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26/01/2021 | FRANCE | N°20/03745

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Chambre commerciale, 26 janvier 2021, 20/03745


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



Chambre commerciale



ARRET DU 26 JANVIER 2021



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03745 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OVVA



Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 SEPTEMBRE 2020

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE MONTPELLIER

N° RG 19/02370



APPELANTE :



Association POUR UN ENSEIGNEMENT TRILINGUE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée

par Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER



INTIME :



Madame [F] [I] ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de l'associat...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

Chambre commerciale

ARRET DU 26 JANVIER 2021

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03745 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OVVA

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 SEPTEMBRE 2020

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE MONTPELLIER

N° RG 19/02370

APPELANTE :

Association POUR UN ENSEIGNEMENT TRILINGUE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIME :

Madame [F] [I] ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de l'association pour un enseignement trilingue

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 4]

Assignée à domicile le 21 septembre 2020

INTERVENANT :

MINISTERE PUBLIC

Cour d'appel

[Adresse 1]

[Localité 4]

Non comparant

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 02 Décembre 2020

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 DECEMBRE 2020,en chambre du conseil, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre

Mme Anne-Claire BOURDON, Conseiller

Mme Marianne ROCHETTE, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Sylvia TORRES

Ministère public :

L'affaire a été communiquée au ministère public, qui a fait connaître son avis.

ARRET :

- réputé contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, et par Madame Hélène ALBESA, Greffier.

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES

PARTIES :

Par jugement du 20 juin 2019, confirmé en appel, le tribunal de grande instance de Montpellier a, sur l'assignation de la SAS Algeco, notamment constaté l'état de cessation des paiements de l'association pour un enseignement trilingue (AET), ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de celle-ci, fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 23 avril 2019 et désigné Mme [I] en qualité de mandataire judiciaire.

Le tribunal, par jugement du 5 décembre 2019, a ordonné la réouverture des débats sur la question du maintien de la procédure de redressement judiciaire en l'état d'un solde bancaire disponible de 28 000 euros susceptible de couvrir le passif.

L'affaire a ensuite subi des renvois successifs aux audiences des 5 mars 2020, 7 mai 2020 et, enfin, du 2 juillet 2020, notamment dans l'attente de l'établissement d'une comptabilité certifiée conforme par un commissaire aux comptes et de la démonstration du débiteur de sa capacité à solder son passif exigible avec sa trésorerie hors les dons affectés à un projet particulier.

Par jugement rendu le 3 septembre 2020, le tribunal a prononcé la liquidation judiciaire de l'association pour un enseignement trilingue et désigné Mme [I] en qualité de liquidateur.

Pour statuer comme il l'a fait, le tribunal a notamment retenu que :

- l'association n'avait pas transmis les éléments comptables certifiés par un commissaire aux comptes, devant permettre de déterminer les ressources collectées, ainsi que leur utilisation avec des dépenses conformes à l'appel aux dons et la capacité de celle-ci à faire face à son passif exigible avec son actif réellement disponible,

- l'état des situations en cours concernant les créances nées avant le jugement d'ouverture, communiqué par le mandataire judiciaire, mentionne un passif déclaré échu de 35 842,03 euros, outre une créance provisionnelle non définitive de 15 000 euros,

- les relevés bancaires de l'association auprès du Crédit mutuel montrent un solde créditeur de 19 132,38 euros au 2 septembre 2019, de 23 178,32 euros au 30 septembre 2019, de 24 150,03 euros au 31 octobre 2019 et de 28 398,52 euros au 2 décembre 2019 et en l'absence de tout élément comptable, il n'est pas possible de déterminer la part de dons devant être comptabilisée dans un compte susceptible d'être remboursé aux donateurs en l'absence d'activité ou d'utilisation conforme,

- au vu des éléments comptables transmis dernièrement, les ressources de l'association proviennent exclusivement de dons dédiés à un projet donné, ne pouvant être affectés au règlement du passif,

- l'association ne justifie donc toujours pas, nonobstant les multiples renvois depuis plus d'un an, d'une trésorerie lui permettant de solder son passif exigible,

- elle ne justifie donc toujours pas de la possibilité de clôturer la procédure de redressement judiciaire en réglant son passif exigible avec son actif disponible et il n'est pas, non plus, démontré d'activité.

L'association pour un enseignement trilingue a régulièrement relevé appel, le 8 septembre 2020, de ce jugement en vue de sa réformation.

