Grosse + copie
délivrée le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3e chambre sociale
ARRET DU 14 DECEMBRE 2022
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/05652 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NL4N
ARRET n°
Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 OCTOBRE 2017
TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE HERAULT
N° RG21600449
APPELANT :
Monsieur [J] [S]
[Adresse 2]
[Localité 1]
comparant en personne
INTIMEE :
CIPAV
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentant : Me SAIZ MELEIRO substituant Me Stéphanie PAILLER de la SELEURL CABINET STEPHANIE PAILLER AVOCAT, avocat au barreau de PARIS
En application de l'article 937 du code de procédure civile, les parties ont été convoquées à l'audience.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 NOVEMBRE 2022,en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet et Mme Isabelle MARTINEZ, Conseillère, chargé du rapport.
Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet
Mme Isabelle MARTINEZ, Conseillère
Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sylvie DAHURON
ARRET :
- Contradictoire.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour ;
- signé par Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet et par Mademoiselle Sylvie DAHURON, greffier.
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EXPOSE DU LITIGE, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par courrier recommandé du 23 février 2016, Monsieur [J] [S] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Hérault d'une opposition à la contrainte du 9 décembre 2015 qui lui a été signifiée par exploit d'huissier du 17 février 2016 à la requête du directeur de la Caisse Interprofessionnelle de Prévoyance et d'Assurance Vieillesse (CIPAV) en paiement de la somme, en principal, de 7 403,61 euros s'appliquant à des cotisations et majorations de retard exigibles au titre de la période suivante : du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014.
Suivant jugement contradictoire du 17 octobre 2017, le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Hérault 'Reçoit M.[J] [S] en son opposition ; Valide la contrainte litigieuse pour son entier montant sans préjudice des frais de signification qui restent à la charge de la partie opposante ; Rappelle qu'en application des dispositions de l'article R 133-3 in fine du code de la sécurité sociale ce jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire'.
Le 2 novembre 2017, Monsieur [J] [S] a interjeté appel du jugement.
La cause, enregistrée sous le numéro RG 17/05652, a été appelée à l'audience des plaidoiries du 17 novembre 2022.
In limine litis, et à titre principal, la CIPAV a soulevé l'irrecevabilité de l'appel interjeté par Monsieur [J] [S], à défaut pour celui-ci d'avoir expressément mentionné, dans sa déclaration d'appel, les chefs de jugement critiqués.
Monsieur [J] [S] a sollicité l'infirmation du jugement, en demandant à la cour :
- d'annuler toutes les 'cotisations hors contrat' ;
- de condamner la CIPAV au paiement 'des dommages et intérêts qui permettront à M. et Mme [S] d'avoir une retraite décente. Le minimum étant un capital permettant un placement en viager comblant la différence entre les 5 000 € actuellement versés par la CIPAV à M.[S] et les 12 000 € du minimum avant pauvreté. Soit un capital de 70 000 € pour une rente de 7 000 €' ;
- condamner la CIPAV au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
La CIPAV a ensuite, à titre subsidiaire, sollicité la confirmation du jugement, en demandant à la cour :
- de valider la contrainte délivrée le 17 février 2016 pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014 en son entier montant s'élevant à 7 403,61 euros, représentant les cotisations (6 546 euros) et les majorations de retard (857,61 euros) dues arrêtées à la date du 21 juin 2015 ;
- de condamner Monsieur [J] [S] au paiement des frais de recouvrement conformément aux articles R 133-6 du code de la sécurité sociale et 8 du décret du 12 décembre 1996 ;
- de condamner Monsieur [J] [S] au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
I.- Sur la recevabilité de l'appel et l'effet dévolutif de la déclaration d'appel
Aux termes de l'article R 142-11 du code de la sécurité sociale, la procédure d'appel est sans représentation obligatoire.
Selon l'article 562 du code de procédure civile, l'appel défère à la cour d'appel la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.
Selon l'article 933 du code de procédure civile, régissant la procédure sans représentation obligatoire devant la cour d'appel, la déclaration désigne le jugement dont il est fait appel, précise les chefs du jugement critiqué auquel l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible, et mentionne, le cas échéant, le nom et l'adresse du représentant de l'appelant devant la cour. Elle est accompagnée de la copie de la décision.
Si, pour les procédures avec représentation obligatoire, il a été déduit de l'article 562 alinéa 1er du code de procédure civile que lorsque la déclaration tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas et que de telles règles sont dépourvues d'ambiguïté pour des parties représentées par un professionnel du droit, un tel degré d'exigence dans les formalités à accomplir par l'appelant en matière de procédure sans représentation obligatoire constituerait une charge procédurale excessive, dès lors que celui-ci n'est pas tenu d'être représenté par un professionnel du droit. La faculté de régularisation de la déclaration d'appel ne serait pas de nature à y remédier.
