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12/01/2023 | FRANCE | N°19/00958

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 12 janvier 2023, 19/00958


Grosse + copie

délivrées le

à











COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



4e chambre civile



ARRET DU 12 JANVIER 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/00958 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OAMU





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 05 NOVEMBRE 2018

TRIBUNAL D'INSTANCE DE BEZIERS

N° RG 11-18-001344





APPELANTE :



SA COFIDIS prise en la personne de son représentant légal en exercice


[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Sandy RAMAHANDRIARIVELO de la SCP RAMAHANDRIARIVELO - DUBOIS, avocat au barreau de MONTPELLIER







INTIMEE :



Madame [N] [R] divorcée [S]

née le [Date naissance 1] 1944 à...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 12 JANVIER 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/00958 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OAMU

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 05 NOVEMBRE 2018

TRIBUNAL D'INSTANCE DE BEZIERS

N° RG 11-18-001344

APPELANTE :

SA COFIDIS prise en la personne de son représentant légal en exercice

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Sandy RAMAHANDRIARIVELO de la SCP RAMAHANDRIARIVELO - DUBOIS, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

Madame [N] [R] divorcée [S]

née le [Date naissance 1] 1944 à [Localité 6] (34)

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Yann GARRIGUE, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Fanny LAPORTE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 24 Octobre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 NOVEMBRE 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Frédéric DENJEAN, Conseiller

Madame Marianne FEBVRE, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Audrey VALERO

ARRET :

- Contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Madame Audrey VALERO, Greffière.

*

* *

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu l'arrêt avant-dire droit de la cour de ce siège en date du 03 novembre 2021 auquel le présent se réfère expressément pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales des parties, qui enjoint à la société Cofidis de produire les contrats de crédit en original, à Mme [N] [R] épouse [S] de produire au moins trois documents revêtus de sa signature apposée entre 2012 et 2016 et ordonné sa comparution personnelle.

Vu les contrats originaux, remis le 17 janvier 2022 par la société Cofidis.

Vu le procès-verbal de comparution personnelle de Mme [N] [R] épouse [S] à l'audience du 17 janvier 2022.

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 03 octobre 2022 auxquelles il est renvoyé pour de plus amples développements sur ses moyens, au terme desquelles la société Cofidis demande d'annuler le jugement au visa des articles 14 et 16 du code de procédure civile, de déclarer irrecevables comme prescrites depuis les 29 novembre 2017 et 21 octobre 2018 toute demande de déchéance du droit aux intérêts au titre de l'offre de crédit renouvelable du 29 novembre 2012 et au titre de l'offre de prêt personnel du 21 octobre 2013 ; d'infirmer la décision en ce qu'elle a prononcé d'office la déchéance du droit aux intérêts, condamné Mme [S] au paiement des sommes de 1287,10€, 4275,01€, 2375,61€ ; dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 08 juillet 2018 et rejeté les autres demandes de la société ; de constater la déchéance du terme et en tant que de besoin, prononcer la résolution judiciaire du contrat, condamner Mme [S] à lui payer les sommes de :

- contrat de prêt personnel du 15 septembre 2015 : 3093,85€ avec intérêts au taux de 18,40% depuis le 23 juillet 2018, hors l'indemnité contractuelle qui portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 05 juillet 2018, à défaut de l'assignation ;

- contrat de crédit renouvelable du 29 novembre 2012 : 6882,20€ avec intérêts au taux contractuel de 12,30% depuis le 23 juillet 2018, hors l'indemnité contractuelle qui portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 05 juillet 2018, à défaut de l'assignation ;

- contrat de prêt personnel du 13 juillet 2016 : 3491,67€ avec intérêts au taux contractuel de 18,29%, depuis le 23 juillet 2018, hors l'indemnité contractuelle qui portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 05 juillet 2018, à défaut de l'assignation ;

- contrat de prêt personnel du 21 octobre 2013 : 10577,27€ avec les intérêts au taux contractuel de 10,02% depuis le 23 juillet 2018, hors l'indemnité contractuelle qui portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 05 juillet 2018, à défaut de l'assignation ;

- contrat de prêt personnel du 13 février 2016 : 3257,10€ avec intérêts au taux contractuel de 18,35% depuis le 23 juillet 2018, hors l'indemnité contractuelle qui portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 05 juillet 2018, à défaut de l'assignation ;

- 1500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, dont distraction pour ceux d'appel, au profit de l'avocat

- application des dispositions des articles 1343-1 et 1343-2 du code civil.

Vu ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 14 octobre 2022 auxquelles il est renvoyé pour de plus amples développements sur ses moyens, au terme desquelles Mme [N] [R] épouse [S] demande de reformer le jugement, de la mettre hors de cause, de rejeter les prétentions de la société Cofidis à son encontre, de condamner la société Cofidis à lui payer la somme de 1500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du Code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture du 24 octobre 2022.

MOTIFS

Sur la nullité du jugement pour violation des articles 4 et 16 du code de procédure civile

La société Cofidis soutient, la défenderesse n'ayant pas comparu et soulevé un moyen quelconque, que le premier juge n'a pas rouvert les débats pour l'inviter à discuter le moyen de pur droit qu'il relevait d'office.

Il est constant qu'il ne résulte pas d'une motivation du jugement déféré que le premier juge, alors qu'il relevait d'office le moyen tiré de l'absence de vérification de la solvabilité de l'emprunteur par le prêteur a invité la société Cofidis à présenter ses observations sur ce moyen.

Ce faisant, le premier juge a violé les dispositions des articles 12 et 16 du code de procédure civile ainsi que le principe de la contradiction. Le jugement encourt par conséquent l'annulation.

La cour, par l'effet dévolutif de l'appel, est saisie de l'ensemble du litige, de telle sorte que le deuxième moyen tiré de la violation du principe dispositif est devenu sans objet.

