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20/04/2022 | FRANCE | N°17/00457

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre sociale, 20 avril 2022, 17/00457


Grosse + copie

délivrées le

à



































3e chambre sociale



ARRÊT DU 20 Avril 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/00457 - N° Portalis DBVK-V-B7B-M75M



ARRÊT n°



Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 DECEMBRE 2016 TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE HERAULT

N° RG21500323





APPELANTE :



SA

RENAULT RETAIL GROUP

700, rue de l'Industrie

34000 MONTPELLIER

Représentant : Me MAMBRE de la SCP FLICHY GRANGÉ AVOCATS, avocat au barreau de PARIS





INTIMEE :



CPAM DE L'HERAULT

29 Cours Gambetta

CS49001

34934 MONTPELLIER CEDEX 9

Mme [R] [P] (Représentante de la...

Grosse + copie

délivrées le

à

3e chambre sociale

ARRÊT DU 20 Avril 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/00457 - N° Portalis DBVK-V-B7B-M75M

ARRÊT n°

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 DECEMBRE 2016 TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE HERAULT

N° RG21500323

APPELANTE :

SA RENAULT RETAIL GROUP

700, rue de l'Industrie

34000 MONTPELLIER

Représentant : Me MAMBRE de la SCP FLICHY GRANGÉ AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

CPAM DE L'HERAULT

29 Cours Gambetta

CS49001

34934 MONTPELLIER CEDEX 9

Mme [R] [P] (Représentante de la CPAM) en vertu d'un pouvoir du 09/03/22

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 MARS 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet

Mme Isabelle MARTINEZ, Conseillère

M. Pascal MATHIS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sylvie DAHURON

ARRÊT :

- Contradictoire;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet et par Mademoiselle Sylvie DAHURON, greffier.

*

**

EXPOSÉ DU LITIGE

Du 1er septembre 1976 au 28 juin 2013, M. [C] [S] a été employé en qualité de mécanicien auto au garage RENAULT de Montpellier au droit duquel vient en dernier lieu la SA RENAULT RETAIL GROUP.

Le 21 décembre 2013, le salarié a effectué une déclaration de maladie professionnelle concernant un carcinome urothélial de haut grade, c'est-à-dire un cancer de la vessie.

La caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault a diligenté une enquête clôturée le 3 avril 2014 par l'enquêteur qui a conclu ainsi :

« Après enquête, il ressort que M. [S] est employé au sein de Renault Montpellier depuis le 1er septembre 1976, en qualité de mécanicien. Son dernier jour de travail effectif fut le 28 juin 2013. Au cours de sa fonction, M. [S] était amené à effectuer des révisions (vidange, remplacement de filtre à huile, remplacement de filtre à air'), remplacer un alternateur, une poulie, le radiateur, déposer des éléments de soubassement' (voir pièces n° 3 et 6). Ainsi, il devait manipuler des produits tels que le nettoyant moteur, du Netelec, du repare pneu, du glacéol RK, Type D, Ixtar Dégoudronneur, de la graisse à pneu 5 Kg, du Brake Fluid BF 40 Plus, du Molykoter BR 2 Plus graisse, Ixtar Nettoyant habitacle, de la pâte à pneu 1 Kg, du liquide de freins DOT5.1 (voir fiches de données de sécurité : pièce n° 7). D'après M. [H] (directeur), le poste de travail de M. [S] se trouve à proximité des postes de carrossiers (voir pièce n° 6). Lors de la réparation, les tôliers peuvent utiliser les ponceuses, lesquelles sont reliées à une aspiration centralisée (pour capter les émissions de poussière). Quant aux postes de peintre, ils sont situés à 25 mètres environ du lieu de travail de M. [S]. Par ailleurs, les préparations de peinture sont effectuées dans un local ventilé et fermé et la pulvérisation des peintures dans une cabine ventilée et fermée (voir pièce n° 6). Néanmoins, M. [S] m'a déclaré être exposé aux inhalations de peinture, de poussière. En outre, il a mentionné ne pas avoir de masque, ni de gants (et ce jusqu'en 2000 environ).

