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délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
Chambre commerciale
ARRET DU 22 MAI 2020
(Dossier 17/5623 joint au dossier 17/5394)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/05394 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NLIX
Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 SEPTEMBRE 2017
TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER
N° RG 2016016328
APPELANTE :
S.A. DT SIGNS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentée par la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assisté de Me Sophie de LA BRIÈRE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
SA FOIR'FOUILLE
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Frédéric DABIENS de l'AARPI DABIENS, KALCZYNSKI, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Elodie AMBLOT, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEES :
SA FOIR'FOUILLE
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Frédéric DABIENS de l'AARPI DABIENS, KALCZYNSKI, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Elodie AMBLOT, avocat au barreau de MONTPELLIER
S.A DECO ADER représenté par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social
[Adresse 12]
[Adresse 12]
[Localité 5]
Représentée par la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assisté de Me Rodolphe PIRET, avocat au barreau de DOUAI, avocat plaidant
S.A. DT SIGNS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentée par la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assisté de Me Sophie de LA BRIÈRE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
ORDONNANCE DE CLOTURE DU 11 Février 2020
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 MARS 2020, en audience publique, Madame Anne-Claire BOURDON, conseiller ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du même code, devant la cour composée de :
Monsieur Jean-Luc PROUZAT, président de chambre
Madame Anne-Claire BOURDON, conseiller
Madame Marianne ROCHETTE, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Madame Hélène ALBESA
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, président de chambre, et par Madame Hélène ALBESA, greffier.
Le délibéré, initialement prévu le 7 avril 2020 a été prorogé au 22 mai 2020.
FAITS, PROCEDURE - PRETENTIONS ET MOYENS DES
PARTIES :
La SA la Foir Fouille anime un réseau de distribution de produits d'équipements pour la maison, notamment en franchise, sous l'enseigne la Foir'Fouille.
La SA DT Signs a pour activité principale la conception, la fabrication, l'installation et la maintenance d'enseignes et signalétiques.
Sur demande de la société la Foir Fouille relative à la réalisation d'une frise destinée à être apposée sur la façade des magasins, la société DT Signs lui a proposé, par le biais de plusieurs devis, la fourniture et la pose de panneaux composites sérigraphiés selon trois motifs bayadère d'une durabilité de cinq années.
La société DT Signs a sous-traité à la SA Déco Ader la mise en impression couleur des panneaux.
Les panneaux ont été installés et un ternissement prématuré de ceux-ci a été constaté.
Par arrêt du 10 juillet 2014, la cour d'appel de Douai, infirmant une ordonnance de référé du président du tribunal de commerce d'Arras du 18 février 2014, a ordonné une mesure d'expertise visant, principalement, à déterminer les désordres affectant les panneaux du magasin la Foir'Fouille situé à [Adresse 14].
L'expert judiciaire désigné a terminé ses opérations d'expertise le 18 février 2015 après le rejet, par une ordonnance de référé du président du tribunal de commerce d'Arras du 17 février 2015, de la demande d'extension des opérations d'expertise à soixante-douze autres sites «en raison de l'absence de constat des désordres constatés».
Par ordonnance du 8 octobre 2015, le président du tribunal de commerce de Montpellier, statuant en référé, a ordonné une nouvelle mesure d'expertise confiée au même expert judiciaire afin, principalement, de déterminer les désordres affectant soixante-douze magasins de la société la Foir Fouille et condamné solidairement par provision les sociétés DT Signs et Déco Ader à verser à cette dernière la somme de 13'604,40 euros en réparation du préjudice subi par le premier magasin.
L'expert judiciaire a terminé ses opérations d'expertise le 25 juin 2016.
Saisi par acte d'huissier du 28 novembre 2016 par la société la Foir Fouille aux fins d'indemnisation, le tribunal de commerce de Montpellier a, par jugement du 20 septembre 2017,
«- (...) homologué le rapport d'expertise de Monsieur [I] du 25 juin 2016 au titre du principe de responsabilité contractuelle de la société DT Signs et Déco Ader ;
- condamné solidairement les sociétés DT Signs et Déco Ader à payer à la Foir Fouille la somme de :
- 248 056,18 euros au titre du coût de la réfection des bandeaux bayadères pour les 78 magasins recensés par l'expertise judiciaire ;
- 26 036,62 euros au titre des frais des constats d'huissiers ;
- dit qu'il y a lieu à applícation des dispositions des articles 1254 et 1154 du code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, alors applicable ;
- débouté les sociétés DT Signs et Déco Ader de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
- condamné solidairement les sociétés DT Signs et Déco Ader à payer à la société la Foir Fouille la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit qu'il n'y a pas lieu à l'exécution provisoire du présent jugement ;
- condamné solidairement les sociétés DT Signs et Déco Ader aux entiers dépens (...).»
Par déclaration reçue le 17 octobre 2017, la société DT Signs a régulièrement relevé appel de ce jugement (RG n°17/05394).
Par déclaration reçue le 30 octobre 2017, la société la Foir Fouille a également relevé régulièrement appel de ce jugement (RG n°17/5623).
La société DT Signs demande à la cour, en l'état de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 25 avril 2018 dans les dossiers
n°RG 17 /5394 et RG n°17/5623, de
«- (...) dire et juger recevable et bien fondé son appel et son appel incident,
- confirmer le jugement (...) en ce qu'il a :
- rejeté la demande de la société Déco Ader tendant à être garantie par elle des condamnations à intervenir à son encontre,
- retenu que la société Foir Fouille ne pouvait prétendre à l'indemnisation que des 78 magasins ayant fait l'objet des investigations de l'expert judiciaire, à l'exclusion des demandes indemnitaires portant sur les 5 autres magasins n'ayant pas fait 1'objet d'investigations contradictoires,
- retenu que le coût de reprise des désordres par magasin se chiffrait à la somme de 2 150 euros HT de frais de nacelle + 15,78 euros par ml de bandeau à reprendre,
- infirmer le jugement dont appel pour le surplus et, statuant à nouveau,
- dire et juger que la société Déco Ader a engagé sa responsabilité contractuelle à son égard et après avoir limité le préjudice indemnisable du franchiseur à la somme, à titre principal, de 179 480,89 euros HT ou, à titre subsidiaire, de 243 287,91 euros, condamner la société Déco Ader à la garantir de toutes condamnations susceptibles d'intervenir à son encontre sur l'action engagée par la société Foir Fouille,
- recevant la concluante en sa demande reconventionnelle, la déclarant bien fondée et y faisant droit, condamner la S.A. Déco Ader à lui payer les sommes de :
- 6 802,20 euros en remboursement de l'indemnité provisionnelle acquittée au titre du magasin de [Localité 15],
- 333 368 euros en réparation de son préjudice commercial,
- 8 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonner la capitalisation des intérêts pour chaque année entière et consécutive, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil,
- débouter la S.A. Déco Ader de toutes ses demandes, fins et conclusions en ce qu'elles sont dirigées à son encontre et la condamner enfin, en tous les frais et dépens de première instance et d'appel incluant les frais d'expertise,
- débouter la société Foir Fouille de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.»
Au soutien de ses appels principal et incident, elle fait essentiellement valoir que
- en sa qualité de contractante directe de la société la Foir Fouille, elle doit supporter la réparation du préjudice tiré des désordres affectant les bandeaux,
- toutefois, elle conteste toute responsabilité ; la société Déco Ader, spécialiste en matière d'impression et choisie à ce titre, supportant à son égard une obligation contractuelle de résultat,
- la société Déco Ader n'invoque aucune faute contractuelle ou délictuelle à l'appui de sa demande de garantie,
- elle n'a fait que répercuter auprès de son propre cocontractant la garantie de cinq années, promise par son sous-traitant (courriel du 15 juillet 2010),
- la société Déco Ader a méconnu son obligation de conseil à son égard,
- les commandes ont toutes été prises dans le cadre de la demande originelle de prix avec un «usage extérieur toute France» et une demande de «garantie de l'impression»,
- les demandes indemnitaires ne peuvent concerner que les soixante-dix-huit magasins ayant fait l'objet de l'expertise et aucun magasin supplémentaire,
- pour vingt-trois magasins, l'indemnisation doit être exclue au regard d'un manque d'entretien ou de constats d'huissier inexploitables,
- elle a perdu la clientèle de la Foir Fouille, qui représentait un chiffre d'affaires important.
Formant appel incident, la SA Déco Ader sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 6 février 2020 dans les dossiers n° RG 17/5394 et 17/5623,
«- (...) dire et juger l'ensemble de ses demandes recevable et bien fondé,
- à titre principal , infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a retenu sa responsabilité pour les dommages allégués par la société Foir'Fouille et statuant à nouveau, débouter la société la Foir'Fouille de l'intégralité de ses demandes formées à son encontre et à titre subsidiaire, confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a réduit le quantum du préjudice allégué par la société Foir'Fouille, sous réserve de l'imputabilité des dommages à la prestation litigieuse et débouter la société Foir'Fouille du surplus de ses demandes,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes formées à l'encontre de la société DT Signs et statuant à nouveau, condamner la société DT Signs à la garantir de l'intégralité des condamnations qui seront prononcées à son encontre et condamner la société DT Signs à lui payer la somme de 6 802,20 euros,
- sur les demandes formées par la société DT Signs, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes,
- en tout état de cause, condamner in solidum la société la Foir'Fouille et la société DT Signs à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à prendre en charge les entiers dépens.»
Elle expose en substance que
- aucun contrat ne la lie à la société la Foir Fouille, à laquelle il appartient de rapporter l'existence d'une faute délictuelle,
- la société DT Signs, qui est un spécialiste dans son domaine d'activité, s'est engagée (devis du 16 septembre 2010) pour une garantie de durabilité de 5 années avant sa propre proposition commerciale (9 février 2011) et a reconnu sa responsabilité envers la société la Foir Fouille,
- la société DT Signs ne lui a jamais fourni de cahier des charges précis avec la destination finale des panneaux et ne s'est pas inquiétée des caractéristiques des panneaux sur lesquels l'impression a été réalisée (aucun test de vieillissement des panneaux n'a été produit, ni les conditions d'entretien desdits panneaux),
- le préjudice n'est pas rapporté (ternissement non établi, manque d'entretien...) et ne peut concerner les magasins ajoutés, ni les panneaux posés en 2013 (date à compter de laquelle la société DT Signs s'est adressée à un concurrent), il sera, le cas échéant, calculé sur la base de son propre chiffrage,
- le préjudice commercial de la société DT Signs n'est pas établi.
La SA la Foir Fouille sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 10 février 2020 dans les dossiers RG n°17/5394 et RG n°17/5623
«- (...) dire et juger recevable et bien fondé ses appels principal et incident,
- réformer le jugement (...) en ce qu'il a :
- limité dans son quantum la condamnation solidaire des sociétés DT Signs et Déco Ader à payer à la société Foir Fouille la somme de 248 056,18 euros au titre du coût de la réfection des bandeaux bayadères pour les 78 magasins recensés par l'expertise judiciaire.
- retenu que le coût de reprise des désordres par magasin se chiffrait à la somme de 2 150 euros HT de frais de nacelle et 15,78 euros par mètre linéaire de bandeaux bayadères à reprendre,
- limité la condamnation solidaire des sociétés DT Signs et Déco Ader à l'indemniser pour 78 magasins exploitant sous l'enseigne la Foir Fouille concernés par les désordres, en excluant du périmètre d'indemnisation 6 magasins supplémentaires exploitant sous l'enseigne la Foir Fouille et concernés par les désordres
- dit qu'il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire du jugement,
- le confirmer pour le surplus (...) :
- homologuer le rapport d'expertise de Monsieur [I] du 25 juin 2016 au titre du principe de responsabilité contractuelle des sociétés Déco Ader et la société DT Signs ainsi qu'au titre de la méthode d'évaluation des préjudices,
- donner acte à la société DT Signs qu'elle ne conteste pas sa responsabilité contractuelle au titre des désordres objet de l'expertise judiciaire diligentée par Monsieur [I],
- débouter les sociétés Déco Ader et DT Signs de toutes leurs contestations relatives aux demandes d'indemnisations formulées (...),
- condamner in solidum les sociétés Déco Ader et DT Signs à lui verser la somme de 346 706,91 euros HT au titre de la réfection des bandeaux bayadères pour les 85 magasins exploitant sous l'enseigne la Foir Fouille concernés par les désordres objet de l'expertise judiciaire
- condamner solidairement les sociétés Déco Ader et la société DT Signs à lui verser la somme de 26 360,71 euros TTC au titre des frais de constats
d'huissier réalisés
- dire et juger que toute somme versée par le requis sur les montants réclamés ci-dessus s'imputeront tout d'abord sur les intérêts dus si le règlement n'est pas intégral,
-vu les dispositions de l'article 1342-2 du code civil, dire et juger qu'il sera fait application de la règle de l'anatocisme,
- dire et juger que sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, le requis sera tenu de procéder au remboursement de toutes sommes qui pourraient être à sa charge en application du décret 2001-212 du 8 mars 2001, modifiant le décret 96-1080 du 12 décembre 1996 portant fixation du tarif des huissiers de justice (...),
- condamner solidairement les sociétés Déco Ader et la société DT Signs à lui verser la somme de 5 000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec distraction pour ceux d'appel,
- débouter les sociétés Déco Ader et DT Signs de toutes leurs demandes, fins et prétentions à l'encontre de la société la Foir Fouille SA au titre de leur appel incident.»
