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22/01/2020 | FRANCE | N°15/05801

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre sociale, 22 janvier 2020, 15/05801


SD/KC















Grosse + copie

délivrées le

à



































3ème chambre sociale



ARRÊT DU 22 Janvier 2020



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 15/05801 - N° Portalis DBVK-V-B67-MF2U



ARRÊT n°



Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 JUIN 2015 TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE D'AUDE

N° RG2140

0215



APPELANTE :



MSA AUDE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me GARRIGUE substituant Me Benoît LECLERC de la SCP BITEAU-LECLERC, avocat au barreau de CARCASSONNE





INTIME :



Monsieur [C] [K]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Non comparant

Représentant : Me Maurice PELLEGRINI,...

SD/KC

Grosse + copie

délivrées le

à

3ème chambre sociale

ARRÊT DU 22 Janvier 2020

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 15/05801 - N° Portalis DBVK-V-B67-MF2U

ARRÊT n°

Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 JUIN 2015 TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE D'AUDE

N° RG21400215

APPELANTE :

MSA AUDE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me GARRIGUE substituant Me Benoît LECLERC de la SCP BITEAU-LECLERC, avocat au barreau de CARCASSONNE

INTIME :

Monsieur [C] [K]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Non comparant

Représentant : Me Maurice PELLEGRINI, avocat au barreau de CARCASSONNE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2018/011669 du 10/10/2018 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

Non présent

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 NOVEMBRE 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, exerçant les fonctions de Président, spécialement désigné à cet effet

Madame Karine CLARAMUNT, Conseillère

Madame Magali ISSAD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sylvie DAHURON

ARRÊT :

- Contradictoire;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, exerçant les fonctions de Président, spécialement désigné à cet effet , et par Mademoiselle Sylvie DAHURON, greffier.

*

**

La MSA de l'Aude initiait à l'encontre de M. [C] [K] des poursuites pour travail dissimulé pour la période du 4ième trimestre 2012 et du 1er trimestre 2013.

Le 27 mars 2014, la MSA de l'Aude signifiait à M. [C] [K] une contrainte d'avoir à s'acquitter de la somme de 8 469, 60 euros au titre d'un redressement de cotisations sur salaires du 4ième trimestre 2012 et 1er trimestre 2013.

Le 11 avril 2014, M. [K] saisissait le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Aude d'une opposition à cette contrainte.

Suivant jugement rendu le 23 juin 2015, le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Aude annulait la contrainte du 19 mars 2014, sans préjudice de la faculté pour la MSA de l'Aude de délivrer une nouvelle contrainte visant exclusivement le rappel de cotisations lié à la sous évaluation des salaires déclarés pour M. [L] [H] et M. [Y] [M] et rejetait toute prétention plus ample ou contraire.

La MSA de l'Aude relevait appel de ce jugement par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 juillet 2015 reçue au greffe le 27 juillet 2015.

A l'audience du 21 novembre 2019, la MSA de l'Aude sollicite l'infirmation du jugement entrepris. Elle demande à la cour de dire que le redressement concernant les salariés [U] [T], [X] [O], [G] [S], [U] [S] est fondé et que le redressement correspondant à la sous déclaration des salaires concernant messieurs [H] ET [M] est justifié. Elle sollicite la validation de la contrainte signifiée le 27 mars 2014 et la condamnation de M. [K] à payer la somme de 8459, 60 euros outre les majorations de retard complémentaires et les frais de signification.

Au soutien de son appel, la MSA de l'Aude fait valoir que

M. [K] engageait messieurs [H] et [M] le 19 novembre 2012; qu'il déclarait à la caisse au titre des salaires du 4ième trimestre 2012, 0 euros pour M. [M] et 200 euros pour M. [H]; que ces chiffres étaient sous évalués et non conformes à ce que rapportaient les salariés lors du contrôle.

