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14/03/2024 | FRANCE | N°21/01542

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 14 mars 2024, 21/01542


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à

























COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



4e chambre civile



ARRÊT DU 14 MARS 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/01542 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O46P





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 01 février 2021



Tribunal judiciaire de Narbonne - N° RG 20/01475





APPELANTE :



Société Banque Populaire Auvergne-Rhône-Alpes

immatriculée au RCS de LYON sous le n° 605 520 071, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me BENET substi...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRÊT DU 14 MARS 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/01542 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O46P

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 01 février 2021

Tribunal judiciaire de Narbonne - N° RG 20/01475

APPELANTE :

Société Banque Populaire Auvergne-Rhône-Alpes

immatriculée au RCS de LYON sous le n° 605 520 071, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me BENET substituant sur l'audience Me Pierre GOUIRY de la SCP GOUIRY/MARY/CALVET/BENET, avocat au barreau de NARBONNE et par Me Bertrand BELVAL, avocat au barreau de LYON

INTIME :

Monsieur [T] [M]

né le [Date naissance 1] 1987 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par Me Perrine DUBOIS, avocat au barreau de NARBONNE avocat postulant et plaidant pour Me Yassine MAHARSI, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 JANVIER 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Henriane MILOT

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Henriane MILOT, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE :

Selon compromis de vente du 29 avril 2010, réitéré par acte authentique du 30 décembre 2010, M. [T] [M] s'est porté acquéreur au sein de l'immeuble inscrit Monument historique sis [Adresse 6].

La Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes ( ci-après la banque) a adressé à M. [M] (l'emprunteur, ci-après) une offre de prêts immobiliers pour financer les projets immobiliers, détaillée comme suit :

- la somme de 205.000 € pour financer l'achat du bien immobilier ainsi que les travaux de rénovation dudit bien (lot n°9) ;

- la somme de 291.000 € pour financer l'achat des biens immobiliers ainsi que les travaux de rénovation desdits biens (lots n°10 et 16).

Par deux actes notariés du 30 décembre 2010, les contrats de crédits ont été régularisés, hors la présence des parties, toutes deux représentées.

S'inquiétant de l'état d'avancement des travaux, l'emprunteur a sollicité une mesure d'expertise judiciaire, et par ordonnance en référé du 17 février 2016 rendue par le tribunal de grande instance de Toulouse, M. [G] a été désigné en qualité d'expert.

Le 03 juillet 2018, la mission d'expertise a été confiée à M.[H], et par ordonnance du 15 novembre 2018 sa mission a été cantonnée aux seuls travaux.

L'expert judiciaire a déposé son rapport définitif le 27 mai 2019.

Par ordonnance présidentielle du 09 octobre 2020, M. [M] a été autorisé à assigner la banque à jour fixe.

C'est dans ce contexte que par acte du 18 novembre 2020, l'emprunteur a fait assigner la banque aux fins notamment de voir constater qu'elle a manqué à son devoir de mise en garde et de la voir condamner à lui payer diverses sommes à titre de dommages et intérêts.

Vu le jugement du 1er février 2021 du tribunal judiciaire de Narbonne, lequel a :

- constaté que l'assignation du 18 novembre 2020, objet de la présente instance, délivrée devant le tribunal judiciaire de Narbonne l'a été par un avocat au barreau de Narbonne et l'a déclarée recevable ;

- condamné la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes à verser à M. [M] la somme de 124.000 € à titre de dommages et intérêts, en réparation de son préjudice de perte de chance ;

- prononcé la déchéance du droit à percevoir des intérêts de la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes, à hauteur de 193.440€, sur les contrats de crédits immobiliers ;

- condamné la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes à reverser à M. [M] les sommes perçues à titre d'intérêts lors du remboursement des prêts immobiliers litigieux ;

- condamné la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes à verser à M. [M] la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu la déclaration d'appel de la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes en date du 09 mars 2021.

Vu l'ordonnance du 24 novembre 2021, rendue par le conseiller de la mise en état, lequel a rejeté la demande de radiation du rôle de l'affaire présentée par M. [M].

PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Vu ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 04 mai 2021, aux termes desquelles la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes demande en substance de :

- à titre principal, juger que les règles de la postulation n'ont pas été respectées, juger qu'il s'agit d'une nullité substantielle qui ne peut être régularisée, juger que le juge n'a pas demandé aux parties l'autorisation de statuer en juge unique, juger qu'il n'a pas respecté et fait respecter le contradictoire et par conséquent annuler l'assignation et le jugement entrepris, juger nulle la procédure d'appel ;

- à titre subsidiaire, réformer le jugement entrepris, faire injonction à M. [M] de communiquer l'ensemble des opérations patrimoniales et financières effectuées par lui et ses déclarations de revenus entre 2010 et 2015, ordonner un sursis à statuer compte tenu de l'instance pénale déclenchée par M. [M] ;

- à titre infiniment subsidiaire, réformer le jugement entrepris et débouter M. [M] de l'ensemble de ses demandes ;

- en tout état de cause, condamner M. [M] à lui payer la somme de 7.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et le condamner aux entiers dépens.

