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délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
Chambre commerciale
ARRET DU 04 AVRIL 2023
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 21/04543 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PCUS
Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 JUIN 2021
TRIBUNAL DE COMMERCE DE BEZIERS
N° RG 2019002635
APPELANTE :
SARL LES PEINTURES OCCITANES prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au dit siège social
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Bachir BELKAID, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Gilles BERTRAND de la SCP ROZE, SALLELES, PUECH, GERIGNY, DELL'OVA, BERTRAND, AUSSEDAT, SMALLWOOD, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
S.A.S. SOCIETE DE BATIMENT PIERRES ET RESTAURATION (SBPR) prise en la personne de son représentant légal en exercice
[Adresse 5]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Jean BELLISSENT de la SCP BELLISSENT - HENRY, avocat au barreau de BEZIERS
Ordonnance de clôture du 17 Janvier 2023
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 FEVRIER 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre
Mme Anne-Claire BOURDON, Conseiller
M. Thibault GRAFFIN, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvie SABATON
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, et par Madame Audrey VALERO, Greffière.
*
* *
FAITS et PROCÉDURE - MOYENS et PRÉTENTIONS DES PARTIES:
La SAS Société de bâtiment Pierres et Restauration (la société SBPR), dont le gérant est [B] [G], est spécialisée dans la rénovation de bâtiments.
La SARL les Peintures occitanes, dont la gérante est [C] [Z], a pour activité tous travaux de peinture, décoration, ravalement de façade et restauration de la pierre.
Par acte sous seing privé en date du 19 septembre 2017, la société SBPR a confié à la société Peintures occitanes le lot n°12 - peinture du marché de réhabilitation de 13 logements à [Localité 7] ([Adresse 6]) par le biais d'un contrat de sous-traitance moyennant un prix de 39 048,51 euros HT.
La société I2F est maître d'ouvrage, la société Arx Architecture est maître d'oeuvre et la SARL [O] [L] est chargée de la planification de l'ouvrage et de l'établissement des bons à payer (OPC).
La société SBPR a refusé de régler en septembre 2018 auprès du factor, la SA Crédit agricole Leasing et Factoring, la situation n°4, ainsi que trois factures d'un montant total de 12 047,43 euros.
Par ordonnance portant injonction en date du 2 avril 2019, le président du tribunal de commerce de Béziers a condamné la société les Peintures occitanes à payer à la société Crédit agricole Leasing et Factoring, dans le cadre des sommes que cette dernière avait réglé à la société SBPR au titre d'un contrat d'affacturage, 12 047,43 euros à titre principal sous réserve de la déduction d'un acompte de 5 000 euros, outre les frais accessoires.
Statuant sur opposition, le tribunal de commerce de Béziers a, par jugement du 5 octobre 2020, notamment ordonné une mesure d'expertise.
Par jugement en date du 7 juin 2021, après avoir prononcé une jonction avec l'assignation délivrée le 2 juillet 2019 par la société les Peintures occitanes afin de paiement à hauteur de la somme de 7 793,62 euros, le tribunal de commerce de Béziers a :
'- dit et jugé que la désignation de l'expert [D] et sa mesure d'expertise ordonnée par jugement préparatoire de notre tribunal en date du 5 octobre 2020 sont caduques,
- dit et jugé qu'il sera statué au vu des seuls éléments présents au dossier,
- condamné la société les Peintures occitanes à payer à la société SBPR la somme de 1 521,64 euros,
- débouté la société SBPR de sa demande relative aux dommages et intérêts au titre de la résistance abusive,
- reçu la société les Peintures occitanes en son opposition,
- l'en a débouté,
- mit à néant l'ordonnance portant injonction de payer,
Et statuant à nouveau,
- condamné la société les Peintures occitanes à payer à la société Crédit agricole Leasinq et Factoring la somme de 7047,43 euros au titre de la créance non valablement transférée majorée des intérêts au taux légal à compter du 29 décembre 2018,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
- condamné la société les Peintures occitanes à payer à la société SBPR la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société les Peintures occitanes à payer à la société Crédit agricole leasing et factoring la somme de 500 euros au titres de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société les Peintures occitanes aux entiers dépens de la présente décision,
- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires tenues pour injustes ou mal fondées'.
La société les Peintures occitanes a régulièrement relevé appel, le 13 juillet 2021, de ce jugement sans avoir intimé la société Crédit agricole Leasing et Factoring.
