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délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
Chambre commerciale
ARRET DU 28 FEVRIER 2023
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 21/02561 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O625
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 17 FEVRIER 2021
TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER
N° RG 2019011380
APPELANTS :
Monsieur [S] [W]
né le 12 Mars 1986 à [Localité 8] (ALGERIE)
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représenté par Me Laurent FERRACCI de la SELARL FERRACCI, avocat au barreau de MONTPELLIER
S.A.S.U. DISTRIMMO exerçant sous l'enseigne EMPLACEMENT NUMERO 1, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Laurent FERRACCI de la SELARL FERRACCI, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
S.A.R.L. L'ENCAS 21 prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité sis
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentée par Me Vincent RIEU de la SCP DORIA AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 13 Décembre 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 JANVIER 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre
Mme Anne-Claire BOURDON, Conseiller
M. Thibault GRAFFIN, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Audrey VALERO
ARRET :
- Contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, et par Madame Audrey VALERO, Greffière.
*
* *
FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES:
La SARL L'Encas 21 a signé le 7 mai 2019 avec la SASU Distrimmo exerçant sous l'enseigne Emplacement n°1, un mandat de vente simple pour son fonds de commerce de restauration rapide, situé [Adresse 4] à [Localité 9], pour un prix net vendeur minimum de 165'000 euros.
Par ailleurs, le 18 juin 2019, la société L'Encas 21 a également signé avec la S.A.S. Abault Ie un mandat de vente non exclusif pour le même droit au bail, et pour un prix acquéreur fixé à 150'000 euros.
Le 19 juin 2019, la société L'Encas 21 a donné son accord par l'intermédiaire de la société Abault Ie à une offre d'achat pour un montant de 155'000 euros nets vendeur.
Le même jour, la société Distrimmo a informé la société L'Encas 21 qu'elle avait trouvé un acheteur ([S] [W]) pour un prix de 150'000 euros.
Le 24 juin 2019, la société Distrimmo a fait vainement délivrer par exploit d'huissier à la société L'Encas 21 une sommation d'avoir à comparaître le 26 juin suivant dans ses locaux afin de régulariser sa proposition d'achat.
À la suite des assignations délivrées les 30 juillet et 26 décembre 2019 par la société Distrimmo et par M. [W] à la société L'Encas 21, et après avoir prononcé la jonction des deux affaires le 17 juin 2020, le tribunal de commerce de Montpellier a, par jugement en date du 17 février 2021 :
- débouté M. [W] et la société Distrimmo de l'ensemble de leurs demandes, fins et écritures,
- condamné la société Distrimmo à verser la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure manifestement abusive, à la société L'Encas 21,
- condamné M. [W] à verser la somme de 1'500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure manifestement abusive, à la société L'Encas 21,
- ordonné l'exécution provisoire dudit jugement.
- condamné solidairement M. [W] et la société Distrimmo à verser à la société L'Encas 21 la somme de 1'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Le 20 avril 2021, la société Distrimmo et M. [W] ont régulièrement relevé appel de ce jugement.
Ils demandent à la cour, dans leurs dernières conclusions déposées via le RPVA le 19 juillet 2021, de':
Vu les articles 1103, 1104 et 1240 du code Civil, et la Loi "Hoguet" n° 70-9 du 2 janvier 1970,
Vu les pièces versées aux débats,
- réformer le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Montpellier le 17 février 2021 en ce qu'il a :
' débouté M. [W] et la société Distrimmo de l'ensemble de leurs demandes, fins et écritures,
' condamné la société Distrimmo à verser la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure manifestement abusive, à la société L'Encas 21,
' condamné M. [W] à verser la somme de 1'500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure manifestement abusive, à la société L'Encas 21,
' ordonné l'exécution provisoire dudit jugement,
' condamné solidairement M. [W] et la société Distrimmo à verser à la société L'Encas 21 la somme de 1'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,
- condamner la société L'Encas 21 à payer à la société Distrimmo la somme de 15'000 euros en réparation du préjudice subi
- condamner la société L'Encas 21 à payer à M. [W] la somme de 75'000 euros en réparation du préjudice subi,
- condamner la société L'Encas 21 à payer à la société Distrimmo et à M. [W] la somme de 2'000 euros chacun en remboursement de leurs frais irrépétibles, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la société L'Encas 21 aux entiers dépens.
Au soutien de son appel, ils font valoir pour l'essentiel que :
- ils ont communiqué dès le 19 juin 2019 l'offre d'achat de M. [W], et ce n'est que le 21 juin suivant que la société L'Encas 21 les a informés qu'elle avait trouvé un autre acquéreur';
- le mandat qui a été donné à la société Distrimmo n'est pas qu'un simple mandat d'entremise consistant en la recherche d'un acheteur, mais un mandat confiant au mandataire le pouvoir de contracter';
- en n'ayant pas donné suite à l'offre d'achat faite par M. [W], la société L'Encas 21 a causé à la société Distrimmo un préjudice de 15'000 euros correspondant à la clause pénale du mandat de vente, et à M. [W] un préjudice de 75'000 euros correspondant à cinq années de pertes de bénéfices.