Vu ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 31 juillet 2021, aux termes desquelles M. [M] demande en substance, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de débouter la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes de l'ensemble de ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 7.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 13 juin 2023.

MOTIFS

Sur la nullité de la procédure

Contrairement à ce que soutient la banque, le jugement n'a pas été rendu en formation de juge unique selon les règles des articles 812 et suivants du code de procédure civile mais en formation de rapporteur dans les termes de l'article 805 du code de procédure civile. Les mentions du jugement font foi jusqu'à inscription de faux. Il relate que les avocats ont été entendus en leurs observations et leurs conclusions. Aucune mention n'indique que l'un quelconque s'est opposé à ce que le magistrat tienne seul l'audience et il est établi que le juge rapporteur en a rendu compte au tribunal composé de trois magistrats dans son délibéré.

Le moyen n'est pas fondé.

La banque soutient ensuite la nullité de la procédure puisque la requête en autorisation d'assigner à jour fixe a été présentée en première instance sans respect des règles de la postulation édictée à l'article 5 de la loi du 31 décembre 1971, par un avocat au barreau de Paris. L'ordonnance du 8 octobre 2020 autorisant M.[M] à assigner à jour fixe est sans mention d'avocat postulant près le tribunal judiciaire de Narbonne, de même que la première assignation délivrée le 29 octobre 2020 dont il semble qu'elle n'a pas été mise au rôle. La deuxième assignation délivrée le 18 novembre 2020 sur la base de la même ordonnance comporte la mention d'un avocat postulant mais il ne s'agit pas du projet d'assignation tel qu'examiné par le juge ayant autorisé l'assignation à jour fixe. Elle conclut à une irrégularité de fond affectant l'acte au sens de l'article 117 du code de procédure civile et l'assignation est irrégulière.

M. [M] réplique que l'ordonnance autorisant une assignation à jour fixe est une mesure d'administration judiciaire non-susceptible de recours et l'assignation qui a saisi le tribunal est régulière dès lors qu'elle est remise par un avocat au barreau de Narbonne.

Les règles de la postulation d'avocat édictées à l'article 5e la loi du 31 décembre 1971 limitent celle-ci aux tribunaux judiciaires de l'ensemble du ressort de la cour d'appel et la cour d'appel dans lesquels l'avocat a établi sa résidence personnelle.

Des articles 840 et 841du code de procédure civile, il résulte que dans les litiges relevant de la procédure écrite ordinaire, le président du tribunal peut, en cas d'urgence autoriser le demandeur, sur sa requête, à assigner le défendeur à jour fixe ; la requête doit exposer les motifs de l'urgence, contenir les conclusions du demandeur et viser les pièces justificatives et copie de la requête et des pièces doit être remise au président pour être versée au dossier du tribunal ; la copie de la requête doit être jointe à l'assignation délivrée ensuite de l'autorisation accordée.

De l'article 119 du code de procédure civile, il résulte que l'exception de nullité fondée sur l'inobservation des règles de fond doit être accueillie sans que celui qui les invoque ait à justifier d'un grief. Il en est ainsi notamment du défaut de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice.

Il est constant qu'en l'espèce, la requête en autorisation d'assigner à jour fixe a été présentée par un avocat inscrit au barreau de Paris, non par un avocat inscrit à l'un quelconque des barreaux du ressort de la cour d'appel de Montpellier. C'est sur le fondement de cette requête que l'ordonnance a été rendue et sur le fondement de cette ordonnance que l'assignation du 18 novembre 2020 a été délivrée et enrôlée.

S'il est effectif que l'ordonnance présidentielle autorisant à assigner à jour fixe est un acte d'administration non susceptible de recours, cette réplique relative à l'absence de voie de recours est sans lien et partant inopérante au regard de la nullité de fond soulevée qui tient à la délivrance d'une assignation sur la base d'un acte initial fondamentalement vicié par le défaut de pouvoir de l'avocat inscrit au barreau de Paris à présenter directement, sans recours à un postulant, investi seul de ce pouvoir, une requête faisant indéniablement corps tant avec l'ordonnance qu'avec l'assignation délivrée et enrôlée au regard des contraintes procédurales édictées aux articles 840 et 841 précités qui imposent la remise d'une copie de la requête au président et sa jonction à l'assignation.

Une telle exigence, seule de nature à permettre le respect des règles gouvernant l'organisation de la profession réglementée d'avocat n'est pas de nature à porter atteinte au droit à un procès équitable et se trouve proportionnée au but poursuivi.

La nullité de fond affectant l'assignation est caractérisée sans nécessité d'un grief et la nullité en sera prononcée, avec pour conséquence la nullité du jugement déféré.

Partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, M. [M] supportera les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement

Juge nulle pour irrégularité de fond l'assignation à jour fixe délivrée le 18 novembre 2020 portant saisine du tribunal judiciaire de Narbonne

Prononce la nullité subséquente du jugement du tribunal de Narbonne du 1er février 2021.

Condamne M. [T] [M] aux dépens de première instance et d'appel.

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/01542
Date de la décision : 14/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-14;21.01542 ?
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