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29/06/2022 | FRANCE | N°17/01932

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre sociale, 29 juin 2022, 17/01932


Grosse + copie

délivrées le

à



































3e chambre sociale



ARRÊT DU 29 Juin 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/01932 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NDKH



ARRÊT n°



Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 MARS 2017 TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE HERAULT

N° RG21501873





APPELANTE :



Madame [

U] [K]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentant : Me TOUR substituant Me Marie-isabelle GUERIN, avocat au barreau de MONTPELLIER





INTIMEE :



CARSAT LANGUEDOC ROUSSILLON

[Adresse 1]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentant : Me CAMPANELLA substituant Me Françoise AURAN...

Grosse + copie

délivrées le

à

3e chambre sociale

ARRÊT DU 29 Juin 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/01932 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NDKH

ARRÊT n°

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 MARS 2017 TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE HERAULT

N° RG21501873

APPELANTE :

Madame [U] [K]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentant : Me TOUR substituant Me Marie-isabelle GUERIN, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

CARSAT LANGUEDOC ROUSSILLON

[Adresse 1]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentant : Me CAMPANELLA substituant Me Françoise AURAN-VISTE de la SCP AURAN-VISTE & ASSOCIES, avocat au barreau de BEZIERS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 MAI 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet

Mme Isabelle MARTINEZ, Conseillère

M. Pascal MATHIS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sylvie DAHURON

ARRÊT :

- Contradictoire;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet , et par Mademoiselle Sylvie DAHURON, greffier.

*

**

EXPOSE DU LITIGE, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES:

Par notification du 19 mars 2015, Madame [U] [K] a été admise au bénéfice d'une pension de retraite personnelle pour carrière longue au taux de 50% avec effet au 1er avril 2015, sur justification de 184 trimestres validés au titre du régime général de sécurité sociale.

Le 9 avril 2015, Madame [U] [K] a contesté le point de départ de cette pension de retraite devant la commission de recours amiable de la Caisse d'Assurance Retraite et de Santé au Travail (Carsat) du Languedoc-Roussillon, en sollicitant la rétroactivité de cet avantage au 1er janvier 2015 compte tenu de son 60ème anniversaire intervenu le 13 décembre 2014 et du 'dépôt' de son dossier en juillet 2014.

Le 7 septembre 2015, la commission de recours amiable a rejeté la demande de Madame [U] [K].

Le 6 novembre 2015, Madame [U] [K] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Hérault en contestation de la décision de rejet de la commission de recours amiable.

Suivant jugement contradictoire du 6 mars 2017, le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Hérault a confirmé la décision de la Carsat du Languedoc-Roussillon fixant au 1er avril 2015 le point de départ de la retraite anticipée pour carrière longue, et a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par Madame [U] [K] en réparation du préjudice subi du fait de la violation de l'obligation d'information de la caisse.

Le 30 mars 2017, Madame [U] [K] a interjeté appel de cette décision.

La cause, enregistrée sous le numéro RG 17/01932, a été appelée à l'audience des plaidoiries du 19 mai 2022.

Madame [U] [K] a sollicité l'infirmation du jugement, en demandant à la cour de :

- constater que la caisse a manqué à son obligation générale d'information du futur retraité, en laissant pendant 8 mois son dossier et en ne l'informant pas de ses droits à retraite qui étaient échus, ce qui lui a causé un préjudice du fait du non règlement de sa pension de retraite du 1er janvier 2015 au 31 mars 2015, sur le fondement de l'article 1382 du code civil ;

- condamner la caisse au paiement de la somme de 6 324,63 euros correspondant à la différence entre le montant qu'elle aurait dû percevoir et celui de ses faibles revenus salariés perçus entre le 1er janvier 2015 et le 31 mars 2015 ;

- constater que les dispositions de l'article L 161-22 du code de la sécurité sociale ne sont pas applicables compte tenu du dépôt de la demande de retraite antérieure au 23 décembre 2015, date d'entrée en vigueur de ces dispositions.

La Carsat du Languedoc-Roussillon a sollicité la confirmation du jugement, et a demandé à la cour de débouter Madame [U] [K] de ses demandes.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I.- Sur la fixation du point de départ de l'avantage vieillesse

Aux termes de l'article L 351-1 du code de la sécurité sociale, l'assurance vieillesse garantit une pension de retraite à l'assuré qui en demande la liquidation, à partir de l'âge mentionné à l'article L 161-17-2 du même code.

Le régime d'assurance vieillesse constituant un statut légal et d'ordre public, il ne peut être ni modifié ni aménagé dès lors que la décision attributive de pension a été prise conformément à la législation en vigueur.

