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20/06/2023 | FRANCE | N°21/06102

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Chambre commerciale, 20 juin 2023, 21/06102


Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



Chambre commerciale



ARRET DU 20 JUIN 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/06102 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PFT3





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 04 OCTOBRE 2021

TRIBUNAL DE COMMERCE DE BEZIERS

N° RG 2021000340





APPELANTE :


r>SARL LE SAINT GERMAIN immatriculée au RCS DE BEZIERS sous le n° 441 696 465 Représentée en la personne de son gérant, domicilié es-qualité au dit siège social

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Pauline AQUILA, avocat au barreau de BEZIERS substituant Me Yannick CA...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

Chambre commerciale

ARRET DU 20 JUIN 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/06102 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PFT3

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 04 OCTOBRE 2021

TRIBUNAL DE COMMERCE DE BEZIERS

N° RG 2021000340

APPELANTE :

SARL LE SAINT GERMAIN immatriculée au RCS DE BEZIERS sous le n° 441 696 465 Représentée en la personne de son gérant, domicilié es-qualité au dit siège social

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Pauline AQUILA, avocat au barreau de BEZIERS substituant Me Yannick CAMBON de la SELARL M3C, avocat au barreau de BEZIERS

INTIMEE :

S.A. AXA FRANCE IARD prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Iris RICHAUD, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Yann GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Représentée par Me Catherine DUPUY, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

Ordonnance de clôture du 21 Mars 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 AVRIL 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre

Mme Anne-Claire BOURDON, Conseillère

M. Thibault GRAFFIN, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Audrey VALERO

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Mme Anne-Claire BOURDON, Conseillère faisant fonction de président en remplacement du président de chambre régulièrement empêché, et par Mme Audrey VALERO, Greffière.

FAITS, PROCEDURE - PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:

La SARL le Saint Germain a pour activité l'exploitation d'un fonds de commerce d'hôtellerie à [Localité 4] (34), [Adresse 2].

Elle a souscrit par acte sous seing privé en date du 18 septembre 2014 auprès de la SA Axa France Iard (la société Axa) un contrat d'assurance multirisque professionnelle n° 6202883204 à effet au 1er octobre 2014, tacitement renouvelable.

Le contrat comprend des conditions générales n°690200L aux termes desquelles sont garanties les conséquences financières de l'arrêt de l'activité professionnelle déclarée par l'assurée au titre, notamment, des pertes d'exploitation (article 2.1), des conditions particulières n°6202883204 et une annexe n°952932 « Multirisque Professionnelle Annexe Hôtels et Hôtels Restaurants », qui prévoit au titre des « pertes financières » (page 7), une extension de la garantie Pertes d'exploitation :

« Perte d'exploitation suite à fermeture administrative

La garantie Perte d'exploitation est étendue au cas d'interruption ou de réduction temporaire de votre activité professionnelle en cas de fermeture provisoire (3 mois maximum) totale ou partielle de l'établissement par décision administrative à la suite d'une maladie contagieuse, de meurtre, de suicide, d'épidémie ou d'intoxication.

En aucun cas il ne peut s'agir d'une fermeture collective d'établissements dans une même région ou sur le plan national. »

Aux termes de deux arrêtés pris les 14 et 15 mars 2020 par le ministre des solidarités et de la santé, portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus covid-19, publiés au Journal officiel, les restaurants, débits de boissons et bars d'hôtel, à l'exception du « room service » ainsi que des activités de livraison et vente à emporter, ont fait l'objet d'une mesure d'interdiction d'accueillir du public pour lutter contre la propagation dudit virus, entraînant selon les cas une fermeture totale ou partielle des établissements concernés.

Divers décrets prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, publiés au Journal officiel, ont maintenu cette mesure d'interdiction d'accueil du public pour les restaurants et débits de boissons, sauf pour leurs activités de livraison et vente à emporter, le « room service » des restaurants et bars d'hôtel et la restauration collective sous contrat.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 14 janvier 2021, la société le Saint Germain a interrogé la société Axa quant à la prise en charge de la perte d'exploitation subie, celle-ci, par courrier en réponse en date du 18 janvier suivant, «confirm[ant] la non-prise en charge de la perte d'exploitation. »

Par lettre en date du 30 avril 2021, la société Axa France Iard a adressé à la société le Saint Germain une proposition d'avenant au contrat, devant prendre effet à la date anniversaire du 1er octobre 2021, par laquelle, notamment, sont exclues, pour la garantie Pertes d'exploitation, les conséquences d'une épidémie.