Elle expose en substance que
- les désordres relèvent d'une non-conformité aux règles de l'art et d'une exécution défectueuse (aucun renseignement préalable sur le support et la destination pour le sous-traitant et aucune interrogation sur les encres utilisées pour le cocontractant),
- la responsabilité contractuelle de la société Déco Ader est engagée,
- les panneaux doivent être remplacés conformément à l'évaluation fournie par la société DT Signs et ne peuvent être réparés,
- quatre-vingt-cinq magasins sont concernés par les désordres constatés par l'expert et les procès-verbaux d'huissier en attestant ont été soumis au débat contradictoire, l'expert judiciaire n'a lui-même opéré aucun retranchement retenant soixante-dix-huit magasins.
Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
C'est en l'état que l'instruction de chaque dossier a été clôturée par ordonnance du 11 février 2020.
MOTIFS de la DECISION :
1- Les appels formalisés par la société DT Signs et la société la Foir Fouille, respectivement les 17 octobre et 30 octobre 2017, portent sur le même jugement et concernent les mêmes parties, de sorte qu'il convient de prononcer leur jonction, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice sous le numéro d'enregistrement au répertoire général de la cour le plus ancien, soit le numéro RG 17/05394.
2- Le rapport d'expertise judiciaire, en date du 25'juin 2016, constate que l'ensemble des procès-verbaux de constat d'huissier relève un ternissement des panneaux portant le motif bayadère, avec une décoloration plus accentuée pour certaines couleurs (vert, rose et orange) et pour les panneaux non protégés par un abri. Il considère que ces dommages présentent un caractère esthétique pouvant nuire à la crédibilité de l'enseigne la Foir' fouille.
Il conclut que ces désordres relèvent d'une non-conformité aux règles de l'art et d'une exécution défectueuse imputable à la société Déco Ader qui, avant de procéder à l'impression numérique, ne s'est pas renseignée sur le support des impressions, ne s'est pas fait confirmer la destination finale extérieure (destination figurant dans la demande de devis de la société DT Signs du 17 août 2010 : « usage extérieur») des panneaux à imprimer et n'a pas recherché l'exposition future par rapport au rayonnement solaire des panneaux pour une pose éventuelle d'un vernis protecteur au regard, notamment, de la garantie des encres utilisées (limitée à deux années) qui recommande une telle application.
Il conclut également que la société DT Signs ne s'est pas assurée du respect par son fournisseur des prescriptions des fiches techniques des encres utilisées, qui ne garantissaient une impression que pendant deux ans en extérieur, à condition d'avoir été réalisée conformément aux recommandations.
L'expert judiciaires ne s'est pas rendu dans l'ensemble des magasins soumis aux opérations d'expertise, ayant donné son avis sur chaque procès-verbal de constat d'huissier, qui lui a été produit.
S'il relève que certains procès-verbaux de constat sont difficilement exploitables il retient pour l'ensemble des magasins, en ce compris les vingt-trois magasins pointés par les sociétés DT signs et Déco Ader, ayant fait l'objet d'un tel constat, l'existence de désordres et chiffre ces désordres pour l'ensemble des soixante-dix-huit magasins, n'ayant donc exclu aucun magasin.
