Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4e chambre civile
ARRÊT DU 27 AVRIL 2023
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 20/04684 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OXMH
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 15 OCTOBRE 2020 Tribunal judiciaire de PERPIGNAN N° RG 18/01125
APPELANT :
Monsieur [P] [V]
né le 06 Novembre 1978 à [Localité 4] ([Localité 4])
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représenté par Me Marjorie AGIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituant Me Céline PIRET de la SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE- KNOEPFFLER -HUOT -PIRET-JOUBES, avocat au barreau de PYRENEES- ORIENTALES, avocat postulant et plaidant
INTIMEE :
SARL Cuisine A+ représentée en la personne de son gérant, domicilié es-qualité au dit siège social
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Christine AUCHE HEDOU substituant Me Jacques Henri AUCHE de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant, et Me Christopher NESE, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 mars 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre
Mme Cécile YOUL-PAILHES, Conseillère
Madame Marianne FEBVRE, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Charlotte MONMOUSSEAU
lors de la mise à disposition : Mme Henriane MILOT
ARRET :
- contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, prévu le 20 avril 2023 et prorogé au 27 avril 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Henriane MILOT, Greffière.
*
* *
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par le biais d'un bon signé le 19 janvier 2017, M. [P] [V] qui faisait construire sa maison a commandé à la SARL Cuisine A+ la fourniture et l'installation d'une cuisine sur mesure et équipée, pour un montant total de 32.830 €. Il a réglé deux acomptes : 10.300 € le jour de la commande et 9.849 € le 12 avril 2017.
Suite à un retard dans les travaux de construction de la maison, la pose de la cuisine qui était initialement prévue pour la fin mars 2017, a été décalée au mois de mai 2017. Après exécution de quelques finitions, la prestation a été terminée courant juillet 2017.
Le 2 novembre 2017, le cuisiniste a fait délivrer au client une sommation de régler le solde de la facture établie le 8 août 2017 pour un montant en principal de 12.681 €. Puis, il a déposé une requête en injonction de payer que le tribunal d'instance de Perpignan a accueillie le 20 décembre 2017 à concurrence de 9.849 € en principal.
Le 30 janvier 2018, M. [V] a formé opposition à l'ordonnance d'injonction de payer qui lui avait été signifiée le 19 janvier précédent devant le tribunal d'instance de Perpignan. Cependant, l'avis de réception de la lettre de convocation à l'audience du 18 mai 2018 adressée par le greffe de ce tribunal n'a pas été signé par le requérant dans les conditions de l'article 670 du code de procédure civile.
Parallèlement et par acte du 16 mars 2018, la société Cuisine A+ a fait assigner M. [V] devant le tribunal de grande instance de Perpignan en paiement de la somme de 12.681€ en principal.
Vu le jugement du 15 octobre 2020 par lequel le tribunal judiciaire de Perpignan a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- déclaré recevable l'opposition formée le 30 janvier 2018 par M.[V] à l'encontre de l'ordonnance portant injonction de payer du 20 décembre 2017 et dit que le jugement se substituait à cette ordonnance, cela après avoir formellement constaté que la lettre de convocation adressée par le greffe du tribunal d'instance n'avait pas été signé dans les conditions prévues à l'article 670 du code de procédure civile, que la société A+ Cuisine avait procédé par voie de signification conformément à l'article 670-1 du même code en assignant M. [V] le 16 mars 2018 devant le tribunal de grande instance de Perpignan en raison du montant de la demande, que M. [V] n'avait élevé aucune contestation sur la juridiction saisie et, enfin, que le tribunal judiciaire de Perpignan était désormais compétent pour statuer (sur les deux types de procédures),
- condamné M. [V] à payer à la société A+ Cuisine la somme de 12.681 € majorée des intérêts au taux légal à compter du 2 novembre 2017,
- débouté la société A+ Cuisine et M. [V] de leurs demandes réciproques de dommages-intérêts ainsi que de toutes autres demandes plus amples ou contraires,
- condamné M. [V] à payer à la société A+ Cuisine une indemnité de 1.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,
Vu la déclaration d'appel de M. [V] en date du 27 octobre 2020,
Vu ses dernières conclusions, en date du 10 novembre 2021, par lesquelles il demande à la cour de réformer partiellement le jugement entrepris et, en substance, de :
- débouter la société Cuisine A+ de toutes demandes et la condamner au paiement de la somme de 15.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,
- subsidiairement, ordonner la compensation entre les sommes dues,
- en tout état de cause, condamner la société Cuisine A+ au paiement d'une indemnité de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, avec distraction au profit de son avocat conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
Vu les dernières conclusions prises le 19 janvier 2023 pour le compte de la société Cuisine A+ intimée aux fins - en résumé - de :
- confirmation du jugement dont appel sauf sur le rejet de sa demande indemnitaire,
- infirmation sur ce point et condamnation de M. [V] à lui payer la somme de 3.500 € à titre de dommages-intérêts,
- condamnation de ce dernier à lui payer en outre une indemnité de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens d'appel,
Vu l'ordonnance de clôture en date du 08 février 2023,
Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur la demande de paiement du solde de la facture du cuisiniste :
Au soutien de son appel, M. [V] réitère tout d'abord que le prix de la prestation s'élevait à la somme de 30.830 € et non 32.830 € comme invoqué par la société Cuisine A+.
