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délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
Chambre commerciale
ARRET DU 14 FEVRIER 2023
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 21/01908 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O5T4
Décisions déférées à la Cour :
Jugement du 22 FEVRIER 2021
TRIBUNAL DE COMMERCE DE BEZIERS
Jugement rectificatif du 08 MARS 2021
TRIBUNAL DE COMMERCE DE BEZIERS
N° RG 2017004053
APPELANTS :
Maître [W] [Y], mandataire judiciaire, commissaire à l'exécution du plan de la société PIERRE DU MONDE,
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représenté par Me Frédéric SIMON de la SCP SIMON FREDERIC, avocat au barreau de BEZIERS
S.A.S. PIERRE DU MONDE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Frédéric SIMON de la SCP SIMON FREDERIC, avocat au barreau de BEZIERS
INTIME :
Monsieur [C] [K]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Christine AUCHE HEDOU, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Jacques Henri AUCHE de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant
Représenté par Me Marie-Laure ARMENGAUD, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant
Ordonnance de clôture du 15 Novembre 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 DECEMBRE 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre
Mme Anne-Claire BOURDON, Conseiller
M. Thibault GRAFFIN, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Audrey VALERO
ARRET :
- Contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, et par Madame Audrey VALERO, Greffière.
*
* *
FAITS et PROCÉDURE - MOYENS et PRÉTENTIONS DES PARTIES:
La SAS Pierre du monde, dont le gérant est Monsieur [N] [M], a pour activité le négoce de pierre, béton, matériaux reconstitués destinés aux particuliers et professionnels ; son siège social est situé à [Localité 5] (34).
Monsieur [C] [K], exerçant en son nom personnel, exploitait un fonds de commerce d'importation de matériaux de construction, commerce en gros de matériaux de construction, pose de pavage et dallage à [Localité 4] (47).
Suite à une promesse de vente sous conditions suspensives en date du 25 juin 2014, par acte sous seing privé en date du 18 juillet 2014 (annulant et remplaçant un précédent acte en date du 1er juillet 2014), Monsieur [K] a cédé son fonds de commerce à la société Pierre du monde pour un prix de 297600 euros.
Par acte du même jour, la société Pierre du monde et Monsieur [K] ont conclu un contrat d'agent commercial concédant à ce dernier un mandat de représentation sur le territoire des régions d'Aquitaine et de Midi-Pyrénées, pour une durée de quatre ans, susceptible d'une prorogation de deux années et trois mois, sauf dénonciation de trois mois avant l'arrivée du terme, rémunéré moyennant une commission de 5% HT les deux premières années et 3% HT les deux suivantes et pendant la prorogation éventuelle.
Par lettre en date du 10 juin 2015, Monsieur [K] a indiqué à la société Pierre du monde, cesser son activité d'agent commercial au 30 juin et être dans l'attente de son accord, que cette dernière lui a donné le 22 juin 2015.
Par acte d'huissier du 7 juin 2017, la société Pierre du monde a assigné Monsieur [K] devant le tribunal de commerce de Béziers en vue d'obtenir la nullité de la cession du fonds de commerce et le paiement de la somme de 36 000 euros au titre de commissions occultes perçues par celui-ci dans le cadre de son contrat d'agent commercial, outre des dommages et intérêts.
Par un premier jugement avant dire droit en date du 5 février 2018, le tribunal de commerce de Béziers a ordonné une mesure d'expertise, destinée à analyser le contrat d'agent commercial du 18 juillet 2014 et faire le compte entre les parties.
Par jugement en date du 4 juillet 2018, la société Pierre du monde a fait l'objet d'une procédure de sauvegarde, convertie en procédure de redressement judiciaire par jugement en date du 3 octobre 2018, Monsieur [Y] étant désigné mandataire judiciaire.