Dans ses dernières conclusions déposées par le RPVA le 8 octobre 2021, la société L'Encas 21 demande à la cour de':
Vu les articles 1103 et suivants, 1231 et suivants et 1240 du code civil,
Vu les articles L.145-1 et suivants du code de commerce,
- statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel de la société Distrimmo et de M. [W],
- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Montpellier le 17 février 2021 en toutes ses dispositions,
En conséquence,
- débouter M. [W] et la société Distrimmo de l'ensemble de leurs demandes, fins et écritures,
- condamner solidairement M. [W] et la société Distrimmo à verser à la société L'Encas 21 la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [W] et la société Distrimmo aux entiers dépens.
Elle fait valoir pour l'essentiel que :
- elle a accepté l'offre d'achat émanant de la société Abault Ie le 19 juin 2019, en signant le document écrit qui lui a été présenté par cette dernière';
-l'agent immobilier de la société Distrimmo est venu l'informer le même jour d'une offre d'achat d'un montant de 150'000 euros, sans proposition écrite, et elle a indiqué à ce dernier qu'elle s'était déjà engagée avec la société Abault Ie';
- elle n'a eu connaissance de l'offre écrite du client de la société Distrimmo, M. [W], que le 24 juin suivant, alors qu'elle était déjà engagée avec la société Abault Ie ;
- elle n'a commis aucune faute ni à l'égard de la société Distrimmo, avec laquelle elle n'a signé aucun mandat d'exclusivité, ni avec M. [W] avec lequel elle n'a aucun lien juridique.
Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 13 décembre 2022.
MOTIFS de la DÉCISION
Sur la demande principale :
Selon les dispositions de l'article 1104 du code civil, les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
L'article 1113 du même code indique que le contrat est formé par la rencontre d'une offre et d'une acceptation par lesquelles les parties manifestent leur volonté de s'engager.
En l'espèce, les appelants soutiennent que la société L'Encas 21 ne pouvait pas ne pas accepter la proposition d'achat faite le 19 juin 2019 par M. [W], et ce par application des dispositions de l'article 6.1 du mandat de vente du 7 mai 2019 selon lesquelles, pendant la durée du mandat, le mandant s'engage à ratifier la vente à tout preneur qui serait présenté par le mandataire, en acceptant les prix, charges et conditions du présent mandat.
De son côté, la société L'Encas 21 soutient, sans toutefois en rapporter la preuve, qu'elle a informé oralement la société Distrimmo le 19 juin 2019 qu'elle avait trouvé un acquéreur par l'intermédiaire de la société Abault Ie.
Elle produit à cet égard aux débats l'offre transmise par cette dernière en date du 19 juin 2019, qu'elle a signé de la main de son gérant.
La société Distrimmo produit pour sa part aux débats la proposition d'achat faite par M. [W] ce même 19 juin 2019, qu'elle justifie avoir envoyée le jour même à 16h11 à la société L'Encas 21, et dont il est également justifié que cette dernière l'a reçue le lendemain 20 juin.
La société Distrimmo affirme ainsi sans toutefois en rapporter la preuve que la proposition de M. [W] aurait été communiquée à la société L'Encas 21 dès le 19 juin, ce que cette dernière conteste.
Dans tous les cas, le 21 juin suivant, par lettre recommandée, M. [X], gérant de la société L'Encas 21, indiquait à la société Distrimmo qu'il lui avait déclaré oralement le 19 juin précédent avoir trouvé un autre acheteur par l'intermédiaire de la société Abault Ie et avoir donné son accord à cette dernière.
La société L'Encas 21 justifie par ailleurs avoir informé dès le 20 juin 2019 son bailleur au sujet de la vente de son fonds de commerce (attestation de M. [U]).
Ainsi, il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société L'Encas 21 n'a nullement donné son accord à la proposition d'achat qui lui était présentée par la société Distrimmo dans le cadre d'un mandat non exclusif, alors qu'elle bénéficiait par ailleurs et de manière concomitante voire préalable d'une autre offre d'achat provenant d'une autre agence immobilière.
En outre, il convient de considérer que les conditions générales du mandat de vente simple n'impliquent nullement l'automaticité de la réalisation de la vente suite à une proposition d'achat conforme aux conditions du mandat, et qu'elles ne sauraient nullement ainsi être regardées comme donnant au mandataire le pouvoir de contracter sans recueillir le consentement du mandataire sur une offre précise, de surcroît dans le contexte ci-dessus rappelé d'une concurrence d'offre d'achat et d'un mandat non exclusif.
Le jugement sera en conséquence confirmé.
Il le sera également s'agissant, dans le contexte ci-dessus rappelé, de la condamnation de la société Distrimmo et de M. [W] à l'octroi de dommages et intérêts, tenant la mauvaise foi sinon la malice de ces derniers dans leur action en justice.
Sur les dépens et l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile :
Les appelants qui succombent dans leurs demandes en cause d'appel seront condamnés in solidum aux dépens, ainsi qu'à payer à la société L'Encas 21 la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions critiquées,
Condamne in solidum la société Distrimmo et M. [S] [W] aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à la société L'Encas 21 la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
le greffier, le président,