Cependant et comme justement constaté par le premier juge, le client ne peut utilement opposer un devis non signé établi le 22 décembre 2016 alors qu'il produit lui-même l'original d'un bon de commande daté du 19 janvier 2017 pour une prestation (fournitures et pose) consentie à 32.830 € malgré un détail aboutissant à un total de 34.245 € (meubles : 23.645 € ; appareils ménagers : 9.100 € et pose des meubles : 1.500 €), et alors que ce bon de commande est strictement conforme au devis détaillé du 19 janvier 2017 produit par le cuisiniste et dont il avait contresigné toutes les pages.
L'appelant invoque par ailleurs à nouveau l'exception d'inexécution, en faisant valoir en résumé que la prestation n'a jamais été achevée et qu'elle n'était pas conforme puisque des tiroirs étaient manquants, qu'il ne pouvait s'assurer que la plaque de cuisson correspondait à celle qu'il avait commandé et que celle qui lui avait été installée était fissurée.
Or, comme l'oppose à juste titre l'intimée, M. [V] fonde son argumentation sur un procès verbal de constat d'huissier établi le 7 juin 2019, soit près de deux ans après la pose intégrale de la cuisine, de sorte que le fait que deux panneaux soient manquants sous les plaques de cuisson ou que la plaque de cuisson soit fissurée à l'angle inférieur droit ne permet pas d'imputer un quelconque manquement à la société Cuisine A+ qui produit quant à elle une photographie de l'installation comportant bien les deux panneaux qui étaient manquants deux ans plus tard.
L'appelant fait également état d'un aveu judiciaire de la part du prestataire qui - selon lui - avait reconnu lors de l'été 2017 que, certaines façades de tiroirs avaient été abîmées pendant le transport et devaient être remplacées, ce qui n'avait jamais été réalisé.
Il ressort pourtant bien des explications de l'intimée et des pièces produites que la cuisine avait été livrée et installée au mois de mai 2017 et qu'il ne manquait qu'à remplacer quelques façades de portes abîmées lors du transport, lesquelles avaient effectivement été remplacées au mois de juillet 2017. Quant aux travaux non terminés reprochés au prestataire lors des échanges entre les parties, ils n'avaient pas trait à l'installation de la cuisine litigieuse, mais ils concernaient d'autres meubles ou éléments (une table en bois et un plan de travail) ne faisant pas partie de ce marché, s'agissant d'éléments commandés d'une part à la société Menuiserie du Lac et pour l'autre à la marbrerie Francisco non visés dans le devis détaillé du 19 janvier 2017.
Par ailleurs, depuis cette période et jusqu'à ses premières conclusions dans le cadre de l'instance engagée par le cuisiniste devant le tribunal judiciaire de Perpignan, ce client ne s'est jamais plaint de la mauvaise qualité de la prestation fournie.
A l'instar du tribunal, la cour estime que M. [V] ne rapporte pas la preuve d'une inexécution par le prestataire de ses obligations contractuelles susceptible de justifier son refus de payer le solde des sommes facturées en vertu du devis détaillé et du bon de commande signé ce jour là.
Le jugement sera donc confirmé du chef de la condamnation de M. [V] au paiement de la somme de 12.681 € majorée des intérêts au taux légal à compter de la sommation de payer (le 2 novembre 2017).
Sur les demandes indemnitaires :
Par suite de la confirmation de sa condamnation au titre de ses obligations contractuelles, M. [V] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.
En première instance, la société Cuisine A+ a été déboutée de sa propre demande indemnitaire de ce chef au motif qu'elle n'établissait pas l'existence d'un préjudice distinct de celui déjà réparé par les intérêts moratoires.
Compte tenu de la faiblesse des moyens soulevés dans le cadre du présent appel pour s'opposer encore - plus de 5 ans plus tard - au paiement du solde d'une facture pour un montant de 12.681 €, la cour constate que le recours est abusif et que, par sa mauvaise foi et une résistance devenue abusive, M. [V] a causé à la société Cuisine A+ un préjudice indépendant du retard réparé par l'intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure, préjudice qu'elle estime pouvoir justement réparer par l'octroi d'une somme de 3.000 €.
Partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, M. [V] supportera les dépens d'appel et sera condamné à payer à la société Cuisine A+ une indemnité au titre des frais par elle exposés en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe
Confirme le jugement entrepris, sauf sur le rejet de la demande indemnitaire de la société Cuisine A+ ;
Statuant à nouveau de ce chef infirmé, et y ajoutant,
Condamne M. [V] à payer à la société Cuisine A+ les sommes suivantes :
- 3.000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
- 2.500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [V] aux dépens d'appel.
Le Greffier Le Président