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07/03/2024 | FRANCE | N°21/06325

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 07 mars 2024, 21/06325


ARRÊT n°



































Grosse + copie

délivrées le

à









COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



4e chambre civile



ARRET DU 07 MARS 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/06325 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PGBN



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 09 septembre 2021

Juge des contentieux de la protection de Rodez <

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N° RG 20/01061



APPELANTE :



S.A. Franfinance

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Arnaud DUBOIS substituant Me Sandy RAMAHANDRIARIVELO de la SCP RAMAHANDRIARIVELO - DUBOIS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant





INTIMEES :



Madame [...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 07 MARS 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/06325 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PGBN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 09 septembre 2021

Juge des contentieux de la protection de Rodez

N° RG 20/01061

APPELANTE :

S.A. Franfinance

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Arnaud DUBOIS substituant Me Sandy RAMAHANDRIARIVELO de la SCP RAMAHANDRIARIVELO - DUBOIS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

INTIMEES :

Madame [W] [S]

née le 19 Février 1953 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Marie CHAREAU substituant Me Karine LEBOUCHER de la SELARL LEBOUCHER AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/016029 du 08/12/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

S.A.S. Energygo

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Fiona GIL de la SCP DONNEVE - GIL, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant, et par Me Céline FLOTARD, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Janvier 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie-José FRANCO, Conseillère, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Henriane MILOT

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Henriane MILOT, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCEDURE

Le 25 janvier 2019, Mme [W] [S] a signé auprès de la Sas Energygo (anciennement Ab Services) un bon de commande moyennant la somme de 17 900 euros TTC pour la pose et l'installation complète d'un système photovoltaïque en surimposition, suite à un démarchage à son domicile.

Le même jour un contrat de crédit affecté a été signé entre Mme [S] et la Sa Franfinance pour un montant total de 22.713,12 euros au Taeg de 3,90 %.

Les fonds ont été débloqués le 14 mars 2019.

Déplorant que l'installation n'était pas garantie aux normes de sécurité électriques, que les panneaux ont été autorisés par la mairie pour une pose en intégration au lieu d'une pose en surimposition, que les crédits d'impôts n'existent plus depuis le 1er juillet 2014 pour les panneaux photovoltaïques et que cette installation s'est avérée déficitaire et a cessé de produire depuis août 2021 Mme [S] a, par actes des 17 et 21 septembre 2020, fait assigner la société Energygo et la société Franfinance devant le tribunal judiciaire de Rodez.

Par jugement contradictoire en date du 9 septembre 2021, ce tribunal a :

- ordonné la nullité du contrat de vente entre Mme [S] et la société Energygo,

- ordonné la nullité du contrat de crédit accessoire conclu entre Mme [S] et la société Franfinance,

- privé la société Franfinance du droit d'obtenir restitution des sommes prêtées,

- l'a condamné à rembourser à Mme [S] la somme de 1 104,11 euros correspondant aux échéances réglées au mois d'avril 2020, somme à parfaire des sommes correspondant aux échéances réglées postérieurement,

- condamné solidairement la société Ab Services et la société Franfinance à prendre en charge le coût des travaux de remise en état de l'immeuble de Mme [S],

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné solidairement la société Ab Services et la société Franfinance à verser à Mme [S] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.

La société Franfinance a relevé appel de ce jugement le 28 octobre 2021.

PRETENTIONS

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 20 décembre 2023, la Sa Franfinance demande en substance à la cour d'infirmer le jugement et de :

- Juger qu'il n'est démontré aucune cause de nullité du contrat et débouter Mme [S] de l'intégralité de ses moyens et demandes.

- A titre reconventionnel, la condamner à lui payer la somme de 19 469,95 euros avec les intérêts au taux conventionnel de 3,83 % à compter de la mise en demeure du 22 mars 2021 hors concernant l'indemnité légale pour 1 398,10 euros qui portera intérêts au seul taux légal dans les mêmes conditions.

- A titre subsidiaire, juger qu'elle n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité civile ou à la priver de son droit à restitution du capital mis à disposition, ni dans le déblocage des fonds puisque celui-ci intervient le 14 mars 2019 après mise en service de la centrale le 8 mars 2019, juger que la Sa Franfinance n'est pas partie au contrat principal par application de l'article 1165 du code civil et qu'il n'est rapporté la preuve d'aucune faute ni d'aucun préjudice en corrélation qui justifierait la dispense totale pour l'emprunteur de restituer le capital,

En conséquence, condamner Mme [S] à lui payer la somme de 17 900 euros, au titre des remises en état et restitution du capital, avec déduction des échéances déjà versées et garantie due par la Sa Energygo en application de l'article L.312-56 du code de la consommation.

