Grosse + copie
délivrées le
à
2° chambre
ARRÊT DU 11 Février 2020
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/05296 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OIVN
ARRÊT n°
Décision déférée à la Cour : Arrêt du 02 AVRIL 2019 COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
N° RG17/01880
APPELANTE :
Société TRADALL
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 5]
Représentant : Me Christine AUCHE HEDOU de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant
Assistée de Me VASSEUR, avocat au barreau de Haute-Seine, avocat plaidant
INTIMES :
Monsieur LE RECEVEUR REGIONAL DES DOUANES DE [Localité 9]
[Adresse 2]
[Localité 9]
Représentant : Me Anne-Claire MOYEN NEVOUET de la SELARL URBINO ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS,
DIRECTION REGIONALE DES DOUANES ET DROITS INDIRECTS DE MONTP
[Adresse 4]
[Localité 9]
Représentant : Me Anne-Claire MOYEN NEVOUET de la SELARL URBINO ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS
INTERVENANTE:
Société SAS TRANSPORTS [Z] [I]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentant : Me CITRON, avocat au barreau de PARIS
En application de l'article 937 du code de procédure civile, les parties ont été convoquées à l'audience.
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 19 DECEMBRE 2019, en audience publique, Madame Anne-Claire BOURDON ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du même code, devant la Cour composée de :
Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre
Mme Anne-Claire BOURDON, Conseiller
Mme Marianne ROCHETTE, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Madame Sylvia TORRES
ARRÊT :
- Contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, et par Madame Hélène ALBESA, Greffier.
FAITS, PROCEDURE - PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
La société Tradall SA est une société anonyme de droit suisse appartenant au groupe Bacardi International Limited (BIL).
Elle fabrique en Suisse pour le compte de cette société dans le cadre d'un contrat de travail à façon des extraits aromatiques destinés à être incorporés dans des boissons alcoolisées produites en France.
Elle bénéficie en Suisse pour la fabrication de ces extraits aromatiques d'un régime douanier de perfectionnement actif, qui permet l'importation de marchandises en Suisse pour ouvraison ou transformation en franchise de droits de douane.
La société BIL, propriétaire des extraits aromatiques, les vend une fois le façonnage réalisé à la société Tradall ; ces ventes sont soumises à la TVA suisse.
Ces extraits aromatiques achetés par la société Tradall sont expédiés en France (sur les sites de [Localité 6] et de [Localité 8]) dans le cadre d'un transfert de stock, assimilé à une exportation depuis la Suisse vers la société Bacardi Martini Production, qui fabrique, pour le compte de la société Tradall, les boissons finales. Ce transfert de stock est accompagné d'une facture pro forma.
Le 18 octobre 2013, le service régional d'enquête (SRE) de la direction régionale des douanes et des droits indirects de [Localité 9] a initié un contrôle sur les flux d'importation et d'exportation en France de la société Tradall à compter du 18 octobre 2010 en se rendant dans les locaux de la société Bacardi Martini Production à [Localité 6].
La procédure de contrôle a pris fin le 14 avril 2015 lors de la notification à la société Tradall d'une infraction de «fausse déclaration de valeur sur des marchandises importées», correspondant à la TVA à l'importation supplémentaire, dont aurait dû s'acquitter la société Tradall, au titre du montant de la TVA suisse à inclure dans la valeur en douane.
Un avis de mise en recouvrement (AMR) n° 903/15/209 a été émis le 27 avril 2015 pour un montant de 3 751 490 euros, qui a été contesté par la société Tradall par courrier en date du 29 mai 2015 avec mise en place d'une garantie bancaire.
Par courrier du 21 décembre 2015, reçu le 29 décembre 2015, la Direction régionale des douanes et droits indirects a rejeté la demande d'annulation de l'avis de mise en recouvrement.
Par acte d'huissier du 22 février 2016, la société Tradall a assigné la Direction régionale des douanes et droits indirects devant le tribunal de grande instance de Montpellier aux fins d'annulation de l'avis de mise en recouvrement n° 903/15/209 du 27 avril 2015.
Par jugement du 7 février 2017, ce tribunal a :
- débouté la société de droit suisse Tradall SA de l'ensemble de ses demandes,
- déclaré l'avis de mise en recouvrement n° 903/15/209 valide pour un montant de
3 751 490 euros,
- condamné la société de droit suisse Tradall SA à payer à l'administration française des douanes un montant de 3 000 euros en indemnisation de ses frais irrépétibles,
- rappelé n'y avoir lieu à dépens.
Le tribunal a considéré que les droits de la défense avaient été respectés, que la méthode de détermination, retenue par l'administration douanière, est claire depuis l'origine, à savoir la valeur transactionnelle, et que la société Tradall ne rapporte pas la preuve exigée par les dispositions applicables.
Par déclaration reçue le 30 mars 2017, la société de droit suisse Tradall SA a régulièrement relevé appel de ce jugement.
Par arrêt de cette cour du 2 avril 2019, l'affaire a fait l'objet d'un retrait du rôle; elle a été réinscrite suite à la demande de la Direction régionale des douanes et droits indirects de [Localité 9] et du Receveur régional des douanes de Montpellier par voie électronique, le 24 juillet 2019.
La société de droit suisse Tradall SA demande à la cour, en l'état de ses dernières conclusions déposées et notifiées le 25 septembre 2019 par voie électronique de :
«- (...) à titre liminaire :
- infirmer le jugement rendu (...), faisant droit à son appel, déclarer recevable et bien fondée son action,
- à titre principal :
- constater que l'article 67-A du code des douanes n'a pas été respecté, et notamment son droit d'être entendue a été violé par la Direction régionale des douanes de [Localité 9] au cours du contrôle douanier dont elle a fait l'objet,
- en conséquence, déclarer nul l'avis de mise en recouvrement n°903/15/209 du 27 avril 2015,
- dire que l'avis de mise en recouvrement n°903/15/209 du 27 avril 2015 a été émis sur la base de procès-verbaux fondés sur une violation des règles douanières, et notamment, constater que la procédure douanière diligentée à son encontre est infondée au regard des règles douanières en ce qu'elle conclut à l'intégration d'une TVA étrangère (pourtant déduite) à la valeur en douane de marchandises importées,
- en conséquence, annuler, pour toutes ces raisons, l'avis de mise en recouvrement n°903/15/209 du 27 avril 2015 ayant été émis par la Direction régionale des douanes et des droits indirects de [Localité 9] (Recette régionale) suite au procès~verbal de notification d`infraction,
- condamner la Direction régionale des douanes et des droits indirects de [Localité 9] au remboursement des frais occasionnés par la garantie placée en faveur de l'administration douanière conformément à l'article 348 du code des douanes pour un montant provisoire de 37 384,73 euros, cette somme devant être réévaluée au vu des éléments chiffrés relatifs au coût de la garantie bancaire supportés entre le 28 novembre 2015 et le jour du jugement (sic),
- en tout état de cause, condamner la Direction régionale des douanes et des droits indirects de [Localité 9] au paiement d'une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- dire et juger que les parties conserveront la charge des dépens qu'elles ont exposés conformément à l'article 367 du code des douanes. »
Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que :
- l'administration des douanes a failli à son obligation de communiquer la référence aux documents et aux informations sur lesquels sa décision est fondée et a bénéficié d'un long délai pour les analyser alors qu'elle-même n'avait que trente jours pour répondre,
- l'administration n'a pas communiqué la méthode de détermination de la valeur en douane retenue et a avancé successivement différentes méthodes d'évaluation générant un doute sur la méthode retenue,
- ce n'est que postérieurement au droit d'être entendu qu'elle a pu connaître la liste des factures sur lesquelles la prétendue infraction était fondée,
- les nombreuses demandes de rendez-vous auprès de la Direction générale des douanes et des droits indirects sont restées vaines,
- l'avis de mise en recouvrement est intervenu seulement quatorze jours après le procès-verbal de notification d'infraction, faisant obstacle à tout délai raisonnable pour qu'elle puisse contester la notification du procès-verbal d'infraction,
- l'applicabilité des cinq méthodes de détermination doit être vérifiée successivement dans un ordre imposé par la réglementation, l'administration n'a pas visé ces méthodes dans son avis de résultat; la valeur transactionnelle (1ère méthode) ne peut être retenue, car bien qu'il y ait eu une vente entre la société BIL et la société Tradall au moment du placement des marchandises sous perfectionnement actif, ces marchandises importées sont déjà la propriété de la société Tradall au moment de leur importation en France,
- dans le cadre de la méthode de la valeur transactionnelle, l'administration des douanes ne pouvait inclure une TVA étrangère; en effet, la TVA suisse acquittée par la société Tradall est une taxe intérieure déductible et ne constitue pas un droit de sortie ou droit à l'exportation, ni un coût final,
- l'administration des douanes n'a aucune compétence pour interpréter le droit suisse,
- au regard de la réglementation suisse et des écrits provenant des autorités suisses, elle démontre la déductibilité de la TVA suisse et la déduction effective de celle-ci (facturation de TVA suisse sur la période contrôlée et documents fiscaux, comptables et bancaires).
La Direction régionale des douanes et droits indirects de [Localité 9] et le Receveur régional des douanes de [Localité 9] sollicitent de voir, aux termes de leurs conclusions transmises et déposées le 25 juillet 2019 :
'- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Montpellier le 7 février 2017 en toutes ses dispositions,
- débouter la société Tradall de l'ensemble de ses demandes,
- débouter la société Transports [Z] [I] de l'ensemble de ses demandes;
- déclarer l'avis de mise en recouvrement valide pour un montant de 3 751 490 euros correspondant au montant des droits fraudés,
- condamner la société Tradall à verser à l'administration des douanes la somme de
5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et dire n'y avoir lieu à dépens.»
Ils exposent en substance que :
- l'avis de résultat précise la règlementation relative à la détermination de la valeur en douane; il cite l'article 29-3-a du code des douanes communautaire, ce qui exclut de facto les méthodes de substitution prévues à l'article 30 de ce même code,
- les documents et informations sur lesquels la décision est fondée sont ceux communiqués par la société Tradall elle-même,
- la réflexion concernant l'application de la meilleure méthode après le rejet de la valeur des facture pro forma , et cela compte tenu des éléments à sa disposition, ne saurait correspondre à des «errements»,
- le procès-verbal de notification est clair sur la méthode de détermination de la valeur en douane dans la mesure où il prend la dernière facture définitive connue, dans le cadre d'une valeur transactionnelle, il a retenu la dernière facture avant importation existante, en l'espèce, celle existant entre les sociétés BIL et Tradall en Suisse,
- la déductibilité de la TVA n'est pas justifiée en droit dans le cadre spécifique du régime du perfectionnement actif suspensif,
- les écrits de l'administration suisse ne font que reprendre la réglementation telle qu'elle existe, mais n'étudient pas les opérations relatives aux importations faisant l'objet du contrôle,
- les pièces produites ne sont pas probantes en l'absence de tout recoupement possible avec une comptabilité et des documents douaniers de type déclarations d'exportation suisse.
Aux termes de conclusions transmises et déposées le 20 février suivant, la SAS Transports [Z] [I], sollicite que :
«- son intervention volontaire soit déclarée recevable,
- qu'il soit dit et jugé que la TVA acquittée par la société Tradall en Suisse lors de l'acquisition des marchandises à la société BIL est une taxe déductible, qui ne saurait constituer l'assiette de la valeur en douane des marchandises importées dans la Communauté,
- faire droit aux demandes et conclusions de la société Tradall,
- dire n'y avoir lieu à condamnation aux dépens en application de l'article 367 du code des douanes.»
Au soutien de son intervention volontaire et appel incident, elle fait essentiellement valoir que :
- elle a, en sa qualité de commissionnaire agréé en douane, souscrit des déclarations de douane pour le compte de la société Tradall et un litige l'opposant à l'administration des douanes, portant partiellement sur la même créance (assignation délivrée le 22 novembre 2018 devant le tribunal de grande instance de Montpellier) est en cours,
- en dépit de la discussion existant entre la société Tradall et l'administration des douanes concernant le respect du principe du contradictoire, cette dernière a appliqué l'article 29 du code des douanes communautaire,
- les produits sont sortis du régime de perfectionnement actif (qui n'a aucune incidence en l'espèce) lorsqu'ils ont été vendus par la société BIL à la société Tradall et la vente intervenue entre la société BIL et la société Tradall a été assujettie à la TVA, qui est déductible,
- la TVA acquittée est sans rapport avec une vente pour l'exportation à destination du territoire douanier comme prévue par l'article 29,
- le système de la TVA repose sur le principe de la neutralité, celle-ci, acquittée lors d'un achat de biens ou services, étant déductible même sans revente de celui-ci.
Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION :
A titre préalable, il sera donné acte, en application de l'article 325 du code de procédure civile, à la SAS Transports [Z] [I] de son intervention volontaire eu égard à sa qualité de mandataire de la société Tradall pour diverses déclarations en douane à l'import en France dans le cadre du contrôle ayant donné lieu à l'avis de mise en recouvrement du 27 avril 2015 contesté dans la présente instance.
Sur le droit d'être entendu :
Selon l'article 67 A du code des douanes national, dans sa rédaction issue de la loi du 30 décembre 2009 et dans sa rédaction antérieure à la loi du 29 décembre 2016, applicable en la cause, sous réserve des dispositions de l'article 67 B, toute décision prise en application du code des douanes communautaire et de ses dispositions d'application, lorsqu'elle est défavorable ou lorsqu'elle notifie une dette douanière telle que définie à l'article 4 paragraphe 9 du code des douanes communautaire, est précédée de l'envoi ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaître la décision envisagée, les motifs de celle-ci,
la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connaître ses observations dans un délai de trente jours à compter de la notification ou de la remise de ce document.
La procédure de contrôle des opérations d'importation et d'exportation de la société Tradall en application de l'article 78 du code des douanes communautaire a débuté par un procès-verbal en date du 18 octobre 2013, suivi de procès-verbaux en date des 24 octobre 2013, 13 février 2014 et 27 novembre 2014, puis d'un avis de résultat d'enquête du 20 janvier 2015, qui constitue le point de départ de la mise en 'uvre du droit d'être entendu.
À ce titre, le cabinet d'avocats Ernst and Young, représentant la société Tradall, a par lettre recommandée avec demande d'avis de réception datée du 17 février 2015 (et non 2014 comme mentionné suite à une erreur de plume), formé des observations, auxquelles l'administration a répondu par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 6 mars 2015, et qu'il a complétées par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 25 mars 2015.
L'infraction relevée a été notifiée par procès-verbal du 14 avril 2015 après l'expiration de la période du droit d'être entendu.
L'échange courant février-mars 2015 entre les parties démontre l'effectivité de l'exercice de ce droit par la société Tradall.
Par ailleurs, le cheminement de l'administration douanière pour déterminer la méthode de détermination de la valeur en douane est reflété par les différents procès-verbaux qu'elle a établis et s'inscrit dans sa prise en compte des pièces que la société Tradall lui a, ou non, transmises, notamment, après le rejet des factures pro forma, étant précisé que ces remises de pièces ont été libres et volontaires.
Le procès-verbal du 27 novembre 2014 recense les factures retenues par l'administration.
L'avis de résultat de contrôle du 20 janvier 2015 rappelle la réglementation relative à la détermination de la valeur en douane de manière globale (articles 29 à 33 du code des douanes communautaire) sans retenir les méthodes de substitution et cite l'article 29-3-a du code des douanes communautaire au titre des droits à ajouter ou pas au prix payé pour la détermination de ladite valeur. L'ordre d'application des différentes méthodes a, ainsi, été respecté.
Enfin, la société Tradall ne peut sérieusement se prévaloir de l'absence de référence dans l'avis de résultat aux documents utilisés par l'administration des douanes pour fonder sa décision alors que cette dernière vise expressément ses propres documents (et notamment les factures qu'elle a transmises dans le cadre du procès-verbal du 27 novembre 2014), ni des délais, qui, fixés par la loi, ont été respectés par l'administration.
Ainsi, la société Tradall, comme l'indique l'intervenant volontaire, a eu connaissance antérieurement au procès-verbal de notification, pendant la période de droit d'être entendu, qui n'impose pas à l'administration de procéder à des entretiens, de la méthode choisie, à savoir la valeur transactionnelle, et de la liste des factures sur lesquelles l'infraction était fondée.
En conséquence, aucune violation de l'article 67 A du code des douanes communautaire n'étant rapportée, la demande d'annulation de l'avis de mise en recouvrement n°903/15/209 du 27 avril 2015 sera rejetée.
Sur la valeur en douane :
La valeur en douane des marchandises importées constitue la base taxable des droits et taxes perçus à l'importation, notamment les droits de douane et la TVA à l'importation. Cette valeur en douane peut être déterminée selon cinq méthodes différentes (méthode de la valeur transactionnelle, méthode comparative, méthode déductive, méthode calculée, méthode dite du dernier recours), dont l'applicabilité doit être vérifiée successivement dans un ordre imposé par la réglementation.
Les articles 29 et suivants du code des douanes communautaire et leurs dispositions d'application déterminent ces méthodes.
Selon l'article 29 du code des douanes communautaire, la première méthode de détermination de la valeur en douane des marchandises importées est leur valeur transactionnelle, c'est-à-dire le prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises lorsqu'elles sont vendues pour l'exportation à destination du territoire douanier de la Communauté européenne, le cas échéant après ajustement effectué conformément aux articles 32 et 33 du même code (...); le paragraphe 3. a) de l'article 29 susvisé dispose que le prix effectivement payé ou à payer est le paiement total effectué ou à effectuer par l'acheteur au vendeur, ou au bénéfice de celui-ci, pour les marchandises importées et comprend tous les paiements effectués ou à effectuer, comme condition de la vente des marchandises importées, par l'acheteur au vendeur, ou par l'acheteur à une tierce personne pour satisfaire à une obligation du vendeur.
L'article 146 des dispositions d`application du code des douanes communautaire précise que si le prix effectivement payé ou à payer, visé à l'article 29 paragraphe 1 du code des douanes communautaire, comprend un montant représentant une taxe intérieure exigible dans le pays d'origine ou d'exportation à l'égard des marchandises considérées, ce montant ne sera pas incorporé dans la valeur en douane à la condition qu'il soit démontré à la satisfaction des autorités douanières concernées que lesdites marchandises en ont été ou en seront exonérées, et cela au bénéfice de l'acheteur.
L'article 147 de ces mêmes dispositions d`application précise encore qu'aux fins de l'article 29 de ce code, le fait que les marchandises faisant l'objet d'une vente sont déclarées pour la mise en libre pratique doit être considéré comme une indication suffisante qu'elles ont été vendues en vue de l'exportation à destination du territoire douanier de la Communauté. Cette indication ne subsiste en cas de ventes successives avant l'évaluation qu'à l'égard de la dernière vente sur la base de laquelle les marchandises ont été introduites dans le territoire douanier de la Communauté, ou à l'égard d'une vente dans le territoire douanier de la Communauté avant la mise en libre pratique des marchandises.
La valeur en douane doit refléter la valeur économique réelle d'une marchandise importée et tenir compte de l'ensemble des éléments de cette marchandise qui présente une valeur économique. Si le prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises forme en général la base de calcul de la valeur en douane, ce prix est une donnée qui doit éventuellement faire l'objet d'ajustements lorsque cette opération est nécessaire pour éviter de déterminer une valeur en douane arbitraire ou fictive.
Au regard de la nature du contrôle, qui un contrôle douanier et non fiscal et de l'accessibilité des dispositions légales relatives à la TVA en Suisse (loi fédérale suisse du 12 juin 2009 - loi sur la TVA LTVA) et au perfectionnement actif dans ce pays (notice de la Confédération suisse), régulièrement échangées entre les parties, aucune demande d'assistance administrative auprès des autorités suisses sur le fondement des articles 65 du code des douanes national et 14 du code des douanes communautaire n'apparaissait utile et nécessaire.
La rubrique 8 du document portant l'autorisation suisse de perfectionnement actif, dont bénéficie la société Tradall, concerne la TVA à l'importation et non la TVA intérieure suisse de sorte que la mention «sans droit de remboursement» de cette rubrique est sans incidence sur la valeur en douane.
En l'espèce, la société Tradall confectionne des extraits aromatiques en Suisse en vue de les intégrer aux boissons alcoolisées qu'elle fabrique ou fait fabriquer en France.
La vente intervenue en Suisse entre la société BIL et la société Tradall doit donc être considérée comme une vente en vue de l'exportation à destination du territoire français, qui relève des dispositions de l'article 29 du code des douanes communautaire et de ses dispositions d'application.
Cette vente en Suisse en vue d'une exportation en France a apuré le régime du perfectionnement actif en vertu duquel ces marchandises ne supportent pas de droits à l'importation, ni de droits de sortie.
Toutefois, pour acquérir ces extraits aromatiques, la société Tradall a versé à la société BIL une «tax», à savoir la TVA intérieure en Suisse, qui n'est pas un droit de sortie. Ce paiement, même s'il ne constitue pas non plus un coût final pour la société Tradall, est une condition de la vente des marchandises importées.
En effet, la société Tradall était tenue de payer cette TVA intérieure, calculée sur le prix des marchandises achetées à la société BIL ; il s'agit donc bien du prix effectivement payé.
La déductibilité de la TVA, étant entendu que le régime de la TVA est un régime neutre, ne peut être établie par les pièces comptables produites, qui, outre qu'elles ne sont nullement certifiées, du fait de leur caractère global [«(prestations exonérées (p.ex. exportations art.23)...], ne permettent pas d'identifier les ventes litigieuses.
Les factures pro forma correspondant à la valeur des stocks n'étaient pas représentatives de la valeur économique des marchandises contrairement au prix de vente entre les sociétés BIL et Tradall figurant sur les factures prises en compte pour retenir l'infraction relevée.
Au surplus, l'administration douanière a pu constater que le montant des déclarations à l'export effectué par la société Tradall des mêmes marchandises est supérieur à celui déclaré à l'importation en France sans qu'une erreur de change, alléguée par cette dernière, ne puisse l'expliquer.
Dès lors, la valeur en douane retenue, comprenant la facturation complète des marchandises, étant conforme aux dispositions applicables, l'avis de mise en recouvrement n° 903/15/209 du 27 avril 2015 n'encourt aucune nullité.
Le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions.
Succombant sur son appel, la société Tradall sera condamnée, au vu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à payer la somme de 4 000 euros tandis que sa demande sur ce fondement sera rejetée.
En application de l'article 367 du code des douanes national, la présente instance est dépourvue de dépens.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire,
Donne acte à la SAS Transports [Z] [I] de son intervention volontaire,
Confirme dans toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Montpellier en date du 7 février 2017,
Condamne la société de droit suisse Tradall SA à payer à la Direction régionale des douanes et droits indirects de [Localité 9] et au Receveur régional des douanes de [Localité 9] la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette la demande de la société de droit suisse Tradall SA fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit qu'en application de l'article 367 du code des douanes national, la présente instance est sans dépens,
Le greffier Le président
A.C.B.