Cependant, M. [H] a précisé que le port de protections respiratoire, auditive, de gants et lunettes, est obligatoire. Enfin, M. [H] conteste la demande de maladie professionnelle de M. [S] car après recherches, il s'avère que des rapports démontrent que la cigarette est un facteur de risque des cancers du rein ou de la vessie. Or, M. [S] est un ancien fumeur. Par ailleurs, occupant diverses fonctions représentatives du personnel, M. [S] n'était pas présent tous les jours, à son poste de travail (voir le relevé annuel d'heures de présence sur la pièce n° 6). »

Le 11 juin 2014, le colloque médico-administratif maladies professionnelles a conclu que la maladie ne figurait pas au tableau des maladies professionnelles alors que l'état de la victime entraînait une incapacité supérieure à 25 % en sorte que le dossier a été transmis pour avis au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, CRRMP, de Montpellier lequel a rendu son avis le 15 septembre 2014 en ces termes :

« a/ existence de rapport de causalité établi entre la maladie soumise à instruction et les expositions incriminée.

b/ en cas de rapport de causalité retenu, la caractérisation du lien de causalité direct entre la maladie en cause et le travail habituel de la victime : M. [S] est atteint d'un carcinome urothélial de haut grade confirmé par l'examen anatomo-pathologique du 05/07/13. M. [S] âgé de 63 ans a exercé la profession de mécanicien automobile dans la même entreprise depuis 1976, Comme le confirme le médecin du travail le Dr [E] dans son avis du 23/06/14 : « il a été potentiellement exposé aux fumées de gaz d'échappement entre autres les diesels, aux huiles usagées notamment lors des opérations de vidange, aux benzènes contenus dans le carburant ». Les huiles usagées et gaz d'échappement diesel contiennent des agents cancérogènes pour la vessie (hydrocarbures aromatiques polycycliques). Les recommandations de bonne pratique surveillance médico-professionnelle des travailleurs exposés ou ayant été exposés à des agents cancérogènes chimiques : Application aux cancérogènes pour la vessie (société française de médecine du travail) En collaboration avec la société française du cancer et l'association française d'urologie labellisée INCA ' institut national du cancer et haute autorité de santé en mars 2012, font état d'une méta-analyse de REULEN qui met en évidence une augmentation du risque de cancer de la vessie chez les mécaniciens. D'après les éléments du dossier médico administratif (avis du médecin du travail), son poste de travail était localisé au sein du secteur carrosserie peinture et donc a été potentiellement exposé aux émanations de peinture. La profession de peintre fait partie du groupe I (I preuve évidente) du CIRC avec un excès rapporté du cancer de la vessie. Compte-tenu de l'ensemble des informations médico-techniques portées à sa connaissance, le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Montpellier considère qu'il peut être retenu un lien direct et essentiel de causalité entre la profession habituellement exercée par M. [S] [C] et la pathologie dont il se plaint, à savoir « cancer de la vessie ». Il doit bénéficier d'une reconnaissance et d'une prise en charge « en maladie professionnelle » au titre de l'article L. 461-1 alinéa 4 du code de la sécurité sociale du régime général. »

Le 13 octobre 2014, la caisse a informé l'employeur de la prise en charge de la maladie au titre de la législation sur les risques professionnels.

Suivant avis du 28 octobre 2014, le médecin conseil de la caisse a estimé que le décès du salarié était imputable à la maladie déclarée le 21 décembre 2013.

L'employeur a contesté la décision de prise en charge devant la commission de recours amiable laquelle a rejeté le recours suivant décision du 18 février 2015 ainsi motivée :

« Objet du litige : Contestation par l'employeur de la prise en charge par la caisse d'une maladie professionnelle présentée le 18/11/2013 et déclarée le 24/12/2013 comme étant en rapport avec le travail.

Textes appliqués : [']

Avis de la caisse : Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau. Cependant, toute maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles, lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne une incapacité permanente d'au moins 25 %, peut être reconnue après avis conforme du CRRMP. L'évaluation de l'incapacité doit se faire par le médecin conseil. Selon l'avis du service médical en date du 11/06/2014, l'affection présentée par l'assuré « cancer de la vessie » ne figure à aucun des tableaux annexés au code de la sécurité sociale mais l'état de la victime entraîne une incapacité supérieure à 25 %. De ce fait, le dossier a été transmis au CRRMP. Cette maladie a été prise en charge au titre du risque professionnel après avis favorable du CRRMP en date du 15/09/2014. Cet avis s'impose à la caisse. Par ailleurs, selon une jurisprudence constante, il appartient à celui qui conteste la décision de prise en charge, de détruire la présomption d'imputabilité qui s'attache à toute lésion, quelle qu'elle soit, survenue au temps et au lieu du travail, en apportant la preuve que cette lésion a une cause totalement étrangère au travail.

Renseignements figurant dans le dossier :

' Déclaration de maladie professionnelle : établie le 24/12/2013.

' Date d'embauche : le 01/09/1976.

' Qualification professionnelle : mécanicien automobile.

' Cessation d'activité : le 28/06/2013.

' Certificat médical établi le : 20/12/2013 par le Dr [W] pour « néoplasie de la vessie (carcinome urothélial) »

' Avis du service médical :

' Émis le 11/06/2014 précisant que la maladie ne figure pas dans un tableau de maladies professionnelles et que l'état de la victime entraîne une incapacité supérieure à 25 %.

' Émis le 28/10/2014 précisant que le décès est imputable à la maladie professionnelle du 18/11/2013.

' Dans le dossier médical figurent :

' Le certificat médical initial établi le 20/12/2013.

' L'avis du colloque médico-administratif du 11/06/2014.

' L'avis du médecin conseil émis le 28/10/2014.

' Dans le dossier administratif figurent :

' La déclaration de maladie professionnelle établie le 24/1 2/ 2013.

' Le questionnaire envoyé à la victime par le service des accidents du travail, duquel il ressort que M. [S] travaillait pour la société RENAULT à Montpellier depuis le 01/09/1976. Il faisait de l'entretien et réparait les véhicules accidentés en carrosserie peinture. Durant ses activités, il était exposé à l'émanation de gaz d'échappement émis par les véhicules, de peinture, de poussières de ponçage, de solvants' M. [S] pensait que sa maladie était professionnelle à cause de l'utilisation depuis 38 ans de produits nocifs et cancérigènes sans protections particulières.

' Le rapport d'enquête administrative effectué par l'agent enquêteur assermenté de la caisse d'assurance maladie de l'Hérault qui comprend :

' Le procès-verbal d'audition de la victime duquel il ressort que M. [S] était employé au sein de RENAULT RETAIL GROUP depuis le 01/09/1976 en qualité de mécanicien. Il travaillait 35 heures par semaine. Le poste de travail de M. [S] se situait au même endroit que les peintres et les carrossiers. De ce fait il était amené à inhaler la peinture, les poussières provoquées par l'application. Durant son activité, M. [S] manipulait le diluant de nettoyage, l'huile de vidange, les batteries' Il n'avait pas de masque. De plus, il n'a pas eu de gans jusqu'en l'an 2000.

' La lettre établie par M. [H], directeur, à l'attention de l'agent enquêteur de la caisse qui précise que le poste de M. [S] se trouve à proximité des postes de carrossiers. Lors de la réparation, les tôliers peuvent utiliser les ponceuses, lesquelles sont reliées à une aspiration centralisée. Quant aux postes de peintre, ils sont situés à 25 mètres environ du lieu de travail de M. [S]. Par ailleurs, les préparations de peinture sont effectuées dans un local ventilé et fermé, et la pulvérisation des peintures dans une cabine ventilée et fermée. M. [H] précise que le port de protections respiratoire, auditive, de gants et lunettes est obligatoire. M. [H] conteste la demande de maladie professionnelle. Il précise que M. [S] est un ancien fumeur et il n'était pas présent tous les jours à son poste de travail car il occupait différentes fonctions représentatives du personnel.

' Des bulletins de paie.

' Des fiches de données de sécurité.

Éléments complémentaires fournis par le conseil de l'employeur : « ['] 1 ' Sur le caractère professionnel. En l'espèce, M. [C] [S] exerçait les fonctions de mécanicien depuis 1976. Il effectuait toute sorte de travaux de réparation automobile (remplacement de pneumatique, d'essuie-glaces, vidanges') ['] Le CRRMP n'établit pas de lien direct et essentiel entre la maladie et le travail. À cet égard, la Commission vérifiera que l'avis du CRRMP repose uniquement sur celui du Dr [E], médecin du travail, lequel fait état d'une exposition potentielle aux fumées de gaz d'échappement, aux huiles usager et au benzène contenu dans le carburant. La société RENAULT RETAIL GROUP conteste toute exposition à un agent cancérogène. C'est le sens des observations adressées à la Caisse. Au terme d'un rapport circonstancié la société précisait : ' que M. [S] avait manipulé des huiles de vidange, non cancérogènes [']. ' que le benzène est présent uniquement dans l'essence sans plomb [']. Il convient de préciser que le port de protections individuelles est obligatoire [']. Le comité fait également état d'émanations de peinture et de gaz d'échappement. Or, M. [S] n'a jamais exercé les fonctions de peintre et la localisation de son poste de travail exclut toute exposition au risque [']. En conséquence, la preuve d'un lien entre la maladie de M. [S] et son activité professionnelle n'est pas rapportée, alors surtout que M. [S] présentait des antécédents de tabagisme [']. 2 ' Sur le non-respect de la caisse du principe du contradictoire. La caisse ne justifie pas avoir respecté son obligation d'information à l'égard de la société RENAULT RETAIL GROUP qui n'a pas été destinataire : - d'un courrier l'informant de la transmission au CRRMP [']. ' d'un avis de clôture de l'instruction[']. Pour ces motifs ['], il est demandé à la commission de recours amiable de déclarer la décision de prise en charge adoptée par la Caisse le 13 octobre 2014 inopposable à la société RENAULT RETAlL GROUP [']. »

Nota Bene :

1 ' Sur la matérialité de la maladie professionnelle.

En cas de contestation de l'employeur, il lui appartient d'apporter la preuve de l'existence d'un état pathologique antérieur à la maladie déclarée et celle de l'absence d'influence des conditions de travail sur l'apparition des lésions. En tout état de cause, la maladie doit être considérée comme contractée au service du dernier employeur chez lequel la victime a été exposée au risque avant sa constatation médicale, sauf à ce que cet employeur rapporte la preuve contraire autrement que par ses dires. En l'espèce, la demande de reconnaissance de maladie professionnelle a été faite pour la pathologie suivante : « cancer de la vessie ». Selon l'avis du service médical en date du 11/06/2014, la maladie ne figure pas dans un tableau de maladies professionnelles et l'état de la victime entraîne une incapacité supérieure à 25 %. En conséquence, le dossier a été transmis au CRRMP le 18/06/2014. Le CRRMP a rendu, en date du 15/09/2014, un avis favorable à la prise en charge de cette maladie au titre du risque professionnel. Ce comité a donc considéré que la pathologie dont se plaint M. [S] est d'origine professionnelle car directement causée par le travail habituel de la victime. L'avis du CRRMP s'impose à la caisse. L'employeur n'ayant pas apporté à l'appui de sa contestation la preuve que l'affection de l'assuré a une cause totalement étrangère au travail, la décision lui est pleinement opposable.

2 ' Sur le respect du contradictoire

Par courrier du 02/01/2014, la caisse a informé l'employeur de la réception d'une déclaration de maladie professionnelle établie par la victime. La caisse joint systématiquement à ce courrier un double de cette déclaration ainsi que celle du certificat médical initial. Par courrier recommandé avec accusé de réception du 27/03/2014, réceptionné le 31/03/2014, la caisse a adressé un courrier à l'employeur l'informant de la nécessité d'un délai complémentaire d'instruction. Compte tenu de l'avis du service médical émis le 11/06/2014, le dossier a été transmis au CRRMP le 18/06/2014. Par courrier recommandé avec accusé dé réception du 18/06/2014, réceptionné le 23/06/2014, la caisse a informé l'employeur de la transmission du dossier au CRRMP. Conformément à la réglementation en vigueur, la caisse a informé la victime en date du 20/06/2014 du refus provisoire de prise en charge de la maladie professionnelle déclarée, l'avis du CRRMP n'ayant pas été rendu. Ce courrier précisait que dans l'hypothèse où un avis favorable serait donné, la caisse reviendrait sur sa décision en adressant une notification de prise en charge. Le CRRMP a rendu, en date du 15/09/2014, un avis favorable à la prise en charge de cette maladie au titre du risque professionnel. Le 23/09/2014, par lettre recommandée avec accusé de réception, la caisse a informé l'assuré et son employeur de la fin de l'instruction du dossier et leur a donné la possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier avant la prise de décision qui interviendrait le 13/10/2014. L'employeur a accusé réception de ce courrier en date du 26/09/2014. Suite à sa demande du 01/10/2014, la caisse a transmis à l'employeur les pièces constitutives du dossier le 02/10/2014. Par notification du 13/10/2014, la caisse a notifié aux parties la prise en charge de la maladie professionnelle.