- En toute hypothèses, condamner tout succombant à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 12 décembre 2023, Mme [S] demande en substance à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions :

A titre subsidiaire, sur la résolution des contrats :

- Ordonner la résolution du contrat de vente et de l'avenant conclus avec la société Energygo ;

- Ordonner la résolution consécutive du contrat de prêt affecté avec la société Franfinance,

- Condamner la société Franfinance à restituer toute somme d'ores et déjà versées au titre de l'emprunt souscrit, soit la somme de 1 104,11 euros au mois d'avril 2020, somme à parfaire au jour de la décision à intervenir sur le fond,

- La priver de tout droit à remboursement auprès de Mme [S] du capital, des frais et accessoires versés entre les mains de la société Energygo.

- Si la faute du prêteur n'est pas retenue, condamner la société Energygo à restituer à Mme [S] la somme de 17 900 euros correspondant au montant du bon de commande et priver rétroactivement la société Franfinance de son droit aux intérêts,

- Condamner solidairement les sociétés Energygo et Franfinance à prendre en charge le coût des travaux de remise en état,

A titre très subsidiaire,

- Prononcer la déchéance des intérêts du contrat de crédit du fait de l'annulation ou la résolution du contrat ou de la faute de la société Franfinance d'avoir accordé un crédit abusif,

- Condamner la société Franfinance à lui payer la somme de 17 900 euros en réparation du préjudice subi,

En toutes hypothèses,

- Débouter les sociétés Energygo et Franfinance de leurs demandes, fins et conclusions,

- Les condamner solidairement à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre le paiement des entiers dépens.

- Dire que sur le fondement de l'article R 631-4 du code de la consommation, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la présente décision et qu'en cas d'exécution par voie extrajudiciaire les sommes retenues par l'huissier instrumentaire devront être supportées par l'adversaire, en sus de l'indemnité mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [S] a réitéré les mêmes demandes dans des conclusions communiquées post-clôture le 22 décembre 2023.

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 18 décembre 2023, la Sas Energygo demande en substance à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la nullité du contrat, l'a condamnée solidairement avec la société Franfinance à la prise en charge des travaux de remise en état et à la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et l'a débouté de ses demandes, et le réformer pour le surplus, y ajoutant :

- A titre principal, juger que le bon de commande est conforme aux dispositions du code de la consommation, que Mme [S] l'a tacitement confirmé, que la société Energygo n'a commis aucun manquement contractuel justifiant la résolution du contrat et rejeter chacune des demandes, fins et prétentions de Mme [S].

- A titre subsidiaire, condamner Mme [S] à lui restituer le kit photovoltaïque et prendre en charge la remise en état de sa toiture, la condamner à rembourser à la société Franfinance le montant du capital emprunté ou le cas échéant, accorder à la société Energygo des délais de paiement de 24 mois et limiter cette condamnation au montant du capital emprunté.

- En tout état de cause, rejeter chacune des demandes, fins et prétentions de Mme [S] et la condamner à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 21 décembre 2023 révoquée le 11 janvier 2024 et la nouvelle ordonnance clôture du même jour.

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS:

L'article L.221-5 du Code de la consommation dans sa rédaction applicable à l'espèce s'agissant d'un contrat conclu le 25 janvier 2019 dispose notamment que, préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations prévues aux articles L.111-1 et L.111-2.

L'article L. 111-1 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige, énonce notamment : « Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L.112-1 à L.112-4 ;

3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte ainsi que s'il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en oeuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles. La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d'État.....».

L'article L.221-9 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties. Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L.221-5. Le contrat mentionne, le cas échéant, l'accord exprès du consommateur pour la fourniture d'un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l'expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier a l'exercice de son droit de rétractation. Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L.221-5.

Enfin, aux termes de l'article L.242-1 du Code de la consommation, les dispositions de l'article L.221-9 du même code sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.

Au cas d'espèce, la cour relève en premier lieu le caractère quasi-illisible au sens premier du terme, du texte du bon de commande au regard de la taille minuscule de ses caractères au mépris des dispositions de l'article L.221-5 du Code de la consommation sus-visé.

La cour observe également que:

- les mentions difficilement déchiffrables portées sur ce bon de commande aux termes desquelles « l'installation comporte un kit de panneaux photovoltaïques pour une puissance globale de 3 KW soit 10 panneaux de 300 Wc ... revente surplus ERDF, Option: Micro-oduleurs de marque Emphase... AB Led System pack de 20 ampoules Led. Pose en surimposition» sont insuffisantes pour décrire ses caractéristiques techniques en termes de performance, de rendement et de capacité de production, informations pourtant essentielles à la décision du consommateur (C.Cass Civ. 1ère 20/12/2023 n°22-14.020).