Il en résulte qu'en matière de procédure sans représentation obligatoire, y compris lorsque les parties ont choisi d'être assistées ou représentées par un avocat, la déclaration d'appel qui mentionne que l'appel tend à la réformation de la décision déférée à la cour d'appel, en omettant d'indiquer les chefs du jugement critiqués, doit s'entendre comme déférant à la connaissance de la cour d'appel l'ensemble des chefs de ce jugement.
Il doit en être de même lorsque la déclaration d'appel, qui omet de mentionner les chefs de dispositif critiqués, ne précise pas si l'appel tend à l'annulation ou à la réformation du jugement.
En l'espèce, par courrier recommandé du 30 octobre 2017 réceptionné le 2 novembre 2017, Monsieur [J] [S], non assisté ni représenté par un professionnel du droit, a, dans les délais, formé appel du jugement rendu le 17 octobre 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Hérault, dont la copie était jointe, en ces termes : 'Par la présente, j'ai l'honneur de déposer auprès de vous cette déclaration d'appel du jugement rendu le 17 octobre 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale, dans l'affaire qui m'oppose à la CIPAV.'
En application des principes susvisés, l'omission, par Monsieur [J] [S], de la mention des chefs de jugement critiqués, ne prive pas la déclaration d'appel de son effet dévolutif, laquelle s'entend comme déférant à la connaissance de la cour de céans l'ensemble des chefs de ce jugement bien que cette déclaration
ne précise pas si l'appel tend à l'annulation ou à la réformation du jugement.
A toutes fins utiles, la cour rappelle qu'une éventuelle absence d'effet dévolutif ne constitue pas une fin de non-recevoir, et que les mentions prévues par l'article 933 du code de procédure civile, lequel renvoie à l'article 57 du même code, ne sont pas prescrites à peine d'irrecevabilité.
II.- Sur la qualité à agir de la CIPAV , l'obligation d'affiliation de Monsieur [J] [S] et la validation de la contrainte du 9 décembre 2015
Aux termes de l'article L 111-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, l'organisation de la sécurité sociale est fondée sur le principe de solidarité nationale. Elle assure le service des prestations d'assurances sociales, d'accidents du travail et maladies professionnelles, des allocations de vieillesse ainsi que le service des prestations familiales dans le cadre des dispositions fixées par le présent code.
En application de l'article L 111-2-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce, sous réserve des traités et accords internationaux régulièrement ratifiés ou approuvés, sont affiliées à un régime obligatoire de sécurité sociale dans le cadre du présent code, quel que soit leur âge, leur sexe, leur nationalité ou leur lieu de résidence, toutes les personnes exerçant sur le territoire français, à titre temporaire ou permanent, à temps plein ou à temps partiel : une activité professionnelle non salariée ; ou une activité pour le compte d'un ou de plusieurs employeurs, ayant ou non un établissement en France, et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat.
L'organisation autonome de l'assurance vieillesse des professions libérale est régie par les dispositions combinées des articles L 621-1 et suivants, et L 641-1 et suivants du code de la sécurité sociale, dans leur version applicable au litige. Elle comprend une caisse nationale ainsi que des sections professionnelles dotées de la personnalité juridique et de l'autonomie financière, telles que la CIPAV.
La CIPAV tire en conséquence son existence de dispositions légales, aux termes desquelles il est acquis qu'elle est une personne morale de droit privé chargée d'une mission de service public, à savoir la gestion d'un régime légal de sécurité sociale, et plus précisément le régime obligatoire des assurances vieillesse de base, de retraite complémentaire et d'invalidité-décès des professions libérales relevant de sa compétence, dont font partie les architectes, comme Monsieur [J] [S], en application des articles L 621-1, L 621-3, L 622-5, L 642-1 et R 641-1 11° du code de la sécurité sociale.
Sans avoir à justifier d'une quelconque formalité administrative d'inscription ou d'immatriculation, la CIPAV, instituée par la seule force de la loi et dotée de la personnalité juridique, tient donc des dispositions susvisées sa capacité juridique et sa qualité à agir dans l'exécution des missions qui lui sont confiées par les articles L 641-2, L 642-1 et L 642-5 du code de la sécurité sociale, dont le recouvrement de cotisations et contributions sociales, ainsi que le contrôle et le contentieux du recouvrement.
