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20/06/2022 | FRANCE | N°22/00234

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Rétentions, 20 juin 2022, 22/00234


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 22/00234 - N° Portalis DBVK-V-B7G-POTD



O R D O N N A N C E N° 2022 - 236

du 20 Juin 2022

SUR SECONDE PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE



dans l'affaire entre,



D'UNE PART :



Monsieur [O] [T]

né le 07 Avril 1986 à [Localité 2] (ALGÉRIE)

de nationalité Algérienne



retenu au centre de rétention de [Localité 6] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitenti

aire,



Comparant, assisté de Maître Fariza TOUMI, avocat commis d'office



Appelant,



et en présence de Monsieur [Z] [N], interprète assermenté...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 22/00234 - N° Portalis DBVK-V-B7G-POTD

O R D O N N A N C E N° 2022 - 236

du 20 Juin 2022

SUR SECONDE PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE

dans l'affaire entre,

D'UNE PART :

Monsieur [O] [T]

né le 07 Avril 1986 à [Localité 2] (ALGÉRIE)

de nationalité Algérienne

retenu au centre de rétention de [Localité 6] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,

Comparant, assisté de Maître Fariza TOUMI, avocat commis d'office

Appelant,

et en présence de Monsieur [Z] [N], interprète assermenté en langue arabe

D'AUTRE PART :

1°) Monsieur LE PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Monsieur [G] [U] dûment habilité,

2°) MINISTERE PUBLIC :

Non représenté

Nous, Myriam BOUZAT conseillère à la cour d'appel de Montpellier, déléguée par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assistée de Sophie SPINELLA, greffière,

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Vu l'arrêté du 18 mai 2022 notifié à 10 heures 10, de Monsieur LE PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES qui a fait obligation à Monsieur [O] [T], de quitter le territoire français et a ordonné sa rétention administrative pendant 48 heures dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,

Vu l'ordonnance du 20 mai 2022 notifiée le même jour, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Montpellier qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de vingt-huit jours, confirmée en appel le 21 mai 2022.

Vu la saisine de Monsieur LE PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES en date du 16 juin 2022 pour obtenir une seconde prolongation de la rétention de cet étranger,

Vu l'ordonnance du 17 juin 2022 à 12h49 notifiée le même jour à la même heure, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Montpellier qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de trente jours,

Vu la déclaration d'appel faite le 17 Juin 2022, par Maître Fariza TOUMI, avocat, agissant pour le compte de Monsieur [O] [T], transmise au greffe de la cour d'appel de Montpellier le même jour, à 17h35,

Vu les télécopies et courriels adressés le 17 Juin 2022 à Monsieur LE PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES, à l'intéressé, à son conseil, et au Ministère Public les informant que l'audience sera tenue le 20 Juin 2022 à 14 heures 30,

L'avocat et l'appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, dans le box dédié de la cour d'appel de Montpellier, les portes de la salle étant fermées pour assurer la confidentialité de l'entretien, en la seule présence de l'interprète , et ce, sur le temps de l'audience fixée, avec l'accord du délégué du premier président de la cour d'appel de Montpellier.

L'audience publique initialement fixée à 14 heures 30 a commencé à 15h24.

PRETENTIONS DES PARTIES

Assisté de Monsieur [Z] [N], interprète, Monsieur [O] [T] confirme son identité telle que mentionnée dans l'ordonnance entreprise et déclare sur transcription du greffier à l'audience : Je suis Monsieur [O] [T], né le 07 Avril 1986 à [Localité 2] (ALGÉRIE). Je ne peux pas être d'accord avec la mesure qui m'éloigne car cela serait un refus d'optempérer. Je suis pas d'accord, j'ai passé une nuit à [Localité 5] puis j'ai été interpellé. On m'a pas laissé quitter le territoire, on ne m'a pas relaché. Je comptais pas rester en France. Je voulais rejoindre l'Italie. J'allais passer une nuit à [Localité 3], de l'Italie je comptais faire mon asile en Suisse. C'est très rare qu'on accepte l'asile en France. J'ai des problèmes en Algérie, je ne veux pas retourner en Algérie bien que j'avais une situation, des diplomes, une maison.'