Décision :

Considérant que cette maladie a été prise en charge au titre du risque professionnel après avis favorable du CRRMP en date du 15/09/2014, considérant que cet avis s'impose à la caisse, considérant que l'employeur n'a pas apporté les éléments détruisant la présomption d'origine, considérant que les modalités d'instruction et d'information préalable prévues aux articles R. 441-11 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale ont bien été respectées, la commission décide de maintenir la décision. »

Contestant la décision de la commission de recours amiable, la SA RENAULT RETAIL GROUP a saisi le 25 février 2015 le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Hérault, lequel, par jugement rendu le 19 décembre 2016, a :

reçu l'employeur en sa contestation ;

rejeté l'exception de nullité de la procédure d'instruction ;

dit que c'est à bon droit que la caisse, en application des dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale a saisi pour avis le CRRMP de Montpellier ;

sursis à statuer ;

ordonner la saisine du CRRMP de la région de Toulouse afin de dire s'il peut être retenu un lien certain et direct de causalité entre le travail habituel de M. [C] [S] et la pathologie dont il se plaint, à savoir un « cancer de la vessie (carcinome urothélial de haut grade) » ;

rappelé que le CRRMP ainsi saisi doit statuer dans le délai de 4 mois à compter de sa saisine ;

dit que l'affaire reviendra à la plus prochaine audience utile après que cet avis ait été notifié aux parties.

Cette décision a été notifiée le 20 décembre 2016 à la SA RENAULT RETAIL GROUP qui en a interjeté appel suivant déclaration du 18 janvier 2017.

Vu les écritures déposées à l'audience et soutenues par son conseil aux termes desquelles la SA RENAULT RETAIL GROUP demande à la cour de :

infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

'rejeté l'exception de la nullité de la procédure d'instruction ;

'dit que c'est à bon droit que la caisse en application des dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale a saisi pour avis le CRRMP de Montpellier ;

lui déclarer inopposable la décision de la caisse du 13 octobre 2014 ayant admis le caractère professionnel de l'affection « carcinome urothélial vessie » déclarée par M. [C] [S] ;

subsidiairement,

ordonner avant dire droit une expertise médicale aux fins de déterminer si la maladie de M. [S] correspond à la maladie désignée dans les tableaux 15 ter et 16 bis ;

surseoir à statuer sur la demande d'inopposabilité dans l'attente du dépôt par l'expert de son rapport.

Vu les écritures déposées à l'audience et reprises par son conseil selon lesquelles la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault demande à la cour de :

confirmer le jugement entrepris ;

dire que c'est à bon droit qu'elle a pris en charge, au titre de la législation professionnelle, la maladie présentée le 18 novembre 2013 et déclarée le 24 décembre 2013 par M. [C] [S] conformément aux dispositions des articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale ;

déclarer opposable à l'employeur la décision de prise en charge de la maladie présentée le 18 novembre 2013 et déclarée le 24 décembre 2013 au titre de la législation sur les risques professionnels en application des articles L. 461-1, D. 461-29 et D. 461-30 du code de la sécurité sociale ;

rejeter la demande d'expertise médicale judiciaire formulée par l'employeur ;

débouter l'employeur de tous ses chefs de demandes.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1/ Sur la désignation de la maladie au sein des tableaux de maladies professionnelles n° 15 ter et 16 bis et sur l'exposition aux produits chimiques énumérés par ces tableaux

L'employeur soutient que le carcinome urothélial dont souffrait le salarié figure aux tableaux des maladies professionnelles n° 15 ter et 16 bis et que c'est à tort que la caisse, qui a pourtant fait le choix d'instruire la déclaration de maladie professionnelle dans le cadre du tableau 15 ter, soutient que l'affection du salarié ne relevait d'aucun tableau de maladie professionnelle, point que contredit l'avis du CRRMP de Montpellier lequel retient que l'affection correspond à la tumeur primitive de l'épithélium urinaire désignée au sein du tableau 15 ter.

L'employeur produit l'avis qu'il a sollicité du Dr [Y] indiquant que les cancers de la vessie sont des maladies expressément désignées dans les tableaux de maladies professionnelles n° 15 ter et 16 bis du régime général. Il conteste l'exposition du salarié aux produits chimiques énumérés par ces tableaux et en déduit que la caisse ne pouvait saisir le CRRMP et n'avait dès lors d'autre choix que de refuser la prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelles.

La caisse répond que l'affection dont souffrait le salarié était bien inscrite au tableau 15 ter des maladies professionnelles mais que les conditions de ce tableau n'étaient pas réunies dès lors que le salarié n'avait pas été exposé aux produits chimiques énumérés audit tableau et qu'elle devait dès lors recueillir l'avis du CRRMP.

La cour retient qu'il résulte des dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale que si une ou plusieurs des conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie, telle qu'elle est désignée dans un des tableaux de maladies professionnelles, peut encore être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle a été directement causée par le travail habituel de la victime et que, dans un tel cas, la caisse est tenue de saisir un CRRMP. La condition tenant à l'exposition aux produits chimiques limitativement énumérés par le tableau doit être assimilée aux conditions précitées qui, si elles ne sont pas remplies, permettent tout de même la reconnaissance de l'origine professionnelle de la maladie, si toutefois il est bien établi qu'elle a été directement causée par le travail habituel de la victime.

Dès lors la procédure suivie par la caisse n'encourt pas la critique de ce chef.

2/ Sur l'obligation d'information

L'employeur reconnaît avoir reçu le 23 juin 2014 une lettre du 18 juin 2014 ainsi rédigée :

« J'ai procédé à l'étude de la demande de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie (cancer de la vessie) déclarée par votre salarié, M. [C] [S] le 18 novembre 2013. Cette maladie n'est pas désignée dans un tableau de maladie professionnelle. Aussi, je transmets le dossier au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. Les pièces du dossier peuvent vous être communiquées à votre demande. »

Mais il reproche à cette lettre de ne pas lui avoir indiqué la possibilité de consulter les pièces du dossier et de formuler des observations avant transmission du dossier au CRRMP, ni la date à laquelle le dossier sera transmis au CRRMP, ni encore le délai dont il disposait pour consulter les pièces du dossier et formuler des observations et pas plus les modalités de consultation du dossier. L'employeur ajoute qu'il est indifférent que le CRRMP a statué le 15 septembre 2014 dans la mesure où il n'a été informé ni de la date de réception du dossier par le comité, ni de la date à laquelle ce dernier envisageait de rendre sa décision.

La caisse répond que l'employeur a disposé d'un délai suffisant de 15 jours francs du 23 juin 2014 au 8 juillet 2014 pour contester utilement les éléments du dossier avant sa transmission au CRRMP lequel n'a statué que le 15 septembre 2014.

La cour retient qu'il résulte des articles L. 461-1, D. 461-29 et D. 461-30 du code de la sécurité sociale qu'en cas de saisine d'un CRRMP, dont l'avis s'impose à la caisse, l'information de l'employeur sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de lui faire grief s'effectue avant la transmission du dossier audit comité régional et que cette information précise la date à laquelle s'effectuera cette transmission.

En l'espèce, le courrier litigieux ne mentionnait pas la date à laquelle la transmission devait être effectuée et dès lors la caisse n'a pas satisfait à son obligation d'information. En conséquence, la prise en charge de la maladie dont souffrait le salarié au titre de la législation professionnelle est inopposable à l'employeur.

3/ Sur les dépens

La caisse supportera les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau,

Déclare inopposable à la SA RENAULT RETAIL GROUP la décision de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault du 13 octobre 2014 ayant admis le caractère professionnel du carcinome urothélial de haut grade déclarée par M. [C] [S].

Laisse les dépens de première instance et d'appel à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17/00457
Date de la décision : 20/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-20;17.00457 ?
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