Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
Chambre commerciale
ARRET DU 06 SEPTEMBRE 2022
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 20/00126 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OO4Z
ARRET N°
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 12 DECEMBRE 2019
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN
N° RG 17/04343
APPELANTS :
Monsieur [K] [U]
né le [Date naissance 2] 1975 à [Localité 11] (66)
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté par Me Florent ESQUIROL, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant non plaidant
SCI JAG
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentée par Me Florent ESQUIROL, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant non plaidant
INTIMES :
M. LE TRESORIER DE LA COMMUNE D'[Localité 10]
[Adresse 8]
[Localité 10]
Représentée par Me Olivier MASSOT, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES substituant Me Philippe CODERCH-HERRE de la SCP SAGARD - CODERCH-HERRE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES
Commune d'[Localité 10]
[Adresse 9]
[Adresse 9]
[Adresse 9]
[Localité 10]
Représentée par Me Frédéric BONNET, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES
PARTIE INTERVENANTE :
M. LE COMPTABLE PUBLIC - RESPONSABLE DU SERVICE DE GESTION COMPTABLE
[Adresse 4]
[Localité 7]
Représentée par Me Olivier MASSOT, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES substituant Me Philippe CODERCH-HERRE de la SCP SAGARD - CODERCH-HERRE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES
Ordonnance de clôture du 26 Avril 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 MAI 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre
Mme Anne-Claire BOURDON, Conseiller
Mme Marianne ROCHETTE, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Audrey VALERO
ARRET :
- Contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, et par Madame Audrey VALERO, Greffière.
*
**
FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRÉTENTIONS DES PARTIES:
Le 28 avril 2006, la SCI Jag ayant pour associé gérant M. [U] a conclu avec la commune d'[Localité 10] un contrat de crédit-bail immobilier à effet au 1er mai 2006 et moyennant un loyer annuel non révisable de 46'640 euros HT payable par mois (3553 euros).
Les deux terrains pris à crédit-bail avaient vocation à être loués à une société d'emballage située sur un terrain voisin, mais dont les locaux ont été détruits par un incendie de sorte que la SCI Jag n'a pu exploiter les terrains comme elle l'envisageait.
Les loyers dus en vertu du crédit-bail étant restés impayés, la commune d'[Localité 10] a émis à l'encontre de la SCI Jag trois titres exécutoires successifs :
- le titre n° 235 en date du 5 mai 2006 pour un montant de 33'295,12 euros (période du 1er mai 2006 au 31 décembre 2006)
- le titre n° 47 en date du 24 janvier 2007 pour un montant de 12'748,16 euros (période du 1er janvier 2007 au 31 mars 2007)
- le titre n° 392 en date du 21 mai 2007 pour un montant de 8498,76 euros (avril et mai 2007).
Le 28 juin 2017, elle a également émis en application des articles 1857 et 1858 du code civil, un titre exécutoire au nom de M. [U] pris en sa qualité d'associé de la SCI pour un montant de 35'014,09 euros. La notification de ce titre a été réceptionnée le 4 juillet 2017.
Le trésor public a mis en place une opposition à tiers détenteur le 16 novembre 2017 contre M. [U] et a diligenté une procédure de saisie mobilière le 27 novembre 2017 contre la SCI.
Par exploit du 8 décembre 2017, la SCI Jag et M. [U] ont fait assigner le trésorier payeur général du centre des finances publiques d'Elne et la " mairie" d'[Localité 10] devant le tribunal de grande instance de Perpignan pour que soit constatée au visa des articles 2224 du code civil et L. 1617'5 du code général des impôts, la prescription de l'assiette du titre exécutoire établi le 28 juin 2017 ainsi que la prescription de recouvrement des titres n° 235/2006, 392/2007 et 47/2007 l'ensemble entraînant l'extinction des droits de la commune d'[Localité 10] et de leur mise en recouvrement.