La CIPAV, qui gère ainsi un régime légal obligatoire échappant au marché public, n'est donc pas une mutuelle, ni une entreprise au sens des Traités. Elle n'exerce pas des activités économiques au sens des règles européennes de la concurrence dès lors qu'elle remplit une fonction de caractère exclusivement social, d'une part fondée sur le principe de la solidarité nationale dans le cadre d'une affiliation obligatoire énoncée à l'article L 111-1 du code de la sécurité sociale, et d'autre part dépourvue de tout but lucratif, et n'exerce pas, non plus, une activité entrant dans le champ d'application des directives concernant la concurrence en matière d'assurance en sorte qu'elle n'est pas soumise à la signature d'un contrat.
Il s'ensuit, au regard des dispositions législatives nationales et européennes qui ne donnent lieu à aucune difficulté d'interprétation, d'une part que Monsieur [J] [S] doit obligatoirement être affilié et cotiser à la CIPAV, organisme désigné par la loi pour son activité libérale d'architecte, et qu'il ne peut a fortiori refuser de payer les cotisations qui lui sont réclamées, et d'autre part, que la CIPAV est parfaitement recevable en son action en recouvrement des cotisations, contributions sociales et majorations de retard litigieuses.
A ce titre, la CIPAV produit des décomptes détaillés faisant apparaître que les cotisations réclamées à Monsieur [J] [S] ont été calculées sur la base des revenus professionnels déclarés par ce dernier et des obligations découlant de son affiliation, et qu'elles s'élèvent à hauteur de 6 546 euros, outre 857,61 euros de majorations de retard appliquées conformément aux dispositions de l'article D 651-12 du code de la sécurité sociale, pour la période allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014.
Monsieur [J] [S], à qui il appartient en sa qualité d'opposant de démontrer le caractère infondé de la créance dont le recouvrement est poursuivi par l'organisme social, se contente de s'offusquer du faible montant de sa retraite perçue en contrepartie des cotisations qu'il prétend avoir versées. Il ne remet nullement en cause les modalités de calculs, ni les bases retenues par la CIPAV pour effectuer ceux-ci. Il ne discute pas davantage les tableaux détaillés produits par la CIPAV, explicitant les calculs ainsi opérés et justifiant du montant des cotisations et des majorations de retard réclamées. Au surplus, il ne démontre pas s'être acquitté de ces sommes.
En conséquence, sans qu'il n'y ait lieu de statuer sur le montant des prestations de vieillesse perçues par Monsieur [J] [S], litige dont la cour n'est pas saisie, le jugement déféré mérite confirmation en ce qu'il a validé la contrainte du 9 décembre 2015 en son entier montant, sans préjudice des majorations de retard complémentaires qui courront jusqu'au complet paiement de la créance et des frais de recouvrement qui doivent être mis à la charge de Monsieur [J] [S] conformément aux dispositions de l'article R 133-6 du code de la sécurité sociale, en l'état de l'opposition jugée infondée.
III.- Sur la demande de dommages et intérêts
Monsieur [J] [S] sollicite des dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'il dit avoir subi du fait de son affiliation 'forcée' à la CIPAV et du faible montant de sa retraite.
Or, d'une part, il a été précédemment admis que l'affiliation de l'intéressé à la CIPAV ne pouvait être remise en cause.
D'autre part, Monsieur [J] [S] ne peut valablement dénoncer le 'faible' montant de sa retraite tout en refusant de s'acquitter par ailleurs du paiement des cotisations et contributions sociales obligatoires dont il est redevable, lesquelles donnent lieu, en contrepartie, au bénéfice des prestations vieillesse.
En tout état de cause, Monsieur [J] [S] ne rapporte pas la preuve d'une faute commise par la CIPAV dans le traitement de son dossier, et échoue à démontrer l'existence d'un préjudice.
Il sera en conséquence débouté de sa demande de dommages et intérêts.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;
Déclare l'appel recevable ;
Dit que la déclaration d'appel opère effet dévolutif pour l'ensemble des chefs du jugement critiqué ;
Déclare la Caisse Interprofessionnelle de Prévoyance et d'Assurance Vieillesse (CIPAV) recevable en son action en recouvrement des cotisations et majorations de retard ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 17 octobre 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Hérault ;
Y ajoutant ;
Déboute Monsieur [J] [S] de sa demande de dommages et intérêts ;
Condamne Monsieur [J] [S] à payer à la Caisse Interprofessionnelle de Prévoyance et d'Assurance Vieillesse (CIPAV) la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Monsieur [J] [S] aux dépens ;
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la juridiction le 14 décembre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT