COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
N° RG 23/00254 - N° Portalis DBVK-V-B7H-P2NO
O R D O N N A N C E N° 2023 - 255
du 17 Mai 2023
SUR PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE
dans l'affaire entre,
D'UNE PART :
Monsieur X se disant [J] [G] alias [V] [P]
né le 05 Août 1981 à COLLO (ALGERIE)ou le 11 février 1983 à SKIKDA (ALGERIE)
de nationalité Algérienne
retenu au centre de rétention de [Localité 4] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,
Comparant et assisté de Maître Dieudonné Michel GHIAMAMA MOUELET, avocat commis d'office.
Appelant,
et en présence de [N] [C], interprète assermenté en langue arabe,
D'AUTRE PART :
1°) PREFET DU VAR
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représenté par Monsieur [H] [W], dûment habilité,
2°) MINISTERE PUBLIC :
Non représenté
Nous, Jonathan ROBERTSON conseiller à la cour d'appel de Montpellier, délégué par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Laurence MONDA, greffière,
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Vu l'arrêté du 12 mai 2023 DU PREFET DU VAR portant obligation de quitter le territoire national sans délai pris à l'encontre de Monsieur X se disant [J] [G] alias [V] [P].
Vu la décision de placement en rétention administrative du 12 mai 2023 de Monsieur X se disant [J] [G] alias [V] [P], pendant 48 heures dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire.
Vu l'ordonnance du 15 Mai 2023 à 14H22 notifiée le même jour à la même heure, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de MONTPELLIER qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de vingt-huit jours.
Vu la déclaration d'appel faite le 16 Mai 2023, par Maître Dieudonné Michel GHIAMAMA MOUELET, avocat, agissant pour le compte de Monsieur X se disant [J] [G] alias [V] [P], transmise au greffe de la cour d'appel de Montpellier le même jour, à 13H29.
Vu les télécopies et courriels adressés le 16 Mai 2023 à PREFET DU VAR, à l'intéressé, à son conseil, et au Ministère Public les informant que l'audience sera tenue le 17 Mai 2023 à 12 H 00.
L'avocat et l'appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, dans le box dédié de l'accueil de la cour d'appel de Montpellier, les portes de la salle étant fermées pour assurer la confidentialité de l'entretien, en la seule présence de l'interprète , et ce, sur le temps de l'audience fixée, avec l'accord du délégué du premier président de la cour d'appel de Montpellier.
L'audience publique initialement fixée à 12 H 00 a commencé à 12H 15.
PRETENTIONS DES PARTIES
Assisté de [N] [C], interprète, Monsieur X se disant [J] [G] alias [V] [P] confirme son identité telle que mentionnée dans l'ordonnance entreprise et déclare sur transcription du greffier à l'audience : ' Je ne suis pas [V] [P]. Je suis bien né le 05 Août 1981 à COLLO (ALGERIE). J'ai fait appel car je voudrais reprendre mon travail en CDI. Je suis en cuisine. Je suis hébergé, je paye un loyer mais je ne suis pas sur le contrat de bail.
Me [D] [K] remet un contrat de location.
Je n'ai pas de famille en France. Je suis arrivé en 2018. J'attendais d'avoir 24 fiches de paie pour demander une régularisation. J'en ai 23 actuellement. '
L'avocat Me Dieudonné Michel GHIAMAMA MOUELET développe les moyens de l'appel formé contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui a prolongé le maintien en rétention de l'étranger. Défaut de base légale : OQTF notifié le 15 mai 2023 or c'est le 12 mai 2023. L'administration n'a pas corrigé cet élément.
Au fond, Monsieur [J] est en CDI, cela presque 2 ans qu'il travaille.'
Monsieur le représentant de PREFET DU VAR demande la confirmation de l'ordonnance déférée. Il indique à l'audience : ' La date c'est une faute de plume.
L'examen de sa situation a été faite par la Prefecture'.
Assisté de [N] [C], interprète, Monsieur X se disant [J] [G] alias [V] [P] a eu la parole en dernier et a déclaré sur transcription du greffier à l'audience : ' Je demande de me donner une dernière chance pour régulariser ma situation. '
Le conseiller indique que la décision et la voie de recours seront notifiées sur place, après délibéré.
SUR QUOI
Sur la recevabilité de l'appel :
Le 16 Mai 2023, à 13H29, Maître Dieudonné Michel GHIAMAMA MOUELET, avocat, agissant pour le compte de Monsieur X se disant [J] [G] alias [V] [P] a formalisé appel motivé de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de [Localité 3] du 15 Mai 2023 notifiée à 14H22, soit dans les 24 heures de la notification de l'ordonnance querellée, qu'ainsi l'appel est recevable en application des articles R 743-10 et R 743-11 du CESEDA.
Sur l'appel :
Monsieur [J] excipe de l'irrégularité de la procédure aux motifs, d'une part, du défaut de base légale de l'arrêté de placement en rétention, en ce que l'OQTF a été notifiée le 15 mai 2023 alors que l'arrêté de placement date du 12 mai 2023, et, d'autre part, du défaut de prise en compte de sa situation personnelle alors qu'il bénéficie d'un emploi et d'un logement.
Toutefois, ainsi que l'a pertinemment relevé le premier juge, la mention sur l'OQTF selon laquelle elle a été notifée le 15 mai 2023 ne peut qu'être une erreur matérielle, dès lors que l'ensemble des autres actes de la procédure (décision de placement, audition de garde-à-vue, registre du CRA) mentionne la date du 12 mai 2023, de sorte qu'il est acquis aux débats que l'OQTF a bien été notifiée le 12 mai 2023, l'arrêté de placement en rétention ne souffrant donc d'aucun défaut de base légale.
De même, il ne saurait être argué de ce que le préfet n'a pas pris en compte la situation de Monsieur [J], qui, présent depuis trois ans sur le territoire national, n'a pas manifesté son intention de régulariser sa situation, qui a fait l'objet d'une précédente OQTF à laquelle il ne s'est pas soumis, qui certes, justifie d'un emploi, mais pas d'un logement suffisamment stable s'agissant d'une sous-location à titre gratuit - le seul fait de travailler ne pouvant mettre en échec, le cas échéant, une mesure de rétention.
Les moyens seront donc rejetés.
SUR LE FOND
L'article L742-3 du ceseda : 'Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court pour une période de vingt-huit jours à compter de l'expiration du délai de quarante-huit heures mentionné à l'article L. 741-1.'
En application des dispositions de l'article L612-2 du ceseda: 'Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants :
1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ;
2° L'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse ;
3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet.'
Et selon l'article L 612-3 du ceseda: 'Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :
1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;
4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;
5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;
6° L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;
7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ;
8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.'
En l'espèce, l'intéressé ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure dès lors que Monsieur [J] s'est déjà soustrait à une précédente mesure d'éloignement, qu'il n'entend manifestement pas quitter le territoire français, qu'il ne justifie pas avoir entrepris de régulariser sa situation et qu'il ne justifie que d'un logement précaire s'agissant d'une sous-location à titre gratuit.
Il y a lieu en conséquence de confirmer l'ordonnance déférée.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement,
Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,
Vu les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
Déclarons l'appel recevable,
Rejetons les exceptions de nullité et moyens de nullité,
Confirmons la décision déférée,
Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l'article R743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile,
Fait à Montpellier, au palais de justice, le 17 Mai 2023 à 12H40.
Le greffier, Le magistrat délégué,