Les sept procès-verbaux de constat d'huissier supplémentaires(pour lesquels les missions confiées sont identiques à celles figurant dans les constats soumis à l'expert judiciaire) versés contradictoirement aux débats, qui concernent des magasins situés à [Localité 10] (24), [Localité 9] (72), [Localité 13] (77), [Localité 21] (57), [Localité 20] (50), [Localité 11] (62 ) et [Localité 19] (50), montrent que les panneaux comportant le motif bayadère de ces magasins présentent également un ternissement des
couleurs ; ils seront donc retenus au titre du dommage subi par la société la Foir Fouille.
L'expert judiciaire expose que les travaux de reprise ne peuvent donner lieu à une réparation, mais à un remplacement sur les indications mêmes de la société Déco Ader à l'occasion des opérations de la première expertise. Il a ainsi exclu la solution de pose d'adhésifs au regard du caractère imprécis de cette solution quant à la garantie réelle («solution susceptible d'être garantie cinq ans, pour quel climat '...»), quant à sa qualité («meilleure qualité en comparaison de quoi '»), quant au nettoyage (non explicité) et à la pose au regard, notamment, des emplacements existants (écrous saillants, angles des façades ...) pour lesquels aucune explication n'est fournie.
Il a évalué, en tenant compte du prix de base, soit 53,99 euros HT, le coût du remplacement à la somme de 63 euros HT le mètre linéaire comprenant, au vu de l'estimation effectuée par la société DT Signs en mars et mai 2016, le prix du matériau, l'impression, le transport des matériaux vers l'imprimeur et sur les points de pose, la dépose des éléments existants, la pose des nouveaux panneaux, une nacelle si besoin, les cornières d'angle et la visserie.
Au regard de la critique circonstanciée faite par l'expert judiciaire de la solution tenant à la réparation des panneaux, il convient de considérer que la réparation intégrale du préjudice subi par la société la Foir Fouille ne peut être assurée que par leur remplacement.
L'expert judiciaire a chiffré le préjudice à hauteur de la somme de
320 813, 91 euros HT. Les sept nouveaux magasins représentent 411 mètres linéaires supplémentaires, soit la somme de 25 893 euros HT. Ainsi, le coût des travaux de reprise sera fixé à la somme de 346 706,91 euros HT.
La société la Foir Fouille justifie du coût de l'ensemble des procès-verbaux de constat d'huissier qu'elle a dû établir dans le cadre de la présente procédure à hauteur de la somme de 26'360,71 euros (en ce compris les derniers magasins) et ce montant sera également retenu.
4- Les commandes de la société la Foir Fouille se sont concrétisées par des devis acceptées, puis facturés magasin par magasin. La société DT Signs a elle-même sollicité les travaux d'impression auprès de la société Déco Ader dans le cadre de huit commandes groupées étalées dans le temps tandis que la société Déco Ader a produit elle-même un lot de trois offres.
Ainsi, par courriel des 13 juillet 2010 et 17 août 2010, la société DT Signs a formé des demandes de prix auprès de la société Déco Ader concernant l'impression de panneaux pour laquelle il était précisé «usage extérieur», «usage extérieur toute France» et « nous fournir la garantie de l'impression». Dès le 15 juillet 2010, la société Déco Ader lui faisait parvenir une offre de prix mentionnant une impression «garantie 5 ans », durée qu'elle a sans cesse réitérée par la suite.
Si la société Déco Ader conteste sa responsabilité concernant l'installation de panneaux dans le courant de l'année 2013, elle ne justifie nullement ne pas être à l'origine de l'impression des panneaux installés dans les magasins situés à [Localité 13], [Localité 18], [Localité 17], [Localité 8], [Localité 16], [Localité 6] et [Localité 7] pour lesquels des désordres ont été contastés, au regard du groupage des commandes d'impression et de la livraison desdits panneaux à un endroit unique, à savoir les locaux de la société DT Signs, la pose étant réalisée à une date indépendante de l'impression et la société la Foir Fouille ayant, à ce titre, sommé la société DT Signs, dans un courrier du 14 novembre 2014, de cesser de «continuer à poser le stock restant de bayadères défectueuses».
