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20/04/2022 | FRANCE | N°22/00156

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Rétentions, 20 avril 2022, 22/00156


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 22/00156 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PMJV



O R D O N N A N C E N° 2022 - 157

du 20 Avril 2022

SUR PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE



dans l'affaire entre,



D'UNE PART :



Monsieur [M] [L]

né le 16 Mars 1993 à [Localité 7] (GEORGIE)

de nationalité Géorgienne



retenu au centre de rétention de [Localité 3] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,




Comparant, assisté de Maître Elodie POURRET, avocate commise d'office.



Appelant,



et en présence de Madame [X] [I], interprète assermenté en l...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 22/00156 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PMJV

O R D O N N A N C E N° 2022 - 157

du 20 Avril 2022

SUR PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE

dans l'affaire entre,

D'UNE PART :

Monsieur [M] [L]

né le 16 Mars 1993 à [Localité 7] (GEORGIE)

de nationalité Géorgienne

retenu au centre de rétention de [Localité 3] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,

Comparant, assisté de Maître Elodie POURRET, avocate commise d'office.

Appelant,

et en présence de Madame [X] [I], interprète assermenté en langue georgienne,

D'AUTRE PART :

1°) PREFET DES Pyrénées Orientales

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Monsieur [G] [W], dûment habilité,

2°) MINISTERE PUBLIC :

Non représenté

Nous, Myriam BOUZAT conseillère à la cour d'appel de Montpellier, déléguée par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assistée de Marion CIVALE, greffière,

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Vu requête de reprise en charge de M. [M] [L] a été adressée le 15 avril 2022 par Monsieur le PREFET DES PYRENEES ORIENTALES, aux autorités suédoises, allemandes, néerlandaises, danoises et espagnoles, conformément aux dispositions de l'articIe18.1b du règlement du conseil (UE) N° 604/2013 du 26 juin 2013.

Vu la décision de placement en rétention administrative du 15 avril 2022 à 15 heures 50 de Monsieur [M] [L], pendant 48 heures dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire.

Vu l'ordonnance du 16 Avril 2022 à 14 heures 37 notifiée le même jour à la même heure, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Perpignan qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de vingt-huit jours.

Vu la déclaration d'appel faite le 19 Avril 2022 par Monsieur [M] [L], du centre de rétention administrative de [Localité 6], transmise au greffe de la cour d'appel de Montpellier le même jour à 11h18.

Vu les télécopies et courriels adressés le 19 Avril 2022 à PREFET DES PYRENEES ORIENTALES, à l'intéressé, à son conseil, et au Ministère Public les informant que l'audience sera tenue le 20 Avril 2022 à 14 heures.

L'avocat et l'appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, dans la salle d'audience de la cour d'appel de Montpellier dédiée aux audiences du contentieux des étrangers, les portes de la salle étant fermées pour assurer la confidentialité de l'entretien, en la présence de l'interprète, et avec l'accord de l'avocate d'un policier de la PAF en raison du défaut de sécurité de ladite salle, l'avocate n'ayant pas souhaité que l'entretien se déroule dans le box d'entretien situé à l'accueil de la cour d'appe de Montpellier et ce, sur le temps de l'audience fixée, avec l'accord de la déléguée du premier président de la cour d'appel de Montpellier.

L'audience publique initialement fixée à 14 heures a commencé à 15h55.

PRETENTIONS DES PARTIES

L'avocate confirme n'avoir pas souhaité que l'entretien se déroule dans le box dédié de l'accueil de la cour d'appel et avoir préféré qu'il se déroule dans la salle d'audience non sécurisée , les portes fermées , et avec son accord, en la présence d'un policier du CRA.

