Grosse + copie
délivrée le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3e chambre sociale
ARRET DU 20 AVRIL 2022
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/00253 - N° Portalis DBVK-V-B7B-M7QG
ARRET n°
Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 DECEMBRE 2016
TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE D'AUDE
N° RG21400103
APPELANTE :
CPAM DE L'AUDE
2 allée de Bezons
11017 CARCASSONNE CEDEX 9
Mme [D] [W] (Représentante de la CPAM) en vertu d'un pouvoir du 16/02/22
INTIMEE :
SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE
1, Esplanade de France
42000 SAINT ETIENNE
Représentant : Me Michaël RUIMY de la SELARL R & K AVOCATS, avocat au barreau de LYON
En application de l'article 937 du code de procédure civile, les parties ont été convoquées à l'audience.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 MARS 2022,en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet chargé du rapport.
Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet
Mme Isabelle MARTINEZ, Conseillère
M. Pascal MATHIS, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sylvie DAHURON
ARRET :
- Contradictoire.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour ;
- signé par Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet et par Mademoiselle Sylvie DAHURON, greffier.
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FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES
Le 19 janvier 2013 Mme [B] [F], salariée de la société (sas) Distribution Casino France (ci-après la société), est victime d'un accident pris en charge au titre de la législation professionnelle par décision 25 janvier 2013 de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Aude (ci-après la caisse).
Le 18 février 2014 la société, après rejet de sa contestation par la commission de recours amiable de la caisse, saisit le Tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Aude afin que la décision de prise en charge lui soit déclarée inopposable.
Le 22 mars 2016 le Tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Aude ordonne expertise.
Le 13 décembre 2016 le Tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Aude, après dépôt du rapport d'expertise le 8 août 2016, déclare inopposable à la société à compter du 1er mars 2013 la prise en charge par la caisse au titre de la législation sur les risques professionnels de l'accident de travail de Mme [B] [F] Du 19 janvier 2013 et dit que la caisse conservera les frais de l'expertise.
Le 11 janvier 2017 la caisse interjette appel et demande à la Cour de :
- décider que l'instance n'est pas périmée ;
- infirmer le jugement ;
- déclarer opposable à la société la prise en charge des soins et arrêts de travail prescrits à Mme [B] [F] jusqu'au 31 mars 2015, date de consolidation.
La société, dispensée de comparaître, demande à la Cour de :
- juger de la péremption de l'instance à défaut de diligences entre le 12 janvier 2017 et le 30 décembre 2020, soit pendant plus de deux ans ;
- à défaut confirmer le jugement et rejeter l'ensemble des demandes présentées à son encontre ;
- condamner la caisse aux entiers dépens.
Les débats se déroulent le 10 mars 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1) sur la péremption d'instance
Concernant le contentieux de la sécurité sociale et de l'admission à l'aide sociale, le code de la sécurité sociale a comporté un article R. 142-22 qui en son dernier alinéa, depuis un décret du 18 mars 1986, limitait la péremption d'instance à l'hypothèse où les parties s'abstenaient d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui avaient été expressément mises à leur charge par la juridiction. Cette disposition avait été rendue applicable à la procédure d'appel par l'ancien article R. 142-30 du même code.
Cette limitation de la péremption d'instance que l'on retrouvait aussi en matière de contentieux prud'homal en vertu d'une autre exception textuelle ne tenait pas au seul caractère oral de la procédure dès lors qu'une jurisprudence constante faisait application des dispositions de l'article 386 du code de procédure civile au contentieux des baux ruraux en l'absence d'exception textuelle.
Le décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 a abrogé au 1er janvier 2019 l'article R. 142-22 du code de la sécurité sociale, l'article 17 III du même décret précisant que ses dispositions relatives à la procédure étaient applicables aux instances en cours.
Concernant uniquement la première instance, le pouvoir réglementaire est rapidement revenu sur cette réforme par un décret n° 2019-1506 du 30 décembre 2019, applicable au 1er janvier 2020, qui introduit dans le code de la sécurité sociale un article R. 142-10-10, lequel limite à nouveau la péremption à l'abstention, durant deux ans, par les parties, d'accomplir les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction. Conformément à son article 9-III, cette nouvelle réforme a été rendue applicable à compter du 1er janvier 2020, y compris aux péremptions non constatées à cette date.
La société demande à la cour de constater la péremption d'instance en application des dispositions de l'article 386 du code de procédure civile en faisant valoir que plus de deux ans séparent l'appel de la date de la première demande de fixation par la caisse le 30 décembre 2020.
Du 11 janvier 2017 au 1er janvier 2019 la péremption ne peut être acquise qu'à défaut de respect par les parties de diligences expressément mises à leur charge par la juridiction, inexistantes en l'espèce.
La péremption qui court à compter du 1er janvier 2019, date du départ du nouveau régime de droit commun, est interrompue par la demande de fixation du 30 décembre 2020.
Dès lors l'instance qui donne lieu à convocation des parties pour l'audience du 10 mars 2022 ne peut être périmée.
2) sur le fond
La présomption d'imputabilité au travail de l'accident survenu au lieu et au temps du travail, prévue par l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, s'étend aux lésions apparues à la suite de cet accident pendant toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète soit la consolidation de l'état de la victime, présomption opposable par l'organisme de prise en charge à l'employeur, lequel peut la détruire en démontrant que les soins prodigués ont une cause totalement étrangère au travail, notamment en ayant pour origine exclusive un état pathologique préexistant.
En l'espèce et consécutivement à l'accident du 19 janvier 2013, il n'existe pas, ainsi que le relève l'expert en page 3 de son rapport, une continuité d'arrêts de travail jusqu'au 31 mars 2015, précision devant également être faite qu'il distingue bien le lumbago d'effort figurant sur le certificat médical initial et ceux subséquents et la pathologie de lombosciatique droite qui apparaît sur les certificats médicaux des 1er avril 2013 et 1er mai 2013, expert qui caractérise qu'il n'existe pas de relation directe et certaine entre cette pathologie et l'accident initial.
Sans qu'il n'y ait lieu à nouvelle expertise et même si l'expert désigné a statué sur pièces, la caisse ne pouvant se prévaloir de sa propre défaillance alors qu'elle a été invitée à présenter ses observations et dires, voire produire tout élément, ce qu'elle n'a pas fait, il convient de retenir les conclusions claires et précises de l'expert désigné selon lesquelles seuls les soins et arrêts de travail jusqu'au 28 février 2013 sont en relation directe et certaine avec la nature de l'accident intial.
Dès lors la décision déférée mérite confirmation.
PAR CES MOTIFS
LA COUR ;
Décide que l'instance n'est pas périmée ;
Confirme le jugement du 13 décembre 2016 du Tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Aude ;
Laisse les dépens du présent recours à la charge de la caisse.
LE GREFFIERLE PRESIDENT