Le tribunal, par jugement du 12 décembre 2019, a notamment :
- déclaré irrecevable l'action de M. [U] et la SCI Jag à l'encontre du titre exécutoire émis le 28 juin 2017 par la commune d'[Localité 10],
- constaté en conséquence que la demande aux fins de voir constater l'extinction des droits de la commune d'[Localité 10] à l'encontre de M. [U] devient sans objet,
- dit que les titres n° 235/2006, 392/2007 et 47/2007 émis par la mairie d'[Localité 10] à l'encontre de la SCI Jag n'encourent aucune prescription,
- condamné M. [U] et la Sci Jag à payer à la commune d'[Localité 10] prise en la personne de son maire en exercice la somme de 1200 euros et la même somme au trésorier de la commune d'[Localité 10] en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
M. [U] et la Sci Jag ont régulièrement relevé appel, le 8 janvier 2020, de ce jugement.
Ils demandent à la cour, en l'état de leurs conclusions déposées et notifiées le 20 avril 2022 via le RPVA, de :
Vu les articles 2224 du code civil, L.1617-5 du code général des collectivités territoriales, 1857, 1858 du code civil et la circulaire ministérielle du 21 avril 2011,
Constatant que le titre exécutoire établi le 28 juin 2017 par la mairie d'[Localité 10] était entaché d'une prescription d'assiette, qu'il était également entaché d'irrégularités en ce qu'il n'informe pas correctement son destinataire de la voie de recours dont il dispose et que les titres n° 235/2006, 392/2007 et 47/2007 établis par la mairie d'[Localité 10] étaient entachés d'une prescription de recouvrement,
- réformer la décision entreprise en toutes ses dispositions (...) et statuant à nouveau,
- déclarer recevable leur contestation introduite devant la juridiction de l'ordre judiciaire,
- constater l'extinction de la créance de la commune d'[Localité 10] par le jeu de la prescription,
- juger prescrite la créance de la commune d'[Localité 10] et de toute entité répondant ou agissant pour son compte,
Constatant subsidiairement que la trésorerie d'Elne ne démontre pas l'insolvabilité de la SCI Jag,
- déclarer irrecevable toute demande à l'encontre de M. [U] en sa qualité d'associé,
- condamner in solidum le trésorier payeur général du centre des finances publiques d'[Localité 10] et la mairie d'[Localité 10] à leur payer la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure ainsi qu'aux entiers dépens.
Plus subsidiairement encore et si par extraordinaire la cour n'accueillait pas favorablement le présent appel, vu les statuts,
- dire que M. [U] ne saurait être engagé au-delà de 46 % de la dette soit 35'014,09 x 46% + 15'756 euros.
Au soutien de leur appel, ils font essentiellement valoir que :
Sur la recevabilité du recours:
- la notification du titre exécutoire n'a pas fait courir le délai de deux mois pour le contester car elle est nulle pour indiquer une voie de recours erronée,
- l'acte introductif d'instance du 8 décembre 2017 signifié dans le délai de deux mois suivant l'avis de saisie de meubles et de l'opposition à tiers détenteur, rend la contestation recevable par application de l'article 1617-5 2°,
- les mises en demeures de mai 2012 et février 2016 ne valent ni notification de titre ni notification d'un acte de poursuite et n'avaient pas à être contestées dans le délai de deux mois,
- leur action a été initiée dans un délai raisonnable par rapport à la date de notification du titre émis contre l'associé (4 juillet 2017),
Sur la prescription de l'assiette:
- l'action engagée contre la SCI encourt la prescription de 5 ans (article 2224 du code civil) et celle engagée contre l'associé s'en trouve éteinte,
- les poursuites contre la SCI en vertu des titres émis encourent la prescription de 4 ans à compter de la prise en charge des titres de recettes (article L.1617-5 3° du code des collectivités territoriales) et auraient dû être engagées au plus tard en 2010-2011,
- en l'état des seuls actes interruptifs de prescription allégués, les titres restent prescrits depuis le 29 mars 2015 et le 29 mai 2015, les autres actes visés au bordereau n'étant ni prouvés ni interruptifs de prescription,
Sur la prescription de l'action en recouvrement:
- les mises en demeures de mai 2012 et février 2016 n'ont eu aucun effet interruptif,
- la mairie d'[Localité 10] ne pouvait pas établi un titre exécutoire le 28 juin 2017 car l'assiette du titre était prescrite à l'égard de créances datant de 2006 ou 2007, nécessairement prescrites depuis 2011 et 2012,
- le comptable aurait dû engager les poursuites au plus tard au cours des années 2010 et 2011,
Sur le non-respect des conditions légales:
- l'action contre les associés n'est que subsidiaire en vertu des articles 1857 et suivants du code civil et sous réserve de la démonstration de l'insolvabilité de la société, M. [U] ne peut être engagé au-delà du capital social détenu dans la société.