Par jugement du 26 juin 2019, le tribunal de commerce de Béziers a arrêté un plan de redressement de cette société et a désigné Monsieur [Y] en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
Suite au dépôt du rapport d'expertise le 3 janvier 2020, le tribunal, devant lequel par acte d'huissier en date du 1er septembre 2020, Monsieur [K] avait assigné Monsieur [Y] ès qualités a, par jugement du 22 février 2021, après avoir prononcé une jonction :
'- débouté la société Pierre du monde de toutes ses demandes (...),
- déclaré irrecevable la demande de nullité de la vente du fonds de commerce pour dol, ce dernier n'étant pas établi,
- homologué le rapport d'expertise de Mme [B],
- dit et jugé que la société Pierre du monde a manqué à son obligation contractuelle dans le cadre du contrat d'agent commercial avec M. [K],
- condamné la société Pierre du monde à payer à M. [K] la somme de 75654,05 euros hors taxes, soit la somme de 90 784,66 euros TTC au titre des commissions qui lui sont dues,
- condamné la société Pierre du monde à payer à M. [K] la somme forfaitaire de 5000 euros au titre des dommages et intérêts pour les préjudices subis,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné la société Pierre du monde à payer à M. [K] la somme de 1500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Pierre du monde aux entiers dépens de la présente décision,
- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires tenues pour injustes ou mal fondées'.
Suite à la requête en date du 24 février 2021 en rectification d'erreur matérielle déposée par la société Pierre du monde, le tribunal a, par jugement en date du 8 mars 2021,
'- dit et jugé que :
* le jugement rendu le 22 février 2021 était entaché d'une erreur matérielle,
* il convient de rectifier cette dernière, [...]
* le jugement doit être rectifié matériellement sur les termes :
' - condamné la société Pierre du monde à payer à M. [K] la somme de 75 654,05 euros hors taxes, soit la somme de 90 784,66 euros TTC au titre des commissions qui lui sont dues,
- condamné la société Pierre du monde à payer à M. [K] la somme forfaitaire de 5000 euros au titre des dommages et intérêts pour les préjudices subis,
- condamné la société Pierre du monde à payer à M. [K] la somme de 1500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Pierre du monde aux entiers dépens de la présente décision'
- Termes qui sont substitués par :
' fixe la créance de la société Pierre du monde à l'égard de M. [K] :
* à la somme de 75 654,05 euros hors taxes, soit la somme de 90784,66 euros TTC au titre des commissions qui lui sont dues,
* à la somme de 5000 euros au titre des dommages et intérêts pour les préjudices subis,
* à la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* aux entiers dépens de la présente décision'
- ordonné qu'il soit fait mention de cette rectification en marge de la minute et des expéditions qui seront délivrées [...]
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
- dit et jugé que les dépens suivront le principal,
- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires tenues pour injuste ou mal fondées.'
La société Pierre du monde et Monsieur [Y] en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Pierre du monde ont régulièrement relevé appel, le 23 mars 2021, du jugement rectifié et du jugement rectificatif ; ces appels ont été joints par une ordonnance du magistrat chargé de la mise en état en date du 1er avril 2021.