L'avocate, Me [C] [S] développe les moyens de l'appel formé contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui a prolongé le maintien en rétention de l'étranger.

Monsieur le représentant, de Monsieur LE PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES, demande la confirmation de l'ordonnance déférée. Il indique à l'audience : ' Pour le délai de rétention légal, ce délai se calcule en jour et se termine le dernier jour à minuit. La préfecture a jusqu'à la fin du délai de rétention pour présenter sa requête, c'est le cas puisque la requête date du 16 juin. Pour l'absence de la fiche CRA actualisée, l'extrait du registre est une pièce utile car il permet au juge des libertés et de la détention de controler que le retenu a pu faire valoir ses droits. Pour les autres éléments, ils sont présents au dossier et vérifiables par le magistrat. Quelque soit le motif de Monsieur pour refuser le test, cela demeure une obstruction pour partir. Il y a au dossier un mail qui explique que Monsieur a refusé le test. Monsieur a reconnu sur l'audience qu'il avait refusé le test. La préfecture exclut l'assignation à résidence. Il n'y a pas de justification de domicile, il y a juste un courrier qui ne prouve rien. Il n'a aucun droit à se trouver sur l'espace Shengen.

Assisté de Monsieur [Z] [N], interprète, Monsieur [O] [T] a eu la parole en dernier et a déclaré sur transcription du greffier à l'audience : ' Pour le PCR, de 18h à 8h du matin, il y a rien au centre. Je me suis levée à 8h du matin, j'ai pris mon petit déjeuner. On m'appelle et on demande de faire le test. Je sais pas pourquoi on m'a demandé de faire le test. J'ai fait une prise de sang, j'ai pas eu de suite. J'ai fait un scanner pour mes maux de tête, cela a été sans suite. Pourquoi je ferais alors le test ' Je n'ai pas fait de demande d'asile en Espagne, les demandes se sont sur internet. J'ai jamais pu avoir un rendez-vous. Je comptais pas faire de demande d'asile en Espagne et en France. J'étais de passage. L'adresse de la femme habite dans mon quartier en Algérie. Si vous devez prendre une décision, je la respecterai. Il y a mon passeport, sans passeport je ne peux rien faire en Europe. Je ne peux rien faire d'autre. J'ai un diplome en informatique. Je suis technicien aéronotique. C'est pour cela que sans passeport, je peux aller nul part. Je vous demande de me libérer même si c'est avec une interdiction d'être sur le sol français, je quitte la France.'

La conseillère indique que la décision et la voie de recours seront notifiées sur place, après délibéré.

SUR QUOI

Sur la recevabilité de l'appel :

Le 17 Juin 2022, à 17h35, Maître Fariza TOUMI, avocate, agissant pour le compte de Monsieur [O] [T] a formalisé appel motivé de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de [Localité 4] du 17 Juin 2022 notifiée à 12h49, soit dans les 24 heures de la notification de l'ordonnance querellée, qu'ainsi l'appel est recevable en application des articles R 743-10 et R 743-11 du CESEDA.

Sur l'appel :

L'avocate de l'appelant soutient l'irrecevabilité de la requête préfectorale du 16 juin 2022 pour défaut de pièces utiles en raison de l'absence de la copie du registre de l'article L 744-2 du CESEDA actualisée et du procès-verbal mentionnant le refus de test PCR de son client.

Selon l'alinéa 2 de l'article R 743-2 du CESEDA, la seule pièce justificative visée par le CESEDA est la copie du registre de rétention de l'article L 553-1 devenu l'article L744-2 du même code, la jurisprudence ayant depuis abondé la liste des pièces utiles dont le défaut rend irrecevable la requête et qui ne peut être complétée postérieurement à son enregistrement par le greffe du juge des libertés et de la détention.

Pour rejeter cette exception d'irrecevabilité, la juge des libertés et de la détention de Montpellier soutient qu'au visa des articles L743-9 du CESEDA: (Le juge des libertés et de la détention, saisi aux fins de prolongation de la rétention, rappelle à l'étranger les droits qui lui sont reconnus et s'assure, d'après les mentions figurant au registre prévu à l'article L. 744-2 émargé par l'intéressé, que celui-ci a été, dans les meilleurs délais suivant la notification de la décision de placement en rétention, pleinement informé de ses droits et placé en état de les faire valoir à compter de son arrivée au lieu de rétention.

Le juge tient compte des circonstances particulières liées notamment au placement en rétention simultané d'un nombre important d'étrangers pour l'appréciation des délais relatifs à la notification de la décision, à l'information des droits et à leur prise d'effet.) Et L743-11 du même code: (A peine d'irrecevabilité, prononcée d'office, aucune irrégularité antérieure à une audience à l'issue de laquelle le juge des libertés et de la détention a prolongé la mesure ne peut être soulevée lors d'une audience ultérieure), son contrôle ne porte sur l'exercice des droits en rétention de l'étranger que lors de la première prolongation et qu'une éventuelle irrégularité a donc été purgée par la première décision judiciaire de première prolongation du 20 mai 2022.

C'est donc à juste titre, au visa de l'arrêt de la première chambre civile de la Cour de Cassation du 15 décembre 2021 Arrêt n° 791 FS-D Pourvoi n° Y 20-50.034 qui va en ce sens, que l'avocate de l'appelant soutient que l'annexion à la requête saisissant le juge des libertés et de la détention d'une deuxième prolongation, d'une copie du registre de rétention non actualisée la rend irrecevable, sans qu'il y ait à chercher l'atteinte aux droits de son client, s'agissant d'une fin de non recevoir en raison du défaut de mention de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du 20 mai 2022 prolongeant la mesure pour vingt-huit jours et de la décision d'appel et défaut de mention du refus test PCR par l'étranger le 13 juin 2022 justifiant le report de son éloignement fixé au 16 juin 2022 et la nouvelle saisine du juge des libertés et de la détention, à défaut de procès-verbal établi par un OPJ en application des dispositions des articles L 824-1 et suivants du CESEDA, joint à la procédure.

La motivation de la cour de cassation ainsi libellée: ' Réponse de la Cour:

4. Il résulte de la combinaison des articles L. 552-2 et L. 552-7 du CESEDA, dans leur rédaction alors applicable, que le juge des libertés et de la détention s'assure, lors de l'examen de chaque demande de prolongation d'une mesure de rétention d'un étranger, que, depuis sa précédente présentation, celui-ci a été placé en mesure de faire valoir ses droits, notamment d'après les mentions du registre prévu à l'article L. 553-1 du même code.

5. Il ressort de la combinaison des articles R. 552-3 et R. 552-11 du CESEDA, dans leur version alors en vigueur, que toute requête en prolongation de la rétention administrative d'un étranger doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée d'une copie de ce registre.

6. La non-production de cette pièce constitue une fin de non-recevoir pouvant être accueillie sans que celui qui l'invoque ait à justifier d'un grief.

7. Ayant relevé que le préfet n'avait pas joint à sa requête une copie actualisée du registre permettant un contrôle de l'effectivité de l'exercice des droits reconnus à l'étranger au cours de la mesure de rétention, le premier président en a exactement déduit que la requête en troisième prolongation était irrecevable.'

Tant le représentant du préfet requérant que la première juge , ont constaté l'annexion à la requête du 16 juin 2022 d'une copie du registre de rétention non actualisée et le défaut de procès-verbal mentionnant le refus du test PCR par l'étranger.

En conséquence, sans avoir à rechercher dans le dossier de la procédure les actes et évènements concernant l'étranger et la mesure, il convient d'accueillir cette exception d'irrecevabilité.

En l'état, les autres chefs de demande devenus surabondants, il n'y a lieu d'y répondre.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement,

Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,

Vu les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

Déclarons l'appel recevable,

Accueillons l'exception d'irrecevabilité de la requête préfectorale du 16 juin 2022,

Infirmons la décision déférée,

Et statuant à nouveau,

Ordonnons la notification immédiate de la décision au Procureur Général,

Ordonnons la remise en liberté de Monsieur [O] [T],

Lui rappelons qu'il a l'obligation de quitter le territoire national,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l'article R 743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile,

Fait à Montpellier, au palais de justice, le 20 Juin 2022 à 16 heures 20.

Le greffier, Le magistrat délégué,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Rétentions
Numéro d'arrêt : 22/00234
Date de la décision : 20/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-20;22.00234 ?
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