L'article R 351-34 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige dispose que 'Les demandes de liquidation de pension sont adressées à la caisse chargée de la liquidation des droits à prestation de vieillesse dans le ressort de laquelle se trouve la résidence de l'assuré (...). Il est donné au requérant récépissé de cette demande et des pièces qui l'accompagnent'.

En outre, selon l'article R 351-37 du code de la sécurité sociale, chaque assuré indique la date à compter de laquelle il désire entrer en jouissance de sa pension, cette date étant nécessairement fixée le premier jour d'un mois et ne pouvant être antérieure au dépôt de la demande. Si l'assuré n'indique rien, sa pension prend effet le premier jour du mois suivant la réception de sa demande par la caisse chargée de liquider ses droits.

Ces règles ne peuvent être écartées, quelle que soit la cause du retard apporté à la présentation de la demande de liquidation.

Par ailleurs, en application de l'article L 161-22 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, le service d'une pension de vieillesse prenant effet postérieurement au 31 mars 1983, liquidée au titre d'un régime de retraite de base légalement obligatoire, et dont l'entrée en jouissance intervient à compter d'un âge fixé par décret en Conseil d'Etat, ou ultérieurement, est subordonné à la rupture de tout lien professionnel avec l'employeur ou, pour les assurés exerçant une activité non salariée relevant du ou desdits régimes, à la cessation de cette activité.

En l'espèce, la retraite personnelle anticipée pour carrière longue de Madame [U] [K] a été liquidée par la Carsat du Languedoc-Roussillon avec effet au 1er avril 2015 après réception, le 17 mars 2015, du formulaire réglementaire de demande qui avait été remis à la pensionnaire le 11 mars 2015, et sur lequel cette dernière a expressément souhaité un point de départ de son avantage vieillesse au 1er avril 2015 compte tenu de la cessation de son activité professionnelle relevant du régime général au 31 mars 2015.

Madame [U] [K] ne démontre pas avoir déposé une demande de liquidation de sa pension de retraite antérieurement au 17 mars 2015, étant précisé que la demande d'attestation de droit au départ en retraite anticipée réceptionnée par la Carsat du Languedoc-Roussillon le 17 juillet 2014 ne constitue pas une demande de liquidation de pension au sens de l'article R 351-34 du code de la sécurité sociale.

En outre, s'il est admis la possibilité de fixer la date d'effet de la pension de retraite à la date de la demande d'attestation de droit à départ anticipé, c'est à la condition que la demande sur l'imprimé réglementaire soit déposée dans le délai de trois mois suivant la date à laquelle aura été établi le document de situation vis-à-vis de la retraite. Or, en l'espèce, bien que le document de situation ait été établi le 6 mars 2015 et que le formulaire réglementaire ait ensuite été déposé le 17 mars 2015, soit dans le délai précité, la cour observe toutefois, d'une part, que Madame [U] [K] n'a à aucun moment mentionné, dans le formulaire réglementaire, la date de sa demande d'attestation du 17 juillet 2014 ni celle du 1er janvier 2015 à laquelle elle aurait espéré percevoir l'avantage vieillesse litigieux suite à l'acquisition de ses 60 ans le 13 décembre 2014, et d'autre part, que l'intéressée a poursuivi son activité salariée jusqu'au 31 mars 2015, ce qui ne lui permettait pas, en tout état de cause, de prétendre au versement de sa pension de retraite avant la cessation de cette activité, en application de l'article L 161-22 du code de la sécurité sociale dont la version antérieure au 23 décembre 2015 qui subordonne l'attribution de l'avantage vieillesse à la rupture de tout lien professionnel avec l'employeur lui est pleinement applicable contrairement à ce qu'elle prétend.

Dès lors, au regard de l'ensemble de ces constatations, la cour considère que la pension de retraite de Madame [U] [K] a été liquidée conformément à la législation en vigueur, la Carsat du Languedoc-Roussillon ayant, à ce titre, à bon droit fixé le point de départ de la pension de retraite de l'intéressée au 1er avril 2015, soit postérieurement à la cessation de son activité professionnelle et au premier jour du mois suivant la réception du formulaire de demande réglementaire.

II.- Sur la demande en dommages et intérêts pour manquement de la caisse à son obligation d'information

Madame [U] [K] entend engager la responsabilité civile de la Carsat du Languedoc-Roussillon, en reprochant à celle-ci d'avoir tardé à l'informer de ses droits au titre de la retraite anticipée pour carrière longue, et de ne pas l'avoir mise en mesure de cesser son activité professionnelle au 31 décembre 2014 afin de pouvoir bénéficier de sa pension de retraite avec effet au 1er janvier 2015.

La cour rappelle, à ce titre, qu'il résulte des articles L 161-17 et R 112-2 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige, que les assurés bénéficient gratuitement d'un droit à l'information sur le système de retraite par répartition, et qu'avec le concours des organismes de sécurité sociale, le ministre chargé de la sécurité sociale prend toutes mesures utiles afin d'assurer l'information générale des assurés sociaux.

L'obligation d'information pesant sur les caisses, en application du premier texte, ne peut être étendue au-delà de ses prévisions, à savoir que celles-ci sont tenues d'adresser périodiquement à leurs ressortissants les informations nécessaires à la vérification de leur situation au regard des régimes dont ils relèvent ainsi qu'un relevé de leur compte au plus tard avant un âge fixé par décret, et l'obligation d'information générale découlant du second texte leur impose seulement de répondre aux demandes qui leur sont soumises et ne leur impose nullement, à défaut de demande de ceux-ci, de prendre l'initiative de les renseigner sur leurs droits éventuels ni de porter à leur connaissance des textes publiés au Journal officiel de la République française.

Ainsi, dès lors qu'elle entraîne un préjudice pour l'employeur ou l'assuré, la faute commise par un organisme de sécurité sociale est de nature à engager sa responsabilité civile sur le fondement de l'article 1382 devenu 1240 du code civil, peu important que la faute soit grossière ou non, et que le préjudice soit ou non anormal.

A ce titre, lorsque l'employeur ou l'assuré recherche la responsabilité civile d'un organisme de sécurité sociale, il lui incombe de démontrer la faute qu'il lui impute ainsi que le préjudice qu'il prétend avoir subi et dont il réclame l'indemnisation, outre le lien entre cette faute et ce préjudice.

Or, en l'espèce, la cour observe que la Carsat du Languedoc-Roussillon a régulièrement fait suite à la demande d'attestation de Madame [U] [K] du 17 juillet 2014, en établissant le 6 mars 2015, après avoir procédé à une étude approfondie de ses droits, le document de situation vis-à-vis de la retraite anticipée pour carrière longue auquel était annexé le relevé de carrière de l'intéressée ainsi que le formulaire réglementaire de demande de retraite complété par Madame [U] [K] le 17 mars 2015 avec mention expresse du point de départ de l'avantage vieillesse souhaité au 1er avril 2015, étant rappelé que la Carsat du Languedoc-Roussillon a ensuite liquidé les droits de l'intéressée conformément aux mentions portées par elle.

Ainsi, la Carsat du Languedoc-Roussillon n'a commis aucun manquement fautif à ses obligations découlant des articles L 161-17 et R 112-2 du code de la sécurité sociale, Madame [U] [K] ne rapportant au surplus nullement la preuve du caractère erroné des informations transmises par la caisse, ni la preuve d'un manquement fautif de cette caisse dans le délai de traitement de sa demande. En effet, sur ce dernier point, s'il ressort des pièces versées aux débats que Madame [U] [K] préparait un dossier de retraite anticipée pour carrière longue, il ne résulte cependant d'aucun document qu'elle aurait demandé spécifiquement à pouvoir présenter sa demande pour le 1er janvier 2015, étant rappelé qu'elle ne pouvait, en tout état de cause, bénéficier de son avantage retraite avant la cessation de son activité professionnelle intervenue le 31 mars 2015.

En outre, il n'appartenait pas à la Carsat du Languedoc-Roussillon de porter à la connaissance de Madame [U] [K] les dispositions de l'article L 161-22 du code de la sécurité sociale subordonnant l'attribution de l'avantage vieillesse à la rupture de tout lien professionnel avec l'employeur, principe en vigueur depuis le 21 décembre 1985 que la pensionnaire ne pouvait donc ignorer.

Il s'ensuit que Madame [U] [K] ne peut valablement reprocher à la Carsat du Languedoc-Roussillon de ne pas l'avoir mise en mesure de cesser son activité professionnelle au 31 décembre 2014 afin de pouvoir bénéficier de sa pension de retraite dès le 1er janvier 2015, et qu'elle échoue donc à rapporter la preuve d'un quelconque manquement fautif de la caisse concernée.

Le jugement querellé mérite entière confirmation.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 6 mars 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Hérault ;

Condamne Madame [U] [K] aux dépens ;

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la juridiction le 29 juin 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17/01932
Date de la décision : 29/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-29;17.01932 ?
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