En l'état de ses dernières conclusions déposées le 9 novembre 2020 via le RPVA, elle demande à la cour, au visa de l'article 2 de l'ordonnance n° 2020-290 du 27 mars 2020 modifiée par l'ordonnance n° 2020-596 du 20 mai 2020 et des articles L. 631-15 et suivants du code de commerce, de :

A titre principal :

- constater que la période d'observation a été prolongée de plein droit de trois mois à compter du 23 juin 2020,

- dire et juger en conséquence que le tribunal ne pouvait pas mettre fin à la période d'observation par jugement du 3 septembre 2020,

A titre subsidiaire :

- constater l'engagement de la SCI Sea Invest de rembourser le compte courant d'associé de l'association au montant du passif définitif et, le cas échéant, des frais de procédure,

- constater au surplus que l'association a des perspectives d'activité lui permettant sans difficulté aucune de proposer un plan de redressement,

- dire et juger en conséquence qu'il n'y a pas lieu de prononcer la liquidation judiciaire.

Au soutien de son appel, elle fait valoir principalement que :

- le tribunal ne pouvait mettre fin à la période d'observation et prononcer la liquidation judiciaire, dès lors qu'en vertu de l'article 2 de l'ordonnance du 27 mars 2020 modifiée par l'ordonnance du 20 mai 2020, la période d'observation a été prorogée de plein droit jusqu'au 23 septembre 2020 inclus,

- il n'a, par ailleurs, en rien constaté que le redressement est impossible, mais seulement qu'elle serait en cessation des paiements,

- elle est créancière de la SCI Sea Invest à hauteur de plus de 500 000 euros, sachant que la SCI dispose d'un bien immobilier d'une grande valeur,

- la somme de 35 845,03 euros, réglée par la SCI à l'association, a été déposée en séquestre sur le compte Carpa, qui permettra le paiement du passif vérifié,

- la SCI Sea Invest s'engage également à rembourser son compte courant à hauteur de l'admission éventuelle de la créance « provisionnelle » et des éventuels frais de procédure taxés,

- elle est donc en mesure de proposer un plan de redressement,

- elle a déposé les rapports du commissaire aux comptes, M. [Z], relativement aux comptes annuels 2018 et 2019, dont il ressort que ses seuls revenus proviennent de dons qui ne sont cependant en rien affectés de sorte qu'ils peuvent servir à l'apurement du passif,

- elle devrait pouvoir commencer son activité grâce à l'achèvement des travaux dans le bâtiment appartenant à la SCI Sea Invest et à la mise à disposition par l'association Terre de France d'une salle de classe les mercredis, samedis et dimanches pour pouvoir commencer à dispenser des cours de calcul mental,

- le prévisionnel d'activité, tel qu'il a été établi par le cabinet d'expertise comptable AMP Conseils fait état d'un chiffre d'affaires de 78 000 euros en 2020/2021, de 81 630 euros en 2021/2022 et de 85 630 euros en 2022/2023 sans prise en compte des dons.

Mme [I], prise en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de l'association AET, n'a pas comparu, bien qu'ayant été assignée à sa personne par exploit du 21 septembre 2020.

Le ministère public auquel le dossier de l'affaire a été communiqué et qui a été avisé de la date d'audience, n'a pas donné son avis.

Instruite conformément aux dispositions de l'article 905 du code de procédure civile, la procédure a été clôturée par ordonnance du 2 décembre 2020.

MOTIFS de la DECISION :

Il résulte de l'article 2 de l'ordonnance du 27 mars 2020 (portant adaptation des règles relatives aux difficultés des entreprises et des exploitations agricoles à l'urgence sanitaire et modifiant certaines dispositions de procédure pénale) modifiée par l'ordonnance du 20 mai 2020 que les durées relatives à la période d'observation sont prorogées d'une durée de trois mois à compter du 23 juin 2020 inclus, soit jusqu'au 23 septembre 2020 ; pour autant, il était loisible au tribunal de faire application du II de l'article L. 631-15 du code de commerce lui permettant, à tout moment de la période d'observation, à la demande du débiteur, de l'administrateur, du mandataire judiciaire, d'un contrôleur, du ministère public ou d'office, d'ordonner la cessation partielle de l'activité ou de prononcer la liquidation judiciaire si le redressement est manifestement impossible.

L'article L. 631-1, alinéa 2, du code de commerce dispose, par ailleurs, que la procédure de redressement judiciaire est destinée à permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif et qu'elle donne lieu à un plan arrêté par jugement à l'issue d'une période d'observation.

Dans le cas présent, l'association pour un enseignement trilingue communique, ce qu'elle n'avait pas fait en première instance, les rapports d'un commissaire aux comptes, M. [Z], sur les comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2018 et les comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2019 ; ces deux rapports enseignent que l'activité de l'association est dépendante des dons provenant de particuliers (108 764,08 euros en 2018 ; 125 174,21 euros en 2019) et qu'elle détient une créance, figurant au bilan, pour 480 004 euros en 2018 et pour 502 046 euros en 2019, dont il n'est pas contesté qu'elle correspond au montant de son compte courant d'associé créditeur dans la SCI Sea Invest, propriétaire de divers locaux situés dans un ensemble immobilier [Adresse 5], SCI dont elle est l'associé majoritaire à concurrence de 90 % du capital.