- la mention « délai de livraison et installation 90 jours » est irrégulière au regard des exigences de l'article L.111-1 3° dès lors que ce délai ne distingue pas entre le délai de pose des modules et celui de la réalisation des prestations à caractère administratif et ne permet pas à l'acquéreur de déterminer de manière suffisamment précise le moment de l'exécution définitive de ses obligations par le vendeur.( C.Cass Civ 1ère 15/06/2022 n°21-11.747).

La cour relève enfin, à l'instar du premier juge, que le contrat ne mentionne ni la marque des panneaux photovoltaïques, ni leurs taille et poids, alors que ces indications constituent également des caractéristiques essentielles à la décision du consommateur dont l'omission ne lui permet pas de comparer le matériel qui lui est proposé par son vendeur avec celui proposé par ses concurrents, ni d'être informé de leur lieu de fabrication et, s'agissant du poids des panneaux installés en surimposition, de vérifier la capacité de sa toiture à les supporter. ( cf s'agissant de la marque, C.Cass Civ 1ère 24/01/2024 n°21-20.691).

Et la société Energygo ne peut utilement, pour pallier ces irrégularités du bon de commande arguer de ce qu'elle aurait remis à Mme [S] les « documentations techniques détaillées du matériel avec leur garantie» laquelle a attesté de leur remise, alors qu'il résulte de l'article L.221-9 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à l'espèce, que « le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable confirmant l'engagement exprès des parties. Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L.221-5 ...» et que dès lors, les informations relatives aux caractéristiques essentielles du bien ou du service, qui sont au nombre de celles que visent ces dispositions, ne peuvent figurer sur des documents annexes qui ne sont pas signés de toutes les parties. (C.Cass, Civ 1ère , 20 Décembre 2023 n° 22-14.020).

L'ensemble des manquements ainsi relevés justifie, sans qu'il soit nécessaire d'examiner le surplus des moyens tendant aux mêmes fins , de prononcer la nullité du contrat de vente, cette nullité n'ayant pu être couverte contrairement à ce que soutient la société Econergy, par le fait que Mme [S] a réceptionné les travaux sans réserve, accepté la mise en service de l'installation et réglé les mensualités du crédit destiné à les financer, alors qu'il n'est pas établi que ce faisant , elle a eu en sa qualité de consommateur nécessairement profane, l'intention de réparer des manquements affectant le contrat dont elle avait connaissance et ainsi, de «confirmer» la nullité du contrat.(C. Cass 1ère 15/06/2022 n° 21-11.747).

Il suit de l'ensemble de ces considérations que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat conclu entre Mme [S] et la société Energygo anciennement dénommée Ab Services.

En vertu des dispositions de l'article L.312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Le prononcé de la nullité du contrat principal conclu entre Mme [S] et la société Energygo emporte en conséquence de plein droit celui du contrat de crédit conclu entre Mme [S] et la société Franfinance destiné à le financer de sorte que le jugement entrepris sera également confirmé de ce chef.

En vertu de l'article 1178 du code civil, le contrat annulé est censé n'avoir jamais existé. Les prestations exécutées donnent lieu à restitutions dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9.

Mme [S] devra dès lors mettre à disposition de la société Energygo le bien vendu cette dernière supportant le coût de cette reprise ainsi que le coût de la remise en état consécutif à celle-ci afin de replacer Mme [S] dans l'état dans lequel elle se trouvait avant la conclusion du contrat, Mme [S] étant sur ce point déboutée de sa demande de condamnation solidaire de la société Franfinance au titre de cette remise en état, le prêteur n'étant pas partie au contrat principal, le jugement étant en conséquence infirmé sur ce point.

La société Energygo sera quant à elle condamnée à restituer à Mme [S] la somme de 17900 euros au titre du prix de vente de l'installation.

S'agissant des conséquences de la nullité du contrat de prêt, la société Franfinance fait grief au premier juge de l'avoir privée de son droit à restitution arguant de l'absence de faute, de préjudice et de lien de causalité.

Mme [S] conclut quant à elle en substance à la confirmation des dispositions déférées de ce chef motif pris de plusieurs fautes commises par le prêteur notamment dans le déblocage illégal des fonds, le défaut de contrôle du contrat principal, faisant état s'agissant du préjudice, de l'absence d'exigence d'une démonstration de celui-ci au regard de la directive européenne 2008/48 du 23 avril 2008 relative aux crédits à la consommation et soutient en tout état de cause l'existence d'un préjudice dès lors que les insuffisances du bon de commande auraient dû alerter l'organisme de crédit et l'inciter à ne pas financer une opération douteuse et financièrement désastreuse pour l'emprunteur.

Il est désormais acquis en jurisprudence que le prêteur professionnel qui a versé les fonds au vendeur sans s'être assuré de la régularité formelle du contrat aux dispositions d'ordre public du code de la consommation commet une faute.

