AFFAIRE :
S.C.A. ARTERRIS
C/
[U]
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4e chambre civile
ARRET DU 02 FEVRIER 2023
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 22/02354 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PM3P
Décisions déférées à la Cour;
Arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 09 mars 2022, enregistrée sous le n° T 19-21.827
Arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 03 juillet 2019, enregistrée sous le n° 16/07469
Jugement du tribunal de grande instance de Narbonne du 22 septembre 2016, enregistrée sous le n° 14/01069
Vu l'article 1037-1 du code de procédure civile;
DEMANDERESSE A LA SAISINE:
SCA ARTERRIS, venant aux droits de la SAS AUDECOOP
RCS de Carcassonne n°D775 784 689, agissant poursuites et diligences au nom de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités au siège social
[Adresse 6]
[Localité 2]
Représentée par Me Caroline TREZEGUET de la SCP DORIA AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituée à l'audience par Me Camille GUIRAO, avocat au barreau de MONTPELLIER,
et assistée à l'instance par Me Sébastien BRUNET-ALAYRAC de la SCP CAMILLE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE
DEFENDERESSE A LA SAISINE
Madame [M] [U]
née le [Date naissance 4] 1961 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Nicolas SAINTE CLUQUE de la SELARL SAINTE-CLUQUE - SARDA - LAURENS, avocat au barreau de NARBONNE
Ordonnance de clôture du 11 octobre 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 18 octobre 2022,en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 805 du code de procédure civile, devant la cour composée de :
M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre
M. Frédéric DENJEAN, Conseiller
Mme Marianne FEBVRE, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier : Mme Camille MOLINA, Greffière lors des débats
ARRET :
- contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour fixée au 7 décembre 2022 prorogée au 19 janvier 2023 puis au 2 février 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre et par Mme Camille MOLINA, Greffière.
*
* *
FAITS ET PROCEDURE
Mme [M] [U] a adhéré le 3 mai 2005 en qualité d'associé coopérateur, à la société coopérative agricole Audecoop, aux droits de laquelle vient la société coopérative agricole Arterris (la SCA), au sein de laquelle l'adhérente détenait un compte courant d'associé.
Soutenant que ce compte était débiteur, la SCA a déposé une requête en injonction de payer à l'encontre de Mme [M] [U], qui a formé opposition contre l'ordonnance ayant accueilli cette requête.
Par jugement en date du 22 septembre 2016, le tribunal de grande instance de Narbonne a statué comme suit :
- rejette la demande de révocation de l'ordonnance de clôture ;
- déclare recevable l'opposition à l'injonction de payer formée par Mme [M] [U] le 10 juin 2014 ;
- rejette la fin de non recevoir tenant du défaut de qualité à agir de la société coopérative agricole Arterris ;
- rejette la demande de condamnation de Mme [M] [U] ;
- rejette toute autre demande des parties ;
- condamne la société coopérative agricole Arterris à verser à Mme [M] [U] une indemnité de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamne la société coopérative agricole Arterris aux dépens de l'action.
Par arrêt en date du 3 juillet 2019, la cour d'appel de Montpellier a statué comme suit :
- déclare l'appel fondé ;
- réforme le jugement de premier ressort ;
- statuant à nouveau de ce seul chef,
- condamne Mme [U] à payer à la société coopérative agricole Arterris la somme de 29 094,02 euros, avec intérêts de droit depuis le 21 octobre 2013, et capitalisation des intérêts depuis au moins une année à compter de la première demande en ce sens ;
- dit n'y avoir lieu à appliquer l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamne Mme [U] aux entiers dépens, dont ceux de la procédure d'injonction de payer, qui seront recouvrés au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.
En date du 9 mars 2022, la première chambre civile de la Cour de cassation a jugé comme suit :
- CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 3 juillet 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;
- remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier autrement composée ;
- condamne la société coopérative agricole Arterris aux dépens ;
- en application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société coopérative agricole Arterris et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à Mme [U] ;
- dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
- aux motifs que pour condamner Mme [U] au paiement du solde débiteur du compte courant, la cour d'appel s'est contentée de relever qu'étaient produits les relevés de compte des 31 octobre 2009, 30 novembre 2009, 31 décembre 2009, janvier 2010, 28 février 2010 ;
- qu'en statuant comme elle l'a fait, sans constater que l'ensemble des relevés de compte permettant de reconstituer le solde débiteur du compte courant ouvert dans les comptes de la société Arterris étaient produits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1315, devenu 1353, du code civil.
Vu la déclaration de saisine de la cour d'appel de Montpellier par la société coopérative agricole Arterris en date du 29 avril 2022 ;
PRETENTIONS ET MOYENS
Par dernières conclusions déposées via le RPVA le 3 octobre 2022, la société coopérative agricole Arterris, auxquelles il est expressément référé pour complet exposé des motifs et du dispositif, demande de ;
Vu l'article 1416 et suivants du code de procédure civile,
Vu l'article 1134 du code civil (ancien),
Réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Narbonne le 22 septembre 2016,
En conséquence,
Statuant à nouveau,
Condamner Mme [M] [U] à lui payer la somme en principal de 29 094,02 euros outre intérêts de droit à compter du 21 octobre 2013, jusqu'au jour du règlement définitif, étant précisé que, conformément à l'article 1154 du code civil les intérêts échus produisent des intérêts au bout d'un an,
Condamner Mme [M] [U] à régler la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers frais et de l'instance en ceux compris les frais de la procédure d'injonction de payer.
