Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1° Chambre B
ARRET DU 13 JUIN 2018
Numéro d'inscription au répertoire général : 17/06101
Décision déférée à la Cour de renvoi autrement composée par Arrêt du 15 JUIN 2017 COUR DE CASSATION - N° RG H16-19.919 - qui a cassé et annulé partiellement l'arrêt rendu le 04 MAI 2016 par la Cour d'appel de MONTPELLIER sur appel du jugement rendu le 16 juin 2014 par le tribunal de grande instance de BEZIERS
APPELANTE :
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU LANGUEDOC venant aux droits de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Midi immatriculée au RCS de Montpellier sous le n° 492 826 417, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié [...]
représentée par Me Marie-Pierre Y..., avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me Franck RIGAUD, avocat au barreau de BEZIERS
INTIMEE :
Madame Laurence X...
née le [...] à Alençon
de nationalité Française
[...]
[...]
représentée et assistée de Me Olivier MENUT, avocat au barreau de BEZIERS
ORDONNANCE DE CLOTURE DU 25 Avril 2018
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 02 MAI 2018, en audience publique, monsieur Georges TORREGROSA, président de chambre ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de procédure civile et monsieur Christian COMBES, conseiller
Ces magistrats ont rendu compte à la cour composée de :
Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre
M. Christian COMBES, Conseiller
madame Nathalie AZOUARD, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Madame Marie-Lys MAUNIER
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre, et par Madame Marie-Lys MAUNIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Les Faits, la procédure et les prétentions :
Vu le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Béziers, en date du 16 juin 2014 ;
Vu l'appel de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc en date du 30 juin 2014 ;
Vu l'arrêt en date du 4 mai 2016 de la cour d'appel de Montpellier;
Vu le pourvoi de Madame X... ;
Vu l'arrêt de la Cour de Cassation en date du 15 juin 2007, saisissant la Cour d'appel de Montpellier autrement composée ;
Vu la déclaration de saisine du Crédit agricole en date du 24 novembre 2007 ;
Vu les conclusions récapitulatives en réponse du Crédit agricole en date du 4 avril 2018 ;
Vu les conclusions de Madame X... en date du 2 mars 2018,
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 25 avril 2018;
SUR CE:
Attendu qu'il convient en liminaire de préciser le périmètre de la saisine de la Cour de renvoi ;
Attendu que dans son arrêt en date du 4 mai 2016, la Cour d'appel a disposé en confirmant le jugement de premier ressort en ce qu'il avait condamné le Crédit agricole au titre du second prêt numéro [...] à payer les sommes de 2332 € et de 1596,82 euros ;
Attendu que cette condamnation est définitive, dans la mesure où la Cour suprême a prononcé une cassation partielle, seulement en ce que l'arrêt a dit que le préjudice de Mme X... résultant des fautes commises par la banque dans l'exécution du prêt numéro [...] ne pouvait s'analyser qu'en une perte de chance ;
Attendu qu'ainsi, et s'agissant de l'éventuelle responsabilité de la banque dans l'exécution de ce prêt, les parties sont remises dans l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt partiellement cassé ;
Attendu que dans ce cadre reprécisé, Mme X... ne peut soutenir que la Cour de renvoi n'est pas saisie de l'entier litige afférent à ce prêt ;
Attendu que la Cour de renvoi est donc saisie de ses demandes à ce titre, à savoir une somme de 2916,07 euros au titre des intérêts payés sur les fractions du prêt réalisées à tort, une somme de 40102,66 euros au titre des sommes exposées pour l'achèvement des travaux, et une somme de 23735,73 euros au titre du coût du financement attaché aux sommes exposées pour l'achèvement des travaux ;