Assisté de Madame [X] [I], interprète, Monsieur [M] [L] confirme son identité telle que mentionnée dans l'ordonnance entreprise et déclare sur transcription du greffier à l'audience : 'Je m'appelle [M] [L], je suis né le 16 Mars 1993 à [Localité 7] en Géorgie. Je suis en concubinage, je ne suis pas marié. J'ai un enfant. Ils vivent en Italie, c'est un garçon il a 5 ans. Je ne suis pas fatigué. J'ai mal aux dents. Ma famille est en Espagne. Vous me demandez pourquoi ils vivent en Italie, c'est pour une raison personnelle, cela n'a rien à voir avec mon affaire. Je suis artiste peintre, je fais des tatouages et je travaille dans un commerce alimentaire, dans un snack en Espagne à [Localité 4]. J'ai expliqué mes problèmes de santé déjà au centre de rétention. À [Localité 4], j'avais prévu des rendez-vous avec des médecins. J'ai des carries, aujourd'hui j'ai mangé quelque chose et depuis j'ai mal aux dents. Justement, aujourd'hui j'avais rendez-vous avec le médecin mais finalement j'ai été transféré ici, à la Cour d'appel. Le 15 avril 2022, je suis entré en France de l'Espagne. J'ai quitté la Géorgie depuis déjà deux ans et demi. Je vis en Espagne depuis. J'ai fait des demandes d'asile en Espagne. Vous me faites remarquer que j'ai déposé plusieurs demandes d'asile dans de nombreux pays, j'ai pris l'avion, j'ai volé au dessus de 14 ou 15 pays on ne peut pas dire que j'ai demandé l'asile là bas. En 2013, j'avais 16 ans ce n'est pas normal, je ne pouvais pas demander l'asile, ce n'est pas possible. Ils n'ont pas bien compris, j'ai été dans ce pays, je l'ai dit mais ce n'est pas possible que j'ai pu demander l'asile là bas. J'ai des problèmes de santé, j'ai froid, je n'ai pas envie de vous écouter, délibérez et laissez moi partir. Vous me demandez si je suis d'accord pour repartir dans un des pays dans lesquels j'ai fait ma demande d'asile, cela date déjà, je ne pense pas que l'Espagne, le Danemark, l'Allemagne va me réclamer. Toute ma famille se trouve en Espagne, je ne peux pas retourner en Géorgie, c'est normal.'

L'avocat Me Elodie POURRET développe les moyens de l'appel formé contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui a prolongé le maintien en rétention de l'étranger. Maître POURRET abandonne l'exception de nullité tenant à l'irrégularité du procès-verbal d'interprétation.

Monsieur le représentant de PREFET DES Pyrénées Orientales demande la confirmation de l'ordonnance déférée. Il indique à l'audience : 'Sur le défaut de motivation de l'ordonnance de 1ère instance, certes le magistrat n'a pas coché les cases de l'article mais pour autant, la situation de Monsieur correspond à 4 points de cet article :

- il a demandé l'asile dans 4 ou 5 pays dont il a été débouté ou s'est soustrait à la détermination du pays responsable

- il a été débouté du droit d'asile en espagne et s'est maintenu sur le territoire quand même

- il n'a aucune garantie stable sur le territoire

- enfin, il demande à pouvoir aller d'Espagne en Italie en passant par la France, alors qu'il n'a le droit de résider à aucun de ces endroits.

L'ordonnance est donc parfaitement motivée.'

Assisté de Madame [X] [I], interprète, Monsieur [M] [L] a eu la parole en dernier et a déclaré sur transcription du greffier à l'audience : 'J'ai déposé la demande d'asile cela fait 8 ans, j'ai été débouté et j'ai décidé de partir. J'ai posé ce jour la demande en Espagne, si je suis débouté j'aurais la possibilité de faire un recours avec mon avocat. L'assistante sociale m'a dit que je ne pouvais pas demander l'asile en France parce que ma procédure était encore en cours en Espagne. Donnez-moi, je vais signer c'est tout.'

La conseillère indique que la décision et la voie de recours seront notifiées sur place, après délibéré.

