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17/11/2020 | FRANCE | N°17/04239

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Chambre commerciale, 17 novembre 2020, 17/04239


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



Chambre commerciale



ARRET DU 17 NOVEMBRE 2020



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/04239 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NITV

jonction avec le N° RG 17/04794 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NJ3R





Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 JUILLET 2017

TRIBUNAL DE COMMERCE DE BEZIERS

N° RG 2016 1377





APPELANTES :



SAS AGROVIN FRANCE prise en la pers

onne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 16]

[Localité 9]

Représentée par Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau d...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

Chambre commerciale

ARRET DU 17 NOVEMBRE 2020

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/04239 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NITV

jonction avec le N° RG 17/04794 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NJ3R

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 JUILLET 2017

TRIBUNAL DE COMMERCE DE BEZIERS

N° RG 2016 1377

APPELANTES :

SAS AGROVIN FRANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 16]

[Localité 9]

Représentée par Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Lola JULIE, de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER , avocat postulant et assisté de Me Charlotte BELLET, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

S.A. BRENNTAG SA inscrite au RCS de LYON sous le n° 709807781, SA à directoire et conseil de surveillance,prise en la personne de son représentant légal, domicilié

[Adresse 12]

[Localité 10]

Représentée par Me Christine AUCHE HEDOU de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Jacques-Henri AUCHE de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assisté de Me Mélanie MANIEZ GEVAERT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

INTIMEES :

SA AXA FRANCE prise en la personne de représentant légal en exercice ès qualités audit siège

[Adresse 7]

[Localité 13]

Représentée par Me Jean-Pierre BERTHOMIEU de la SELARL MBA & ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

SAS AGROVIN FRANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 16]

[Localité 9]

Représentée par Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Lola JULIE, de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER , avocat postulant et assisté de Me Charlotte BELLET, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

Page 2

S.A. BRENNTAG SA inscrite au RCS de LYON sous le n° 709807781, SA à

directoire et conseil de surveillance,prise en la personne de son représentant légal, domicilié

[Adresse 12]

[Localité 10]

Représentée par Me Christine AUCHE HEDOU de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Jacques-Henri AUCHE de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assisté de Me Mélanie MANIEZ GEVAERT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

SA GENERALI IARD prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés ès qualités au siège social sis

[Adresse 6]

[Localité 11]

Représentée par Me Jean-Michel CHARBIT de la SCP JURI-OC, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assisté de Me Lyne HAIGAR, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

SCA LES CELLIERS DU NOUVEAU MONDE

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Valérie LAMBERT de la SELARL VALERIE LAMBERT, avocat au barreau de CARCASSONNE

SAS LES DOMAINES DES MARINS, prise en la personne de son représentant légal en exercice, inscrite au RCS de BEZIERS sous le n° 384 061 362 , domiciliée ès qualités au siège social sis

[Adresse 15]

[Localité 8]

Représentée par Me Marie-Pierre VEDEL SALLES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assisté de Me Aude TASTAVY, avocat au barreau de BEZIERS, avocat plaidant

SCA UNION DE COOPERATIVE FONCALIEU, prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités au siège social sis

[Adresse 14]

[Localité 3]

Représentée par Me Sabine SUSPLUGAS, avocat au barreau de MONTPELLIER

SAS VIGNERONS DE LA MEDITERRANEE représentée par son représentant légal domicilié ès qualités au siège social sis

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Cyrille AUCHE de la SCP VERBATEAM MONTPELLIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assisté de Me Nathalie TOURETTE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 25 Février 2020

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 OCTOBRE 2020,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Anne-Claire BOURDON, conseiller, chargé du rapport et Mme Marianne ROCHETTE, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Anne-Claire BOURDON, conseiller, faisant fonction de président

Mme Marianne ROCHETTE, conseiller

Mme Sylvie ARMANDET, conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Hélène ALBESA

ARRET :

- contradictoire.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Madame Anne-Claire BOURDON, conseiller faisant fonction de président en l'absence du président régulièrement empêché, et par Madame Hélène ALBESA, greffier.

FAITS, PROCEDURE - PRETENTIONS ET MOYENS DES

PARTIES :

La SAS Agrovin France exerce une activité de distribution de produits 'nologiques et de vente en gros d'articles de chai et de cave auprès des viticulteurs, négociants et caves coopératives.

Elle commercialise notamment des machines de stabilisation tartrique, destinées à réduire le taux de potassium dans le vin par le biais d'un système Free K +. Le traitement consiste à éliminer une certaine quantité de cations potassiques pour les remplacer par des protons (H+ neutre) par un passage sur une résine échangeuse de cations.

Cette résine doit être régénérée entre chaque utilisation en utilisant un acide chlorhydrique, que la société Agrovin a acheté entre août et décembre 2011, auprès de la SA Brenntag, qui est une entreprise spécialisée dans la distribution en France de nombreux produits chimiques industriels et de spécialités en vrac, dans leur conditionnement d'origine ou après reconditionnement.

A compter du mois de septembre 2011, la société Agrovin a proposé à quatre caves vinicoles de procéder à une démonstration gratuite d'une machine de stabilisation tartrique :

- la société coopérative agricole (SCA) les Celliers du nouveau monde (Aude);

- le domaine Montariol Degroote (Hérault) ;

- l'union des Vignerons des Côtes du Lubéron (Vaucluse) ;

- la Maison Ginestet (Gironde).

Elle a procédé début décembre 2011 et début janvier 2012 à des opérations de stabilisation du vin (vin rosé Cinsault et Syrah) de la société les Celliers du nouveau monde, adhérente de l'union de coopératives Foncalieu (qui est un groupement de coopératives réalisant le conditionnement et la commercialisation des vins produits).

Le 2 décembre 2011, la société les Celliers du nouveau monde a reçu la commande de 1 400 hl de vin rosé Cinsault IGP pays d'Oc par l'union de coopératives Foncalieu à destination de la SAS des Domaines des Marins, négociant en vins.

Selon marché en date du 2 décembre 2011, l'union de coopératives Foncalieu a vendu à la société les Domaines des Marins un lot de vin rosé Cinsault IGP OC récolte 2011 en vrac, qui l'a ensuite revendu, via un courtier, Monsieur [O] [N], en vrac, le 23 janvier 2012, à la SAS les Vignerons de la Méditerranée (ayant pour activité la vinification et la commercialisation de vins).

Sur ce marché, la société les Vignerons de la Méditerranée a retiré 650 hectolitres en deux fois :

- 400 hl, réceptionnés le 1er juin 2012,

- 250 hl, réceptionnés le 5 juillet 2012.

Page 4

L'union de coopératives Foncalieu a également utilisé cet apport pour procéder à des assemblages avec d'autres vins, eux-mêmes vendus, notamment dans la grande distribution et à l'export, soit en vrac, soit en bag in box (BIB) sous marques de distributeurs.

Fin mai 2012, l'union de coopératives Foncalieu a reçu des appels téléphoniques de consommateurs et le 1er juin 2012, une plainte d'un de ses clients de la grande distribution (Franprix) portant sur la qualité des vins conditionnés en bag in box. Elle a organisé une cellule de crise dès le 4 juin lançant des investigations confiées à un laboratoire.

A partir de la fin du mois de juillet 2012, plusieurs enseignes de la distribution ont informé la société les Vignerons de la Méditerranée de réclamations de consommateurs portant sur les vins vendus.

Ceux-ci présentaient un défaut organoleptique majeur, les réclamations des clients tendaient à dénoncer un mauvais goût («goût de vinaigre, de plastique, de poisson, un goût acide, piquant, un goût de médicament»).

La société Agrovin est assurée par la SA Axa France IARD dans le cadre d'un contrat responsabilité civile de l'entreprise n° 3517601004 en date du 28 avril 2010, ayant pris effet le 1er mars 2010, annulé et remplacé par un contrat en date du 4 septembre 2012 avec effet au 1er août 2012.

La société Domaines des Marins est assurée par la SA Generali IARD dans le cadre d'un contrat responsabilité civile en date du 19 août 2008, ayant pris effet le 1er juin 2008.

***

La société les Vignerons de la Méditerranée a, par acte d'huissier du 11 octobre 2012, assigné en référé la société les Domaines des Marins sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, afin de solliciter l'instauration d'une expertise judiciaire.

Par acte d'huissier du 7 novembre 2012, la société les Domaines des Marins a appelé dans la cause l'union de coopératives Foncalieu, afin que lui soit déclarée commune et opposable la mesure d'expertise. L'union de coopératives Foncalieu a, à son tour, attrait en la cause la société les Celliers du nouveau monde par acte d'huissier du 20 novembre 2012, laquelle a appelé dans la cause la société Agrovin France par acte d'huissier du 19 décembre 2012.

Par ordonnance du 14 janvier 2013, le président du tribunal de commerce de Béziers, statuant en référé, a ordonné une mesure d'expertise judiciaire afin principalement de déterminer l'origine et les causes des désordres présentés par les vins vendus et désigné Monsieur [Z] [Y] pour y procéder.

Cette ordonnance a, par la suite, été déclarée commune et opposable :

- à la société Axa France IARD (et à son courtier Monsieur [T]) par une ordonnance du 28 mai 2013,

- à la société Brenntag par une ordonnance du 30 juin 2014,

- à la société Productos Agrovin par une ordonnance du 10 février 2014, confirmée par un arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 13 novembre 2014.

Parallèlement, la société les Vignerons de la Méditerranée a sollicité une provision à valoir sur ses préjudices et par ordonnance de référé du 9 février 2015, le président du tribunal de commerce de Béziers a renvoyé les parties à se pourvoir au fond.

Monsieur [Z] [Y] a terminé ses opérations d'expertise le 15 septembre 2015.