Par ailleurs, la MSA de l'Aude expose que M. [K] confiait à M. [U] [S] des travaux forestiers ( abattage d'arbres) à compter de novembre 2012 pour un montant initial, a minima de 3500 euros. Dans ce cadre, messieurs [U] [T], [X] [O], [G] [S] et [P] [S] travaillaient sur les chantiers. M. [K] aurait dû, dès la conclusion du contrat, conformément aux dispositions des articles L 722 -23 du code rural ,

L 8222-1, L 8222-4, D 8222-5 et R 8222-7 du code du travail, obtenir de son sous traitant la communication des documents attestant que celui-ci exerçait son activité de façon régulière et en dehors de tout salariat. En outre, la MSA relève que le contrat écrit était signé le 11 février 2013 pour un chantier débutant en novembre 2012. Elle ajoute que M. [K] reconnaissait avoir falsifié un contrat initialement conclu entre une société tierce et M. [U] [S]. N'était pas levée la présomption de salariat édictée par les dispositions de l'article L 722 -23 du code rural et les personnes travaillant sur le chantier en cause doivent être considérées comme salariées du donneur d'ordre.

A l'audience du 21 novembre 2019, M. [K] régulièrement convoqué par lettre recommandée dont il accusait réception le 18 septembre 2019 était non comparant.

Vu l'article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions de l'appelante , il sera renvoyé à ses conclusions écrites auxquelles elle a déclaré expressément se rapporter lors des débats.

MOTIFS :

M. [K] est exploitant agricole.

Sur l'absence de respect des dispositions de l'article L 8222-1 du code du travail :

Aux termes des dispositions de l'article L 8222-1 du code du travail, toute personne vérifie lors de la conclusion d'un contrat dont l'objet porte sur une obligation d'un montant minimum en vue de l'exécution d'un travail, de la fourniture d'une prestation de service ou de l'accomplissement d'un acte de commerce et périodiquement jusqu'à la fin de l'accomplissement du contrat que son cocontractant s'acquitte des formalités mentionnées aux articles L 8221-3 et L 8221 -5 du code du travail ( travail dissimulé par dissimulation d'activité et travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié).

Aux termes des dispositions de l'article R 8222-1 du code du travail, les vérifications à la charge de la personne qui conclut un contrat prévues à l'article L 8222-1 sont obligatoires pour toute opération d'un montant au moins égal à 3000 euros.

Aux termes des dispositions de l'article L 8222-2 du code du travail, toute personne qui méconnaît les dispositions de l'article L 8222-1 du code du travail ainsi que toute personne condamnée pour avoir recouru directement ou par personne interposée aux services de celui qui exerce un travail dissimulé est tenue solidairement avec celui qui a fait l'objet d'un procès verbal pour délit de travail dissimulé.

Sans que soit nécessaire une condamnation pénale préalable, la règle de solidarité s'applique à toute personne , particulier ou professionnel

( client ou donneur d'ordre) qui ne s'est pas assurée lors de la conclusion du contrat que son cocontractant , fournisseur d'un bien, d'un travail ou d'une prestation s'acquittait de ses obligations au regard de l'article

L 8222-1 précité.

Il résulte du procès verbal d'audition par la gendarmerie nationale de M. [S] [U] du 13 février 2013, que celui-ci faisait l'objet d'un contrôle routier , le 8 février 2013. Le véhicule était conduit par son frère, M. [P] [S]. Se trouvaient également à bord, son neveu M. [G] [S] et deux de ses ouvriers, M. [U] [T] et M. [X] [O]. Ils se rendaient sur un chantier forestier, sur la commune de VILLARDONEL, sur les terres exploitées par M. [K].