SUR QUOI

Sur la recevabilité de l'appel :

Le 19 Avril 2022, à 11h18, Monsieur [M] [L] a formalisé appel motivé de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de [Localité 3] du 16 Avril 2022 notifiée à 14h37, soit dans les 24 heures de la notification de l'ordonnance querellée, qu'ainsi l'appel est recevable en application des articles R 743-10 et R743-11 du CESEDA.

Sur l'appel:

L'avocate de l'étranger soutient également le défaut de motivation de l'ordonnance entreprise au visa des articles 455 et 458 du code de procédure civile, au motif que le premier juge a énoncé le texte de l'article L 751-10 du CESEDA sans le confronter à la situation particulière de son client, lequel est titulaire d'un passeport valide puisque sa reprise en charge a été demandée notamment à l'Espagne.

De la lecture de l'ordonnance querellée, il ressort que si le premier juge a effectivement développé le texte de l'article L 751-10 du CESEDA, pour qualifier le risque de fuite de l'intéressé et confirmer la prolongation de la mesure de rétention administrative, il a écrit que celui-ci circulait sans autorisation en France et que des demandes de reprise en charge avaient été adressées dès le 15 avril 2022 aux aux autorités suédoises, allemandes, néerlandaises, danoises et espagnoles.

Que ce faisant, le premier juge n'a pas effectivement confronté l'application de la loi à la situation particulière de l'intéressé, lequel après s'être vu refusé l'asile en Espagne ( § 2ème de l'article L 751-10 du CESEDA ) y a poursuivi sa résidence irrégulière et en application du 7ème de l'article L 751-10 du CESEDA ne peut justifier d'une résidence effective et permanente en France.

Que cette erreur d'appréciation n'est pas un défaut de motivation qu'il conviendrait de sanctionner par l'annulation de l'ordonnance querellée mais de rectifier ainsi que l'appel permet de le faire, l'erreur de droit commise.

L'avocate de l'appelant soutient la demande d'assignation à résidence de son client chez Madame [R] [Z] demeurant [Adresse 2] à [Localité 5] ( 02 ).

En application de l'article L 743-13 du CESEDA':' «'Le juge des libertés et de la détention peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.

L'assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution.

Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L. 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.'»

Nonobstant la remise de l'original de son passeport gérogien valide jusqu'en 2029, 'attestation d'hébergement manuscrite de Madame [R] [Z] du 19 avril 2022 confortée par la copie de la première page de son passeport n'est pas suffisante pour accréditer la demande , à défaut de justifier de la réalité de ce logement par la production d'une facture d'eau, d'électricité, de téléphone ou d'une quittance de bail du mois précédent.

La demande d'assignation à résidence sera rejetée

SUR LE FOND

C'est à juste titre que le premier juge a fait droit à la requête préfectorale au visa de l'article L742-3 du ceseda qui stipule : 'Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court pour une période de vingt-huit jours à compter de l'expiration du délai de quarante-huit heures mentionné à l'article L. 741-1.'

L'intéressé malgré la remise de son passeport géorgien, dans l'attente de la réponse d'un des états saisis de la demande de reprise en charge compte tenu de ses multiples demandes d'asile, ne dispose pas d'un logement effectif et permanent en France, est resté dans l'espace SCHENGEN de manière irrégulière et notamment en Espagne où il veut revenir vivre avec femme et enfant restés en Italie, alors que l'Espagne a rejeté sa demande d'asile.

En conséquence le risque avéré de fuite est caractérisé par les dispositions de l'article L 751-10, 2° et 7° du CESEDA.

Il y a lieu en conséquence de confirmer l'ordonnance déférée.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement,

Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,

Vu les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

Déclarons l'appel recevable,

Rejetons le moyen de nullité et la demande d'assignation à résidence,

Confirmons la décision déférée par substitution de motifs,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l'article R743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile,

Fait à Montpellier, au palais de justice, le 20 Avril 2022 à 16 heures 30.

Le greffier, Le magistrat délégué,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Rétentions
Numéro d'arrêt : 22/00156
Date de la décision : 20/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-20;22.00156 ?
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