La commune d'[Localité 10] demande à la cour l'état de ses conclusions déposées et notifiées via le RPVA le 13 avril 2022 :
In limine litis,
- constater que l'action est introduite le 8 novembre 2017, soit plus de deux mois après la notification du titre exécutoire en courrier recommandé le 4 juillet 2017 et qu'elle est donc forclose,
- constater que le jugement du 12 décembre 2019 n'est pas utilement critiqué,
- débouter par voie de conséquence la SCI Jag et M. [U] de l'ensemble de leurs fins, moyens et prétentions avec toutes conséquences de droit,
- les condamner solidairement au paiement d'une somme de 2000 euros chacun par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au bénéfice de Me Frédéric Bonnet.
Elle expose :
- la somme de 21 246,95 euros acquittée par la SCI Jag par chèque du 10 septembre 2007 avait été affectée sur le titre le plus ancien n°235 partiellement apuré et le contrat de crédit bail avait été résilié le 1er juin 2007 pour absence de paiement des loyers,
- au terme de 10 années de vaines poursuites, elle avait émis un titre exécutoire contre l'associé pour un montant équivalent à la somme restant due par la SCI Jag,
Sur la recevabilité du recours:
- les appelants qui disposaient d'un délai expirant le 4 septembre 2017 ne démontrent pas que leur action n'est pas forclose,
- cette action ne se rapportant pas au bien-fondé de la créance (les loyers impayés), il importe peu que le titre exécutoire ait désigné le tribunal administratif comme juridiction devant être saisie et les appelants ne s'y sont pas trompés,
- les mesures de poursuites de saisie-meubles et opposition à tiers détenteur n'ont pas eu pour effet de proroger le délai de recours contentieux,
Sur la prescription d'assiette et de recouvrement:
- les titres exécutoires ont été émis contre la SCI Jag en temps utiles et ont permis d'éviter la prescription d'assiette et de recouvrement,
- le bordereau de situation comptable du 19 décembre 2017 établi par le Trésor public prouve que chaque titre a fait l'objet avant l'expiration du délai de 4 ans d'actes de poursuites et d'exécution et aucun délai de plus de 4 ans ne sépare leur accomplissement,
- les créances n'étant ni éteintes ni prescrites, elle avait valablement émis le titre du 28 juin 2017,
- ces tentatives dirigées contre la société s'étant soldées par un échec, les conditions de l'article 1858 du code civil sont réunies et M. [U] ne peut prétendre être tenu qu'à hauteur de 46 % sur la base de statuts modifiés en 2010 emportant diminution de ses parts sociales.
M. le comptable public, responsable du service de gestion comptable de la commune d'[Localité 7] intervient volontairement et demande aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 14 février 2022 :
A titre liminaire, vu l'arrêté du 17 novembre 2021 portant ajustement de périmètre des services déconcentrés de la direction générale des finances publiques
- recevoir son intervention volontaire à l'instance aux lieu et place de M. le trésorier de la commune d'[Localité 10],
- juger qu'en l'état du transfert de l'activité de la trésorerie d'Elne vers le service de gestion comptable de la commune d'[Localité 7], aucune prétention ne peut prospérer à l'encontre de M. le trésorier de la commune d'[Localité 10],
- rejeter les demandes formulées contre M. le trésorier de la commune d'[Localité 10],
A titre principal, vu les articles L. 1617'5, 2° et L. 2331'1 du code général des collectivités territoriales,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
A titre subsidiaire, vu l'article 1859 du code civil, les articles R. 281'1 et suivants du livre des procédures fiscales,
- débouter la SCI Jag et M. [U] de leurs demandes
- en toutes hypothèses, condamner la SCI Jag et M. [U] in solidum à payer à M. le comptable public responsable du service de gestion comptable d'Argelès-sur-Mer la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens.