Elle demande à la cour, en l'état de ses conclusions déposées et notifiées le 12 octobre 2021 via le RPVA, de :
'-Vu les articles 1203 et 1104 du code civil,
'- dire et juger qu'elle est recevable et bien fondée en son appel,
Y faisant droit,
- infirmer le jugement rendu (...) en ce qu'il l'a condamnée à payer à la SBPR la somme de 1521,64 euros et celle de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens et a rejeté ses demandes,
- Et statuant à nouveau, condamner la SBPR à lui payer la somme principale de 7793,62 euros,
- condamner la SBPR à lui payer les intérêts au taux légal majorés de 5 points sur la somme de 7793,62 euros à compter du 24 septembre 2018 jusqu'à complet règlement,
- ordonner la capitalisation des intérêts,
- condamner la SBPR à lui payer la somme de 1500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,
- En tout état de cause, rejeter les demandes de la SBPR,
- condamner la SBPR à lui payer la somme de 2500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, en cause d'appel'.
Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que :
- le projet de décompte général définitif du 20 décembre 2018 est incomplet, elle est créancière pour un montant de 7 793,62 euros puisque :
* l'état d'acompte mensuel n°4 établi par le maître d'oeuvre mentionne expressément des 'travaux sur avenant' d'un montant de 8050 euros et n'a pas validé ce projet de décompte,
* la société SBPR ne justifie pas de moins-values à hauteur d'une somme de 11 901,28 euros (seulement 9 689,36 euros)
* la société SBPR n'apporte pas la preuve que la retenue sur le dépôt de garantie soit justifiée, les réserves ayant été levées depuis fin 2018.
Formant appel incident, la société SBPR sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 3 janvier 2022 :
'- Vu les articles 1101 et suivants et 1217 et suivants du code civil,
'- accueillir la société SBPR en son appel incident,
- confirmer le jugement rendu (...) en ce qu'il a :
* - dit et jugé que la désignation de l'expert [D] et sa mesure d'expertise ordonnée par jugement préparatoire de notre tribunal en date du 5 octobre 2020 sont caduques,
* dit et jugé qu'il sera statué au vu des seuls éléments présents au dossier,
* condamné la société les Peintures occitanes à lui payer la somme de 1521,64 euros,
* condamné la société les Peintures occitanes à lui payer la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,
- la réformer en ce qu'il :
* a limité à la somme de 1521,64 euros la condamnation prononcée à l'encontre de la société les Peintures occitanes à son profit à titre de dommages et intérêts,
* l'a déboutée de sa demande de condamnation de la société Les peintures occitanes à lui payer la somme complémentaire de 1500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la résistance abusive,
- Statuant à nouveau, débouter la société les Peintures occitanes de l'ensemble de ses demandes injustes et mal fondées,
- Reconventionnellement, porter la condamnation prononcée à l'encontre de la société les Peintures occitanes (...) à la somme de 6921,64 euros à titre de dommages et intérêts,
- condamner en outre la société les Peintures occitanes à lui payer la somme complémentaire de 1500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la résistance abusive,
- En tout état de cause, condamner la société les Peintures occitanes à lui payer la somme de 2500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et en outre aux entiers frais et dépens de l'instance'.
Elle expose en substance que :
- aucun devis de travaux supplémentaires n'a été régularisé ni même ne lui a été présenté, M [L], chargé de la planification de l'ouvrage et de l'établissement des bons à payer (OPC) n'ayant pas le pouvoir de valider les devis,
- la société les Peintures occitanes est redevable d'une somme finale de 6921,64 euros, puisqu'il faut déduire 11 901,28 euros de moins-value au marché de base, au titre notamment des travaux non réalisés et des travaux confiés à d'autres entreprises ainsi qu'au titre des pénalités de retard, (qu'elle a elle-même supporté à hauteur de 51 220 euros),
- la société les Peintures occitanes ne rapporte pas la preuve de la levée des réserves, elle a abandonné le chantier.
Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 17 janvier 2023.
MOTIFS de la DECISION :
1- Selon l'article 1104 du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, applicable en l'espèce, les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d'ordre public.
Suite au contrat de sous-traitance en date du 19 septembre 2017, la société les Peintures occitanes confirmait, par courriel, le 23 janvier 2018 à la société SBPR que le chantier serait terminé le 23 février 2018.
Le 26 mars 2018, la société SBPR constatait que seuls deux appartements étaient terminés à 95 % et annonçait à sa cocontractante qu'elle devait appliquer des pénalités de retard. Un procès-verbal de constat d'huissier, en date du 30 mai 2018, atteste que le chantier n'est pas terminé.
Le décompte général définitif, en date du 30 juin 2018, visé le 20 décembre 2018 par l'OPC, comprend outre le marché de base (39 048,51 euros), un devis accepté à hauteur de 400 euros et des moins-values à hauteur de 127,18 euros et 11 901,28 euros pour un montant total de 27 670,05 euros. Eu égard aux pénalités de retard, soit 27 jours à 200 euros (5 400 euros), au compte prorata (553,40 euros) et au compte interentreprises (1 399,10 euros), ce décompte indique que la somme due à la société Peintures occitanes est égale à 18934,05 euros alors qu'elle a déjà perçu une somme de 25 855,69 euros, laissant un solde débiteur à sa charge à hauteur de ' 6 921,64 euros.
