COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
N° RG 22/00367 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PRRK
O R D O N N A N C E N° 2022 - 371
du 16 Septembre 2022
SUR QUATRIEME PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE
dans l'affaire entre,
D'UNE PART :
Monsieur [T] [U]
né le 26 Novembre 1985 à [Localité 1] (ALGÉRIE)
de nationalité Algérienne
retenu au centre de rétention de [Localité 2] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,
Comparant, assisté de Maître Nadia RAHAL, avocate commise d'office,
Appelant,
et en présence de Madame [E] [D], interprète assermentée en langue arabe,
D'AUTRE PART :
1°) LE PREFET DE LA HAUTE VIENNE
Représenté par Monsieur [F] [V], dûment habilité,
2°) MINISTERE PUBLIC :
Non représenté
Nous, Myriam BOUZAT conseillère à la cour d'appel de Montpellier, déléguée par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assistée de Sophie SPINELLA, greffière,
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Vu l'arrêté 30 mars 2022 de Monsieur LE PREFET DE LA HAUTE VIENNE portant obligation de quitter le territoire national sans délai et fixant le pays de renvoi pris à l'encontre de Monsieur [T] [U],
Vu la décision de placement en rétention administrative du 2 juillet 2022 à 9 heures 30 de Monsieur [T] [U], pendant 48 heures dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,
Vu l'ordonnance du 4 juillet 2022 notifiée le même jour, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de vingt-huit jours, confirmée en appel le 7 juillet 2022.
Vu l'ordonnance du 1er août 2022 notifiée le même jour, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de trente jours, confirmée en appel le 4 août 2022.
Vu l'ordonnance du 31 août 2022 à 15h10 notifiée le même jour à la même heure, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Perpignan qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de quinze jours, confirmée en appel le 2 septembre 2022,
Vu la saisine de LE PREFET DE LA HAUTE VIENNE en date du 14 septembre 2022 pour obtenir une quatrième prolongation de la rétention de cet étranger,
Vu l'ordonnance du 15 septembre 2022 à 14 heures 48 notifiée le même jour à la même heure, du juge des libertés et de la détention du juge des libertés et de la détention de Perpignan qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de quinze jours,
Vu la déclaration d'appel faite le 15 Septembre 2022 par Monsieur [T] [U] , du centre de rétention administrative de [Localité 2], transmise au greffe de la cour d'appel de Montpellier le même jour à 16 heures 24,
Vu les télécopies et courriels adressés le 15 Septembre 2022 à LE PREFET DE LA HAUTE VIENNE, à l'intéressé, à son conseil, et au Ministère Public les informant que l'audience sera tenue le 16 Septembre 2022 à 14 heures 30,
L'avocat et l'appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, dans le box dédié de la cour d'appel de Montpellier, les portes de la salle étant fermées pour assurer la confidentialité de l'entretien, en la seule présence de l'interprète , et ce, sur le temps de l'audience fixée, avec l'accord du délégué du premier président de la cour d'appel de Montpellier.
L'audience publique initialement fixée à 14 heures 30 a commencé à 14 heures 49.
PRETENTIONS DES PARTIES
Assisté de Madame [E] [D], interprète, Monsieur [T] [U] confirme son identité telle que mentionnée dans l'ordonnance entreprise et déclare sur transcription du greffier à l'audience : ' Je suis Monsieur [T] [U]. Je suis né le 26 Novembre 1985 à [Localité 1] (ALGÉRIE). Je ne suis pas d'accord pour retourner en Algérie, je ne peux pas me soigner en Algérie, je me soigne ici en France. J'ai un dossier avec mon épouse pour me marier, il est au tribunal. Le 22 septembre, elle doit me faire un hébergement et elle est d'accord pour que je retourne à la maison. '
L'avocat, Me Nadia RAHAL développe les moyens de l'appel formé contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui a prolongé le maintien en rétention de l'étranger.
Monsieur le représentant, de LE PREFET DE LA HAUTE VIENNE, demande la confirmation de l'ordonnance déférée. Il indique à l'audience : ' Monsieur a refusé un test PCR le 7 septembre, cela a entrainé l'annulation du vol, ce n'est pas l'absence de réponse du consulat. Monsieur a été reconnu, un laisser passer consulaire a été délivré en 2014, avant hier, un rendez vous consulaire s'est tenu. Les perspectives de délivrance d'un laisser passer consulaire est établit.'
