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14/03/2024 | FRANCE | N°22/05129

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 14 mars 2024, 22/05129


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à

























COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



4e chambre civile



ARRÊT DU 14 MARS 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/05129 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PSIV



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du conseiller de la mise en état

du 27 septembre 2022 de la cour d'appel de Montpellier -

N° RG 21/06302





DEMANDEUR A LA REQUETE ET APPELANT :



La Caisse d'Epargne et de Prévoyance du Languedoc-Roussillon

Banque coopérative régie par les art. L 512-85 et s. du Code monétaire et financier - SA à Directoire et Conseil d'Orientati...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRÊT DU 14 MARS 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/05129 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PSIV

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du conseiller de la mise en état du 27 septembre 2022 de la cour d'appel de Montpellier -

N° RG 21/06302

DEMANDEUR A LA REQUETE ET APPELANT :

La Caisse d'Epargne et de Prévoyance du Languedoc-Roussillon

Banque coopérative régie par les art. L 512-85 et s. du Code monétaire et financier - SA à Directoire et Conseil d'Orientation et de Surveillance - capital social 370 000 000 euros - RCS Montpellier 383 451 267 ' Siège social [Adresse 2] 'Intermédiaire d'assurance immatriculé à l'ORIAS sous le n° 07 005 729- Titulaire de la carte professionnelle 'Transactions sur immeubles et fonds de commerce, sans perception de fonds, effets ou valeurs' n° 2008/34/2106, délivrée par la Préfecture de 'Hérault,

garantie par CEGC [Adresse 1],

représentée par le Président de son Directoire en exercice

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Chloé GILLI-CANAL substituant Me Alexia ROLAND de la SCP VPNG, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

DEFENDEUR A LA REQUETE ET INTIMEE :

S.A. Cnp Assurances

société anonyme au capital de 594.151.292,00 euros, entreprise régie par le Code des assurances, inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de NANTERRE sous le numéro 341 737 062, dont le siège social est [Adresse 5], représentée par ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Emmanuel LE COZ de la SELARL CABINET LE COZ AVOCATS, avocat au barreau de BEZIERS, avocat postulant et non plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 JANVIER 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Henriane MILOT

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Henriane MILOT, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCEDURE :

Selon offre du 4 novembre 2008, Monsieur [Y] [R] et Madame [L] [Z] épouse [R] ont souscrit un prêt immobilier d'un montant de 299 999 euros auprès de la SA Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon.

Un contrat d'assurance couvrant la garantie ITT a été souscrit avec la SA CNP Assurances.

A compter du 8 mars 2012, les emprunteurs ont cessé de rembourser les échéances du prêt à la suite de l'arrêt-maladie de Mme [L] [Z] épouse [R].

Par acte du 8 mars 2016, Mme [L] [Z] épouse [R] a assigné la Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon et la SA CNP Assurances aux fins de voir notamment constater que le TEG du prêt est usuraire et de voir condamner la banque à lui rembourser le trop-perçu des intérêts.

Par jugement du 12 avril 2021, le tribunal judiciaire de Béziers a :

- mis hors de cause la SA CNP Assurances ;

- déclaré prescrites les actions en déchéance du droit aux intérêts contractuels et l'action indemnitaire entreprises par Mme [L] [Z] épouse [R] à l'encontre de la Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon ;

- condamné la Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon à restituer à Mme [L] [Z] épouse [R] les sommes indûment perçues au-delà du taux d'usure de 7,36 % en application du contrat de prêt immobilier conclu le 19 novembre 2008;

- dit que les échéances à venir du prêt devront être recalculées pour satisfaire aux dispositions légales et réglementaires sur le taux d'usure ;

- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

- condamné la Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc Roussillon à payer à Mme [L] [Z] épouse [R] la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté les demandes de la SA CNP Assurances fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc Roussillon aux dépens qui seront distraits au profit de Me Aline Arles, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code civil.

La SA Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon a relevé appel de ce jugement par une déclaration du 20 avril 2021 (affaire n° RG 21/02562).

Par conclusions d'incidents, Mme [R] a demandé au conseiller de la mise en état de prononcer l'irrecevabilité de l'appel en ce que la banque n'a pas intimé M. [R], ni l'assureur alors que le litige serait indivisible à l'égard de toutes les parties.

Le 27 octobre 2021, la SA Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon a régularisé un second appel à l'encontre de M. [Y] [R] et de la SA CNP Assurances (affaire n° RG 21/06302).

Elle a sollicité la jonction des deux affaires.

Mme [R] s'est désistée de sa demande aux fins de voir prononcer l'irrecevabilité de l'appel.

Par ordonnance du 30 mars 2022, le conseiller de la mise en état, après avoir pris acte de l'appel formalisé à l'encontre de M.[R] et de l'assureur, a constaté la recevabilité de l'appel et le désistement de Mme [R] (dans le dossier n° RG 21/02562).

Par conclusions d'incident, la SA CNP Assurances a saisi le conseiller de la mise en état d'une demande tendant, sur le fondement des articles 122, 124, 528, 538, 648, 654, 675, 680, 700 et 909 du code de procédure civile, à l'irrecevabilité de l'appel de la SA Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon en ce qu'il a été formalisé au-delà du délai d'appel d'un mois visé à l'article 538 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 27 septembre 2022, le conseiller de la mise en état a :

Dit l'appel du 27 octobre 2021 à l'encontre de la société Cnp Assurances irrecevable ;

Dit n'y avoir lieu à joindre les affaires enrôlées sous les n°de RG 21/02562 et 21/06302 à ce stade de la procédure ;

Condamné la société Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc Roussillon aux dépens ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

C'est dans ces circonstances que par requête du 7 octobre 2022, la SA Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon a déféré à la cour d'appel l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 27 septembre 2022.

Vu la requête en déféré transmise par voie électronique le 21 octobre 2022, aux termes desquelles la SA Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon demande, sur le fondement des articles 916 du code de procédure civile, 552 et 553 du code de procédure civile, de :

Réformer l'ordonnance du 27 septembre 2022 en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Débouter la société CNP Assurances de ses demandes visant à voir prononcer l'irrecevabilité et/ ou la caducité de l'appel formalisé le 27 octobre 2022 ;

juger l'appel recevable ;

joindre les affaires enrôlées sous les n° de RG 21/02562 et 21/06302 ;

condamner la société CNP Assurances aux dépens et à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 10 octobre 2023, aux termes desquelles la SA Cnp assurances demande, sur le fondement des articles 122, 124, 528, 538, 552, 553, 562, 648, 654, 675, 680, 700, 908, 909 et 916 du code de procédure civile, 914 de ce même code, de :

Juger ses conclusions recevables et bien fondées,

Confirmer l'ordonnance du 27 septembre 2022 en toutes ses dispositions,

Rejeter l'ensemble des demandes formées par la Caisse d'Epargne,

Condamner la SA Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon aux dépens et à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS :

Sur l'irrecevabilité de l'appel

L'article 552 du code de procédure civile dispose que : « En cas de solidarité ou d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel formé par l'une conserve le droit d'appel des autres, sauf à ces dernières à se joindre à l'instance.

Dans les mêmes cas, l'appel dirigé contre l'une des parties réserve à l'appelant la faculté d'appeler les autres à l'instance.

La cour peut ordonner d'office la mise en cause de tous les co-intéressés ».

L'article 553 du même code ajoute que : « En cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel de l'une produit effet à l'égard des autres même si celles-ci ne se sont pas jointes à l'instance ; l'appel formé contre l'une n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance ».

Conformément à l'article 562 dudit code, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent ; la dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou « si l'objet du litige est indivisible ».

Il résulte de ces textes les principes suivants :

En cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, d'une part, l'appel dirigé contre l'une d'elles réserve à l'appelant la faculté d'appeler les autres à l'instance, d'autre part, l'appel formé contre l'une n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance. L'appelant dispose, jusqu'à ce que le juge statue, de la possibilité de régulariser l'appel en formant une seconde déclaration d'appel pour appeler en la cause les parties omises dans sa première déclaration (2e Civ., 23 mars 2023, pourvoi n° 21-19.906) ;

Un litige est indivisible par exemple à l'égard des coïndivisaires (3e Civ., 19 juin 2002, pourvoi n°00-21.869);

En revanche, une condamnation in solidum n'est pas une condamnation indivisible ;