Page 5

Saisi par un premier acte d'huissier du 7 mars 2016 délivré par la société les Vignerons de la Méditerranée, le tribunal de commerce de Béziers, après avoir prononcé une jonction, a, par jugement du 3 juillet 2017

« - dit et jugé que l'expert judiciaire a parfaitement répondu à la mission qui lui a été confiée par le juge des référés et qu'il a bien respecté le principe du contradictoire,

- homologué le rapport de l'expert judiciaire

- constaté que l'origine des désordres subis par les vins est la présence de la molécule 2-bromo-cresol, dite 2BpC, dans l'acide chlorhydrique technique vendu par la SA Brenntag et utilisé par la SAS Agrovin France pour la régénération des résines saturées en potassium. lors du traitement des vins par cette dernière,

- dit et jugé que la SA Brenntag a engagé sa responsabilité au titre de sa garantie légale des vices cachés,

- dit et jugé que la SA Brenntag. suite à de nombreux manquements a engagé sa responsabilité sur le fondement des anciens articles 1382 et 1383 du code civil,

- dit et jugé que la SA Brenntag a manqué à son obligation de résultat,

- dit et jugé que la SAS Agrovin France a manqué à son principe de précaution. et a ainsi engagé sa responsabilité civile sur le fondement des articles anciens 1382 et 1383 du code civil.

- dit et jugé que la SAS Agrovin France a engagé sa responsabilité en ne rappelant pas aux utilisateurs leurs obligations réglementaires comme l'exigeait sa qualité de démonstrateur,

- dit et jugé que la SCA les Celliers du nouveau monde a manqué à son obligation de la garantie des vices cachés en vendant à l'Union de coopératives Foncalieu des vins contenant la molécule 2 Bpc les rendant ainsi impropres à leur destination.

- dit et jugé que la SCA les Celliers du nouveau Monde a manqué à son principe de précaution. et a ainsi engagé se responsabilité civile sur le fondement des articles anciens 1382 et 1386 du code civil.

- dit et jugé que la société les Domaines des Marins a engagé sa responsabilité contractuelle sur le fondement de l'article 1641 du code civil en vendant à la SAS Vignerons de la Méditerranée des vins contenant la molécule 2 Bpc les rendant ainsi impropre à leur destination,

- dit et jugé que la SAS les Domaines des Marins suite à de nombreux manquements, a engagé sa responsabilité sur le fondement des anciens articles 1382 et 1383 du code civil

- dit et jugé que l'Union de coopératives Foncalieu a manqué à son obligation de la garantie des vices cachés en vendant à la SAS les Domaines des Marins des vins contenant la molecule 2 Bpc. les rendant ainsi impropres à leur destination,

- dit et jugé que l'Union de coopératives Foncalieu a manqué à son principe de précaution. et a ainsi engagé sa responsabilite civile sur le fondement des articles anciens 1382 et 1383 du code civil,

- dit et jugé que l'Union de coopératives Foncalieu ne pourra pas se prévaloir d'une quelconque clause limitative de responsabilité,

- dit et jugé que la SAS Vignerons de la Méditerranée a manqué à son obligation du principe de précaution et a ainsi engagé sa responsabilité sur le fondement des articles anciens 1382 et 1383 du code civil,

- dit et jugé que la garantie de la SA Générali n'est pas acquise à la SAS les Domaines des Marins compte tenu de l'absence du caractère aléatoire en l'espèce.

- dit et jugé que la société Axa France IARD doit garantir son assuré dans les conditions prévues par l'avenant du contrat. à savoir dans la limite de 120 000 euros par sinistre diminué de la franchise de 10% du montant du sinistre sans pouvoir dépasser 2 200 euros,

- dit et jugé que le sinistre causé par la SAS Agrovin France et survenu dans les caves de la SCA les Celliers du nouveau monde constitue un sinistre indépendant des sinistres causés par la SAS Agrovin France dans les autres locaux,

- dit et jugé que le montant des préjudices subis s'élève à :

la somme de 314 505euros pour la SAS les Vignerons des la Méditerranée

la somme de 222 663 euros pour la société Coopérative agricole les Celliers du nouveau monde

la somme de 264 131 euros pourl'Union de coopératives Foncalieu

la somme de 21 976 euros pour la SAS Domaines des Marins

- dit et jugé que les sociétés qui se prévalent d'un préjudice de par leur attitude ont contribué à ce dernier,

- arrêté la responsabilité des sociétés SAS Vignerons de la Méditerranée. l'Union de coopératives Foncalieu, la société SCA les Celliers du nouveau monde à 20% du montant de leur propre préjudice.

vu le rapport d'expertise de M. [Y] :

- pour la société Coopérative agricole les Celliers du nouveau monde :

- retient que cette société a subi un préjudice de 222 663 euros d'après le rapport d'expertise de M. [Y],

- retient la responsabilité majoritaire de Brenntag et d'Agrovin au principal puis en niveau secondaire à eux -mêmes pour défaillance de leur systeme de contrôle.

- arbitre forfaitairement le montant de le responsabilité de la société SCA les Celliers du nouveau monde à 20% de son préjudice soit la somme de 44 532,60 euros,

- pour le surplus, condamné solidairement les sociétés Agrovin France SAS et la SA Brenntag soit à la somme de 178 130,40 euros,

- pour l'Union de coopératives Foncalieu. :

- retient que cette société a subi un préjudice de 264 131 euros d'après le rapport d'expertise de M. [Y],

- retient la responsabilité majoritaire de Brenntag et d'Agrovin au principal, puis au niveau secondaire à la défaillance du propre système qualité de la société Coopérative agricole les Celliers du nouveau monde,

- arbitre forfaitairement le montant de la responsabilité de la société l'Union de coopératives Foncalieu à 10% de son préjudice soit la somme de 28 413,10 euros,

- arbitre forfaitairement le montant de la responsabilité de la SCA les Celliers du nouveau monde à 10% du préjudice subi par l'Union de coopératives Foncalieu, soit la somme de 20 413,10euros.

- pour le surplus, condamné solidairement les sociétés Agrovin France SAS et la SA Brenntag,soit la somme de 211 304,80 euros,

- pour les Vignerons de la Méditerranée. :

- retient que cette société a subi un préjudice de 314 505 euros selon le rapport d'expertise de M. [Y],

- dit et jugé que les désordres liés à la premiére livraison sont imputables au manquement de Brenntag SA et Agrovin SAS via l'Union de coopératives Foncalieu,

- dit et jugé que pour la deuxiéme livraison, outre Brenntag SA et Agrovin SAS en premier niveau, les désordres sont imputables à la société les Vignerons de la Méditerranée pour la défaillance du systéme qualité et à Foncalieu pour défaut d'information,

- retient la responsabilité de l'Union de coopératives Foncalieu qu'il convient d'arbitrer à la comme de 10% soit 19 499.31euros.

- retient la responsabilité majoritaire des sociétés Brenntag SA et Agrovin France soit la comme de 175 493.79euros,

- pour le surplus, condamné solidairement les sociétés Agrovin France SAS et la SA Brenntag soit à la somme de 175 493,70euros,

- retient, pour la deuxieme livraison de 250 hectolitres. la somme de

119 511,90 euros, soit 0,35% du préjudice total,

- retient la responsabilité des Vignerons de la Méditerranée pour défaut du système de qualité qu'il convient d'arbitrer à la somme de 11 051,10 euros correspondant à 10% du préjudice,

- retient la responsabilité de l'Union de coopératives Foncalieu pour défaut d'information qu'iI convient d'arbitrer à la somme de 11 951,19 euros correspondant à 10% du préjudice,

- retient la responsabilité du Domaines des Marins qui a pris la décision de livrer une deuxième fois «en accord avec le client», arbitre à la somme de

11 951,10 euros correspondent à 10% du préjudice.

- retient la responsabilité majoritaire des sociétés Brenntag SA et Agrovin France soit la somme de 83 658.33euros,

- pour le surplus, condamné solidairement les sociétés Agrovin France et la SA Brenntag à la somme de 83 658,33euros,

- pour les Domaines des Marins :

- retient que cette société a subi un préjudice de 21 976 euros TTC correspondant à une facture impayée par les Vignerons de la Méditerranée,

- condamné la société l'Union de coopératives Foncalieu qui a manqué à son devoir d'information. à payer cette facture à la société les Domaines des Marins,

- dit qu'il n'y a pas lieu à l'exécution provisoire de la présente décision.

- dit qu'il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné les sociétés Brenntag et Agrovin France à payer les entiers dépens dans la présente décision, qui comprendront les frais d'expertise,

- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires tenues pour injustes ou mal fondées.»

***

Par déclaration reçue le 27 juillet 2017 (RG n°17/4239), la société Agrovin France a régulièrement relevé appel de ce jugement.

Par déclaration reçue le 31 août 2017 (RG n°17/4794), la société Brenntag a régulièrement relevé appel de ce jugement.

La société Agrovin France demande à la cour, en l'état de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 6 février 2020 dans chaque dossier, de

«- infirmer en toutes ses dispositions le jugement (...), sauf en ce qu'il a débouté la société Brenntag de sa demande de nullité du rapport d'expertise et en ce qu'il a retenu la responsabilité des sociétés Celliers du Nouveau Monde, UC Foncalieu, Vignerons de la Méditerranée et les Domaines des Marins et par conséquent,

- à titre principal, débouter les sociétés SCA les Celliers du nouveau monde, UC Foncalieu, Vignerons de la Méditerranée, les Domaines des Marins de toutes leurs demandes à son encontre aux motifs qu'elles ne prouvent ni la faute alléguée, ni le lien de causalité entre cette prétendue faute et les préjudices invoqués ;

- à titre subsidiaire, débouter les sociétés SCA Celliers du Nouveau Monde, UC Foncalieu, Vignerons de la Méditerranée, les Domaines des Marins de toutes leurs demandes à son encontre aux motifs qu'elle bénéfice d'une cause d'exonération liée à la force majeure et/ou à la faute d'imprudence commise par elles,

- à titre infiniment subsidiaire, dire et juger que les sommes éventuellement allouées à la société les Celliers du nouveau monde ne saurait excéder la somme de 222 663 euros, à laquelle il faut encore déduire la part de 30 % s'imputant à la cave, soit un préjudice évalué à 155 864 euros.