Ils demandent à la cour, en l'état de leurs conclusions déposées et notifiées le 15 septembre 2021 via le RPVA, de :
'- Recevant les appels des jugements du 22 février 2021, et du jugement rectificatif du 8 mars 2021, les dires recevables et bien fondés, infirmer le jugement du 22 février 2021 et statuant de nouveau,
- dire recevable dans son action la société Pierre du monde,
- prononcer l'annulation pour vice de consentement de la vente du fonds de commerce suivant acte sous seing privé du 18 juillet 2014 entre les parties, en raison du dol constitué par la réticence d'information concernant les déboires entre M. [K] et la société Colas pour le chantier [Adresse 8] à [Localité 6], alors que ledit chantier était une cause déterminante de la volonté d'acquérir le fonds de commerce,
- prononcer l'annulation du contrat d'agent commercial en date du 18 juin 2014, indissociablement lié à la vente du fonds de commerce,
- condamner M. [K] avec intérêts à compter de l'assignation introductive d'instance à rembourser à la société Pierre du monde ou à M. [Y] si la cour estime que ce droit appartient au commissaire à l'exécution du plan :
* 480 971 euros au titre du remboursement du prix du fonds de commerce, le coût des actes et droits d'enregistrement, la somme de 166641,40 euros au titre des pénalités subies et des conséquences financières de la reprise des engagements de M. [K] à l'égard de Colas,
* 43 800 euros au titre de l'abus de confiance pour avoir encaissé les commissions occultes en espèces auprès des fournisseurs,
- rejeter la demande de M. [K] au titre des commissions, du fait de l'annulation du contrat d'agent commercial, la fraude commise par ce dernier, en toute hypothèse limiter à la somme de 4862,02 euros arbitrée par l'expert le montant de la créance à fixer,
- en tout état de cause compte tenu de la procédure collective de la société Pierre du monde rejeter toute condamnation au paiement de commissions, créances éventuelles antérieures à l'ouverture du plan de sauvegarde,
- En conséquence de l'infirmation du jugement du 22 février 2021, infirmer le jugement rectificatif du 8 mars 2021, et statuant à nouveau, dire que compte tenu du rejet des demandes de M. [K], il n'y a plus lieu à rectifier matériellement une décision infirmée,
- condamner M. [K] au paiement à la société Pierre du monde et M. [Y] chacun, de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens, de première instance et d'appel comprenant les frais d'expertise.'
Au soutien de leur appel, ils font essentiellement valoir que :
- M. [Y] ne peut être mis en cause puisque l'instance était en cours à la date du jugement d'ouverture du redressement et qu'à la suite du jugement arrêtant le plan, la société Pierre du monde est redevenue maître de ses biens et peut poursuivre seule l'instance initiée avant la procédure collective,
- la cession du fonds de commerce est nulle ; M. [K] a commis un dol, en ayant caché le conflit existant avec la société Colas et ses conséquences (nombreux courriers et courriels reçus par M. [K] relatifs aux problèmes de livraison des pierres et leur non conformité avant la cession), la reprise de ce marché étant un élément déterminant,
- M. [K] n'apporte pas la preuve de ce que la société Pierre du monde aurait été informée de l'existence de ce conflit avant la cession puisque l'avenant conclu avec la société Colas ainsi que la reddition des comptes sont postérieurs à la cession,
- l'expert judiciaire a évalué les pertes dues au rejet de certains pavés dans le litige l'opposant à la société Colas à un montant de 166 641,40 euros et elle a été condamnée à payer (par jugement devenu définitif du fait d'une faute de son précédent conseil) au fournisseur la somme de 257 213,48 euros, ce qui a causé la procédure collective,
- la nullité justifie le remboursement du prix, plus les droits d'enregistrement, et les frais d'actes, ainsi que l'indemnisation des pénalités de retard subies,
- M. [K] est redevable d'une somme de 43 800 euros au titre des commissions occultes que la société Fafstone lui a octroyé dans le cadre de son contrat d'agent commercial, pour le marché auprès des SCI Lalande et Cap Breton,
- le contrat d'agent commercial est indissociable de la vente du fonds de commerce, la nullité de ce dernier entraîne la caducité du premier,
- le montant des commissions doit se limiter à la somme de 4 862,02 euros telle que fixée par l'expert, les sommes réclamées par M. [K] n'étant pas dues puisqu'il n'a pas participé aux commandes, s'agissant de chantiers hors de ses commissions.
