décembre 2018,

[Adresse 6]

[Localité 8]

Représentée par Me Julia MUSSO substituant Me RIEU de la SCP DORIA AVOCATS, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant ayant plaidé pour Me Corinne LASNIER BEROSE, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Février 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Henriane MILOT

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Henriane MILOT, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [P] [L] et ses enfants Mme [S] [T] et M. [H] [T] ont constitué une société civile immobilière dénommée Mck 2013 (ci-après la SCI).

Le 24 juillet 2014, la Sci a souscrit un prêt de 71 361 € d'une durée de 240 mois au taux de 3,54 % l'an auprès de la Banque populaire du Sud (ci-après la banque) afin de financer les travaux de construction d'une maison d'habitation sur un terrain situé à Los Masos (66).

Le 6 juin 2014, Mme [L] et ses enfants, Mme [S] [T] et M. [H] [T] se sont respectivement portés cautions personnelles et solidaires de la SCI Mck pour garantir le prêt dans la limite de 92 769,30 €.

Le 11 décembre 2015, par lettre recommandée avec accusé de réception, la Banque a notifié à la SCI la déchéance du terme pour défaut de paiement, rendant exigibles les sommes dues au titre du prêt à hauteur de 75.697,09 €.

A la même date et par lettres recommandées avec accusé de réception, elle a mis en demeure les trois cautions de payer cette somme.

A défaut de paiement, la Banque a engagé une procédure de saisie immobilière contre la SCI. Par jugement du 2 juin 2017, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Perpignan a fixé la créance de la Banque à 78.878 € et a ordonné la vente forcée du terrain situé à Los Masos.

Le 29 septembre 2017 par jugement d'adjudication, le bien immobilier appartenant à la SCI a été adjugé à la Banque au prix de 20 000 €.

C'est dans ce contexte que par acte en date des 13 et 18 novembre 2017, la banque a fait assigner Mme [L] et les consorts [T] en paiement.

Le 27 décembre 2018, la Banque a cédé à la SAS Mcs et associés, un portefeuille de créances dont celles de Mme [L] et des consorts [T]

Par jugement contradictoire en date du 15 octobre 2020, le tribunal judiciaire de Perpignan a :

Constaté l'intervention volontaire de la société Mcs et associés venant aux droits de la Banque populaire du sud et la déclare recevable ;

Rejeté le moyen tiré de la disproportion manifeste des engagements de caution et la demande de nullité des actes de cautionnements ;

Prononcé la déchéance du créancier de son droit aux intérêts conventionnels, frais et accessoires à compter du 31 mars 2015 ;

Condamné Mme [L] et les consorts [T] à payer chacun à la Sas Mcs et associés dans la limite de leurs engagements de caution, la somme de 48 253,22 €, majorée des intérêts au taux légal à compter du 11 décembre 2015, étant précisé que la somme totale à recouvrer par la société Mcs et associés ne pourra excéder le montant de sa créance de 48 253,22 € outre intérêts en vertu de la règle selon laquelle le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur ;

Ordonné la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1343-2 du Code civil

Débouté les parties de toutes autres demandes, plus amples ou contraires ;

Constaté que [S] [T] est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale ;

dit n'y avoir lieu à paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

Condamné [P] [L], représentée par l'UDAF 66 en qualité de tuteur, [S] [T] et [H] [T] aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux règles applicables en matière d'aide juridique ;

Dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire ;

Le 16 décembre 2020, les consorts [L] - [T] ont relevé appel de ce jugement.

PRÉTENTIONS

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 25 novembre 2022, les consorts [T] demandent en substance à la cour de réformer le jugement notamment en ce qu'il a rejeté leurs demandes et les a condamnés à payer la somme de 48 253,22 € outre intérêts et aux dépens et, statuant à nouveau, de :

- Constater l'absence de caractère exigible de la créance, la disproportion des engagements de caution et la nullité des actes de caution ;

- Débouter la Banque de l'intégralité de ses demandes

- Constater le défaut de mise en garde

- A titre subsidiaire, condamner la société Mcs et associés au paiement de dommages-intérêts à hauteur des sommes empruntées et prononcer la compensation de celles-ci.