- dire et juger que les sommes éventuellement allouées à la société l'UC Foncalieu ne sauraient excéder la somme de 153 127 euros à laquelle il faut encore déduire la part de 30 % s'imputant à la cave, soit un préjudice évalué à 107 189 euros,

- dire et juger que les sommes éventuellement allouées à la société les Domaines des Marins ne sauraient excéder la somme de 127 775 euros à laquelle il faut encore déduire la part de 30 % s'imputant à l'intimée, soit un préjudice évalué à 89 443 euros,

- dire et juger que les sommes éventuellement allouées à la société Vignerons de la Méditerranée ne sauraient excéder la somme de 263 181 euros, à laquelle il faut encore déduire la part de 30 % s'imputant à la cave, soit un préjudice évalué à 184 227 euros,

- débouter les sociétés SCA les Celliers du nouveau monde, l'UC Foncalieu, les

Domaines des Marins et les Vignerons de la Méditerranée de toutes demandes plus amples ou contraires,

- en toute hypothèse, débouter la société Brenntag de toutes ses demandes, fins et conclusions dirigées contre elle,

- à toutes fins utiles, condamner la société Brenntag à la garantir et relever indemne de l'ensemble des conditions pouvant être prononcées à son encontre,

- débouter la société AXA de toutes ses demandes, fins et conclusions en ce qu'elles ont pour finalité de contester son obligation de garantie (...),

- dire et juger que le plafond de la garantie d'assurance ne s'applique pas pour l'ensemble des quatre sinistres déclarés par elle, mais uniquement pour le sinistre global déclaré par les sociétés SCA les Celliers du nouveau monde, UC Foncalieu, Vignerons de la Méditerranée et les Domaines des Marins,

- dire et juger que le litige s'inscrit dans la catégorie «dommages matériels et immatériels consécutifs confondus »' du contrat d'assurance litigieux ;

- condamner par conséquent Axa à la garantir des éventuelles conditions mises à sa charge dans la limite de 1 500 000 euros, après déduction d'une franchise de 10 % et de 2 200 euros maximum ;

- débouter la société Generali de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- condamner les sociétés SCA les Celliers du nouveau monde, UC Foncalieu, Vignerons de la Méditerranée et les Domaines des Marins et/ou in solidum la société Brenntag, à lui payer la somme de 50 000 euros, représentant les frais d'avocat, de son propre expert et les frais d'analyse, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les sociétés SCA les Celliers du nouveau monde, UC Foncalieu, Vignerons de la Méditerranée et les Domaines des Marins et/ou in solidum la société Brenntag aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire et de référé.»

Formant appel incident, la SA Generali IARD sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 14 février 2020 dans chaque dossier

« - (...) à titre principal, dire et juger que les désordres sont dus au traitement tartrique du vin par l'intermédiaire d'un acide pollué, confirmer le jugement rendu (') et dire et juger que la société Agrovin SA et de la société Brenntag sont responsables à titre principal des désordres,

- infirmer le jugement rendu (...) en ce qu'il a retenu une part de responsabilité au titre des désordres litigieux à l'encontre de la société les Domaines des Marins ;

- et, statuant à nouveau, dire et juger que la société les Domaines des Marins n'est pas responsable des dommages, en conséquence, rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de la société les Domaines des Marins et d'elle-même, son assureur,

- à titre subsidiaire, rejeter les demandes d'indemnisation formées par la société Vignerons de la Méditerranée faute de justificatifs suffisants,

- dire et juger que les préjudices ne sauraient être supérieurs à la somme calculée par l'expert judiciaire après débat contradictoire,

- s'il est considéré que la société les Domaines des Marins avait connaissance des désordres, dire et juger que la garantie de Generali ne pourra être acquise, en l'absence de caractère aléatoire du contrat d'assurance, en conséquence, rejeter toute demande formée contre la société Generali,

- à défaut, limiter sa condamnation aux termes de la police d'assurance, à savoir l'exclusion de la reprise de prestation de l'assuré, l'exclusion des dommages matériels, corporels ou immatériels du fait de vice ou défaut dont l'assuré avait connaissance pendant la période de validité du contrat et la limitation des dommages immatériels consécutifs à un dommage matériel, à la somme de 1 600 000 euros, et sous déduction d'une franchise de 10% du montant des dommages avec un minimum de 800 euros et un maximum de 4 000 euros,

- condamner la société SCA les Celliers du nouveau monde et l'Union de coopératives Foncalieu à la relever et garantir de l'ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre, au titre du vice du produit vendu,

- condamner les sociétés Agrovin et Brenntag, à la relever et garantir de l'ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,

- condamner les sociétés Agrovin et Brenntag ou tous succombant, in solidum, au paiement de la somme de 8 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens.»

Formant appel incident, la société l'Union de coopératives Foncalieu sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 14 février 2020 dans chaque dossier

«- (...) déclarer recevable son appel incident, infirmer le jugement rendu (...) en ce qu'il a dit et jugé qu'elle a manqué à son obligation de la garantie des vices cachés, à son principe de précaution, et a ainsi engagé sa responsabilité civile sur le fondement des articles anciens 1382 et 1383 du code civil, qu'elle ne pourra pas se prévaloir d'une quelconque clause limitative de responsabilité, et a fixé le montant des préjudices de chaque cave avec une part de responsabilité pour chacune d'elles et les a condamnés à payer les sommes retenues,

- statuant à nouveau, in limine litis, rejeter toutes conclusions contraires comme injustes et mal fondées

- sur le fond, rejeter toutes conclusions contraires comme injustes et mal fondées,

- (...) dire et juger que la société Agrovin France a fautivement utilisé un acide chlorhydrique de qualité technique et non alimentaire, contrairement aux conseils d'utilisation de sa maison mère, et sans prendre de mesures de précaution avant sa mise en 'uvre afin de vérifier l'absence de risque lié à son utilisation dans des vins,

- dire et juger que la société Brenntag a fourni et vendu l'acide pollué par une molécule qui a contaminé les vins à la société Agrovin France sans avoir effectué de recherches pour vérifier la pureté de cet acide,

- en conséquence, dire et juger que la société Agrovin France et la société Brenntag sont responsables de l'intégralité des dommages subis et préjudices supportés par elle,

- dire et juger qu'elle n'a commis aucun manquement et qu'elle est exonérée de sa responsabilité par application de ses conditions générales de vente opposables à la société les Domaines des Marins,

- dire et juger que la société les Domaines des Marins, en exigeant d'être livrée du vin qu'elle avait acheté et en livrant ce vin qu'elle savait impropre à la consommation à la société Les Vignerons de la Méditerranée, sans l'informer de cette situation, a commis une faute et est également responsable des dommages causés à la société Les Vignerons de la Méditerranée,

- débouter la société les Domaines des Marins, et son assureur Generali IARD, de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral ainsi que de sa demande de condamnation solidaire au titre de sa facture de 21 976 euros,

- débouter la société les Domaines des Marins et Generali IARD de leurs demandes tendant à la voir condamner à les relever et garantir de toute condamnation prononcée à leur encontre,

- la mettre hors de cause au titre des préjudices subis par la société les Vignerons de la Méditerranée,

- (...) dire et juger que son préjudice a été fixé par l'expert judiciaire à la somme de 271 604 euros, à laquelle il échet de rajouter le montant total des frais d'analyse exposés pour rechercher l'origine des désordres avant la mise en place de l'expertise judiciaire, soit la somme de 3 964,50 eurosqui avait été validée par Monsieur [Y], ce qui porte le montant total du préjudice subi à la somme de 275 568,50 euros,

- condamner in solidum la société Agrovin France son assureur la société Axa France IARD et la société Brenntag à lui payer la somme de 275 568,50 euros en réparation des préjudices subis, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation en référé en date du 20 novembre 2012,

- condamner in solidum la société Agrovin France son assureur la société Axa France IARD et la société Brenntag à lui payer la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum la société Agrovin France son assureur la société Axa France IARD et la société Brenntag aux entiers dépens en ce compris l'intégralité des frais d'expertise judiciaire.»

Formant appel incident, la société les Vignerons de la Méditerranée sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 17 février 2020 dans chaque dossier

«- (...) prononcer la jonction de la procédure enrôlée sous le RG 17/04239 avec la procédure enrôlé sous le RG 17/04794 ;

- (...) confirmer le jugement (...) en ce qu'il a dit et jugé que l'expert judiciaire a parfaitement répondu à la mission, homologué le rapport de l'expert judiciaire, dit et jugé que la SA Brenntag a engagé sa responsabilité au titre de sa garantie légale des vices cachés et sur le fondement des anciens articles 1382 et 1383 du code civil, a manqué à son obligation de résultat, dit et jugé que la SAS Agrovin France a manqué à son principe de précaution, et a ainsi engagé sa responsabilité civile sur le fondement des articles anciens 1382 et 1383 du code civil (...), dit et jugé que la société SCA les Celliers du nouveau monde a manqué à son obligation de la garantie des vices cachés et a engagé sa responsabilité civile sur le fondement des articles anciens 1382 et 1383 du code civil, dit et jugé que la société les Domaines des Marins a engagé sa responsabilité contractuelle sur le fondement de l'article 1641 du code civil et a engagé sa responsabilité sur le fondement des anciens articles 1382 et 1383 du code civil, dit et jugé que l'Union de coopératives Foncalieu a manqué à son obligation de la garantie des vices cachés et a engagé sa responsabilité civile sur le fondement des articles anciens 1382 et 1383 du code civil, dit et jugé que l'Union de coopératives Foncalieu ne pourra pas se prévaloir d'une quelconque clause limitative de responsabilité,

- infirmer pour le surplus et, statuant à nouveau :

- condamner en conséquence in solidum la société les Domaines des Marins, son assureur la société Generali, la société Agrovin France, son assureur, la société Axa France IARD, et la société Brenntag à lui payer la somme de 442 390,59 euros en réparation de son préjudice, avec intérêts au taux légal et anatocisme à compter de l'assignation en référé du 11 octobre 2012 ;

- débouter la société les Domaines des Marins de sa demande en paiement de la somme de 21 976 euros TTC correspondant à sa facture de vente du vin affecté d'un vice caché, objet de la seconde retiraison ;

- à titre subsidiaire, si (...) la demande en paiement de la SAS les Domaines des Marins à son égard était accueillie, condamner in solidum la SAS Agrovin France, son assureur, la SA Axa France IARD et la SA Brenntag à la relever et garantir ;

- en tout état de cause, débouter la SAS les Domaines des Marins, son assureur la SA Generali, la SAS Agrovin France, son assureur, la SA Axa France IARD, et la SA Brenntag, de leurs demandes (...) ;

- condamner in solidum la SAS les Domaines des Marins, son assureur la SA Generali, la SAS Agrovin France, son assureur, la SA Axa France IARD et la SA Brenntag à lui payer la somme de 50 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, en ce compris les frais d'expertise.»