Monsieur [K] sollicite de voir, aux termes de conclusions déposées et notifiées par le biais du RPVA le 22 juillet 2021 :
'- débouter la société Pierre du monde et M. [Y], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan, de leurs appels,
- rejeter l'intégralité des prétentions de la société Pierre du monde et M. [Y], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan, à l'encontre de M. [K], en les déclarant irrecevables et en tout cas non fondées,
- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Béziers en date du 22 février 2021, rectifié par jugement en date du 8 mars 2021,
- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Béziers en date du 8 mars 2021, sauf à rectifier l'erreur matérielle affectant les dispositions du jugement du 8 mars 2021 en ce qu'il est dit 'fixe la créance de la société Pierre du monde à l'égard de M. [K]' par 'fixe la créance de M. [K] à l'égard de la société Pierre du monde', de sorte que le dispositif du jugement doit être rectifié ainsi,
- fixer la créance de M. [K] à l'égard de la société Pierre du monde à la somme de 75 654,05 euros HT, soit 90 784,66 euros TTC, au titre des commissions qui lui sont dues,
- fixer la créance de M. [K] à l'égard de la société Pierre du monde à la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts,
- fixer la créance de M. [K] à la somme de 1 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- fixer la créance de M. [K] aux entiers dépens à l'égard de la société Pierre du monde ayant donné lieu aux jugements avant dire droit en date du 5 février 2018 et 14 mai 2018 (RG n°2017004053 et RG 2018000914), en ce et y compris les frais d'expertise judiciaire de Mme [B],
- Y ajoutant, condamner la société Pierre du monde solidairement avec M. [Y] au paiement de la somme de 6000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de la présente instance d'appel'.
Il expose en substance que :
- les prétentions de M [Y] sont irrecevables puisque le débiteur a seul qualité pour poursuivre les actions qu'il a intentées lui-même, en cours au jour où est arrêté le plan,
- la cession a été conclue conformément aux dispositions de l'article L. 141-1 du code de commerce et aucune action en nullité n'a été intentée dans l'année suivant la cession,
- la société Pierre du monde ne rapporte pas la preuve d'un dol ; concernant le marché Espace Saint [W], elle a signé un contrat avec le fournisseur (Canteria Cim) le 1er juillet 2014, et avec la société Colas le 8 août 2014, M. [M], gérant de la société Pierre du monde avait connaissance de l'état du chantier, il a été présenté à la société Colas,
- les mises en demeure et les pénalités dues en raison du retard ou de reprise des pavés sont imputables à la société Pierre du monde (qui a finalement choisi un autre fournisseur Granitos Urbanos) et ce après la reprise puisqu'un arrêté des comptes a été validé contradictoirement au titre des prestations antérieures au 1er juillet 2014 entre la société Pierre du monde et la société Colas,
- la société Colas a réglé le marché (la somme de 166 000 euros n'est pas justifiée),
- la société Pierre du monde n'a jamais agi à son encontre lors de la procédure engagée par la société Canteria Cim à son encontre,
- les prévisionnels établis pour les chantiers '[Adresse 8]' et '[Adresse 7]' se sont avérés exacts pour la période 2014-2015,
- la société Pierre du monde n'apporte pas la preuve de l'indivisibilité du contrat d'agent commercial avec la vente du fonds de commerce,
- les commissions sont dues même pour les bons de commandes qui n'ont pas été contresignés par ce dernier, puisqu'il bénéficiait d'une exclusivité sur son secteur, l'expert judiciaire les ayant estimées à un montant de 90 784,86 euros TTC, sur la base d'un modus operandi convenu entre les parties,
- l'expert judiciaire a dû effectuer un travail de fourmi pour établir les comptes compte tenu des éléments partiels produits par la société Pierre du monde,
- la société Pierre du monde ne rapporte pas la preuve de commissions occultes (photocopie d'un document manuscrit abscons sur la base duquel elle extrapole).
Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 15 novembre 2022.
MOTIFS de la DÉCISION :
1- sur les demandes de M. [Y] ès qualités
Eu égard aux dispositions de l'article L. 626-25 du code de commerce disposant notamment que le commissaire à l'exécution du plan poursuit les actions introduites avant le jugement qui arrête le plan et auxquelles l'administrateur ou le mandataire judiciaire est partie et à la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle après le jugement arrêtant le plan de redressement, l'action en paiement engagée contre le débiteur avant le jugement d'ouverture de son redressement judiciaire est poursuivie contre ce dernier redevenu maître de ses biens, le commissaire à l'exécution du plan n'ayant pas qualité pour poursuivre l'instance, les demandes de M. [Y] en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Pierre du monde sont irrecevables pour défaut de qualité.