Attendu qu'à l'appui de ses demandes, Mme X... produit l'offre de prêt immobilier initiale de 250000 €, en date de mars 2007, dont elle dit qu'elle-même qu'il s'agissait de financer des travaux de rénovation sur la base d'un devis établi le 22 février 2007 par Top Rénov (sa pièce numéro deux ) ;
Attendu qu'elle fournit en pièce trois la demande de déblocage des fonds du notaire pour l'achat immobilier, en date du 11 avril 2007, ce qui n'est pas litigieux, ce déblocage ayant eu lieu le 11 avril (pièce numéro quatre) ;
Attendu qu'il est fourni en pièce numéro cinq la démonstration du déblocage partiel par la banque d'une somme de 40090 €, en date du 17 avril 2007 ;
Attendu qu'il est reconnu que ce déblocage a profité à Top Rénov (pièce numéro huit) mais sans autorisation de l'emprunteuse, qui a protesté selon courrier en date du 27 avril 2007 (sa pièce numéro six) ;
Attendu qu'un déblocage similaire a eu lieu sans autorisation, pour un montant de 26396,10 euros, toujours au profit de Top Rénov (sa pièce numéro neuf) ;
Attendu qu'il est produit en pièce numéro [...] une facture de la société Espace concept habitat, en date du 30 octobre 2007, portant la mention : « reprise et installation des ouvrages non réalisés suite à abandon de Immeuble rue [...] commune de[...] » ;
Attendu qu'en réalité, il est soutenu par Mme X... que les deux déblocages de fonds non autorisés ont permis à Top Rénov d'encaisser des fonds sans pour autant réaliser les travaux normalement dus selon un avancement de chantier qu'elle n'a pas pu contrôler;
Mais attendu que la réalité est un peu plus complexe, à condition que l'on se livre à un examen exhaustif des pièces précitées ;
Attendu que le devis initial de Top Rénov comporte ainsi in fine la mention : « acompte de 40 % à la signature du devis, le solde à la fin du chantier » ;
Et attendu que si l'on applique un taux de 40 % au montant hors taxes de 95250 € de ce devis, l'on arrive à un montant de 38100 €, ce qui correspond à 100 € près à la facture numéro [...] (pièce numéro huit) en date du 12 avril 2007, qui correspond bien selon son libellé à un acompte sur les travaux ;
Attendu qu'en réalité, et au vu de ces documents, la libération de la somme de 40090 € (pièce numéro huit, facture du 12 avril 2007), toutes taxe comprises, a permis tout simplement de démarrer le chantier, et était prévue contractuellement à la signature du devis;
Attendu que la Cour ne discerne donc pas que la faute qui a consisté à ne pas se prémunir de l'autorisation de l'emprunteuse pour libérer cette somme a pu être à l'origine d'un quelconque dommage, a fortiori résultant du non accomplissement de telle ou telle prestation, puisqu'il s'est agi à l'évidence de démarrer le chantier, et qu'en aucun cas la facture numéro [...] du 12 avril 2007 (pièce numéro huit) ne peut être interprétée comme la demande de paiement de travaux accomplis concernant la toiture, la menuiserie, la plomberie, l'électricité et la peinture, puisqu'il s'agissait d'un acompte, et qu'au demeurant le court délai depuis l'acceptation du devis et celle du prêt ne permettait pas l'effectivité des travaux;
Attendu que la Cour relève par ailleurs qu'aucune lettre de protestation n'a été adressée à Top Rénov, au vu des pièces régulièrement communiquées, pas plus qu'il n'a été constaté un abandon de chantier ;
Attendu que bien plus, il n'est pas contesté que des factures ont été réglées par autorisation de déblocage et ne sont pas contestées, à savoir celle de 10500 € du 24 avril 2007, celle de 15424 € du 27 juillet 2007 et celle de 4339,81 euros du 1er octobre 2007 ;
Attendu que ces factures sont postérieures à celles précitées de 40090 € du 12 avril, et pour deux d'entre elles postérieures à celle du 28 juin 2007 pour un montant de 26396,10 euros (pièce numéro neuf) ;