Au soutien de ses prétentions, elle fait notamment valoir que :
- la coopérative réclame le solde débiteur d'un compte courant dont le principe et le fonctionnement ont été acceptés par Mme [U] qui n'a pas protesté au vu des relevés de compte adressés.
- si effectivement le compte tiers est par définition établi par la seule coopérative, et que l'intégralité des relevés de compte ne sont pas produits, il n'en demeure pas moins que la combinaison et l'analyse de ces documents permet de caractériser la créance de la société Arterris.
- l'analyse du compte tiers à la date du 28 février 2010 correspond au solde dû sur le relevé de compte adressé à Mme [U] sans qu'elle n'émette la moindre contestation.
Par dernières conclusions déposées via le RPVA le 2 août 2022, Mme [M] [U] demande à la cour de :
Débouter la société coopérative agricole Arterris de l'ensemble des ses demandes, fins et prétentions,
Confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamner la société coopérative agricole Arterris prise en la personne de son représentant légal à lui verser la somme de 4 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'exécution inhérents à l'arrêt à intervenir.
A l'appui de ses prétentions, elle fait notamment valoir que :
- l'existence du compte courant ne dispense pas la coopérative qui invoque un solde en sa faveur de rapporter la preuve du bien-fondé de sa créance à due concurrence.
- la coopérative échoue à rapporter la preuve de ce que Mme [U] serait recevable du paiement des prétendues livraisons de marchandises dans la mesure où elle ne verse aucune facture ni bon de livraison correspondant à la période considérée, en violation de l'article 13 du titre III du règlement intérieur de la coopérative.
- n'étant pas en mesure de produire l'ensemble des relevés de compte correspondant à la période de 2006 à 2013 permettant de retracer toutes les opérations ayant abouti au prétendu solde débiteur, la créance de la coopérative ne peut être considérée comme établie.
Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 11 octobre 2022 ;
MOTIFS
Aux termes de l'article 1134 du code civil, devenu 1103, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
L'article 1315 du même code, devenu 1353, énonce que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Mme [U] ne conteste pas son adhésion le 3 mai 2005 à la société coopérative agricole Audecoop, avec la signature d'une convention de compte courant le même jour, mais elle signale que le solde débiteur du compte courant n'est pas démontré compte tenu de l'absence de production de l'ensemble des relevés de compte, nécessaires pour retracer toutes les opérations ayant abouti à ce solde.
En effet, la preuve d'une créance de solde débiteur de compte courant ne peut résulter de la production des relevés du compte que si ceux-ci sont produits dans leur totalité.
La société coopérative agricole Arterris a produit en pièce 23 les relevés de compte des 31 octobre 2009, 30 novembre 2009, 31 décembre 2009, 31 janvier 2010, et 28 février 2010, mais sans communiquer l'ensemble des relevés de compte, pourtant nécessaire pour pouvoir reconstituer le solde débiteur du compte courant ouvert dans les comptes de cette société.
Cependant, la société Arterris produit également devant la présente cour, en pièce 24, les factures émises par Audecoop/Arterris du 30 septembre 2007 au 30 septembre 2009, pour lesquelles cette société signale dans ses conclusions que "pour certaines d'entre elles les bons de commande y afférents sont signés" par Mme [U].
Ainsi, les bons de livraison signés par Mme [U] sont communiqués concernant le montant de factures de 3 923 euros, dont un bon de livraison du 20 juillet 2009 qui a été réglé au 31 août 2009 par une chèque de 1 052,92 euros, comme justifié par la pièce 15 produite par Mme [U].
En l'absence de documents permettant de reconstituer autrement l'historique du solde débiteur, la créance de la société Arterris apparaît certaine, liquide et exigible pour le seul montant de 3 923 moins 1 052,92 soit 2 870,08 euros, au paiement duquel Mme [U] sera condamnée, avec les intérêts au taux légal à compter de la date de signification de l'ordonnance d'injonction de payer le 9 janvier 2014, et avec capitalisation des intérêts annuels conformément à l'article 1154 du code civil.
Par conséquent, il conviendra de réformer partiellement le jugement.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Vu l'arrêt en date du 9 mars 2022 de la Cour de cassation qui a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt du 3 juillet 2019 de la cour d'appel de Montpellier ;
Réforme partiellement le jugement de premier ressort, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de révocation de l'ordonnance de clôture, déclaré recevable l'opposition à l'injonction de payer formée par Mme [M] [U] le 10 juin 2014, et rejeté la fin de non recevoir tenant du défaut de qualité à agir de la société coopérative agricole Arterris ;
Statuant à nouveau,
Condamne Mme [M] [U] à payer à la société coopérative agricole Arterris la somme de 2 870, 08 euros, avec intérêts de droit depuis le 9 janvier 2014, et capitalisation des intérêts depuis au moins une année à compter de la première demande en ce sens ;
Condamne [M] Mme [U] à payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [M] [U] aux entiers dépens d'appel et de première instance, dont ceux de la procédure d'injonction de payer.
La greffière, Le président,