Saisi par acte d'huissier en date du 16 février 2021, délivré par la société le Saint Germain, le tribunal de commerce de Béziers a, par jugement du 4 octobre 2021 :

« - (') débouté la SARL le Saint Germain de toutes ses demandes ('),

- dit et jugé que les conditions de la garantie de l'assureur Axa France IARD ne sont pas remplies pour prendre en charge le sinistre,

- dit et jugé que le sinistre n'est pas dû au titre de la garantie Pertes d'exploitation,

- dit qu'il n'y a pas lieu à une quelconque condamnation au titre des dispositions de l'art. 700 du Code de Procédure Civile,

- condamné la SARL le Saint Germain aux entiers dépens de la présente décision,

- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires tenues pour injustes ou mal fondées. »

Par déclaration reçue le 15 octobre 2021, la société le Saint-Germain a régulièrement relevé appel de ce jugement

Elle demande à la cour, en l'état de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 17 mars 2023, de :

« Vu les articles 1103, 1104, 1112-1, 1170, 1190 et 1241 du code civil, vu les articles L112-4, L 113-1, L 113-5 et L 521-4 du code des assurances, ('),

- Rejetant toutes fins, demandes et conclusions contraires,

- Déclarer ses demandes recevables et bien fondées,

- Réformer le jugement rendu (') en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes ('),

- statuant à nouveau,

- Débouter Axa France IARD de ses demandes comme étant injustes et mal fondées,

- Juger que les critères d'indemnisation de la garantie 'perte d'exploitation suite à fermeture administrative' souscrite auprès d'Axa France IARD (') sont réunis concernant les pertes d'exploitation subies par cette dernière du 15 mars au 2 juin 2020 et du 29 octobre 2020 jusqu'à l'autorisation administrative de réouverture au public,

- Juger que la clause 'en aucun cas il ne peut s'agir d'une fermeture collective d'établissement dans une même région ou sur le plan national' n'est pas mentionnée en caractère très apparent et n'est ni formelle ni limitée vidant ainsi la garantie de sa substance,

- Juger la clause 'en aucun cas il ne peut s'agir d'une fermeture collective d'établissement dans une même région ou sur le plan national' non écrite,

- Prononcer l'annulation de ladite clause d'exclusion en l'absence de caractère formel et limité et à défaut de rédaction en caractères très apparents,

- En conséquence, juger que la garantie perte d'exploitation est due par la société Axa France IARD,

- En conséquence, condamner Axa France IARD à indemniser les pertes d'exploitation subies pendant les périodes du 15 mars au 2 juin 2020 et du 29 octobre 2020 jusqu'à l'autorisation administrative de réouverture au public, dans la limite totale de 24 mois,

- Avant dire droit, ordonner une mesure d'instruction consistant en une expertise judiciaire et désigner tel expert qu'il plaira à la Cour avec la mission suivante :

- Prendre connaissance des conditions particulières du contrat d'assurance de la SARL le Saint Germain, des conditions générales et de l'annexe Hôtels & Hôtels Restaurants,

- Prendre connaissance de tout élément comptable de la société le Saint Germain,

- Evaluer le montant des dommages constitués par la perte de marge brute subie pendant la période d'indemnisation conformément aux conditions du contrat d'assurance,

- Evaluer le montant des dommages constitués par la perte de revenus subie pendant la période d'indemnisation conformément aux conditions du contrat d'assurance,

- Evaluer le montant des frais supplémentaires d'exploitation pendant la période d'indemnisation conformément aux conditions du contrat d'assurance,

- Entendre tout sachant lui permettant de mener à bien sa mission d'expertise,

- Se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utiles à sa mission,

- S'il l'estime nécessaire se rendre sur place,

- Mener de façon strictement contradictoire ses opérations d'expertise, en particulier en faisant connaître aux parties, l'état de ses avis et opinions à chaque étape de sa mission, puis un document de synthèse en vue de recueillir les dernières observations des parties avant une date ultime qu'il fixera avant le dépôt de son rapport,

' Donner plus généralement à la juridiction tous les éléments nécessaires à la solution du litige, au besoin avec tout sapiteur compétent,

- juger que les frais d'expertise seront à la charge de la société Axa France IARD,

- A titre provisionnel, condamner Axa France IARD à lui payer la somme provisionnelle de 50 000 euros à valoir sur le montant définitif de l'indemnité qui résultera de la mesure d'instruction ordonnée outre intérêts au taux légal à compter de la présente assignation,

- En tout état de cause, condamner Axa France IARD à lui payer la somme provisionnelle de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure et aux entiers dépens de première instance et d'appel. »

Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que :