Formant appel incident, la société Axa France IARD sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 18 février 2020 dans chaque dossier

« - (...) - rejetant l'appel principal de la société Brenntag

- rejetant l'appel principal de la société Agrovin en ce qu'il vise la réformation de celles des dispositions du jugement entrepris qui ont consacré l'opposabilité tant à son égard qu'à celui des autres parties à la procédure du plafond de garantie d'AXA égal à 120 000 euros

- rejetant appels incidents des sociétés Vignerons de la Méditerranée, l'Union de coopératives Foncalieu les Domaines des Marins et les Celliers du nouveau monde.

- déclarant recevable et fondé son appel incident, (') infirmant partiellement la décision entreprise,

- au principal, constater qu'AXA France a consenti à la société Agrovin un contrat responsabilité civile n° 3517601004, suivi d'un avenant du 4 septembre 2012, à effet au 1er août 2012, adjoignant à la seule activité précédemment déclarée et garantie l'activité qui lui vaut aujourd'hui de voir sa responsabilité recherchée, qui est en base réclamation, de sorte qu'il a seul vocation à s'appliquer au sinistre objet de la présente procédure puisqu'il a été déclaré à AXA au mois de septembre 2012,

- constater que si la faute reprochée à la société Agrovin procède bien de ce fait d'une activité préalablement déclarée à son assureur, le fait dommageable qui est à l'origine de l'action en justice engagée à son encontre était connu de l'assurée à la date de souscription de la garantie concernée puisqu'elle était informée des désordres que ces essais ont provoqués, quand bien même trois sinistres sur quatre n'ont été déclarés qu'après la conclusion de l'avenant.

- dire et juger fondée son refus de garantie à la société Agrovin.

- dire et juger les motifs de ce refus de garantie parfaitement opposables aux

« tiers lésés » que sont les sociétés Vignerons de la Méditerranée, l'Union de coopératives Foncalieu, les Domaines des Marins et les Celliers du nouveau monde.

- (...) subsidiairement, (...) dire et juger (...) la molécule qui a infesté le vin (...) traduit une pollution par un composant exogène et que le sinistre est la cause d'un vice caché qui rend seul responsable le fabricant du produit, la société Agrovin ne pouvant de son côté répondre de cette responsabilité en l'absence de chaîne contractuelle,

- en conséquence, prononcer la mise hors de cause de la société Agrovin puisque sa faute éventuelle, si elle existe, est dans tous les cas sans lien avec le préjudice (...),

- très subsidiairement, tenant la défaillance avérée par l'expert judiciaire des systèmes de contrôle mis en place par les sociétés demanderesses, sans laquelle le désordre affectant le vin aurait pu être constaté, comme il l'a été en d'autres endroits du territoire par d'autres bénéficiaires des mêmes essais,

- constater en conséquence de ce seul chef, l'absence partielle de causalité entre une faute éventuelle de la société Agrovin et le préjudice allégué, ou encore ce qui revient au même une responsabilité secondaire des demanderesses dans la production de leur propre préjudice,

- (...) dire et juger en conséquence que la responsabilité de la société Agrovin ne saurait excéder 6% dans la production du préjudice éventuellement causé à la SA Vignerons de la Méditerranée et 10% du préjudice éventuellement causé à l'Union de coopératives Foncalieu et à la SCA les Celliers du nouveau monde,

- débouter purement et simplement la SA Vignerons de la Méditerranée, l'Union ds coopératives Foncalieu et la SCA les Celliers du nouveau monde de toutes leurs prétentions excédant l'évaluation que l'expert judiciaire a fourni de leur préjudice respectif,

- débouter purement et simplement la SA Vignerons de la Méditerranée, l'Union des coopératives Foncalieu et la société coopérative agricole les Celliers du nouveau monde de leurs demandes tendant à voir les condamnations qu'elles revendiquent assorties d'intérêts au taux légal,

- dire et juger que la société Domaine des Marins n'a subi aucun préjudice et que seule la SA Vignerons de la Méditerranée peut être débitrice du paiement de sa facture au paiement de laquelle il lui appartient de solliciter sa condamnation à l'exclusion de toutes autres,

- la débouter de l'intégralité de ses prétentions mal dirigées à son encontre et/ou son assurée,

- dire et juger que toute condamnation, par extraordinaire, prononcée à son encontre ne pourra intervenir que dans les limites contractuelles applicables, c'est-à-dire sous déduction de la franchise stipulée dans la police bénéficiant à la société Agrovin, mais aussi dans la limite du plafond contractuel de garantie s'élevant à 120 000 euros et applicable au sinistre objet de la présente procédure,

- constater que les dommages causés aux quatre tiers lésés qui ont séparément engagé une procédure à l'encontre de la société Agrovin ont une cause unique, à savoir l'emploi d'un même lot d'acide non alimentaire dont il s'est révélé qu'il était pollué et que les conséquences en sont aussi les mêmes.

- dire et juger en conséquence qu'il s'agit bien d'un seul et même sinistre au sens du contrat d'assurance et qu'elle est fondée à opposer un plafond de garantie unique.

- condamner la ou les parties succombantes à lui payer la somme de 18 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens. »

Formant appel incident, la société les Celliers du nouveau monde sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 18 février 2020 dans chaque dossier

«- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé que l'expert judiciaire avait parfaitement répondu à la mission (...) ; dit et jugé que la SA Brenntag a engagé sa responsabilité au titre de la garantie légale des vices cachés ainsi que sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil et quelle a, en outre, manqué à son obligation de résultat ; dit et jugé que la SAS Agrovin a manqué à son principe de précaution et ainsi engagé sa responsabilité sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil ; retenu que la société coopérative agricole les Celliers du nouveau monde a subi un préjudice de 222 663 euros;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé qu'elle a manqué à son principe de précaution, engageant ainsi sa responsabilité sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil, arbitré forfaitairement le montant de sa responsabilité à 20% de son préjudice, soit la somme de 44 532,60 euros;

- statuant à nouveau, dire et juger que la SAS Agrovin France et la SA Brenntag sont responsables de l'intégralité des préjudices subis par la SCA les Celliers du nouveau monde,

- dire et juger qu'elle n'a commis aucun manquement aux obligations à sa charge,

- condamner solidairement la société Agrovin France, son assureur Axa France IARD et la SA Brenntag au paiement de la somme de 222 683 euros, telle qu'évaluée par l'expert judiciaire, en réparation ses préjudices, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 27 avril 2016 ;

- à titre subsidiaire, confirmer le jugement en ce qu'il a fixé la part de responsabilité de la société SCA les Celliers du nouveau monde à hauteur de

20 % de son préjudice soit la somme de 44 532,60 euros,

- en tout état de cause, débouter les sociétés Agrovin et Brenntag de toutes leurs demandes, fins et conclusions dirigées contre la société coopérative agricole les Celliers du nouveau monde,

- condamner solidairement la société Agrovin France, son assureur Axa et la SA Brenntag au paiement des entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, et de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.»

Formant appel principal et incident, la société Brenntag sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 20 février 2020 en qualité d'appelante et d'intimée, dans chaque dossier

«- (...) dire et juger les présentes conclusions recevables et bien fondées ;

- en conséquence, infirmer le jugement rendu (') en ce qu'il a déclaré que le rapport d'expertise de Monsieur [Y] lui est opposable, retenu la responsabilité solidaire de la société Brenntag et de la société Agrovin France à l'égard des sociétés les Vignerons de la Mediterranee, les Domaines des marins, Generali IARD, l'UC Foncalieu, les Celliers du nouveau monde, l'a condamnée à les indemniser à hauteur de 40 % de leurs préjudices ;

- et statuant à nouveau, in limine litis, juger que l'expert n'a pas respecté le principe de contradiction ni satisfait à l'ensemble des chefs de sa mission qui lui ont été impartis par ordonnance de référé du 15 juillet 2014,

- en conséquence, prononcer la nullité du rapport d'expertise judiciaire de Monsieur [Y],

- (...) juger qu'elle n'a pas engagé sa responsabilité sur le fondement de la garantie des vices cachés ;

- juger que les sociétés les Vignerons de la Méditerranée, Domaines des Marins, Generali IARD, Foncalieu et les Celliers du nouveau monde, Agrovin France et Axa France IARD ne rapportent pas la preuve d'une quelconque faute délictuelle à son encontre, ni qu'elle aurait manqué à son devoir d'information ;

- (...) juger qu'elle n'a pas engagé sa responsabilité contractuelle à l'égard de la société Agrovin France, ni délictuelle à l'égard des sociétés les Vignerons de la Méditerranée, les Domaines des Marins, Foncalieu et les Celliers du nouveau monde;

- juger que les désordres sont imputables à la seule erreur fautive de la société Agrovin France ;

- juger que les sociétés les Vignerons de la Méditerranée, Domaines des Marins, UC Foncalieu, les Celliers du nouveau monde, mais également Agrovin France ont été défaillantes dans le systeme de contrôle qualité mis en 'uvre lors des essais de stabilisation tartrique des vins ;

- juger que les sociétés Vignerons de la Méditerranée, Domaines des Marins,UC Foncalieu, Celliers du nouveau monde et Agrovin France sont seules responsables de l'aggravation des dommages, et devront en supporter les conséquences financières,

- en conséquence, débouter les sociétés Vignerons de la Méditerranée, Domaines des Marins, Generali IARD, UC Foncalieu et Celliers du nouveau monde, Agrovin France et Axa France IARD, de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions dirigées contre la société Brenntag ;

- la mettre hors de cause ;

- à titre subsidiaire, si par extraordinaire, si la cour entre en voie de condamnation à son encontre, sur les préjudices, juger que le montant des préjudices réclamés par les sociétés les Vignerons de la Méditerranée, les Domaines des Marins, UC Foncalieu, les Celliers du nouveau Monde est excessif et en partie non justifié ;

- juger que leur montant ne saurait, en toute hypothèse, être supérieur à celui que l'expert judiciaire a arrêté dans son rapport d'expertise judiciaire,

- en tout état de cause, condamner les sociétés les Vignerons de la Méditerranée,

Domaines des Marins, Generali IARD, UC Foncalieu, les Celliers du nouveau monde, Agrovin France et Axa France IARD et/ou toute partie succombante, à lui payer la somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.»