Selon la société Déco Ader, les panneaux Dilite fournis par la société DT Signs n'étaient garantis que deux années. L'expert judiciaire n'a pas retenu cette argumentation considérant que le débat relatif au partage de responsabilité entre celle-ci et son cocontractant ne le concernait pas. En tout état de cause, la cause des désordres est étrangère à la nature et à la qualité du support et aucune responsabilité de la société DT Signs à ce titre ne pourra être retenue.
Les sociétés DT Signs et Déco Ader sont toutes deux des professionnels. Toutefois, la société Déco Ader est un professionnel spécialisé dans les travaux d'impression et devait, au titre des travaux qui lui ont été confiés, déterminer la durée de leur garantie. La durée limitée de la garantie concernant les encres utilisées, dont aucun élément ne permet de retenir que la société DT Signs avait connaissance, relevait donc de sa seule prestation de sorte qu'aucune faute de la société DT Signs de ce fait ne pourra être retenue. À ce titre, d'ailleurs dans le cadre du premier rapport d'expertise du 18 février 2015, l'expert judiciaire a pu exposer que la société Déco Ader avait indiqué que les fiches techniques des encres utilisées n'étaient pas en sa possession et constater que cette dernière n'avait jamais fait mention des conditions de garantie ou des recommandations d'utilisation de ses encres dans le cadre de ses offres de prix.
La responsabilité contractuelle de la société DT Signs à l'encontre de la société la Foir Fouille est engagée en ce que celle-ci a failli à ses obligations contractuelles de garantie des matériaux qu'elle lui a vendus et installés.
Aucune relation contractuelle ne lie la société la Foir Fouille et la société Déco Ader. Toutefois, le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, le manquement commis par l'un des cocontractants dans l'exécution de ses obligations contractuelles.
Dans le cadre du contrat de prestation de services liant la société DT Signs et la société Déco Ader, cette dernière a failli à ses obligations contractuelles, relevant d'une obligation de résultat, tenant au choix d'encres adaptées aux travaux sollicités et une impression conforme aux règles de l'art. Ces
manquements contractuels sont à l'origine de la décoloration des panneaux qu'elle a sérigraphiés.
En conséquence, la société DT Signs et la société Déco Ader sont toutes deux responsables des préjudices subis par la société la Foir Fouille et seront condamnées in solidum à l'indemniser sur les fondements juridiques sus-énoncés à hauteur des sommes de 346 706,91 euros au titre de la reprise des désordres et de 26'360,71 euros au titre du coût des procès-verbaux de constat d'huissier.
L'absence de toute responsabilité de la société DT Signs justifie la demande de garantie formée par celle-ci à l'encontre de la société Déco Ader de l'intégralité des condamnations prononcées, y compris la condamnation prononcée à titre provisionnel par une ordonnance de référé rendu le 8 octobre 2015 au titre de laquelle la somme de 6 802,20 euros (qu'elle a d'ores et déjà versée selon un courrier de son conseil en date du 2 mars 2016) devra lui être remboursée tandis que la demande de garantie formée par la société Déco Ader ne pourra qu'être rejetée.
Le jugement sera ainsi confirmé quant à la condamnation des deux sociétés prestataires, sous réserve de la substitution du fondement juridique de la responsabilité retenue pour la société Déco Ader et de celle du terme in solidum en lieu et place du terme solidairement dans le prononcé de cette condamnation et en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Déco Ader à l'encontre de la société DT Signs.
Il sera par ailleurs réformé en ce qu'il a rejeté la demande de garantie et de remboursement formée par la société DT Signs à l'encontre de la société Déco Ader.
