Grosse + copie
délivrées le
à
3e chambre sociale
ARRÊT DU 01 MARS 2023
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/05800 - N° Portalis DBVK-V-B7C-N4V3
ARRÊT n°
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 OCTOBRE 2018 TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE HERAULT
N° RG21602454
APPELANTE :
[6]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentant : Me Claire COLLEONY substituant Me Frédérique BELLET, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE :
CPAM DU GARD
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]
Mme [G] [N] (Représentante de la CPAM) en vertu d'un pouvoir du 13/12/22
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 05 JANVIER 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet
Mme Isabelle MARTINEZ, Conseillère
Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sylvie DAHURON
ARRÊT :
- Contradictoire;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet et par Mademoiselle Sylvie DAHURON, greffier.
*
* *
FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES
Le 27 août 2014, M. [H] [E] (ci-après l'assuré) adresse à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Gard (ci-après la caisse) une déclaration de maladie professionnelle accompagnée d'un certificat médical initial établi le 27 août 2014 sur les lésions suivantes: "rupture de la coiffe des rotateurs gauche " avec 1ère constatation médicale au 10 juin 2014.
Le 1er décembre 2014 la caisse notifie à l'employeur, la société [6], (ci-après la société ou l'employeur) un délai complémentaire d'instruction de 3 mois dans l'attente des résultats de l'enquête administrative et de l'avis du médecin conseil, précisant que ce délai ne pourra excéder 3 mois.
Le 27 janvier 2015 la caisse notifie à l'employeur que le dossier est transmis au CRRMP pour examen dans le cadre du 3ème alinéa de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale, la condition relative à la liste limitative des travaux fixés au tableau n'étant pas remplie.
Le 7 septembre 2015 le CRRMP de la région Montpellier Languedoc-Roussillon, retenant le lien direct et certain de causalité entre le travail habituel et la pathologie décide d'une prise en charge de la maladie au titre du tableau n° 57 des maladies professionnelles.
Le 15 septembre 2015 la caisse notifie à l'employeur la décision de prise en charge de la maladie déclarée au titre de la législation professionnelle, tableau 57 affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail.
Le 16 novembre 2015 l'employeur saisit la commission de recours amiable de la caisse pour contester l'opposabilité à son égard de la décision du 15 septembre 2015 et afin d'obtenir que les prestations relatives à la maladie soient imputées au compte spécial en vertu des dispositions de l'article D 242-6-7 du code de la sécurité sociale et de l'article 2 de l'arrêté du 16 octobre 1995.
Le 28 décembre 2015 la Carsat Sud-Est notifie à l'employeur que sa demande présentée à la caisse et transmise à ses services afin d'obtenir que les prestations relatives à la maladie soient imputées au compte spécial en vertu des dispositions de l'article D 242-6-7 du code de la sécurité sociale et de l'article 2 de l'arrêté du 16 octobre 1995 ne peut être accueillie puisque la maladie professionnelle n'a pu qu'être que contractée au sein de son établissement.
Le 31 août 2016 la commission de recours amiable de la caisse rejette la contestation et la demande de l'employeur aux motifs que les éléments du dossier établissent que la maladie déclarée ressort bien de ce tableau 57 et que l'assuré a bien été exposé au risque au sein de la société à la date de la première constatation médicale.
Le 7 novembre 2016 l'employeur saisit le Tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Hérault.
Le 15 octobre 2018, le Tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Hérault, sur audience de plaidoiries du 17 septembre 2018, rejette les exceptions de nullité de la procédure d'instruction, déclare opposable à la société la décision de prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelle et dit n'y avoir lieu à inscription au compte spécial.
Le 20 novembre 2018 la société interjette appel et demande à la Cour de:
- infirmer le jugement ;
- décider que la décision de prise en charge lui est inopposable puisque la caisse ne rapporte pas la preuve que la maladie est conforme au tableau 57 A des maladies professionnelles et que l'avis du CRRMP est intervenu après la reconnaissance du caractère professionnel acquis au plus tard le 1er mars 2015 ;
- décider que la Cour est compétente pour statuer sur l'imputation au compte spécial ;
- décider que les dépenses relatives à l'affection du 27 août 2014 doivent être inscrites au compte spécial.