Formant appel incident, la société Domaines des Marins sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 21 février 2020 dans chaque dossier

«- infirmer le jugement rendu (')

- rejeter la demande de nullité du rapport d'expertise rédigé par M. [Y],

- homologuer le rapport d'expertise de M. [Y] (...),

- dire et juger qu'elle n'est pas responsable des dommages et n'a agi que comme simple intermédiaire,

- la mettre hors de cause et rejeter l'ensemble des demandes (...) dirigées à son encontre,

- condamner la société les Vignerons de la Méditerranée à lui payer la somme de 21 976 euros correspondant à la facture du 7 juillet 2012 restée à ce jour impayée avec intérêt au taux légal et anatocisme à compter du 7 juillet 2012 date de présentation de la facture restée à ce jour impayée,

- subsidiairement et, si par impossible la demande en paiement formée par les Vignerons de la Mediterranee était accueillie à son égard au titre de l'article 1641 du code civil, fixer son préjudice à la somme fixée par l'expert soit 329 421 euros déduction faite de la somme de 14 916 euros déjà perçue, soit 314 505 euros et rejeter en conséquence le montant demandé par les Vignerons de la Méditerranée car infondé,

- dire et juger qu'à cette somme fixée par l'expert sera déduit 10 % sur la seconde livraison (250hl) compte tenu de sa propre défaillance dans son système qualité comme constaté par l'expert, soit 12 096,00 euros,

- condamner in solidum les sociétés UC Foncalieu, les Celliers du nouveau monde ainsi que les sociétés Agrovin et Brenntag à la relever et garantir de l'ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ou condamner la société UC Foncalieu seule à la relever et garantir de l'ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre à qui il appartiendra d'appeler en garantie qui de droit,

- si par impossible la cour estimait que sa responsabilité peut être retenue, elle ne le sera que sur la seconde livraison et la fixer à hauteur de 5 % soit 6 048 euros, somme pour laquelle elle sera relevée et garantie par l'UC Foncalieu pour défaut d'information,

- dire et juger, en tout état, que la garantie de Generali lui est acquise en présence du caractère aléatoire du contrat d'assurance,

- accueillir sa demande reconventionnelle et condamner la société les Vignerons de la Méditerranée à lui payer la somme de 21 976 euros correspondant à la facture du 7 juillet 2012 restée à ce jour impayée avec intérêt au taux légal à compter du 7 juillet 2012,

- très subsidiairement et si la demande en paiement à l'encontre des Vignerons de la Mediterranée était rejetée, rejeter les demandes de l'UC Foncalieu à son égard et notamment déclarer inopposable la clause limitative d'indemnisation dont elle se prévaut,

- condamner l'UC Foncalieu à lui payer la somme de 21 976 euros au titre de son préjudice matériel, avec intérêts au taux légal et anatocisme à compter de la demande d'expertise soit le 20 novembre 2012,

- subsidiairement et eu égard aux conclusions de l'expert, condamner in solidum les SA Brenntag, SAS Agrovin France, les Celliers du nouveau monde, l'UC Foncalieu et les Vignerons de la Mediterranée à lui payer la somme de 21 976 euros au titre de son préjudice matériel avec intérêts au taux légal et anatocisme à compter de la demande d'expertise soit le 20 novembre 2012,

- condamner l'UC Foncalieu à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de son préjudice moral du fait des man'uvres dolosives,

- condamner solidairement les sociétés Brenntag, Agrovin France et l'UC Foncalieu à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

- subsidiairement condamner solidairement les sociétés Brenntag, Agrovin France, les Celliers du nouveau monde, l'UC Foncalieu et les Vignerons de la Méditerranée à lui payer la somme de 5 000 eurosau titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

- subsidiairement infirmer partiellement le jugement rendu et y ajoutant, dire et juger que la garantie de Generali lui est acquise ,

- condamner l'UC Foncalieu à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de son préjudice moral,

- condamner l'UC Foncalieu à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens. »

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnances du 25 février 2020 dans les dossiers RG n°17/4239 et 17/4794.

***

Saisi par l'Union des vignerons des Côtes du Lubéron, le tribunal de grande instance d'Avignon a, par jugement du 26 août 2019, mis hors de cause la société Agrovin et retenu la seule responsabilité de la société Brenntag, qui a relevé appel dudit jugement tandis que la cour d'appel de Bordeaux, par arrêt du 23 octobre 2019 à la requête de la SA Maison Ginestet, a mis hors de cause la société Brenntag et retenu la seule responsabilité de la société Agrovin, qui a, avec son assureur, formé un pourvoi à l'encontre de cet arrêt.

MOTIFS de la DECISION :

1- sur la jonction

Les appels formalisés par la société Agrovin et la société Brenntag, respectivement les 27 juillet et 31 août 2017, portent sur le même jugement et concernent les mêmes parties, de sorte qu'il convient de prononcer leur jonction, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice sous le numéro d'enregistrement au répertoire général de la cour le plus ancien, soit le numéro RG 17/04239.

2 - sur la nullité du rapport d'expertise

La société Brenntag a été appelée aux opérations d'expertise (ayant débuté suite à une ordonnance de référé du 14 janvier 2013) par une ordonnance de référé en date du 30 juin 2014, lui déclarant communes et opposables les opérations d'expertise au vu de la note technique et du pré-rapport n°1 de l'expert, qui suspendait les opérations dans l'attente de l'examen des éléments devant être

produits par cette société. Celui-ci a ainsi établi un rapport d'étape 'pour éclairer la société Brenntag en préambule à l'accédit technique du 10 décembre 2014' et celle-ci a participé à trois réunions d'expertise les 10 décembre 2014, 18 et 24 mars 2015.

Si la société Brenntag n'a pas assisté aux prélèvements des vins effectués contradictoirement avant sa participation aux opérations d'expertise, les échantillons prélevés sont restés à sa disposition pour investigation auprès de l'expert judiciaire sans qu'elle ne formule jamais cette demande, pas même au cours de la présente instance.

Les parties ont été informées des résultats positifs de l'analyse d'identification et de quantification de la molécule à l'origine des désordres dans les vins à une date à laquelle la société Brenntag était présente ; elle a également reçu les informations relatives aux résultats des tests relatifs à la perception des désordres.

La société Brenntag était présente aux opérations d'expertise effectuée par le sapiteur chimiste, qui concernent l'acide chlorhydrique qu'elle a vendu.

Par ailleurs, la disparition par incendie des derniers containers du lot d'acide chlorhydrique vendu est sans incidence sur le caractère contradictoire des opérations d'expertise (dont la prétendue absence n'est pas explicitée par la société Brenntag), l'expert désigné et son sapiteur étant étrangers à celle-ci.

Ainsi, la société Brenntag a été informée du résultat des opérations expertales et de la possibilité qu'elle avait de présenter des observations et de demander des investigations complémentaires, elle a été convoquée à des réunions lors desquelles elle a eu connaissance du déroulement des opérations d'expertise, étant, derechef, invitée à présenter ses observations, les débats sur les pré-rapports étant, contrairement à ce qu'elle soutient, essentiels pour chaque partie.

Dès lors, la demande de nullité du rapport d'expertise, tirée de la violation du principe de la contradiction, soulevée par la société Brenntag sera rejetée et le jugement confirmé de ce chef, sauf en ce qu'il a homologué à titre superfétatoire ledit rapport d'expertise, puisque le juge n'est pas lié par les conclusions du technicien en application de l'article 246 du code de procédure civile.

3 - sur les responsabilités

- le rapport d'expertise judiciaire

Selon les conclusions du rapport d'expertise judiciaire, le vin a fait l'objet d'un traitement oenologique de stabilisation tartrique par résines échangeuses de cations à l'occasion duquel un acide chlorhydrique de régénération, de qualité technique et non alimentaire, a été utilisé. Cet acide était porteur d'une molécule de contamination, dénommée 2-bromo-para-crésol, dite 2 BpC, (concentration de 872 ug/l) étrangère au vin et faisant partie des impuretés, qui a provoqué des désordres organoleptiques.

Le rapport d'expertise expose, par le biais du sapiteur, que l'acide chlorydrique est inscrit en tant qu'additif alimentaire (code 507) au tableau 3 du Codex alimentarius, qui recense, principalement, les normes internationales garantissant la sécurité sanitaire des aliments en vue de leur commercialisation et qu'il existe trois qualités commerciales d'acide chlorydrique : l'acide de qualité technique, de qualité alimentaire (food grade) et de qualité médicale.

Il indique que l'acide chlorhydrique de qualité technique peut être utilisé dans différentes applications (peinture, cosmétique, chimie fine') ; ainsi il ne fait pas l'objet de contrôles approfondis pour détecter des produits toxiques et son conditionnement est généralement fait en containers reconditionnés. L'acide chlorhydrique de qualité alimentaire subit un traitement différent au niveau de la purification et des contrôles qualité ainsi que des transferts afin de garantir un taux de contaminants inférieur (exemple : le conditionnement est réalisé en

containers neufs uniquement). Il précise que l'on obtient la qualité dite alimentaire par purification successive de la qualité technique et les différences entre l'acide chlorhydrique de qualité technique et alimentaire se situent principalement dans les dosages de traces et de métaux.