Reprenant pour l'essentiel aussi les mêmes moyens que la commune, il fait plus particulièrement valoir :
- qu'une erreur dans la mention des voies de recours stipulés dans un acte de notification n'est pas une cause de nullité mais d'inopposabilité des délais de recours au redevable,
- en tout état de cause, le bien-fondé de la créance devait être effectivement contesté devant le tribunal administratif par application de l'article L.2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques,
- la SCI n'étant pas dissoute, le délai de prescription de l'assiette n'a pas commencé à courir à l'égard de M. [U] par application des dispositions de l'article 1859 du Code civil,
- les mises en demeure par lettres recommandées avec demande d'avis de réception adressées à M. [U] le 16 mai 2012 et le 2 février 2016 avaient également un effet interruptif car elles sont assimilées à des actes de poursuite interruptives de prescription.
Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 26 avril 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur l'intervention volontaire du comptable public responsable du service de gestion comptable d'[Localité 7] :
Intervenant volontairement aux lieu et place du trésorier de la commune d'[Localité 10] en vertu de l'arrêté du ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics en date du 17 novembre 2021, publié au journal officiel du 20 novembre 2021, portant ajustement du périmètre des services déconcentrés de la direction générale des finances publique et transférant en conséquence l'activité de gestion comptable et financière des communes à un service de gestion comptable, il convient d'accueillir cette intervention volontaire et de mettre hors de cause le trésorier de la commune d'Elne.
Sur la recevabilité de l'action de M. [U] et de la SCI Jag :
Les intimés soutiennent que l'action engagée par [K] [U] et la SCI Jag est forclose faute pour eux deux d'avoir introduit leur action à l'intérieur du délai de deux mois ouvert par la notification le 4 juillet 2017 en courrier recommandé du titre exécutoire du 28 juin 2017, soit avant le 4 septembre 2017.
Il est constant en procédure civile que l'absence de mention ou la mention erronée dans l'acte de notification d'un jugement de la voie de recours ouverte, de son délai ou de ses modalités a pour effet de ne pas faire courir le délai de recours.
Le titre exécutoire délivré à l'encontre de M. [U] en date du 28 juin 2017, notifié par lettre recommandée dont l'avis de réception est du 04 juillet 2017 précise s'agissant des voies de recours, que 'pour contester le bien fondé de cette créance, vous devez déposer un recours devant le tribunal administratif dans un délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire ou, à défaut du premier acte procédant de ce titre ou de la notifcation d'un acte de poursuite ( cf 2°de l'article L.1617-5 du code génrale des collectivités territoriales').
Il n'est pas sérieusement discuté que la contestation de ce titre exécutoire délivré à l'encontre de l'intéressé sur le fondement des dispositions invoquées de l'article 1857 et 1858 du code civil relève de la juridiction judiciaire et les intimés ne soulèvent d'ailleurs pas l'incompétence de cette dernière pour connaître des contestations émises tant par M. [U] que par la SCI Jag.
La notification du titre litigieux n'a donc pas fait courir le délai de recours et la contestation formée par assignation du 8 décembre 2017 dans le délai d'un mois suivant les actes d'exécution signifiés à chacun des débiteurs est recevable.
Le jugement de première instance sera donc infirmé en ce qu'il a jugé le contraire.