- le contrat d'assurance n'est pas nul au visa des articles L. 113-2 et L. 113 -8, en ce qu'elle n'a fourni aucune fausse déclaration, ni omis de fournir la moindre information quant à son chiffre d'affaires, la différence de chiffre d'affaires entre 2018 et 2019 à hauteur d'une augmentation de 10 %, qui n'a pas été communiquée à l'assureur, n'est qu'une omission, n'étant pas de nature à changer l'objet du risque assuré (le montant de la cotisation ayant augmenté chaque année en raison de l'augmentation du chiffre d'affaires déclaré),

- l'impossibilité de la clientèle de se rendre dans son établissement du fait de la limitation des déplacements résultant des mesures gouvernementales a entraîné un arrêt de l'activité, le service en chambre (room service) ne pouvant plus fonctionner,elle a subi une interdiction d'accueillir du public et a dû fermer ses portes à compter du 14 mars 2020,

- à compter du 15 décembre 2020, il subsistait une entrave au libre accès à son établissement,

- l'interdiction d'accueillir du public s'est traduite par une fermeture de l'établissement, la possibilité de vente à emporter ou de service en chambre ne permettant pas un exercice normal de l'activité d'hôtel-restaurant et la garantie perte d'exploitation est due,

- selon le contrat, elle est garantie en cas de fermeture administrative provisoire totale ou partielle suite à une épidémie, or la fermeture temporaire partielle de son établissement est intervenue suite aux décisions gouvernementales liées à la lutte contre la propagation du virus covid 19 et cette maladie a été expressément qualifiée de pandémie,

- le contrat ne prévoit aucune exclusion du risque épidémique ou pandémique,

- la clause d'exclusion liée à la fermeture collective d'établissement n'est pas mentionnée en caractères très apparents et il s'agit bien d'une clause d'exclusion et non d'une circonstance affectant le risque au titre de la définition des conditions de mise en 'uvre de la garantie,

- l'avenant transmis par Axa en avril 2021 comprend une clause d'exclusion apparente du risque pandémique et traduit la reconnaissance sans équivoque par Axa du caractère nul de la précédente clause,

- les clauses d'exclusion doivent être formelles et limitées comme l'impose l'article L. 113-1 du code des assurances,

- l'exclusion de fermeture administrative en raison d'épidémie « lorsque la fermeture est collective dans une même région ou sur le plan national » prive de sa substance la garantie, une épidémie ne pouvant toucher qu'un seul établissement et les fermetures individuelles administratives n'étant prononcées qu'à titre de sanction à des manquements,

- la jurisprudence considère que ces clauses ne sont pas limitées,

- l'application de la garantie et le calcul de l'indemnisation devant être fait en application du contrat justifie que soit ordonnée une mesure d'instruction avec fixation d'une provision pour le montant de laquelle elle produit des documents comptables.

Formant appel incident, la société Axa sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 20 mars 2023 :

« - A titre principal, confirmer le jugement (') en ce qu'il a débouté la société le Saint Germain de toutes ses demandes ('),

- A titre subsidiaire, si la Cour infirmait le jugement ('), déclarer que les conditions de la garantie de la société AXA France IARD ne sont pas remplies en l'espèce ;

- Débouter la société le Saint Germain de l'intégralité de ses demandes (');

- A titre plus subsidiaire, si la Cour estimait que la garantie est mobilisable, déclarer que la preuve du montant des pertes d'exploitation qui serait garanti aux termes de la police d'assurance n'est pas rapportée ;

- Débouter la société le Saint Germain de l'ensemble de ses demandes ('),

- Plus subsidiairement encore, déclarer que seules les pertes d'exploitation afférentes aux activités objets d'une fermeture administratives sont garanties;

- Désigner un expert avec pour mission de chiffrer le montant des pertes d'exploitation garanties, aux frais de l'appelante, avec les précisions :

- se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utile à l'accomplissement de sa mission, notamment l'estimation effectuée par l'intimée et/ou son expert-comptable, accompagnée de ses bilans et comptes d'exploitation sur les trois dernières années ;

- entendre les parties ainsi que tout sachant et évoquer, à l'issue de la première réunion avec les parties le calendrier possible de la suite de ses opérations ;

- chiffrer les pertes d'exploitation garanties contractuellement par le contrat d'assurance pour la seule activité « restauration » et « bar », dans la limite du plafond de garantie prévu aux Conditions Générales, et sur les seules périodes allant du 15 mars au 2juin 2020 et du 30 octobre 2020 au 30 janvier 2021 ;

- chiffrer et tenir compte de l'ensemble des économies réalisées par l'assuré au cours de la période d'indemnisation ainsi que de l'ensemble des aides d'Etat perçues ;