Il indique encore que le Codex alimentarius précise les caractéristiques et spécifications de l'acide chlorydrique autorisé sans faire état de la dénomination «alimentaire», qui ne représente pas une réalité fonctionnelle. Ainsi, les deux acides ont des caractéristiques fonctionnelles équivalentes. Il souligne que la qualité alimentaire limite, mais sans l'éliminer, les risques de contamination accidentelle ou liée aux différentes étapes de fabrication.

Il maintient que l'acide technique ne peut contenir que des traces (impuretés ou contaminants), issu de son procédé de fabrication, or le 2 BpC n'est pas un élément de fabrication du procédé utilisé par le fournisseur de la société Brenntag (la société Arkema), il est donc apparu après ce procédé de fabrication et peut être qualifié de pollution exogène. Il souligne que la qualité alimentaire n'aurait pas supprimé le risque, mais l'aurait simplement limité aux opérations réalisées en dehors de la société Brenntag.

Il précise que la qualité de l'acide chlorhydrique vendu par la société Brenntag répondait aux normes d'acceptabilité définie par le Codex alimentarius et la norme AFNOR NF 939 F (qui, bien que concernant le traitement des eaux destinées à la consommation humaine, et non les vins, est la seule qui puisse être retenue comme référence), à l'exception de la quantification des métaux lourds (chrome, mercure, nickel, plomb'), qui n'est pas mentionnée pour l'acide chlorhydrique vendu par la société Brenntag alors que son fournisseur, la société Arkema, l'indique (cf certificat de conformité du 25 juillet 2011).

Il constate que la société Brenntag est dans l'incapacité de garantir la traçabilité de l'acide chlorhydrique qu'elle a vendu.

En conclusion, le rapport d'expertise judiciaire indique expressément qu'un acide chlorydrique de qualité technique peut être utilisé à condition de respecter le cahier des charges en paramètres d'impuretés, pouvant être communiquées au vin, et à condition de s'assurer que les résidus ou leurs dérivés dans le produit fini ne présentent pas de risque sanitaire, c'est-à-dire que les caractéristiques et spécifications de cet acide soient en accord avec le Codex alimentarius et la norme AFNOR NF 939 F.

- la responsabilité de la société Brenntag

Selon l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'ils les avait connus.

Le vice caché est le défaut qui rend la chose impropre à sa destination normale.

Le vendeur professionnel est, en application combinée des dispositions des articles 1147 (devenu 1231-1) et 1615 du code civil, débiteur d'une obligation d'information, y compris à l'égard de l'acheteur professionnel, lorsque celui-ci ne dispose pas des caractéristiques techniques du bien vendu.

Contrairement à ce que soutient la société Brenntag, le rapport d'expertise retient expressément que l'acide utilisé était porteur d'une molécule de contamination et que cette molécule est la conséquence d'une pollution, l'acide étant défectueux et impropre, de ce fait, à l'usage alimentaire. Il expose que tout acide qu'il soit de qualité technique ou à usage alimentaire, ne doit pas être pollué, de sorte que ladite molécule est à l'origine des désordres organoleptiques constatés, qui ne proviennent pas d'une utilisation inadaptée, mais d'un défaut intrinsèque.

La société Brenntag ne justifie pas avoir informé la société Agrovin lors de la

vente de cet acide que celui-ci était susceptible de comporter telle ou telle impureté, notamment par le biais de la fiche technique et du certificat de conformité du produit, qui ne mentionnent, pour la première, que les caractéristiques de celui-ci quant à sa coloration, son aspect et ses teneurs en fer, arsenic et matières oxydantes tout en précisant que 's'agissant d'un produit reconditionné, les données au départ du site de production ne peuvent être garanties', et, pour le second, que 'la fourniture est conforme aux spécifications techniques du marché, commande du client (...) et répond sous tous ses aspects aux spécifications particulières applicables'.

Si les sociétés Brenntag et Agrovin s'opposent quant la fiche de données de sécurité (qui recense les informations relatives aux risques de santé liés à l'exposition ou l'utilisation de produits dangereux), applicable au moment de la vente, produisant chacune une fiche, la première en date du mois de mars 2011, et, la seconde, en date du mois de février 2012, il est patent que seule la fiche du mois de mars 2011 était applicable compte tenu de la date du contrat de vente, soit le second semestre 2011.

Au demeurant, la fiche de données de sécurité du 24 mars 2011 indique : «à ce jour, nous ne disposons pas d'informations relatives à des restrictions

d'usage » et la fiche de données de sécurité du 2 février 2012 indique : «'SU4 ' fabrication de produits alimentaires' et 'utilisations déconseillées : actuellement aucune utilisation contre-indiquée n'a été identifiée ». Chacune de ces formulations présente un caractère imprécis, susceptible de générer une confusion en ce qu'elles n'excluent pas un usage alimentaire et si ces fiches ne définissent pas les obligations contractuelles des parties, elles relèvent de la responsabilité de leur rédacteur.

Si les conditions générales de vente de la société Brenntag stipulent dans l'article 5 que : « [les] produits sont de qualité industrielle standard, sauf stipulation contraire. L'acheteur doit s'assurer de la compatibilité des produits avec l'utilisation qu'il veut en faire. Il relève de sa responsabilité de contrôler à réception la conformité du produit. [Elle] dégage de toute responsabilité résultant d'une utilisation erronée ou non conforme à la prudence, aux usages et aux prescriptions d'emploi, en particulier celles édictées par le fabricant.», les caractéristiques et spécifications indiquées sur les documents techniques de la société Brenntag ci-dessus exposées ne permettent pas de s'assurer du respect des caractéristiques et spécifications prescrites par le Codex alimentarius et la norme AFNOR NF 939 F ni avant l'achat, ni lors de la réception du lot (le certificat de conformité ne contenant aucune mesure de pureté).

Enfin, l'absence de traçabilité de l'acide acheté corrobore ce défaut de recherche des paramètres d'impureté.

Ainsi, la destination normale d'un acide chlorhydrique technique peut être un usage alimentaire et ce, indépendamment de l'absence de transmission par l'acquéreur du moindre cahier des charges, et la présence de la molécule de contamination dans l'acide chlorhydrique vendu caractérise un vice caché en ce qu'il était au regard des constatations expertales nécessairement antérieur à la vente, inconnu et en a compromis l'usage.

Le vice caché ci-dessus caractérisé ainsi que les informations imprécises délivrées lors de la vente engage la responsabilité de la société Brenntag en sa qualité de vendeur à l'égard de la société Agrovin et constituent pour la société les Celliers du nouveau monde, ayant utilisé le système Free K+ et pour les sociétés UC Foncalieu, Domaines des Marins et Vignerons de la Méditerranée ayant, par la suite, acheté le vin traité, une faute délictuelle, leur ayant causé un préjudice.

A contrario, le produit vendu est parfaitement conforme au produit acheté et aucune violation de l'obligation de délivrance du vendeur n'est rapportée.

- sur la responsabilité de la société Agrovin

Il n'existe aucun prêt à usage gratuit entre la société Agrovin et la société les Celliers du nouveau monde, puisque la société Agrovin a conservé la maîtrise et l'usage de la machine Free K+, sa plaquette commerciale indiquant 'un procédé automatique', de sorte que sa responsabilité doit, dans leurs relations, être recherchée sur un fondement délictuel ainsi qu'à l'égard des sociétés, ayant acquis le vin vicié, qui sont sans lien contractuel avec elle.

Selon les anciens articles 1382 et 1383 (devenus 1240 et 1241 ) du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer et chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par un imprudence.

Il résulte du rapport d'expertise judiciaire que la société Agrovin avait, dès le mois de février 2012, connaissance de désordres sur un autre site dans le cadre d'un traitement par le biais d'une même machine de stabilisation tartrique, puis au mois de mai suivant, sur un troisième site.

Celle-ci ne rapporte pas avoir tenu compte de ces difficultés dans l'usage qu'elle a fait de la machine auprès de la société les Celliers du nouveau monde, qui contredisent, en tout état de cause, les précédents essais qu'elle qualifie de 'concluants', notamment, en l'avertissant de l'existence de ces difficultés.

Selon le rapport d'expertise judiciaire, comme déjà évoqué, un acide technique peut être utilisé à des fins alimentaires lorsque le cahier des charges en paramètres d'impuretés, pouvant être communiquées au vin, est respecté et que le risque sanitaire, tenant à la présence les résidus ou leurs dérivés dans le produit fini, est écarté. Si l'acide chlorydrique acheté ne comportait aucune restriction d'utilisation, il appartenait à la société Agrovin en sa qualité de professionnel, ayant fait le choix d'un usage à destination alimentaire de s'assurer de cette possibilité en sollicitant de son vendeur les caractéristiques et spécifications de l'acide chlorydrique afin de les comparer avec celles prescrites par le Codex alimentarius et la norme AFNOR NF 939 F, ce qu'elle n'a pas fait.

Enfin, la présence de la molécule dans l'acide chlorydrique acquis auprès de la société Brenntag ne constitue pas un événement caractérisant un cas de force majeure, à défaut d'être irrésistible et imprévisible. En effet, d'une part, le risque de pollution est en soi un évènement commun et, d'autre part, la société Agrovin avait été destinataire des recommandations de sa maison-mère, la société espagnole Productos Agrovin, qui mettent en avant l'usage d'un acide alimentaire. Ainsi, son choix d'un acide technique lui imposait de s'assurer que celui-ci pouvait être utilisé en lieu et place d'un acide alimentaire, ce qu'elle ne démontre pas avoir effectué.

Au surplus, l'expert judiciaire indique le 28 mars 2015 dans une réponse à un dire que la société Agrovin « a bien indiqué, en tout début de [ses] opérations, s'être trompée dans sa commande».

Ces imprudences et négligences graves de la société Agrovin constituent un ensemble de fautes, qui est à l'origine des préjudices dont il est sollicité réparation, et engage sa responsabilité délictuelle.