La caisse sollicite la confirmation.
Les débats se déroulent le 5 janvier 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1) sur l'imputation au compte spécial
La juridiction sociale ne peut être saisie que d'un recours à l'encontre d'une décision d'un organisme social ou entité faisant fonction refusant à un assuré le droit qu'il revendique.
Il ne lui appartient que de statuer sur le bénéfice du droit revendiqué, objet de la décision attaquée et non d'annuler les décisions administratives étant intervenues à ce titre.
En l'espèce il n'existe aucune décision de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Gard statuant sur la demande présentée par l'employeur afin que les prestations relatives à la maladie soient imputées au compte spécial en vertu des dispositions de l'article D 242-6-7 du code de la sécurité sociale et de l'article 2 de l'arrêté du 16 octobre 1995, demande présentée la première fois le 16 novembre 2015 lorsque l'employeur saisit la commission de recours amiable de la caisse.
D'ailleurs l'organisme saisi transmet régulièrement cette demande sur laquelle elle ne peut statuer à la Carsat Sud-Est qui, le 28 décembre 2015, notifie à l'employeur que la demande qui lui a été transmise par caisse le 19 novembre 2015 est rejetée puisque la maladie professionnelle n'a pu qu'être que contractée au sein de son établissement, décision régulièrement notifiée à l'employeur le 29 décembre 2015 par signature de l'avis de réception de la lettre recommandée de notification (pièce 14 du dossier de la caisse), notification qui précise les modalités et délais pour introduire un recours devant la CNITAAT d'[Localité 4].
Dès lors le recours introduit le 7 novembre 2016 à l'encontre de la caisse devant le Tribunal des affaires de sécurité sociale, d'ailleurs sans mise en cause de l'auteur de la décision, la Carsat Sud-Est, est irrecevable.
2) sur l'opposabilité
Le fait que, dans les rapports assuré-caisse, le caractère professionnel de la pathologie procède d'une reconnaissance à raison d'une décision implicite à défaut de réponse dans les délais (cf notamment page 13/ 23 des conclusions de la société : " cet avis (du CRRMP) a été rendu postérieurement à la reconnaissance du caractère professionnel de la pathologie de M. [E], intervenue au plus tard le 1er mars 2015 ") et non de l'avis ultérieur du CRRMP, ne constitue nullement une circonstance de nature à entraîner l'inopposabilité de la décision de prise en charge à l'encontre de l'employeur, décision de prise en charge qui peut intervenir à raison de l'expiration d'un délai d'instruction et ce même dans l'hypothèse où les conditions du tableau ne sont pas remplies'
Il est admis que le tableau subordonne la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de la maladie à sa confirmation par une IRM ou un arthroscanner en cas de contre-indication à l'IRM.
Les examens médicaux dont le résultat sert à caractériser la maladie visée au tableau n'ont pas à figurer au dossier que l'employeur a la possibilité de consulter et effectivement " la teneur de l'IRM mentionnée au tableau n° 57 A des maladies professionnelles constitue un élément du diagnostic, qui ne peut être examinée que dans le cadre d'une expertise, de sorte qu'elle n'a pas à figurer dans les pièces du dossier constitué par les services administratifs de la caisse et dont l'employeur peut demander la communication ".
Pour autant la caisse doit justifier, au soutien de sa décision, de la réalisation d'une IRM ou d'un arthroscanner en cas de contre-indication à l'IRM et l'employeur peut contester la prise en charge si ces examens n'ont pas été réalisés.
En l'espèce la caisse ne justifie que de la réalisation d'une arthrographie, examen qui n'est ni une IRM ni un arthroscanner.
Dès lors la décision de prise en charge est effectivement inopposable à l'employeur.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Infirme le jugement du 15 octobre 2018 du Tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Hérault ;
Statuant à nouveau ;
Décide que la décision de prise en charge du 15 septembre 2015 au titre de la législation professionnelle de la maladie déclarée par M. [H] [E] le 27 août 2014 pour le tableau 57 affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail est inopposable à la société [6] ;
Décide que la demande relative à l'inscription au compte spécial est irrecevable ;
Y ajoutant ;
Laisse les dépens du présent recours à la charge de la caisse.
LE GREFFIER LE PRESIDENT