- En tout état de cause, confirmer le jugement en ce qu'il a ramené la somme totale à recouvrer à hauteur de 48 253,22 € outre intérêts et de condamner reconventionnellement la banque à la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 21 avril 2023, la société Mcs et associés demande en substance à la cour de :

Dire et constater l'extinction de l'instance en appel du chef de Madame [P] [L]

Juger les consorts [T] irrecevables et mal fondés en toutes leurs demandes ;

Confirmer le jugement rendu le 15 octobre 2020 en toutes ses dispositions ;

Condamner les consorts [T] à payer à la société Mcs et associés, en qualité de cautions, chacun dans la limite de son engagement, la somme de 48 253, 22 €n outre les intérêts au taux légal à compter du 11 décembre 2015 et ordonner la capitalisation des intérêts dus depuis un an ;

Condamner solidairement les consorts [T] à lui payer la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens en application de l'article 696 du même code.

Mme [P] [L] est décédée le [Date décès 5] 2021. Ses enfants, Mme [S] [T] et M. [H] [T], ont renoncé à sa succession. Par ordonnance du 8 septembre 2022, le conseiller de la mise en état a constaté en conséquence que l'instance se poursuivait entre la société MCS et Mme [S] [T] et M. [H] [T].

Vu l'ordonnance de clôture en date du 15 janvier 2024.

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Il sera précisé en liminaire que le conseil des appelants n'a pas mis à jour ses conclusions qui contiennent les demandes initialement présentées au nom de Mme [L] alors que celle-ci est décédée et que ses enfants ont renoncé à sa succession.

Sur la demande de la société intimée, il sera constaté que l'instance d'appel engagée par Mme [L] est éteinte par application des dispositions de l'article 384 du code de procédure civile.

Sur l'exigibilité de la créance

Les consorts [T] reprennent leur moyen de première instance, écarté par le premier juge qui a retenu le caractère exigible de la créance détenue par la société MCS & Associés.

Ils font valoir, au visa des articles 2288 et 2313 du code civil, dans leur version antérieure à l'ordonnance du 15 septembre 2021, que la banque ne démontre ni des modalités de calcul de la créance dont elle se prévaut, ni de son caractère exigible. Ils soutiennent que le courrier prononçant la déchéance du terme se borne de façon vague à faire état de précédents courriers, en violation de la jurisprudence n°1415655 du 3 juin 2015. Ils soutiennent encore que la banque ne justifie pas de la date exacte du premier incident de paiement.

La banque réplique que le prêt a été mis en exigibilité par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 11 décembre 2015 et que le décompte était joint, y compris aux courriers adressés aux cautions.

Le premier juge pour écarter le moyen des consorts [T] a retenu que s'il n'était pas justifié d'une mise en demeure préalable au prononcé de la déchéance du terme, l'acte de prêt contenait une disposition expresse et non équivoque dispensant le créancier de cette délivrance.

La clause exigibilité figurant en page 10 des conditions particulières de l'offre de prêt annexée à l'acte authentique énonce : 'toutes les sommes restant dues au titre du prêt en principal, majorées des intérêts échus et non payés, éventuellement des commissions et des primes d'assurances, pourront devenir immédiatement exigibles à première demande de la banque, sans sommation ni mise en demeure préalables et malgré toutes offres de consignations ultérieures dans les cas de non paiement d'une échéance à bonne date...'

A l'instar du premier juge, la cour constate que cette clause vaut disposition expresse et non équivoque dispensant le créancier de la délivrance d'une mise en demeure préalable.

Au courrier recommandé avec avis de réception du 11 décembre 2015 notifiant à la SCI le prononcé de la déchéance du terme ainsi qu'aux courriers sous même forme adressés à chaque caution était annexé un décompte de créance indiquant qu'au jour de la déchéance du terme du 12 novembre 2015 était due la somme de 1661,32 euros au titre d'échéance(s) impayée(s) permettant tant à la SCI qu'à chaque caution de déterminer la date du premier impayé en divisant ce montant par celui de l'échéance contractuelle.

La créance exigible est également certaine et liquide.