5- La société DT Signs soutient avoir perdu la clientèle de la société la Foir Fouille depuis 2013 celle-ci s'étant adressée à un autre fournisseur d'enseignes. Elle produit à l'appui de sa demande deux tableaux qu'elle a elle-même établis, sans la moindre pièce comptable l'étayant. Elle ne justifie pas davantage du développement futur du réseau de la société la Foir Fouille, qui démontrerait une quelconque perte de marché. Au demeurant, la diminution du chiffre d'affaires qu'elle allègue ne correspond pas à une perte de clientèle, mais seulement à une réduction de l'activité entre ces deux sociétés, étant précisé qu'il n'est pas contesté que l'essentiel des magasins du réseau la Foir Fouille a été équipé des panneaux bayadère entre 2012 et 2013, exercices lors desquels ledit chiffre d'affaires est le plus élevé. Dès lors, sa demande d'indemnisation au titre d'un préjudice commercial à l'égard de la société Déco Ader sera rejetée et le jugement sera confirmé.
6- Par ailleurs, la demande de la société la Foir Fouille relative à l'application de l'article 1254 (devenu 1343-1) du code civil, dans sa rédaction applicable aux faits, ne tendant qu'à reprendre ces dispositions, elle apparaît sans objet et le jugement sera complété à ce titre.
7- Succombant principalement, la société DT Signs et la société Déco Ader seront condamnées in solidum aux dépens et au vu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à payer à la société la Foir Fouille la somme globale de 3 000 euros.
La société Déco Ader sera pour sa part également condamnée à verser la somme de 1 500 euros à la société DT Signs, sa propre demande sur ce fondement étant rejetée.
8- Le droit proportionnel, fixé par l'article A. 444-32 du code de commerce (ancien article 10 du décret n° 96-1080 du 12 décembre 1996) reste à la charge du créancier, sauf lorsque la dette est due par un contrefacteur (article R. 444-55 du même code) ou un professionnel (article R. 631-4 du code de la consommation) sans qu'aucune autre dérogation ne soit prévue, la demande de la société la Foir Fouille tendant à ce qu'il soit dérogé aux dispositions régissant les charges de frais d'huissier de justice sera donc rejetée.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire
- Ordonne la jonction des procédures inscrites au répertoire général de la cour sous les numéros RG 17/05394 et RG 17/05623, sous le numéro
RG 17/05394 ;
- Réforme le jugement du tribunal de commerce de Montpellier en date du 20 septembre 2017, mais seulement en ce qu'il a condamné solidairement les sociétés DT Signs et Déco Ader à payer à la société la Foir Fouille la somme de 248 056,18 euros au titre du coût de la réfection des bandeaux bayadères pour les soixante-dix huit magasins recensés par l'expertise judiciaire et de
26 036,62 euros au titre des frais des constats d'huissiers et a débouté la société DT Signs de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
Statuant à nouveau de ces chefs,
- Condamne in solidum la SA DT Signs et la SA Déco Ader à payer à la SA la Foir Fouille la somme de 346 706,91 euros HT au titre du coût de la réfection des panneaux au motif bayadère pour quatre vingt cinq magasins et de 26 360,71 euros au titre du coût des procès-verbaux de constat
d'huissier ;
- Condamne la SA Déco Ader à relever et garantir la SA DT Signs de l'intégralité des condamnations prononcées au profit de la SA la Foir Fouille, en ce compris celles prononcées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et au titre des dépens en première instance et en appel ;
- Condamne, en conséquence, la SA Déco Ader à rembourser à la SA DT Signs la somme de 6 802,20 euros correspondant à la condamnation solidaire prononcée par une ordonnance de référé rendue le 8 octobre 2015 par le président du tribunal de commerce de Montpellier ;
- Rejette la demande de dommages- intérêts formée par la SA DT Signs au titre d'un préjudice commercial ;
- Confirme le jugement entrepris dans le surplus de ses dispositions, sauf à préciser que la condamnation des SA DT Signs et SA Déco Ader prononcée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et au titre des dépens est une condamnation in solidum et non solidaire ;
Y ajoutant,
- Dit que la demande de la SA la Foir Fouille tendant à l'application des dispositions de l'article 1254 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, est sans objet ;
- Condamne in solidum la SA DT Signs et la SA Déco Ader à payer à la SA la Foir Fouille la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamne la SA Déco Ader à payer à la SA DT Signs la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Rejette le surplus des demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Rejette la demande de la SA Foir Fouille relative à l'application du «décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 (tarif des huissiers)» ;
- Condamne in solidum la SA DT Signs et la SA Déco Ader aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.
Le greffier Le président
A.C.B.