- chiffrer et tenir compte des coefficients de tendance générale de l'évolution de l'activité et des facteurs externes et internes susceptibles d'être pris en compte pour le calcul de la perte de marge brute imputable à la mesure de fermeture administrative ;

- Rejeter les chefs de mission sollicites par la société le Saint Germain ;

- Débouter la société le Saint Germain de toute demande de provision ;

- Débouter la société le Saint Germain du surplus de ses demandes ;

- En tout état de cause, débouter la société le Saint Germain de toute demande excédant la limite de garantie prévue aux conditions générales ;

- Débouter la société le Saint Germain de toute demande fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens ;

- Condamner la société le Saint Germain à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction ('),

- Débouter la société le Saint Germain de l'ensemble de ses demandes (') à son encontre. »

Elle expose en substance que :

- elle n'a pas maintenu devant le tribunal son argumentaire relatif à la nullité du contrat, celui-ci n'ayant pas tranché cette question,

- par l'effet du contrat, les pertes d'exploitation subies en raison d'une interruption ou d'une réduction de l'activité sont garanties dès lors que deux conditions cumulatives sont réunies, d'une part l'interruption/la réduction doit résulter d'une décision administrative ordonnant la fermeture totale ou partielle de l'établissement à la suite d'une épidémie notamment et d'autre part, cette fermeture administrative ne doit pas concerner d'autres établissements dans la même région ou sur le plan national,

- aucune des mesures administratives prises pour limiter la propagation du covid 19 n'a ordonné la fermeture des hôtels à partir de mars 2020 ou en octobre 2020 ; l'interdiction d'accueil du public ne visait pas les hôtels,

- la circonstance que la clientèle a cessé de fréquenter l'établissement ne constitue pas une fermeture partielle donnant lieu à garantie puisque le contrat ne couvre que les conséquences d'une fermeture administrative, qui n'existait pas en l'espèce,

- aucune mesure administrative n'a ordonné la fermeture des restaurants d'hôtel, l'activité de restauration se poursuivant par le biais du service en chambre,

- si l'établissement avait fait l'objet d'une fermeture administrative, la garantie ne s'appliquerait pas davantage, puisque les mesures gouvernementales s'appliquaient sur l'ensemble du territoire de la République,

- la stipulation contractuelle selon laquelle « il ne peut s'agir d'une fermeture collective d'établissement dans une même région ou sur le plan national » ne constitue pas une clause d'exclusion et n'est pas soumise à son formalisme, mais participe à définir le périmètre de la garantie ; la clause qui a pour objet de placer hors de son champ certains types de dommages, constitue une condition de la garantie et non une clause d'exclusion de garantie,

- selon le code de la sécurité intérieure, qui renvoie à l'article L. 3332-15 du code de la santé publique, les décisions de fermeture administrative sont par nature des décisions prononcées à titre individuel,

- la clause est claire et précise et est insusceptible d'interprétation,

- le risque assuré n'est pas le risque d'une épidémie, mais celui d'une fermeture administrative, l'obligation de garantie ne joue qu'en cas de fermeture administrative causée par une épidémie à condition que cette fermeture ne soit pas ordonnée à plusieurs établissements de la région ou sur le plan national, or une fermeture administrative pour cause d'épidémie peut être circonscrite à un seul établissement (salmonellose) ; la garantie n'est donc pas vidée de sa substance,

- les documents comptables produits ne suffisent pas pour justifier le montant d'une provision tandis que la marge brute perdue doit être différenciée pour chacune des activités hôtellerie et restauration, le contrat prévoit une période d'indemnisation et le calcul opéré ne respecte pas la méthode prévue par le contrat (s'agissant des facteurs internes et externes dont il faut tenir compte).

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 21 mars 2023.

MOTIFS de la DÉCISION :

1- sur la garantie

Au préalable, il convient de constater qu'aucune demande de nullité du contrat d'assurance litigieux n'est soumise à la cour, qui n'est, donc, pas saisie d'une telle demande.

Selon l'article 1156 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes plutôt que de s'arrêter au sens littéral de ses termes.

L'article 1162 du même code, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, dispose que dans le doute, la convention s'interprète contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation.

Les dispositions contractuelles, liant les parties, édictent sans ambiguïté, et sauf à les dénaturer, que le contrat d'assurance couvre, dans le cadre d'une extension de la garantie des pertes d'exploitation, l'interruption ou la réduction de l'activité déclarée, résultant de la fermeture provisoire totale ou partielle du fonds de commerce assuré, décidée par une autorité administrative en cas notamment d'une épidémie, sauf fermetures administratives collectives au sein d'une même région ou sur le plan national.