Sur la disproportion manifeste des engagements de caution

Selon l'article L.341-4 code de la consommation, devenu L. 332-1 et L. 343-4, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Le caractère manifestement disproportionné du cautionnement qu'il incombe à la caution de rapporter, s'apprécie au regard de l'ensemble des engagements souscrits par cette dernière d'une part, de ses biens et revenus d'autre part, sans tenir compte des revenus escomptés de l'opération garantie, mais en fonction de tous les éléments du patrimoine et pas seulement de ses revenus.

Il appartient à la caution, qui l'invoque, de démontrer l'existence de la disproportion manifeste de son engagement, au moment de la conclusion de celui-ci.

Il convient de relever en l'espèce que la banque ne produit pas de fiche de renseignement patrimoniale de telle sorte que la caution est libre de démontrer la réalité de sa situation patrimoniale au jour de la souscription de son engagement.

Le premier juge a exclu la disproportion manifeste en retenant que la preuve n'en était pas rapportée par aucun des consorts [T].

Ceux-ci ont manifestement tenu compte des motifs du premier juge ayant conduit au rejet de leur prétention en produisant en cause d'appel des pièces qui démontrent leur situation patrimoniale au jour de l'engagement.

- Mme [T] ne percevait que l'allocation adulte handicapé de l'ordre de 800€ par mois, sans aucun complément de revenus (elle produit l'avis de non imposition 2014 en cause d'appel, ce que le premier juge lui a reproché de ne pas avoir fait).

Elle était propriétaire d'une parcelle agricole sur la commune de [Localité 10] et produit en cause d'appel un avis de valeur d'un agent immobilier, rien ne permettant d'en mettre en doute la valeur probante, selon lequel cette parcelle a une valeur de 3000€.

Elle n'était titulaire que de 10 parts sur 430 du capital social de la SCI Mck 2013, laquelle n'était propriétaire que d'un terrain à bâtir apporté par Mme [L], acheté 45000€ en 2008, évalué à 41000€ lors de l'apport en SCI du 10 février 2014, non aménagé puisque l'objet du prêt cautionné était d'y construire une habitation.

Le patrimoine de Mme [T] était donc au mieux de 45000/430x10 + 3000€, soit 4046,51€.

Sachant que l'engagement de caution souscrit par Mme [T] le 6 juin 2014 portait sur la somme de 92769,30 euros pour une durée de 264 mois, que l'échéance mensuelle du prêt garanti à laquelle elle aurait du faire face en cas de défaillance de l'emprunteur s'élevait à 415,33€, la preuve d'une disproportion manifeste entre les biens et les revenus et l'engagement est rapportée par Mme [T] de telle sorte que la banque ne peut s'en prévaloir.

- M. [T], moniteur d'auto école, percevait en 2014 un revenu mensuel de 1446€, avec lequel il devait faire face à ses charges courantes dont un loyer de 350€, amputant son reste à vivre, impôt sur le revenu de 85€, pension alimentaire de 35€, ne disposait d'aucun patrimoine autre que les 10 parts du capital social de la SCI telles qu'évaluées ci dessus. L'engagement était identique de telle sorte que la preuve d'une disproportion manifeste entre les biens et les revenus et l'engagement est rapportée par M. [T], la banque ne pouvant s'en prévaloir.

Le jugement sera donc infirmé en toutes ses dispositions intéressant Mme [S] [T] et M. [H] [T].

Partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, la société MCS & Associés venant aux droits de la Banque Populaire du Sud supportera les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

statuant contradictoirement

Constate l'extinction de l'instance d'appel engagée par Mme [P] [L].

Infirme le jugement sur le surplus des dispositions déférées à la connaissance de la cour.

Juge que la société MCS & Associés ne peut se prévaloir des engagements de caution souscrits par Mme [S] [T] et M. [H] [T] le 6 juin 2014 en garantie du prêt contracté par la SCI MCK 2013.

Déboute en conséquence la société MCS & Associés de l'ensemble de ses demandes dirigées contre Mme [S] [T] et M. [H] [T].

Condamne la société MCS & Associés aux dépens de première instance et d'appel.

Condamne la société MCS & Associés à payer à M. [H] [T] la somme de 2500€en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et dit n'y avoir lieu à d'autre application de ce texte.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/05787
Date de la décision : 04/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-04;20.05787 ?
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