Le devis n°800 en date du 13 février 2018 à hauteur de 3 000 euros (facture 427 du 20 février 2018), le devis n°821 en date du 9 avril 2018 (facture n°430 du 13 avril 2018) à hauteur de 1 800 euros et le devis, non produit, ayant donné lieu à la facture n°428 du 20 février 2018 d'un montant de 3 000 euros, établis par la société les Peintures occitanes, sous-traitante, n'ont pas été acceptés par la société SBPR, entrepreneur principal, conformément aux dispositions de l'article X du contrat de sous-traitance, l'OPC n'ayant pas qualité pour y procéder en ses lieu et place, sauf à hauteur de la somme de 400 euros pour le devis n°821 dans le cadre d'une acceptation partielle.
Il n'est pas contesté que la société SBPR a adressé à sa cocontractante ce décompte général définitif le 12 mars 2019 et que celui-ci n'a pas fait l'objet de contestations (le contrat de sous-traitance se référant au cahier des clauses administratives générales), la société Peintures occitanes ne justifiant pas avoir réitéré les réclamations qu'elle avait formées par courriel du 12 novembre 2018 à l'appui d'un projet de décompte général définitif.
Au titre des moins-values, il est établi que les travaux sur les parties communes n'ont pas été réalisés (8 194,36 euros) et la société SBPR justifie à l'appui de factures, avoir confié des travaux, devant être effectués, à des sociétés tierces qu'elle impute à hauteur de 44,21 % à la société les Peintures occitanes, qui se borne à avancer un chiffrage de 9689,36 euros sans explication.
Si la société SBPR produit un planning d'exécution des travaux avec un achèvement fixé au 26 mars 2018 et qu'à cette date, il est manifeste que le chantier n'était pas terminé, le calcul des pénalités de retard, arrêté au 30 juin 2018 à hauteur de 5 400 euros, apparaît purement forfaitaire sans aucun élément suffisant tenant au suivi du chantier et ne peut être retenu au titre de la retenue de garantie, étant constaté qu'aucun abandon de chantier n'est caractérisé et que l'ensemble des corps de métier accusait un retard important.
Les courriels adressés par la société les Peintures occitanes à l'OPC les 1er novembre et 5 décembre 2018 ainsi que le courrier en date du 12 mars 2019 de la société SBPR, accompagnant la transmission du décompte général définitif, permettent de considérer que les réserves ont été levées, de sorte que la retenue de garantie à hauteur de 1 383,50 euros n'est plus fondée.
Il en résulte que le total du marché doit être fixé à la somme de 27 670,05 euros, que les sommes à soustraire correspondent au compte prorata à hauteur de 553,40 euros et au compte interentreprises à hauteur de 1 399,10 euros, soit un solde de 25 717,55 euros en faveur de la société les Peintures occitanes, qui ayant déjà perçu la somme de 25 855,69 euros, demeure, dès lors, débitrice à hauteur de la différence, soit 138,14 euros, à laquelle elle sera condamnée.
2- La société SBPR ne produisant aucune pièce justifiant que l'action en justice exercée par la société les Peintures occitanes soit le fruit de la malice, de la mauvaise foi ou le résultat d'une erreur grossière et qu'ayant dégénéré en abus, elle ait été source de préjudice, sa demande de dommages et intérêts pour « résistance » (sic) abusive sera rejetée.
Par ces motifs, le jugement sera confirmé, sauf en ce qu'il a considéré que la retenue de garantie était justifiée et condamné la société les Peintures occitanes à payer la somme de 1 521,64 euros.
3- Succombant principalement sur son appel, la société les Peintures occitanes sera condamnée aux dépens sans que ni l'équité, ni aucune considération d'ordre économique ou relevant de l'équité ne commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, les demandes des parties sur ce fondement étant rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement du tribunal de commerce de Béziers en date du 7 juin 2021, sauf en ce qu'il a condamné la SARL les Peintures occitanes au paiement de la somme de 1 521,64 euros à la SAS Société de bâtiment Pierres et Restauration,
Statuant à nouveau de ce chef,
Condamne la SARL les Peintures occitanes à payer à la SAS Société de bâtiment Pierres et Restauration la somme de 138,14 euros,
Confirme le jugement entrepris dans le surplus de ses dispositions,
Rejette les demandes des parties fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SARL les Peintures occitanes aux dépens d'appel.
le greffier, le président,