M. [U] [S] expliquait que le 6 novembre 2012, il ouvrait une entreprise en Espagne dans le seul but de venir travailler en France. Un ami le mettait en relation avec M. [K]. Il effectuait seul la coupe de bois sur plusieurs de ses parcelles pendant trois semaines en janvier 2013. M [S] indique que le contrat verbal conclu avec monsieur [K] était seulement finalisé le 11 février 2013. Le 28 janvier et le 1er février 2013, il embauchait, en Espagne, messieurs [G] [S], [P] [S], [X] [Z], [U] [T]. Il aurait remis les papiers de la société, les contrats de travail et le justificatif de son assurance à M. [K] le 15 janvier 2013. Mais, il n'effectuait aucune déclaration préalable auprès de l'inspection du travail en France.

Sur l'autorité de la chose jugée au pénal :

Suite au contrôle routier et à l'enquête menée par la gendarmerie, M. [K] était poursuivi pour avoir :

- exercé une activité de production, de transformation, de réparation, de prestation de service ou accompli un acte de commerce sans immatriculation au registre du commerce et des sociétés;

- le 11 février 2013, altéré frauduleusement la vérité dans un écrit à savoir un contrat d'entreprise établi initialement entre la société BELLEPODIENNE DES BOIS et M. [U] [S] de manière à établir un contrat le liant à M. [U] [S] et avoir fait usage du faux;

- avoir eu recours aux services d'une personne exerçant un travail dissimulé, en l'espèce [U] [S], [G] [S], [U] [T]; [X] [O].

Suivant jugement en date du 11 juillet 2013, le tribunal correctionnel de Carcassonne le relaxait.

Mais, l'autorité de la chose jugée au pénal ne fait pas obstacle à la constatation du non respect des obligations imposées par l'article L 8222-1 du code du travail à savoir l'absence de vérification de la bonne exécution des obligations fiscales et sociales à la charge de l'exécutant par son cocontractant.

Sur le seuil légal de 3000 euros :

Il ressort du contrat d'entreprise établi le 11 février 2013 ainsi que de l'audition de M. [U] [S] que la coupe d'une pile de bois était rémunérée 70 euros. Monsieur [K] indiquait lors de ses auditions successives que le contrat portait sur 35 piles puis sur 38 piles; qu'il devait, en outre, verser un supplément si les piles coupées étaient au final plus nombreuses ( 5 ou 10 piles en plus prévisibles); qu'il avait donné, pour simple acompte, en liquide, la somme de 2 500 euros à M. [U] [S]. Celui-ci confirmait, dans son audition du 13 février 2013, avoir perçu, à titre d'acompte, 2500 euros en espèces. Dans son audition du 4 mars 2013, il précisait que le chantier portait sur 200 mètres cube soit 50 piles. Ainsi, le contrat initial portait sur la somme de 3500 euros supérieure au minimum légal.

Sur les vérifications opérées par M. [K] :

Aux termes des dispositions de l'article L 8222-4 du code du travail, lorsque le cocontractant intervenant sur le territoire national est établi ou domicilié à l'étranger, les obligations dont le respect fait l'objet de vérifications sont celles qui résultent de la réglementation d'effet équivalent de son pays d'origine et celles qui lui sont applicables au titre de son activité en France.

Aux termes des dispositions de l'article D 8222-7 du code du travail, la personne qui contracte lorsqu'elle n'est pas un particulier, est considérée comme ayant procédé aux vérifications imposées par l'article L 8222-4 si elle se fait remettre par son cocontractant établi ou domicilié à l'étranger, lors de la conclusion du contrat et tous les six mois jusqu'à la fin de son exécution: :

1° Dans tous les cas les documents suivants :

- un document mentionnant son numéro individuel d'identification attribué en application de l'article 286 ter du code général des impôts;

- un document attestant de la régularité de la situation sociale du cocontractant au regard du règlement CE n ° 883/2004 du 29 avril 2004 ou d 'une convention internationale de sécurité sociale;

2° Lorsque l'immatriculation du cocontractant à un régime professionnel est obligatoire dans le pays d'établissement ou de domiciliation, l'un des documents suivants :

- un document émanant des autorités tenant le registre professionnel ou un document équivalent certifiant cette inscription;

- un devis , un document publicitaire ou une correspondance professionnelle à condition qu'y soient mentionnés le nom ou la dénomination sociale, l'adresse complète et la nature de l'inscription au registre professionnel;

- pour les entreprises en cours de création, un document datant de moins de six mois émanant de l'autorité habilitée à recevoir l'inscription au registre professionnel et attestant de la demande d'immatriculation audit registre.