Maitre RAHAL indique que Monsieur n'a pas pu prendre son vol en raison de l'absence du laisser passer consulaire.
Assisté de Madame [E] [D], interprète, Monsieur [T] [U] a eu la parole en dernier et a déclaré sur transcription du greffier à l'audience : ' je voulais faire le test. On m'a dit que ce n'était pas obligatoire. Voila pourquoi je ne l'ai pas fait. Je voudrais retourner chez ma femme, me marier avec elle et repartir en Algérie. '
La conseillère indique que l'affaire est mise en délibéré et que la décision et la voie de recours ( pourvoi en cassation ) seront notifiées sur place après délibéré.
SUR QUOI
Sur la recevabilité de l'appel :
Le 15 Septembre 2022, à 16h24, Monsieur [T] [U] a formalisé appel motivé de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Perpignan du 15 Septembre 2022 notifiée à 14h48, soit dans les 24 heures de la notification de l'ordonnance querellée, qu'ainsi l'appel est recevable en application des articles R 743-10 et R743-11 du CESEDA.
Sur l'appel :
L'avocate de l'appelant soutient le défaut pour l'autorité administrative d'établir la délivrance du laisser passer consulaire à bref délai au visa de l'alinéa 3 a) de l'article L 742-5 du CESEDA.
Pour faire droit à la requête en quatrième prolongation de la mesure, la juge des libertés et de la détention de Perpignan a considéré que suite au rendez-vous d'identification du 14 septembre 2022, sans retour du consulat algérien au moment de sa saisine, de la demande de routing avant le 30 septembre 2022 et de la précédente délivrance d'un laissez passer consulaire en 2014, l'autorité administrative démontrait la prochaine délivrance du laissez passer consulaire algérien.
Or l'alinéa 3 a) de l'article L742-5 du CESEDA dispose: 'A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours :
1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;
2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :
a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 9° de l'article L. 611-3 ou du 5° de l'article L. 631-3 ;
b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
L'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours.
Si l'une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application du huitième alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas quatre-vingt-dix jours.'
Le refus de test PCR de l'étranger en date du 7 septembre 2022 en prévision du vol du 9 septembre 2022 n'a eu aucune incidence sur l'annulation du vol puisque l'annulation a été consécutive au défaut de délivrance du laissez passer consulaire algérien selon l'accusé de demande de routing du 8 septembre 2022.
Au jour de la saisine du juge des libertés et de la détention de Perpignan le 14 septembre 2022, l'autorité administrative, établit que la délivrance du laissez passer consulaire algérien doit intervenir à bref délai, en l'état du rendez-vous d'identification du 14 septembre 2022, de la demande de routing faite le 8 septembre 2022 pour la période comprise entre le 18 et le 30 septembre 2022, communiquée au consulat algérien et le précédent laissez passer consulaire algérien de 2014.
Le moyen de nullité sera donc rejeté.
SUR LE FOND
L'autorité administrative a fait le choix d'une mesure d'éloignement sans délai en application des dispositions de l'article L612-2-3° du ceseda: 'Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants :
1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ;
2° L'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse ;
3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet.'
De plus, il ressort des éléments de la procédure que l'étranger a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement non exécutée le 1er avril 2021 suivies d'assignations à résidence des 1er avril et 12 octobre 2021 non respectées , qu'il est défavorablement connu des services de police pour avoir été interpellé le 31 mars 2021 pour violences et menaces de mort, le 12 octobre 2021 pour exhibition sexuelle, le 23 février 2022 pour violences conjugales, le 29 mars 2022 pour vol aggravé en récidive et le 1er juillet 2022 pour vol.
Selon l'article L 612-3 du ceseda: 'Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :
4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; ( audition du 1er juillet 2022 )
5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; ( OQTF du 1er avril 2021 )
8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ( vit dans un squat ) ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5. ( violations des obligations des deux assignations à résidence des 1er avril 2021 et 12 octobre 2021)'
En l'espèce, l'intéressé ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure qui est considéré comme établi au visa de l' article L 612-3, 4°, 5° et 8° du ceseda.
Il y a lieu en conséquence de confirmer l'ordonnance déférée.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement,
Déclarons l'appel recevable,
Rejetons le moyen de nullité ,
Confirmons la décision déférée,
Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l'article R 743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile,
Fait à Montpellier, au palais de justice, signée le 16 Septembre 2022 à 15 heures 03.
Le greffier, Le magistrat délégué,