La responsabilité de la société Brenntag en sa qualité de vendeur au titre de la garantie des vices cachés et du défaut d'information et celle de la société Agrovin au titre de ses fautes délictuelles ayant concouru aux préjudices subis, toutes deux seront condamnées in solidum au profit des sociétés vitivinicoles intimées tandis qu'entre elles, la responsabilité sera partagée à hauteur de 70 % pour la société Brenntag et de 30 % pour la société Agrovin et la demande de garantie formée par cette dernière sera rejetée.

- sur la responsabilité des sociétés vitivinicoles

La vente du vin, devenu lui-même vicié au sens des dispositions de l'article 1641 du code civil du fait du traitement de stabilisation tartrique, entre les différentes sociétés vinicoles a transmis la garantie des vices cachés pour chaque contrat de vente et chaque vendeur est tenu de ladite garantie envers son propre acquéreur.

La clause limitative de responsabilité contenue dans les conditions générales de vente de la société UC Foncalieu, qui a vendu ce vin, dans le cadre d'une relation d'affaires établie, à la société Domaines des Marins, ne peut être appliquée, la version desdites conditions générales figurant au verso des factures des 5 juin et 4 juillet 2012 (et de toutes celles datées de l'année 2012, qui sont versées aux débats) entrant en vigueur le 1er janvier 2013.

Le rapport d'expertise judiciaire expose que les désordres organoleptiques résultant de la pollution présentent la particularité d'être perçus différemment par les individus, voire d'échapper à la perception de certains et que la présence de la molécule a été perçue, à l'occasion de ce contentieux, pour la première fois dans des vins. Il précise qu'il faut prendre en compte le fait que ces désordres étaient nouveaux et qu'il était permis lors d'un doute (comme celui survenu lors de l'agréage au sein de la société les Vignerons de la Méditerranée) de penser qu'un assemblage pouvait en diluer le caractère 'pas net' alors que le nombre limité de décisionnaires n'a peut-être pas permis d'avoir statistiquement un nombre de sujets sensibles.

La limite de quantification de la molécule est de 0,30 et la limite de détection de 0,09 ug/l.

L'expert judiciaire indique que les vins incriminés ont des concentrations comprises entre 0,04 et 0,8 ug/l, sauf pour la société les Celliers du nouveau monde où la concentration est de 7,55ug/l et que lorsque la molécule est présente à hauteur d'une valeur de 5,5 ug/l, seuls 84 % des testeurs la détectent et que lorsqu'elle est présente à hauteur d'une valeur de 1,8ug/l, ou même moindre, à hauteur de 0,45 ug/l, seuls 34 % des testeurs la détectent.

L'absence de perception du désordre au sein de la société les Celliers du nouveau monde compte tenu de la concentration en 2 BpC n'est pas compréhensible, l'expert l'ayant lui-même détecté dès l'ouverture de la cuve, précisant que la perception était statistiquement possible sur l'une des cuves au moins.

Dans le cadre de la vente entre les sociétés les Celliers du nouveau monde et UC Foncalieu, la concentration en 2 BpC est de 0,813 ug/l (cuve 119 devenue cuve 64).

Dans le cadre de la vente entre les sociétés Domaines des Marins et Vignerons de la Méditerranée, lors du premier enlèvement, le 1er juin 2012, l'échantillon d'agréage a été validé, l'intermédiaire, Monsieur [N], signalant une insatisfaction de la société Vignerons de la Méditerranée sur la qualité du vin postérieurement avec conservation des vins et lors du second enlèvement, le 4 juillet 2012, le même vin a fait l'objet d'un nouvel agréage avec une 'gêne' ressentie par une seule des personnes procédant à l'agréage sur les trois testeurs. Ici la concentration en 2 BpC est de 0,469 ug/l (cuve 52 devenue cuve 66).

Ainsi, si les agréages ont eu lieu, avec une 'gêne' décelée lors de la seconde retiraison par la société Vignerons de la Méditerranée, qui ne rend pas, en tout état de cause, le vice apparent et si les concentrations au sein des cuves des sociétés ayant acheté le vin traité est nécessairement moindre du fait des mélanges effectués avec d'autres vins, celle-ci était supérieure à la limite de détection et au regard des retours immédiats et massifs du vin vendu, il est manifeste qu'elles ont toutes failli à leur contrôle qualité, notamment, la société les Celliers du nouveau monde, qui n'a relevé aucune anomalie, et que ces contrôles auraient permis d'éviter la vente du vin alors que l'expert souligne que le contaminant peut à forte dose avoir des effets irritants.

Cette défaillance du contrôle qualité de chaque société (y compris la société Domaines des Marins, que la qualité d'intermédiaire ne dispensait pas d'effectuer) justifie que soit retenue une part de responsabilité dans la survenance de leurs préjudices à hauteur de 30 % pour la société les Celliers du nouveau monde, de 20% pour l'UC Foncalieu et la société Domaines des Marins et de 10 % pour la société Vignerons de la Méditerranée sans qu'il y ait lieu de différencier les deux retiraisons effectuées par cette dernière.

Si la société les Celliers du nouveau monde n'a pas respecté la réglementation applicable en ne tenant pas le registre dédié (article 112 du règlement (CE) 479/2008) et n'a pas davantage effectué le traitement sous la responsabilité d'un oenologue ou d'un technicien qualifié (Codex oenologique international et règlement CE n°1234/2007), tout lien de causalité avec les désordres est exclu.

Elle a eu connaissance le 4 juin 2012 des plaintes des clients de l'UC Foncalieu, répercutant dès cette date l'information auprès de la société Agrovin et diligentant une expertise amiable par le biais du laboratoire Vect'oeur pour une déviance organoleptique, dont elle a reçu le rapport le 15 juin 2012.

L'UC Foncalieu, qui avait donc connaissance depuis fin mai/début juin 2012 de plaintes de ses clients, a également diligenté une expertise amiable par le biais du laboratoire Dubernet pour une déviance organoleptique dans le cadre d'une cellule de crise. Toutefois, même si elle a bloqué toutes les ventes en interne, y compris le vrac, alors qu'elle n'avait aucune réclamation dans cette branche, elle n'a informé téléphoniquement la société Domaines de Marins que d'une 'réserve sur la qualité des vins'. Cette dernière a alors indiqué dans un courriel en date du 11 juin 2012 qu'elle souhaitait procéder à «l'enlèvement pour une citerne, attendant pour la suite le résultat des analyses pour continuer les enlèvements', dont elle n'a jamais eu connaissance, bien que l'UC Foncalieu ait reçu le résultat de ces analyses, qui indiquait, d'ailleurs, leur nécessaire poursuite, le 12 juin 2012.

Cette rétention d'information caractérise un manquement à la loyauté qui doit présider toute relation contractuelle et si ce manquement pourrait également caractériser une faute délictuelle commise par la société les Celliers du nouveau monde, aucun élément ne permet de retenir qu'elle savait que son cocontractant n'avait pas répercuté auprès de son propre acquéreur la nature des analyses en cours de sorte que seul le comportement de l'UC Foncalieu est susceptible d'avoir générer un préjudice.

4- sur la garantie des assureurs

L'aléa consiste à la survenance d'un risque de perte ou à une chance de gain dépendant d'un événement de réalisation incertaine.

La société Agrovin n'ayant fait que mettre à la disposition de la société les Celliers du nouveau monde la machine Free K + tandis que le vin ne lui appartenait pas, la garantie applicable ne relève pas de celle concernant les dommages causés aux biens confiés à l'assuré, mais concerne sans ambiguïté l'activité déclarée au titre de la 'vente en gros d'articles de choix et de caves, de produits oenologiques et de produits d'entretien destinés aux viticulteurs', qui entre dans le champ d'application du contrat signé le 28 avril 2010, à effet au 1er mars 2010, et plus précisément dans l'activité nouvellement déclarée au titre de la 'vente d'un appareil permettant la stabilisation tartrique des vins avec essais

chez les clients' dans un avenant signé le 4 septembre 2012, prenant effet le 1er août 2012.

Toutefois, la société Agrovin ayant connaissance depuis le mois de février 2012 de difficultés dans l'utilisation de cette machine, dont elle a effectivement fait part à son courtier d'assurances, par courriels notamment du 29 mai 2012, sans que cette information ne puisse être opposée à l'assureur, qui offre, par définition, sa garantie pour l'avenir et ayant été avisée, dans le présent dossier, de désordres par la société les Celliers du nouveau monde le 4 juin 2012, sa demande de garantie à l'égard de la société Axa France pour un dommage, qui n'était pas aléatoire à la date de la souscription du contrat d'assurance, ne pourra prospérer. A ce titre d'ailleurs, la société Agrovin s'est rapprochée de son assureur pour savoir si sa nouvelle activité de vente entrait dans le champ d'application de la garantie en cours par courriers des 29 mai et 8 juin 2012, dates auxquelles lesdites difficultés devenaient de potentielles déclarations de sinistre.

La défaillance du contrôle qualité au sein de la société Domaine des Marins ne peut être assimilée à une connaissance du défaut et une action intentionnelle privant d'aléa le contrat d'assurance. Ainsi, la société Generali doit sa garantie à l'exception des frais, correspondant au coût du vin acheté et livré, qui en sont exclus et il sera fait application du plafond de garantie et de la franchise contractuels.

La société Generali sera condamnée in solidum avec son assurée au profit de la société Vignerons de la Méditerranée, à l'exclusion du montant de 14 600 euros découlant de la vente du vin vicié.

5- sur les préjudices

L'expert judiciaire a procédé à l'examen des vins présents dans les cuves de chaque société. Il a chiffré les préjudices sur la base du prix de revient et y ajouté les frais de transport ou des coûts de maintenance, les coûts de stockage, les pénalités clients et les pertes de marché.

La société Celliers du nouveau Monde sollicite la somme de 222 663 euros correspondant au montant retenu par l'expert, qui, à défaut de critiques sérieuses, sera retenu. La société Brenntag et la société Agrovin seront condamnées in solidum à payer la somme de 155 864,10 euros (222 663 euros - 30 %) avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et capitalisation de ceux-ci en application de l'article 1343-2 du code civil.

