COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
N° RG 22/00365 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PRRG
O R D O N N A N C E N° 2022 - 368
du 16 Septembre 2022
SUR SECONDE PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE [Localité 6] PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE
dans l'affaire entre,
D'UNE PART :
Monsieur [L] [B]
né le 03 Avril 1994 à AIN BEIDA (ALGÉRIE)
de nationalité Algérienne
retenu au centre de rétention de [Localité 7] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,
Comparant, assisté de Maître Nadia RAHAL, avocat commis d'office
Appelant,
et en présence de Madame [F] [W], interprète assermenté en langue arabe
D'AUTRE PART :
1°) Monsieur LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représenté par Monsieur [P] [N], dûment habilité,
2°) MINISTERE PUBLIC :
Non représenté
Nous, Myriam BOUZAT conseillère à la cour d'appel de Montpellier, déléguée par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assistée de Sophie SPINELLA, greffière,
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Vu l'arrêté de Monsieur LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE du 15 août 2022 notifié 17 heures 50 à Monsieur [L] [B], portant obligation de quitter le territoire national sans délai .
Vu la décision de placement en rétention administrative pendant 48 heures dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire du 15 août 2022 de Monsieur [L] [B] notifiée à ce dernier le même jour à 18 heures 05,
Vu l'ordonnance du 18 Août 2022 notifiée le même jour à la même heure, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Montpellier qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de vingt-huit jours, confirmée en appel le 22 août 2022.
Vu la saisine de Monsieur LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE en date du 13 septembre 2022 pour obtenir une seconde prolongation de la rétention de cet étranger,
Vu l'ordonnance du 15 septembre 2022 à 12 heures 58 notifiée le même jour à la même heure, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Montpellier qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de trente jours,
Vu la déclaration d'appel faite le 15 Septembre 2022, par Maître Nadia RAHAL, avocat, agissant pour le compte de Monsieur [L] [B], transmise au greffe de la cour d'appel de Montpellier le même jour, à 15 heures 32,
Vu les télécopies et courriels adressés le 15 Septembre 2022 à Monsieur LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE, à l'intéressé, à son conseil, et au Ministère Public les informant que l'audience sera tenue le 16 Septembre 2022 à 14 H 00,
L'avocat et l'appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, dans le box dédié de la cour d'appel de Montpellier, les portes de la salle étant fermées pour assurer la confidentialité de l'entretien, en la seule présence de l'interprète , et ce, sur le temps de l'audience fixée, avec l'accord du délégué du premier président de la cour d'appel de Montpellier.
L'audience publique initialement fixée à 14 heures a commencé à [Immatriculation 2] avec l'accord des parties.
PRETENTIONS DES PARTIES
Assisté de Madame [F] [W], interprète, Monsieur [L] [B] confirme son identité telle que mentionnée dans l'ordonnance entreprise et déclare sur transcription du greffier à l'audience : ' Je suis Monsieur [L] [B]. Je suis né le 03 Avril 1994 à AIN BEIDA (ALGÉRIE). Je suis marié, l'idéal pour moi serait d'être relaché. Je prendrai ma femme et je quitterai la France. Oui je partirai. '
L'avocat, Me [U] [T] développe les moyens de l'appel formé contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui a prolongé le maintien en rétention de l'étranger.
Monsieur le représentant, de Monsieur LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE, demande la confirmation de l'ordonnance déférée. Il indique à l'audience : sur le document du consulat, il y a à coté un numéro de courrier, il y a un tampon du 6. En l'espace de trois semaines, la préfecture a obtenu la reconnaissance de Monsieur [B] qui n'était pas documenté et la demande de routing. L'administration a été diligente.
Assisté de Madame [F] [W], interprète, Monsieur [L] [B] a eu la parole en dernier et a déclaré sur transcription du greffier à l'audience : ' je demande la relaxe pour pouvoir rejoindre ma femme. Elle est bi nationale, franco-marocaine et elle ne pourra pas me rejoindre en Algérie. '
La conseillère indique que la décision et la voie de recours seront notifiées sur place, après délibéré.
