COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
N° RG 23/00078 - N° Portalis DBVK-V-B7H-PWQH
O R D O N N A N C E N° 2023 - 78
du 04 Février 2023
SUR LE REJET DE LA REQUETE AUX FINS DE MISE EN LIBERTE
(Article R.742-2 et suivants du CESEDA)
dans l'affaire entre,
D'UNE PART :
Monsieur [R] [F]
né le 29 Mai 1988 à [Localité 5] (ALGERIE)
de nationalité Algérienne
retenu au centre de rétention de [Localité 1] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,
Comparant, assisté de Maître Fariza TOUMI, avocat commis d'office.
en présence de Maître SOLH, avocate en observation
Appelant,
et en présence de Monsieur [V] [P], interprète assermenté en langue arabe,
D'AUTRE PART :
1°) Monsieur LE PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Non comparant
2°) MINISTERE PUBLIC
Non comparant
Nous, Sophie PUIGREDO conseillère à la cour d'appel de Montpellier, déléguée par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assistée de Marion CIVALE, greffier,
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Vu l'ordonnance du 28 janvier 2023 du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de PERPIGNAN prolongeant la rétention administrative de Monsieur [R] [F] pour une durée maximale de vingt-huit jours, confirmée par la cour d'appel de Montpellier par ordonnance du 31 janvier 2023
Vu la requête de Monsieur [R] [F] en date du 2 février 2023 sollicitant sa remise en liberté sur le fondement de l'article R 742-2 et suivants du CESEDA.
Vu l'ordonnance du 03 Février 2023 à 18h20 notifiée le même jour à la même heure, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de PERPIGNAN qui a rejeté la demande de mise en liberté de Monsieur [R] [F].
Vu la déclaration d'appel faite le 04 Février 2023 par Monsieur [R] [F] , du centre de rétention administrative de [Localité 7], transmise au greffe de la cour d'appel de Montpellier le même jour à 11h56.
Vu les télécopies adressées le 04 Février 2023 à Monsieur LE PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES, à Monsieur [R] [F], à son conseil, et au Ministère Public les informant que l'audience sera tenue le 04 Février 2023 à 15 H 30.
L'avocat et l'appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, dans le box dédié de l'accueil de la cour d'appel de Montpellier, les portes de la salle étant fermées pour assurer la confidentialité de l'entretien, en la seule présence de l'interprète , et ce, sur le temps de l'audience fixée, avec l'accord du délégué du premier président de la cour d'appel de Montpellier.
L'audience publique initialement fixée à 15 H 30 a commencé à 15h51.
PRETENTIONS DES PARTIES
Assisté de Monsieur [V] [P], interprète, Monsieur [R] [F] confirme son identité telle que mentionnée dans l'ordonnance entreprise et déclare sur transcription du greffier à l'audience : ' Je m'appelle [R] [F], je suis né le 29 Mai 1988 à [Localité 5], c'est un quartier à [Localité 4] en Algérie. J'ai fait une demande pour être remis en liberté. Je voudrais être libéré, et à défaut que l'on m'envoie en Espagne. En France je travaille, je suis plaquiste mais je suis en rétention parce que je dois quitter le territoire français. En Espagne, j'ai de la famille et je connais des gens là bas. Ma tante habite à [Localité 3]. J'ai fait une demande d'asile en Espagne, c'était en 2014 mais je ne connais pas la date exacte, je n'ai pas eu de réponse encore. J'ai aussi fait une demande en Allemagne, en 2018. C'est les services de police qui me l'ont suggéré, je ne suis pas resté longtemps là bas, trois mois, parce que je n'ai pas trouvé de travail. Je suis en France depuis 2014. J'ai été en Espagne, puis en France puis en Allemagne. Je suis revenu en 2018, à [Localité 6] puis à [Localité 1].'
L'avocat, Me Fariza TOUMI développe les moyens de l'appel formé contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui a prolongé le maintien en rétention de l'étranger.
Assisté de Monsieur [V] [P], interprète, Monsieur [R] [F] a eu la parole en dernier et a déclaré sur transcription du greffier à l'audience : 'Je voudrais être libéré et ne pas rester en centre de rétention. J'ai toujours travaillé, j'aimerais reprendre mon métier. Je peux aller en Espagne si vous me relachez.'
La conseillère indique que la décision et la voie de recours seront notifiées sur place, après délibéré.
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SUR QUOI
Sur la recevabilité de l'appel :
Le 04 Février 2023, à 11h56, Monsieur [R] [F] a formalisé appel motivé de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Perpignan du 03 Février 2023 notifiée à 18h20, soit dans les 24 heures de la notification de l'ordonnance querellée, qu'ainsi l'appel est recevable en application des articles R 743-10 et R743-11 du CESEDA.