Selon les énonciations du jugement entrepris, le passif échu de l'association AET s'élève à la somme de 35 842,03 euros, outre une créance de l'URSSAF déclarée à titre provisionnel pour 15 000 euros.

Certes, l'association pour un enseignement trilingue a déposé sur le compte Carpa de son avocat la somme de 35 842,04 euros correspondant au passif exigible, qui a été versée par la SCI Sea Invest et provenant de son compte courant d'associé créditeur, sachant que l'association et la SCI ont le même dirigeant ([E] [W]) ; il est également communiqué une convention conclue le 1er août 2020 avec l'association Terre de France pour la mise à disposition de l'association AET d'une partie de ses locaux situés [Adresse 6] tous les mercredis, samedis et dimanches de 9 heures 30 à 16 heures, ainsi qu'un dossier prévisionnel établi par le cabinet d'expertise comptable AMP Conseils, qui concerne le projet d'exercice d'une activité de « Calcul mental -Neuro Gym », visant un chiffre d'affaires prévisionnel (frais d'inscription de 110 élèves, abonnements aux activités de calcul mental, stages de calcul mental) de 78 000 euros sur l'exercice 2020/2021, de 81 630 euros sur l'exercice 2021/2022 et de 85 442 euros sur l'exercice 2022/2023 avec des résultats d'exploitation envisagés au cours de ces trois exercices de, respectivement, 39 977 euros, 42 919 euros et 46 438 euros, le recrutement de deux salariés étant prévu.

Il s'avère cependant que l'association AET, ainsi que son dirigeant (M. [W]) ont été condamnés pénalement, par un jugement du tribunal correctionnel de Montpellier du 10 décembre 2018 partiellement confirmé par un arrêt de la chambre des appels correctionnels de la cour en date du 21 juillet 2020, pour avoir, de septembre 2016 à juillet 2018, ouvert illégalement un établissement privé d'enseignement primaire dans les locaux de la mosquée Averroes 423, rue Émile Picard à Montpellier, sans déclaration préalable au maire de la commune et au représentant de l'État compétent en matière d'éducation, la fermeture de l'établissement ayant été ordonnée à titre de peine complémentaire ; cet élément résulte d'une note adressée le 2 septembre 2020 au tribunal par Mme [I], mandataire judiciaire, qui a été communiquée au conseil de l'association.

Le mandataire judiciaire y indique également que l'activité périscolaire envisagée de « Calcul mental -Neuro Gym » n'est pas prévue dans les statuts de l'association, dont l'objet est d'aider à l'éducation et à l'épanouissement des enfants et de contribuer à leur soutien social et scolaire en fournissant un enseignement complet, la formation et l'accompagnement scolaire et le soutien financier et juridique à la création et la gestion de tout type d'établissement scolaire de premier second degré ; en toute hypothèse, l'association AET, qui se propose d'accueillir 110 élèves selon son prévisionnel d'activité, ne justifie pas, en l'état actuel et un an et demi après l'ouverture de la procédure collective, disposer des autorisations notamment administratives lui permettant d'exercer une activité de soutien scolaire, que ce soit dans les locaux mis à sa disposition par l'association Terre de France ou dans les locaux du [Adresse 5], qui devaient à l'époque accueillir une école privée d'enseignement, locaux appartenant à la SCI Sea Invest ; dès lors que l'association n'a strictement aucune activité depuis, à tout le moins, la fermeture de l'établissement d'enseignement privé ouvert illicitement, qui a été ordonnée par le jugement du tribunal correctionnel du 10 décembre 2018, l'arrêt d'un plan de redressement ne peut être sérieusement envisagé, puisqu'un tel plan doit nécessairement tendre à la poursuite de l'activité, qui est l'un des objectifs visés à l'article L. 631-1.

Le jugement rendu le 3 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de Montpellier doit en conséquence être confirmé.

Les dépens afférents à la procédure d'appel seront employés en frais privilégiés de procédure collective.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire, après débats en chambre du conseil,

Confirme dans toutes ses dispositions le jugement rendu le 3 septembre par le tribunal judiciaire de Montpellier,

Dit que les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de procédure collective,

Le greffier, Le président,

J.L.P.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 20/03745
Date de la décision : 26/01/2021

Références :

Cour d'appel de Montpellier 02, arrêt n°20/03745 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-01-26;20.03745 ?
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