2- sur la nullité de la cession du 18 juillet 2014
Selon l'article 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2016-131 en date du 10 février 2016, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume point et doit être prouvé.
La société Pierre du monde a poursuivi, suite à l'achat du fonds de commerce de M. [K] par un acte du 18 juillet 2014 (annulant et remplaçant un acte en date du 1er juillet), le contrat de fournitures en date du 21 octobre 2013, liant ce dernier à la société Colas Sud Ouest, pour le réaménagement de l'espace Saint-Michel à [Localité 6] dans le cadre d'un avenant en date du 8 août 2014. Pour l'exécution de ce contrat, M. [K] avait signé le 16 décembre 2013 un contrat 'd'achat-vente de produits' avec la société de droit espagnol Canteria Cim. La société Pierre du monde a signé avec cette même société espagnole le 1er juillet 2014 un contrat 'd'achat et de vente de produits' destiné à approvisionner le même chantier.
Par courrier du 25 juin 2014, la société Colas Sud Ouest, synthétisant les difficultés rencontrées dans l'exécution du chantier depuis le mois de février 2014, avait indiqué à M. [K] qu'elle 'émettait toute réserve utile quant aux manquements contractuels de ce dernier' se prévalant de l'article 12 du contrat les liant pour lui rappeler qu'elle était fondée à ce titre à lui 'demander réparation des éventuelles conséquences financières de ces manquements en cas de dépose ou repose de parties de l'ouvrage, réfaction du prix, pénalités de retard ....'
L'avenant signé le 8 août 2014, soit concomitamment à la cession du fonds de commerce, indique que la société Colas Sud Ouest et la société Pierre du monde ont établi un arrêté de compte au titre des prestations réalisées antérieurement au 1er juillet 2014. La société Pierre du monde ne produit pas cet arrêté de compte, qui relate, par essence, les difficultés signalées par la société Colas Sud Ouest auprès de M. [K] avant la cession. A ce titre, il résulte de la lecture d'un courrier en date du 14 décembre 2014 adressé par la société Colas Sud Ouest à la société Pierre du monde qu'à la fin du mois de mai 2014, M. [K] était venu récupérer les pavés refusés.
Cet arrêté des comptes traduit un accord de la société Colas Sud Ouest et de la société Pierre du monde sur les difficultés ayant existé et leur résolution au 1er juillet 2014 au terme d'une discussion entre elles ayant eu lieu, nécessairement, à une date à laquelle cette dernière n'avait pas encore acquis le fonds de commerce. Elle a, ainsi, au plus tard par ce biais, été informée avant la cession des manquements ayant été reprochés, de sorte qu'elle est dans l'incapacité de démontrer, alors qu'elle supporte la charge de la preuve, l'existence d'une réticence dolosive, l'ayant conduite à contracter, étant entendu que l'importance du chiffre d'affaires que représentait ce chantier (environ 2 000 000 euros) par rapport aux autres chantiers en cours, ne suffit pas à rapporter que l'absence de toute difficulté sur ce chantier, susceptible de générer une diminution du chiffre d'affaires annoncé, constituait un élément déterminant de son consentement.
En conséquence, la demande en nullité pour dol de la cession en date du 18 juillet 2014, formée par la société Pierre du monde, sera rejetée.
3- sur les commissions d'agent commercial
La cession du fonds de commerce par M. [K] à la société Pierre du monde et le contrat d'agent commercial signé par ces mêmes parties pouvaient parfaitement être exécutés de façon autonome et ne s'inscrivent pas dans une intention commune des parties de les lier, ces deux actes ne mentionnant nullement un tel lien.