L'expert judiciaire a retenu au titre du préjudice subi par l'UC Foncalieu  un montant de 264 131 euros ou de 271 604 euros comprenant la marge sur retour.

Ce dernier montant, qui correspond à la réparation intégrale du préjudice sera retenu, à l'exclusion des frais d'analyse du laboratoire Vect'oeur à hauteur de 3 964,50 euros, qui correspondent à des frais irrépétibles. La société Brenntag et la société Agrovin seront condamnées in solidum à payer la somme de

217 283,20 euros (271 604 euros - 20 %) avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et capitalisation dans les mêmes conditions que précédement.

Concernant la facture impayée à hauteur de 21 976 euros TTC par la société Vignerons de la Méditerranée à la société Domaines des Marins, cette perte constitue le préjudice subi par cette dernière, que l'expert a retenu à hauteur de son montant hors taxe, et en l'absence d'autre élément, elle sera retenue à hauteur de 14 600 euros (18 250 euros - 20 % ), que la société Vignerons de la Méditerranée sera condamnée à payer avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et capitalisation de ceux-ci.

Les sociétés Brenntag et Agrovin, seules responsables des préjudices en bout de la chaîne de responsabilité, seront condamnées in solidum à relever et garantir la société Vignerons de la Méditerranée de cette condamnation.

Concernant son préjudice moral, la société Domaines des Marins ne démontre pas que la rétention d'information de l'UC Foncalieu a généré une perte de confiance mettant un terme définitif à leurs relations commerciales, ni une perte d'image ou de réputation envers ses propres clients, de sorte sa demande d'indemnisation à ce titre ne pourra qu'être rejetée.

L'expert judiciaire indique concernant le calcul en prix de vente sollicité par la société les Vignerons de la Méditerrnaée pour fonder sa demande d'indemnisation, qu'il ne peut être démontré documentairement une perte de chiffre d'affaire. S'il n'a effectué son calcul que sur la base des 4 461 hectolitres examinés et non des 7 861 hectolitres contaminés, il expose expressément que suite à une filtration, les vins contaminés n'ont pu être précisément raccordés au sinistre et que les opérations d'expertise n'ont permis d'identifier que 4 461 hectolitres. Par ailleurs, le mode de calcul du prix de revient effectué par l'expert judiciaire sera retenu, celui-ci étant détaillé dans son montant pour chaque conditionnement tandis que celui avancé par la société les Vignerons de la Méditerrannée ne l'étant que pour les bag in box de 5 litres. En conséquence, le préjudice de la société Vignerons de la Méditerranée sera fixé à hauteur de la somme de 316 381 euros (314 505 euros + 1 881 euros), comprenant les frais financiers sur immobilisation des stocks.

La société Brenntag, la société Agrovin et la société Domaines des Marins, in solidum avec son assureur, seront donc condamnées in solidum à verser à la société les Vignerons de la Méditerranée la somme de 284 474,90 euros

(316 381 euros - 10 % ), avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et capitalisation de ceux-ci.

Les sociétés Brenntag et Agrovin relèveront indemne in solidum pour les mêmes motifs que précédemment la société Domaines des Marins et son assureur la société Generali IARD de cette condamnation.

Le jugement entrepris sera donc réformé, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de nullité du rapport d'expertise, retenu la responsabilité des sociétés Brenntag et Agrovin par motifs non contraires à ceux du présent arrêt et, le cas échéant, par substitution de motifs et les a condamnées sous réserve de ce qu'il s'agit d'une condamnation in solidum et a retenu pour les sociétés les Celliers du nouveau monde, UC Foncalieu, Domaines des Marins et Vignerons de la Méditerranée un défaut de leur contrôle qualité.

6 - sur les autres demandes

Succombant sur leurs appels respectifs, la société Brenntag et la société Agrovin seront condamnées in solidum aux dépens et au vu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à payer la somme de 5 000 euros à chaque société vitivinicole intimée, en ce compris les frais d'analyse pour l'UC Foncalieu, ainsi que la somme de 3 000 euros à chaque société d'assurance, le surplus des demandes sur ce fondement étant rejeté.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

- Ordonne la jonction des procédures inscrites au répertoire général de la cour sous les numéros RG 17/044239 et RG 17/04794, sous le numéro RG 17/04239;

- Réforme le jugement du tribunal de commerce de Béziers du 3 juillet 2017, sauf en ce qu'il a

- dit et jugé que l'expert judiciaire a parfaitement répondu à la mission qui lui a été confié par le juge des référés et qu'il a bien respecté le principe du contradictoire,

- constaté que l'origine des désordres subis par les vins est la présence de la molécule 2-bromo-cresol, dite 2 BpC, dans l'acide chlorhydrique technique vendu par la SA Brenntag et utilisé par la SAS Agrovin France pour la régénération des résines saturées en potassium. lors du traitement des vins par cette dernière,

- dit et jugé que la SA Brenntag a engagé sa responsabilité au titre de sa garantie légale des vices cachés,

- dit et jugé que la SA Brenntag. a engagé se responsabilité sur le fondement des anciens articles 1382 et 1383 du code civil,

-dit et jugé que la SAS Agrovin France a engagé sa responsabilité civile sur le fondement des articles anciens 1382 et 1383 du code civil.

- dit et jugé que la SCA les Celliers du nouveau monde a manqué à son obligation de la garantie des vices cachés,

- dit et jugé que la société les Domaines des Marins a engagé sa responsabilité sur le fondement de l'article 1641 du code civil,

- dit et jugé que l'Union de coopératives Foncalieu a manqué à son obligation de la garantie des vices cachés,

- dit et jugé que les sociétés qui se prévalent d'un préjudice de par leur attitude ont contribué à ce dernier,

-

pour la société Coopérative agricole les Celliers du nouveau monde, retient que cette société a subi un préjudice de 222 663 euros,

- dit qu'il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné les sociétés Brenntag et Agrovin France à payer les entiers dépens (...), qui comprendront les frais d'expertise,

Statuant à nouveau,

Dit n'y avoir lieu à homologuer le rapport d'expertise judiciaire ;

Dit que la SA Brenntag est tenue de la garantie des vices cachés de l'acide chlorydrique vendu et a manqué à son obligation d'information en qualité de vendeur ;

Dit que la SAS Agrovin a commis des négligences graves, constitutives de fautes délictuelles ;

Dit que dans leurs rapports entre elles, la SA Brenntag est responsable à hauteur de 70 % et la SAS Agrovin à hauteur de 30 % ;

Rejette l'appel en garantie formé par la SAS Agrovin à l'encontre de la société SA Brenntag ;

Rejette la demande de garantie formée par la SAS Agrovin à l'égard de la SA Axa France IARD ;

Dit que la société coopérative les Celliers du nouveau monde est tenue de la garantie des vices cachés du vin traité vendu ;

Dit que l'union des coopératives agricoles Foncalieu est tenue de la garantie des vices cachés du vin traité vendu ;

Rejette la demande de l'union des coopératives agricoles Foncalieu fondée sur la clause limitative de responsabilité figurant dans les conditions générales de

vente ;

Dit que la SAS Domaine des Marins est tenue de la garantie des vices cachés du vin traité vendu ;

Dit que la société coopérative les Celliers du nouveau monde a contribué à son propre préjudice à hauteur de 30 % ;

Dit que l'union des coopératives agricoles Foncalieu a contribué à son propre préjudice à hauteur de 20 % ;

Dit que la SAS Domaines des Marins a contribué à son propre préjudice à hauteur de 20 % ;

Dit que la SAS Vignerons de la Méditerranée a contribué à son propre préjudice à hauteur de 10 %;

Condamne in solidum la SA Brenntag et la SAS Agrovin à payer à la société coopérative les Celliers du nouveau monde la somme de 155 864,10 euros, déduction faite de la part de responsabilité à hauteur de 30 %, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et capitalisation conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

Condamne in solidum la SA Brenntag et la SAS Agrovin à payer à l'union des coopératives agricoles Foncalieu la somme de 217 283,20 euros, déduction faite de la part de responsabilité à hauteur de 20 %, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et capitalisation conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

Condamne la SAS Vignerons de la Méditerranée à payer à la SAS Domaine des Marins la somme de 14 600 euros, déduction faite de la part de responsabilité à hauteur de 20 %, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et capitalisation conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

Condamne in solidum la SA Brenntag et la SAS Agrovin à relever et garantir la SAS Vignerons de la Méditerranée de cette condamnation prononcée au profit de la SAS Domaine des Marins ;

Rejette la demande d'indemnisation d'un préjudice moral formée par la SAS Domaines des Marins ;

Condamne in solidum la SA Brenntag, la SAS Agrovin, la SAS Domaines des Marins, in solidum avec son assureur, la SA Generali IARD, à payer à la SAS Vignerons de la Méditerranée la somme de 284 474,90 euros, déduction faite de la part de responsabilité à hauteur de 10 %, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et capitalisation conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

Dit que la garantie de la SA Generali IARD à l'égard de son assurée, la SAS Domaines des Marins, ne couvre pas le montant de 14 600 euros et s'appliquera dans la limite du plafond de garantie et de la franchise contractuels ;

Condamne in solidum la SA Brenntag et la SAS Agrovin à relever et garantir la SAS Domaines des Marins et la SA Generali IARD de cette condamnation prononcée au profit de la SAS Vignerons de la Méditerranée ;

Condamne in solidum la SA Brenntag et la SAS Agrovin à payer à la société coopérative les Celliers du nouveau monde, l'union des coopératives agricoles Foncalieu, la SAS Domaine des Marins et la SAS Vignerons de la Méditerranée la somme de 5 000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum la SA Brenntag et la SAS Agrovin à payer à la SA Axa France IARD et à la SA General IARD la somme de 3 000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette le surplus des demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum la SA Brenntag et la SAS Agrovin aux dépens d'appel.

le greffierle président

A-C B.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17/04239
Date de la décision : 17/11/2020

Références :

Cour d'appel de Montpellier 02, arrêt n°17/04239 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-11-17;17.04239 ?
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