Sur la prescription de l'assiette et de recouvrement :
La prescription d'assiette est le délai qui court à l'encontre de la collectivité créancière pour émettre le titre de recettes. A défaut d'émission du titre dans ce délai, la prescription est acquise au profit du débiteur et entraîne l'extinction des droits de la collectivité.
Il n'est pas discuté que le délai de prescription opposable à la commune d'[Localité 10] pour émettre le titre de recette était de 5 ans à compter du fait générateur qui était le défaut de paiement des loyers.
La commune d'[Localité 10] oppose donc à juste titre qu'elle a émis en temps utile les trois titres exécutoires à l'encontre de la SCI Jag puisque le délai de la prescription d'assiette n'était pas expiré quand elle a émis les titres :
- n° 235, en date du 5 mai 2006 au titre des loyers échus entre le 1er mars 2006 et le 31 décembre 2006,
- n° 47 en date du 24 janvier 2007 au titre des loyers échus entre le 1er janvier 2007 et le 31 mars 2007,
- n° 392 en date du 21 mai 2007 au titre des loyers échus pour les mois d' avril et mai 2007.
M. [U] objecte ensuite que faute d'avoir agi en recouvrement dans un délai de quatre ans à compter de la prise en charge des titres de recettes, la dette de la SCI Jag est éteinte depuis 2010/2011 et qu'il ne peut plus être rien réclamer aux associés, le titre du 28 juin 2017 se rapportant à des créances prescrites depuis 2010/2011.
L'article L.1617-5 du code général des collectivités territoriales dispose : (...)
'3° L'action des comptables publics chargés de recouvrer les créances des régions, des départements, des communes et des établissements publics locaux se prescrit par quatre ans à compter de la prise en charge du titre de recettes.
Le délai de quatre ans mentionné à l'alinéa précédent est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des débiteurs et par tous actes interruptifs de la prescription.'
(...)
«5° Lorsque le redevable n'a pas effectué le versement qui lui était demandé à la date limite de paiement, le comptable public lui adresse la mise en demeure de payer prévue à l'article L. 257 du livre des procédures fiscales avant la notification du premier acte d'exécution forcée devant donner lieu à des frais'.
L'article L.257 0 A du livre des procédures fiscales précise notamment que la mise en demeure de payer interrompt la prescription de l'action en recouvrement.
En l'espèce, il résulte du 'bordereau de situation de la totalité des produits locaux dus à la trésorerie' ayant valeur probante, établi le 19 décembre 2017 par la direction générale des finances publiques que des actes interruptifs de prescription sont intervenus,les appelants soutenant ainsi sur la base des indications de ce document que trois saisies ventes ont été réalisées le 29 mai 2008, le 29 mars 2011 et le 29 mai 2008 de sorte que :
- le titre 2006/235 serait prescrit depuis le 29 mai 2011
- le titre 2007/47 serait prescrit depuis le 29 mars 2015
- le titre 2007/392 serait prescrit depuis le 29 mai 2012.
Ce document mentionne cependant l'envoi d'une 'mise en demeure standard' du 15 mai 2012 dont la copie est produite aux débats avec le justificatif du dépôt du recommandé correspondant, ce qui rend inopérant l'argument tiré du défaut de preuve de l'existence de cet acte. Ce courrier adressé à ' SCI Jag chez M. [U] [K]' a été retourné à l'expéditeur avec la mention 'boîte non identifiable' sans que cette circonstance exclusivement imputable à la destinataire ne puisse être préjudiciable aux intimés puisqu'un courrier envoyé ultérieurement à la SCI Jag à la même adresse, a cette fois-ci été effectivement réceptionné par celle-ci.
Par application des dispositions de l'article L.257 0A rappelées supra, cet acte a fait courir un nouveau délai de prescription expirant le 15 mai 2016 mais il est encore justifié qu'une nouvelle mise en demeure en date du 24 février 2016 d'avoir à payer la somme de 35 014,09 euros a été notifiée à la SCI Jag, à la même adresse au visa du même article L.257. L'avis de réception de ce courrier recommandé a été réceptionné par ses soins le 7 mars 2016.