L'énoncé de cette clause, selon lequel 'en aucun cas il ne peut s'agir d'une fermeture collective d'établissements dans une même région ou sur le plan national », exprime une exigence générale et précise à laquelle la garantie est subordonnée et détermine l'étendue de la garantie en plaçant hors de son champ les fermetures individuelles ; il institue une condition de celle-ci, et non une exclusion de garantie.

S'agissant, ainsi, des conditions de mise en 'uvre de la garantie, il appartient à l'assuré d'en démontrer la réunion, et non, à l'assureur de rapporter l'application d'une clause d'exclusion.

A défaut de caractériser une clause d'exclusion, cette stipulation contractuelle ne nécessite nullement d'être formulée en caractères très apparents comme le prescrit l'article L. 112-4 du code des assurances et l'argumentation relative au caractère formel et limité des clauses d'exclusion prévu par l'article L. 113-1 de ce même code et au fait que celles-ci ne doivent pas vider la garantie de sa substance est inopérante.

Les deux arrêtés ministériels, pris les 14 et 15 mars 2020, portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus covid-19, ont prévu, afin de ralentir la propagation de ce virus, que les restaurants et débits de boissons (établissements relevant des catégories mentionnées à l'article GN1 de l'arrêté du 25 juin 1980, soit la catégorie N alors que les hôtels (et pensions de famille) relèvent de la catégorie O), ne peuvent plus accueillir du public, sauf pour leurs activités de livraison et de vente à emporter et le « room service » des restaurants et bars d'hôtels (') tandis que le décret n°2020-293 du 23 mars 2020 permettait aux établissements, tels que les restaurants notamment, de continuer à recevoir du public pour leurs activités relevant de l'hôtellerie et hébergement similaire (').

L'article 40 du décret n°2020-1310 du 29 octobre 2020, prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, a maintenu cette interdiction d'accueil pour les restaurants et débits de boissons (I 1°) et édicté cette mesure concernant les hôtels pour les espaces dédiés aux activités de restauration et de débit de boissons (I 4°), à l'exclusion des activités de livraison et vente à emporter et du « room service » des restaurants et bars d'hôtel (').

Par ailleurs, les déplacements et le transport de personnes hors de leur domicile ou lieu de résidence ont été interdits ou limités à des motifs impérieux d'ordre personnel ou familial, de santé relevant de l'urgence ou professionnel ne pouvant être différé pendant l'état d'urgence sanitaire.

Les dispositions des articles L. 3131-1 et L. 3131-15 du code de la santé publique, issues de la loi n°2020-290 du 23 mars 2020, qui fondent ces mesures gouvernementales, permettaient, aux autorités compétentes, d'ordonner la fermeture provisoire d'une ou plusieurs catégories d'établissements recevant du public ('), à l'exception des établissements fournissant des biens ou des services de première nécessité, puis, dès le 12 mai 2020, d'ordonner la fermeture provisoire et de réglementer l'ouverture, y compris les conditions d'accès et de présence, d'une ou plusieurs catégories d'établissements recevant du public ('), le représentant de l'Etat territorialement compétent pouvant être habilité à prendre toutes les mesures d'application, y compris des mesures individuelles, rappelant, in fine, que les mesures prescrites (') sont strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu (.. .).

Ainsi, outre la poursuite de l'activité de « room service » pour les restaurants et bars d'hôtels, les hôtels n'ont pas fait l'objet de décisions de l'autorité administrative compétente de fermeture de leurs établissements, qui sont restés ouverts malgré les mesures restreignant les déplacements et les transports, qui, si elles ont pu entraîner, comme conséquence, une fermeture, au moins partielle, dudit hôtel, qu'évoque, notamment, le préambule de l'arrêté du 14 mars 2020, n'en étaient pas la cause, étant rappelé que le contrat d'assurance ne couvre pas le risque de la survenance d'une épidémie, mais celui d'une fermeture administrative découlant, notamment, d'une épidémie.

Les conditions d'application et de mise en 'uvre de l'extension de garantie ne sont donc pas remplies et les demandes de la société le Saint Germain seront rejetées.

Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.

2- sur les autres demandes

Succombant, la société le Saint Germain sera condamnée aux dépens d'appel et au vu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à payer la somme de 1 500 euros, sa demande sur ce fondement étant rejetée.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme dans toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Béziers en date du 4 octobre 2021 ;

Condamne la SARL le Saint Germain à payer à la SA Axa France Iard la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette la demande de la SARL le Saint Germain fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SARL le Saint Germain aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.

le greffier, la conseillère faisant fonction de président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21/06102
Date de la décision : 20/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-20;21.06102 ?
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