La société Pierre du monde conteste le droit à commission de M. [K] lorsque les bons de commande ne sont pas contresignés par ce dernier conformément au contrat d'agent commercial (article 8 alinéa 2) ainsi que, ponctuellement, pour certains chantiers, considérant que ceux-ci ne peuvent lui être attribués. Elle se reconnaît, par ailleurs, débitrice pour quatorze chantiers.
Toutefois, d'une part, M. [K] disposait d'une exclusivité territoriale et une commission lui est due sur l'ensemble des ventes de son secteur, que les commandes soient transmises par lui ou soient parvenues autrement au mandant (article 8 alinéa 9), sa démission est en date du 12 juin 2015 et d'autre part, la société Pierre du monde a elle-même intégré dans les commissions qu'elle considère dues des factures pour lesquelles les bons de commande n'étaient pas contresignés par l'agent dans le cadre d'une relation de confiance entre les parties.
Ainsi, les factures relatives aux chantiers [H] (autres), Eurovia (autres), [O] et [Z], les factures 'autres clients [K]' et les factures 'autres clients hors [K] mais sur secteur', répertoriées par le rapport d'expertise judiciaire, en date du 31 décembre 2019, en pages 30, 31 et 32 seront retenues.
Concernant les chantiers Colas, ayant procédé à une analyse précise et complète des éléments qui lui étaient soumis, l'expert judiciaire indique que ceux-ci peuvent être intégrés dans la base de calcul des commissions dues, sous déduction pour le chantier Saint-[W] d'une perte à hauteur de 166641,40 euros.
Concernant le chantier [Adresse 7], la société Pierre du monde soutient que M. [K] a bénéficié de commissions occultes à l'appui d'un document manuscrit (pièce 21 du dossier de l'appelant), établi par M. [K] à une date inconnue, par lequel celui-ci sollicite auprès d'une personne désignée sous son prénom '[E]', le versement d'une 'somme de 12 000 euros comme convenu (3000 m2 x 4 euros), et auquel il est répondu, par cette personne sur ce même document, que le versement sera limité à 2 500 euros 'parce que mon [mot indéchiffrable] n'était pas prévenu', qui ne permet pas d'établir l'existence et la matérialité de telles commissions en l'absence de tout autre élément.
Au regard d'un récapitulatif des bases de chiffres d'affaires sur le secteur affecté à M. [K], qui tient compte des charges à déduire sur les commissions à hauteur de 24 029,39 (qui ne sont pas contestées) et des avances également à déduire à hauteur de 20 427,51 euros (qui ne sont pas, non plus contestées), l'ensemble des commissions d'agent commercial dues à ce dernier, en ce compris la pénalité contractuelle de 3%, sera fixé à la somme de 75 654,05 euros HT ou 90 784,86 euros TTC.
Par ces motifs, les jugements entrepris seront confirmés dans toutes leurs dispositions, sauf à préciser, par rectification de l'erreur matérielle figurant dans le jugement rectificatif, qu'il s'agit d'une fixation des créances de M. [K] au passif de la société Pierre du monde.
4- sur les autres demandes
Succombant sur son appel, la société Pierre du monde sera, seule, condamnée aux dépens et au vu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à payer la somme de 3 000 euros, le surplus des demandes sur ce fondement étant rejeté.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Déclare irrecevables, pour défaut de qualité à agir, les demandes de Monsieur [W] [Y] en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SAS Pierre du monde,
Confirme dans toutes leurs dispositions les jugements rectifié et rectificatif du tribunal de commerce de Béziers en date des 22 février et 8 mars 2021, sous réserve de ce qu'il s'agit d'une fixation des créances de Monsieur [J] [K] au passif de la SAS Pierre du monde,
Condamne la SAS Pierre du monde à payer à Monsieur [J] [K] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette le surplus des demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SAS Pierre du monde aux dépens d'appel.
le greffier, le président,