Sur la prescription opposable

La société Cofidis développe le moyen selon lequel la prescription quinquennale des articles L.110-4 du code de commerce et 2224 du code civil est opposable au juge tout comme à l'emprunteur.

La cour constate que Mme [S], intimée, ne discute pas devant elle, fusse à titre subsidiaire, le moyen tiré de l'absence de vérification de la solvabilité que la cour n'entend pas soulever d'office alors que l'intimée est valablement représentée à l'instance.

Le moyen tiré de l'opposabilité de la prescription quinquennale est sans objet.

Sur l'appel incident de Mme [S]

Mme [S] a formé appel incident du jugement en ce qu'il porte condamnation à paiement de diverses sommes à son encontre et demande à être mise hors de cause, n'étant pas signataire des cinq offres de crédit sur lesquelles la société Cofidis fonde ses demandes et les dispositions de l'article 220 du code civil ne pouvant lui être opposées.

Elle expose au soutien que son époux, depuis placé sous curatelle renforcée par jugement du 18 mai 2017, a reconnu le 16 octobre 2016 avoir imité sa signature pour la souscription d'une multitude de prêts, sans l'en avoir informée et que ce n'est que lorsque leur fille, agissant en qualité de représentante, a pu examiner les différents papiers retenus par son père qu'elle a été informée de l'ampleur des imitations, plusieurs créanciers se désistant ensuite de leur action à son encontre.

Elle dénie sa signature et produit divers documents attestant de celle-ci, complétés par le relevé de signatures effectué devant le conseiller de la mise en état.

Ces sommes n'ont pas été empruntées pour les besoins du ménage, les multiples emprunts contractés auprès de douze organismes différents n'étant ni modestes ni nécessaires aux besoins du ménage.

La société Cofidis conteste une telle analyse en soulignant que les signatures figurant dans les cartouches des contrats sont rigoureusement identiques ou similaires à celle reconnue par Mme [S]. Elle revendique l'application des dispositions de l'article 220 du code civil.

En cet état contraire, la cour, au vu des signatures figurant sur chaque original de contrat de crédit et des éléments de comparaison produits et provoqués, est en mesure d'affirmer que les signatures apposées sur chaque contrat de crédit ne sont pas de la main de Mme [S]. Il existe en effet une différence importante tenant au double soulignement entre les signatures apposées par elle devant le conseiller de la mise en état, conformes aux pièces de comparaison produites (copie de la carte d'identité, de sa carte d'électeur, fiche d'engagement de bénévole au restos du coeur, tableau récapitulatif de soins, certificat de restitution de matériel, contemporains des signatures querellées et conformes aux exemplaires apposés devant le conseiller de la mise en état) et les signatures figurant dans les cartouches dédiés des contrats de crédits qui comportent (ou non) un tiret en dessous de la signature qui révèle une imitation maladroite du soulignement volontaire et déterminé de sa signature par Mme [S].

La dénégation de signature est confortée par le document manuscrit pièce n°4 imputé à M. [X] [S] qui y reconnaît de manière générale avoir imité la signature de son épouse et par la production de nombreuses décisions du tribunal d'instance de Béziers qui ont fait droit à l'égard d'autres créanciers à la dénégation de signatures soit en rejetant leurs prétentions, soit en leur donnant acte de leur désistement d'instance.

Mme [S] affirme ne pas avoir eu accès aux relevés du compte sur lequel les déblocages de fonds et les prélèvements étaient opérés avant la découverte par leur fille des malversations de M. [X] [S], affirmation plausible en l'état du contexte et confortée par la production de relevés du compte de monsieur faisant état de transfert d'argent vers son compte personnel au moyen de chèques indiqués comme tirés depuis le compte ouvert au nom de son épouse.

La cour en conclut sans barguigner que Mme [N] [R] épouse [S] n'est pas signataire des offres de crédit souscrites auprès de la société Cofidis auxquelles elle n'a pas consenti.

S'agissant des dispositions de l'article 220 du code civil, selon lequel le consentement des deux époux n'est pas requis pour les emprunts lorsqu'ils ne portent que sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante et que le montant cumulé de ces sommes en cas de pluralité d'emprunts ne soit pas manifestement excessif eu égard au train de vie du ménage, la cour relève de la motivation des jugements du tribunal d'instance de Béziers rendus dans les instances opposant Mme [S] à d'autres créanciers que M. [S] a souscrit la totalité de 36 crédits sur une période allant de 2014 à 2016 tels que repris dans le plan de surendettement, portant sur un capital de plus de 230000€, élément non contredit par la société Cofidis.

Ainsi, si chaque crédit souscrit auprès de la société Cofidis peut être considéré comme portant sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante, le montant cumulé, qu'il le soit auprès de Cofidis (6000€, 14000€, 3000€, 3000€, 3000€, de 2012 à 2016) ou auprès de l'ensemble des organismes financiers prêteurs (230000€) est manifestement excessif eu égard au train de vie du ménage dont la société Cofidis ne rapporte pas la consistance.

La société Cofidis sera en conséquence déboutée de l'ensemble de ses demandes en paiement.

Partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, elle supportera les dépens de l'instance.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,

Annule le jugement du tribunal d'instance de Béziers du 05 novembre 2018,

Statuant sur l'appel principal et l'appel incident,

Déboute la société Cofidis de l'ensemble de ses prétentions à l'encontre de Mme [N] [R] épouse [S],

Condamne la société Cofidis à payer à Mme [N] [R] épouse [S] la somme de 1500€ par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Cofidis aux entiers dépens de l'instance.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/00958
Date de la décision : 12/01/2023
Sens de l'arrêt : Annulation

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-12;19.00958 ?
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