Cependant, cette faute ne dispense l'emprunteur de restituer le capital emprunté que s'il justifie avoir subi un préjudice en lien avec celle-ci, les dispositions européennes invoquées au soutien de l'exonération du consommateur de la charge de la preuve du dit préjudice n'étant pas applicables au cas d'espèce dès lors que l'article 15 2° de la Directive 2008/48 du 23 avril 2008 cité par l'intimée vise la situation des biens ou services faisant l'objet d'un contrat de crédit qui ne sont pas fournis en partie ou totalement, ou ne sont pas conformes au contrat de fourniture de biens ou de prestation de service et alors que l'installation objet du présent litige a bien été livrée et mise en service et était conforme au bon de commande.

Sur le terrain de la preuve de l'existence d'un préjudice en lien avec cette faute, Mme [S] échoue à le caractériser dès lors que le contrat de vente principal a été exécuté, que l'installation a été mise en service le 13 mars 2019, la société Franfinance justifiant n'avoir débloqué les fonds prêtés que le 14 mars, que Mme [S] n'établit pas qu'elle a dysfonctionné, faisant état dans ses mises en demeure adressées au vendeur et au prêteur le 18 octobre 2019 des seules irrégularités formelles du bon de commande et de la pose des modules antérieurement à la délivrance de l'autorisation municipale, et les rapports mensuels « Emphase» produits au titre de la période d'octobre 2022 à octobre 2023 dont il semble ressortir que l'installation ne serait plus productive, étant à eux seuls insuffisants à établir que la défaillance de l'installation en serait la cause.

Le moyen tiré de l'existence d'un préjudice lié à une faute de la banque dans le choix d'un crédit à la consommation plutôt que d'un crédit immobilier plus avantageux et protecteur pour le consommateur ne pourra prospérer dès lors que les dispositions de l'article L.313-1 du code de la consommation relatives au champs d'application du crédit immobilier en vigueur depuis le 1er juillet 2016, ne prévoient pas que relèvent de ces dispositions les opérations relatives à des travaux d'amélioration de l'immeuble hors les cas ou le crédit finance dans le même temps son acquisition, et celui garanti par une hypothèque ou une sûreté comparable.

Mme [S] allègue également à titre subsidiaire l'existence d'un préjudice lié au non-respect du devoir de vigilance du prêteur sur le fondement de l'article L312-6 du code de la consommation en ce que la société Franfinance lui a consenti le crédit sans tenir compte de son endettement déjà en cours et en s'abstenant de corroborer la fiche dialogue par des pièces justificatives.

La cour répond que Mme [S] est mal-venue à invoquer le devoir de vigilance de prêteur alors qu'elle-même a manqué à son obligation de sincérité en omettant de faire état dans la fiche dialogue signée le 25 janvier 2019 de la moindre charge alors qu'elle indique aujourd'hui avoir contracté deux crédits antérieurement à celui souscrit auprès de la société Franfinance, étant au surplus relevé qu'en l'absence de fichier national des crédits, il ne peut être reproché au prêteur de n'avoir pas pris en considération cette situation d'endettement préexistante.

Au regard de l'ensemble de ces considérations dont il ressort que Mme [S] échoue à rapporter la preuve de l'existence d'un préjudice en lien avec la faute du prêteur, la cour ne pourra qu'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a privé la société Franfinance du droit d'obtenir la restitution des sommes prêtées et statuant à nouveau, condamnera Mme [S] à lui restituer la somme de 17900 euros sous déduction des sommes versées par elle au titre du remboursement du prêt, et condamnera la société Energyco par application des dispositions de l'article L312-56 du code de la consommation, à garantir Mme [S] de cette condamnation, ladite société étant déboutée de sa demande de délais sur le fondement des dispositions de l'article 1343-5 du code civil en l'absence de justification de sa situation financière.

Partie succombante, Mme [S] supportera les dépens d'appel par application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS:

Statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- condamné solidairement la société Ab Services(nouvellement dénommée Energygo) et la société Franfinance à prendre en charge le coût des travaux de remise en état de l'immeuble de Mme [S],

- privé la société Franfinance du droit d'obtenir la restitution des sommes prêtées,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Condamne la société Energygo à prendre en charge le coût des travaux de remise en état,

Condamne Mme [S] à restituer à la société Franfinance la somme de 17900 euros au titre du capital emprunté diminuée du montant des échéances remboursées.

Condamne la société Energyco par application des dispositions de l'article L312-56 du code de la consommation, à garantir Mme [S] de cette condamnation;

Déboute la société Energyco de sa demande de délais.

Confirme pour le surplus le jugement,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de la société Franfinance.

Condamne Mme [S] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/06325
Date de la décision : 07/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-07;21.06325 ?
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