Sur la violation du principe du contradictoire
L'avocat de l'appelant fait valoir que la procédure devant le premier juge est entachée d'irrégularité car le principe du contradictoire n'aurait pas été respecté et ce en violation de l'article 16 du code de procédure civile, en le privant d'accès au mémoire de la Préfecture des Pyrénées-orientales.
L'article 16 du code de procédure civile dispose que le juge doit, en toute circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
Il ne peut retenir dans sa décision les moyens, explications et documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.
En l'espèce, le premier juge, pour motiver sa décision de rejet s'est fondé exclusivement sur des éléments déjà au dossier avant la demande de mise en liberté de M. [F] en date du 2 février 2023 et donc contradictoirement débattus.
D'ailleurs, en cause d'appel, le conseil de M. [F] n'excipe d'aucune pièce, d'aucun élément de droit ou de fait qui auraient été retenus par le juge des libertés et de la détention et dont il n'en aurait pas eu préalablement connaissance.
Ce moyen sera donc rejeté.
L'avocat de l'appelant fait valoir que la convention de Genève aurait été violée ainsi que la confidentialité de la demande d'asile.
Pour rejeter ce moyen, le premier juge a justement retenu qu'en application de la convention de Genève du 28 juillet 1951 et de l'article L512-1 du CESEDA, la personne ayant qualité de réfugié ou celle ne disposant pas de cette qualité mais bénéficiant de la protection subsidiaire a droit à la confidentialité des informations la concernant, mais que M.[F] ni ne soutient ni ne prouve qu'il bénéficie du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire.
A l'audience de ce jour, il a indiqué simplement avoir déposé il y a plusieurs années des demandes d'asile en ESPAGNE et en ALLEMAGNE, sans avoir été tenu informé toutefois des réponses qui y ont été apportées, ce qui ne peut qu'étonner.
Il ne justifie donc pas de la qualité de réfugié ou de personne ayant la protection subsidiaire.
En outre, il ne justifie pas que la présentation aux autorités consulaires algérienne lui ait causé un quelconque grief.
Ces moyens seront donc rejetés
L'avocat de l'appelant soutient le défaut de diligences de l'autorité administrative.
L'appelant reproche à l'autorité administrative d'avoir formulé une demande de reprise en charge aux autorités d'ALLEMAGNE, de HOLLANDE et d' ESPAGNE que le 30 janvier 2023, alors que le passage à la borne EURODAC le 28 janvier 2023 avait révélé trois hits positifs de catégorie 1.
Il résulte de l'article L. 741-3 du CESEDA qu'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ, l'administration étant tenue d'exercer toutes diligences à cet effet, dès le placement en rétention (1re Civ., 13 mai 2015, pourvoi n° 14-15.846, Bull. 2015, I, n° 109)
D'une part, l'autorité administrative n'est obligée à entamer des diligences en vue du départ de l'étranger qu'au jour de son placement en rétention administrative et d'autre part, toute irrégularité de procédure antérieure à la décision de prolongation de la mesure ne peut être soutenue sous peine d'irrecevabilité au visa de l'article L 743-11 du CESEDA.
Pour rejeter ce moyen tiré du défaut de diligences de l'autorité administrative , le juge des libertés et de la détention de Perpignan a relevé à juste titre que l'autorité administrative française avait fait le nécessaire qui lui incombait le 30 janvier 2023, les autorités néerlandaises ayant refusé de reprendre en charge l'intéressé dès le 31 janvier 2023 et les autorités allemande dès le 1er février 2023, la réponse des autorités espagnoles n'étant pas connue à ce jour .
En outre, il apparaît que dès le 27 janvier 2023, les autorités administratives françaises ont adressé 9h23 une demande d'information aux autorités espagnoles sur la situation de l'intéressé, demande à laquelle les autorités espagnoles ont répondu le 27 janvier 2023 à 16h27, en précisant que l'intéressé n'était pas inscrit au fichier espagnol des étrangers et qu'aucun signalement en vigueur le concernant n'existait.
Le moyen sera donc rejeté.
SUR LE FOND
L'article L 743-13 du CESEDA':' «'Le juge des libertés et de la détention peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.
L'assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution.
Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L. 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.'»
En l'espèce, l'intéressé ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure (article L 551-1 du CESEDA et L 511-1 II 3è) en ce qu'il ne justifie pas de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, et en ce qu'il ne justifie pas de son lieu de résidence effective certaine et stable ;
L'ordonnance du juge des libertés et de la détention sera en conséquence confirmée.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement,
Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,
Vu les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
Déclarons l'appel recevable,
Rejetons les exceptions de nullité et moyens de nullité,
Confirmons la décision déférée,
Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l'article R 743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile.
Fait à Montpellier, au palais de justice, le 04 Février 2023 à 17h 04.
Le greffier, Le magistrat délégué,