Aux termes des dispositions de l'article D 8222-8 du code du travail, les documents et attestations énumérés à l'article D 8222-7 sont rédigés en langue française ou accompagnés d'une traduction en langue française.

Les seuls documents produits aux débats pour justifier des vérifications opérées par M.[K] donneur d'ordre ( document émanant du ministère de la sécurité sociale ' Déclaration simplifiée de l'agence de travail ') sont en langue espagnole et ne permettent pas de vérifier qu'ils correspondent aux critères légaux.

M. [K] se rendait, avec M. [U] [S], entre le 8 février 2013 et le 13 février 2013, dans les locaux de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi pour se renseigner sur les demandes préalables de détachement des salariés de M. [U] [S]. Cette déclaration n'a jamais été déposée auprès de la DIRECCTE. Messieurs [G] [S], [P] [S], [X] [Z], [U] [T] travaillaient, sur l'exploitation de M. [K] sans être régulièrement déclarés aux autorités françaises.

M. [S] faisait l'objet d'une mesure de garde à vue dans le cadre de l'enquête menée par la gendarmerie nationale . A la suite de cette garde à vue, sur instructions du Procureur de la République de Carcassonne, il faisait l'objet d'une convocation devant le tribunal de grande instance en avril 2013 dont on ignore l'issue. Il faisait donc bien l'objet d'un procès verbal pour travail dissimulé.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, la contrainte notifiée par la MSA de l'Aude était justifiée concernant le travail dissimulé de messieurs [U] [S], messieurs [G] [S], [P] [S], [X] [Z], [U] [T].

Sur la déclaration des salaires de messieurs [L] [H] et [Y] [M] :

Dans son audition du 27 mars 2013, M. [K] reconnaissait avoir embauché messieurs [Y] [M] et [L] [H] de mi novembre à mi décembre 2012. Il exposait avoir déclaré leur embauche à la MSA par téléphone. La MSA lui transmettait un courrier l'avisant que la régularisation de la situation était en suspens faute de déclaration écrite selon la voie légale. Aucun contrat de travail n'était signé. Aucune fiche de paie n'était délivrée. M. [K] ne tenait aucune fiche horaire de travail.

Sont produites aux débats les fiches de déclaration de salaires à la MSA pour le dernier trimestre 2012. Elles étaient envoyées avec retard. Aucune rémunération n'était déclarée pour M. [M]. Concernant M. [H], sont déclarés 200 euros à titre de rémunération.

Or, dans son audition du 4 mars 2013, M. [U] [S] déclarait qu'il fallait en moyenne 25 ou 30 heures de travail par personne pour couper une pile.

M. [K], quant à lui, expliquait qu'il payait messieurs [H] et [M] 50 euros la pile plus 10 euros pour le chargement.

Il résulte de ces explications que les salaires déclarés à la MSA étaient sous évalués.

La contrainte délivrée par la MSA concernant messieurs [M] et [H] était donc justifiée.

PAR CES MOTIFS :

La Cour , statuant, publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire :

Infirme le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Hérault du 23 juin 2015 dans toutes ses dispositions;

Condamne M. [K] à payer à la MSA de l'Aude la somme de 8459, 60 euros, outre les majorations de retard complémentaires et les frais de signification;

Rejette toutes demandes plus amples ou contraires.

Condamne M.[K] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15/05801
Date de la décision : 22/01/2020

Références :

Cour d'appel de Montpellier 3S, arrêt n°15/05801 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-22;15.05801 ?
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