Il résulte de cette chronologie qu'au 28 juin 2017, date d'émission du titre exécutoire délivré contre M. [U], la prescription quadriennale portant extinction du titre n'était pas acquise.
M. [U] et la SCI Jag seront donc déboutés de leur demande tendant à ce qu'il soit jugé que la créance de la commune d'[Localité 10] est prescrite.
Sur le non-respect des articles 1857 et suivants du code civil :
L'article 1858 du code civil dispose que les créanciers ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu'après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale.
La commune d'[Localité 10] dispose de trois titres exécutoires contre la SCI Jag relatif à des impayés de loyers pour un total de 54.542,04 euros sur lequel une somme de 21.246,95 euros a été acquittée par la débitrice le 10 septembre 2007, huit mois après une première tentative de saisie vente. Le caractère infructueux des mises en demeure et tentatives d'exécution forcée ultérieures par voie de saisie vente comme l'absence de moyens de contestation sérieux opposés par la SCI Jag quant au bien fondé de la somme réclamée qu'elle n'a pu régler que partiellement du fait de l'impossibilité de tirer profit des terrains en cause, permettent de conclure qu'elle est dans l'incapacité financière de s'acquitter de sa dette.
Les conditions de mise en oeuvre des dispositions précitées de l'article 1858 du code sont donc réunies.
L'article 1857 du code civil dispose ensuite qu'à l'égard des tiers, les associés répondent indéfiniment des dettes sociales à proportion de leur part dans le capital social à la date de l'exigibilité ou au jour de la cessation des paiements.
La date d'exigibilité de la créance étant celle de la notification à la société des trois titres exécutoires voire de celle de la mesure d'exécution forcée engagée par voie de saisie vente le 29 mai 2008 pour chacun des trois titres, M. [U] ne peut pas soutenir n'être tenu qu'à hauteur de sa participation dans le capital social telle qu'elle a été actée ultérieurement, selon statuts modifiés en 2010.
Il sera donc débouté de sa demande subsidiaire tendant à ce qu'il dit qu'il ne saurait être engagé au-delà de 46 % de la somme restant due.
Sur les frais et les dépens :
M. [U] et la SCI Jag qui succombent, devront supporter les dépens de l'instance et payer in solidum à la commune d'[Localité 10] représentée par son maire en exercice, d'une part, et au comptable public responsable du service de gestion comptable d'Argelès sur Mer, d'autre part, la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Accueille l'intervention volontaire du comptable public responsable du service de gestion comptable d'[Localité 7],
Met hors de cause le trésorier de la commune d'[Localité 10],
Réforme le jugement du tribunal de grande instance de Perpignan en date du 12 décembre 2019 en ce qu'il a :
- déclaré irrecevable l'action de M. [U] et la SCI Jag à l'encontre du titre exécutoire émis le 28 juin 2017 par la commune d'[Localité 10],
- constaté en conséquence que la demande aux fins de voir constater l'extinction des droits de la commune d'[Localité 10] à l'encontre de M. [U] devient sans objet,
Statuant à nouveau de ces chefs,
Rejette la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de la contestation de M. [U].
Déboute [K] [U] et la SCI Jag de leur demande tendant à ce qu'il soit jugé que la créance de la commune d'[Localité 10] est prescrite,
Déboute M. [U] de sa demande tendant à ce que soit déclarée irrecevable toute demande formée à son encontre en sa qualité d'associé et de celle tendant à ce qu'il ne soit pas engagé au-delà de 46 % de la dette,
Confirme le jugement entrepris dans le surplus de ses dispositions,
Dit que M. [U] et la SCI Jag supporteront les dépens de l'instance et paieront in solidum à la commune d'[Localité 10] représentée par son maire en exercice, d'une part, et au comptable public responsable du service de gestion comptable d'Argelès sur Mer, d'autre part, la somme de 2000 euros, à chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Dit que les dépens seront recouvrés comme il est dit à l'article 699 du code de procédure civile
le greffier, le président,