En l'absence d'impossibilité d'exécuter simultanément deux décisions concernant les parties au litige, l' indivisibilité , au sens de l'article 553 du code de procédure civile n'étant pas caractérisée, l'appel de l'une des parties ne peut pas produire effet à l'égard d'une partie, qui ne s'est pas jointe à l'appel (2e Civ., 23 mars 2023, pourvoi n° 21-15.723) ;

En définitive, l'objet du litige est indivisible lorsque les chefs dispositifs résultent de demandes des parties qui sont tenues par un lien de dépendance et de subordination, autrement dit lorsque l'exécution de l'un des chefs dispositifs est incompatible avec l'exécution de l'autre (Cass. soc., 4 juin 1984, n° 82-16.499).

En l'espèce, Mme [L] [Z] épouse [R], qui était coemprunteuse avec son ex-mari, Monsieur [Y] [R], a obtenu du tribunal judiciaire de Béziers la condamnation de la Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon à lui restituer les sommes indûment perçues au-delà du taux d'usure de 7,36 % en application du contrat de prêt immobilier conclu le 19 novembre 2008, les échéances à venir du prêt devant être recalculées.

La CNP Assurances et M. [Y] [R] n'ont pas fait l'objet d'une condamnation, aucune demande n'ayant d'ailleurs été formulée à leur encontre.

La SA Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon fait valoir qu'à la suite d'un premier appel à l'encontre de Madame [L] [Z] épouse [R] par déclaration du 20 avril 2021 (affaire n° RG 21/02562), elle a régularisé un second appel le 27 octobre 2021 (affaire n° RG 21/06302) à l'encontre de la CNP Assurances et de M. [Y] [R] afin de « préserver ses droits et d'éviter toute difficulté ».

Il est constant que ce second appel a été régularisé au-delà du délai d'appel d'un mois prévu à l'article 538 du code de procédure civile, le jugement du 12 avril 2021 du tribunal judiciaire de Béziers ayant été signifié le 16 juin 2021 à la SA Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc Roussillon.

Par ordonnance du 27 septembre 2022, le conseiller de la mise en état a jugé que l'appel du 27 octobre 2021 à l'encontre de la SA CNP Assurances était irrecevable compte tenu de ce que : « l'objet du litige n'est pas, par définition, indivisible puisque la Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc Roussillon a estimé pouvoir limiter son premier appel à Mme [R] ».

La SA Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon critique cette ordonnance et prétend que le litige est indivisible.

Toutefois, elle échoue à indiquer en quoi il y aurait indivisibilité de l'objet du litige à l'égard des différentes parties.

En effet, l'exécution du jugement litigieux du 12 avril 2021 ne concerne que les rapports entre la SA Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon et Mme [L] [Z] épouse [R], la première ayant été condamnée à restituer à la seconde les sommes indûment perçues au-delà du taux d'usure de 7,36 %.

La SA Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon échoue à rapporter la preuve qu'il y aurait incompatibilité avec une exécution de ce jugement dans ses rapports avec la SA CNP Assurances, à qui elle ne demande rien et qui n'a pas été condamnée.

Dès lors, les obligations n'étant pas indivisibles, l'appel régularise le 20 avril 2021 à l'encontre de Mme [L] [Z] épouse [R] [R] ne pouvait produire effet à l'égard de la SA CNP Assurances.

L'appel régularisé le 27 octobre 2021 à l'encontre de la CNP Assurances est donc tardif car formé au-delà du délai d'un mois visé à l'article 538 précité.

En conséquence, il y a lieu de confirmer l'ordonnance prononcée le 27 septembre 2022 d'irrecevabilité de l'appel à l'encontre de la SA CNP Assurances et de rejet de la demande de jonction.

Sur les frais et dépens

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

La demande en déféré de la SA Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon étant rejetée, il convient, en application de cette disposition, de la condamner aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Confirme l'ordonnance rendue le 27 septembre 2022 par le conseiller de la mise en état ayant prononcé l'irrecevabilité de l'appel de la SA Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon ;

Y ajoutant,

Condamne la SA Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon aux dépens ;

Condamne la SA Caisse d'épargne et de prévoyance du Languedoc-Roussillon à payer à la SA CNP Assurances la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/05129
Date de la décision : 14/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-14;22.05129 ?
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