SUR QUOI
Sur la recevabilité de l'appel :
Le 15 Septembre 2022, à 15h32, Maître Nadia RAHAL, avocate, agissant pour le compte de Monsieur [L] [B] a formalisé appel motivé de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de [Localité 5] du 15 Septembre 2022 notifiée à 12h58, soit dans les 24 heures de la notification de l'ordonnance querellée, qu'ainsi l'appel est recevable en application des articles R 743-10 et R 743-11 du CESEDA.
Sur l'appel :
L'avocate de l'appelant soutient le défaut de diligences de l'autorité administrative au visa de l'article L 741-3 du CESEDA.
Selon l'article L741-3 du CESEDA: 'Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet.'
L'appelant reproche à l'autorité administrative de n'avoir effectué de diligences à l'effet de son départ que le 9 septembre 2022 sans toutefois justifier n'avoir reçu que ce jour là, la réponse écrite du consul d'Algérie du samedi 3 septembre 2022, ayant ainsi laissé s'écouler six jours sans diligence.
S'il est de jurisprudence constante que le retard pris par l'autorité administrative pour effectuer des diligences à l'effet du départ de l'étranger n'est caractérisé qu'au-delà de trois jours, fin de semaine comprise, en l'espèce, comme le relève la juge des libertés et de la détention de [Localité 5], l'autorité administrative justifie de la réception du courrier consulaire algérien le 9 septembre 2022 par une mention manuscrite différente des deux autres dates reportées sur ledit document.
Toutefois , le courrier consulaire algérien daté du 3 septembre 2022 comporte également la date du 6 septembre 2022 par tampon dateur, date qui correspond au mardi suivant, rendant plus vraisemblable l'expédition du courrier le mardi 6 septembre 2022 par le service courrier du consulat algérien que le samedi 3 septembre 2022, date de la signature du courrier par le consul d'Algérie puisque si la réception par la préfecture du document avait été le 6 septembre , il ne serait pas mentionné la date du vendredi 9 septembre 2022.
Rappelant qu'il incombe à celui qui prétend un fait d'en rapporter la preuve au visa de l'article 9 du code de procédure civile, l'étranger ne peut prouver que l'autorité administrative ait reçu le courrier consulaire algérien daté du samedi 3 septembre 2022 avant la date du vendredi 9 septembre 2022, sauf à démontrer qu'il s'agit d'un faux commis par un fonctionnaire d'Etat.
En conséquence, l'autorité administrative contrainte de solliciter un laissez passer consulaire algérien en l'état du défaut de passeport de l'étranger, et justifiant avoir reçu le courrier consulaire algérien le 9 septembre 2022, a sollicité du pôle central d'éloignement une demande de routing le jour même, démontrant sa diligence.
Le moyen de nullité sera donc rejeté.
SUR LE FOND
Le juge des libertés et de la détention de [Localité 5] a justement accueilli la requête en deuxième prolongation de la rétention adminsitrative de l'intéressé au visa de l'alinéa 3 a) de l'article L742-4 du CESEDA qui dispose ': «'Le juge des libertés et de la détention peut, dans les mêmes conditions qu'à l'article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :
1° En cas d'urgence absolue ou de menace d'une particulière gravité pour l'ordre public ;
2° Lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement ;
3° Lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :
a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement ;
b) de l'absence de moyens de transport.
L'étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l'article L. 742-2.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d'une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas soixante jours.'»
L'autorité adminsitrative avait fait le choix d'une mesure d'éloignement sans délai par application des dispositions de l'article L612-2 du CESEDA qui édicte: 'Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants :
1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ;
2° L'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse ;
3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet.'
Et actuellement, l'intéressé ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure qui est considéré comme établi au visa des articles L 612-2 et L 612-3 du ceseda puisqu'il ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour , s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement du 9 juin 2021 et ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité.
L'assignation à résidence ne peut en conséquence en l'état être ordonnée au visa de l'article [4] 743-13 du CESEDA.
Il y a lieu en conséquence de confirmer l'ordonnance déférée.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement,
Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,
Vu les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
Déclarons l'appel recevable,
Rejetons le moyen de nullité,
Confirmons la décision déférée,
Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l'article R 743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile,
Fait à Montpellier, au palais de justice, signée le 16 Septembre 2022 à 14 heures 15.
Le greffier, Le magistrat délégué,