Et attendu que si on se réfère à cette deuxième facture, pièce numéro neuf , elle comporte la mention pour le placoplâtre d'une quantité facturée de 95 unités, alors que le devis initial en comportait 450, ce qui veut dire sauf élément nouveau que l'entreprise a facturé 95 m² effectués à cette date (3420 €), par rapport aux 450 m² commandés pour 16200 € ;
Attendu que pour la plomberie, il n'est facturé dans cette facture numéro [...] du 28 juin 2007 (pièce numéro neuf) que l'évacuation et la mise en eau, pour 4100 €, avec la mention forfait, alors que le devis initial prévoyait en plomberie une somme de 14500 € prévoyant le raccordement au réseau d'assainissement de tous les appartements, le raccordement chaud et froid de tous les points d'eau, mais aussi la fourniture et la pose de tout le sanitaire ;
Attendu que sauf élément nouveau, cela veut tout simplement dire que Top Rénov a facturé l'évacuation et la mise en eau, mais pas le sanitaire qui n'avait pas été fait ;
Attendu que s'agissant de la toiture, cette même facture numéro [...] du 28 juin 2007 indique une reprise complète pour 17500 €, sachant que l'on cherchera vainement dans la facture de Concept habitat la mention de travaux de reprise concernant la toiture ;
Attendu qu'il s'en déduit, s'agissant de cette seconde facture, que rien ne démontre un lien entre la libération sans autorisation des fonds réclamés et le dommage qui serait constitué par des travaux ainsi payés mais qui s'avéreraient non réalisés;
Attendu qu'en d'autres termes, rien ne démontre qu'au 28 juin 2007, la toiture n'était pas refaite complètement, que l'évacuation et la mise en eau stricto sensu n'étaient pas terminées ou que 95 m² de placoplâtre n'étaient pas effectués ;
Attendu que la facture de Concept habitat en date du 30 octobre 2007 ne démontre pas plus ce lien, la cour ne discernant pas pourquoi, s'il s'agissait de terminer des travaux tels que prévus au devis initial, suite à un abandon de chantier, aucune lettre de protestation n'est produite envers Top Rénov, dont des règlements sont intervenus postérieurement au deux libérations litigieuses, ce qui implique nécessairement un suivi de chantier et une mise en perspective des travaux facturés à l'occasion de ces factures qui ne sont pas litigieuses, et de ceux facturés ayant donné lieu au deux paiements litigieux ;
Attendu qu'aucun abandon de chantier n'a été constaté ;
Et attendu que la mise en perspective du devis initial et de la facture Concept habitat laisse subsister plusieurs interrogations, puisqu'il est impossible de déterminer par exemple si Top Rénov avait prévu la même qualité de sanitaire, la même qualité de peinture, les mêmes cumulus entre autres ;
Attendu que la Cour estime en réalité impossible, à partir de la seule facture de concept habitat, d'établir qu'il s'agissait bien de réaliser les mêmes prestations au même prix que celles figurant au devis initial de Top Rénov, des interrogations importantes subsistant sur l'éventualité de prestations sinon supplémentaires, du moins non comparable au point de vue tarifaire, ou de malfaçons à reprendre, sachant que la faute stricto sensu de la banque, en débloquant sans autorisation les fonds qui constituaient un acompte exigible à la signature du devis, ou des travaux partiels dont rien ne démontre qu'ils n'ont pas été effectués (dont notamment le toit), est sans rapport démontré avec le recours à une autre société le 30 octobre 2007 ;
Attendu qu'il n'est pas inutile de relever qu'une autre interrogation demeure, à savoir les raisons pour lesquelles à la date du 1er octobre 2007, un paiement de 4339,81 euros a eu lieu qui n'est pas contesté en faveur de Top Rénov, ce qui a porté l'ensemble des sommes perçues par cette société à 96749,90 euros, montant bien évidemment à rapprocher du montant de toutes taxes comprises du devis initial de 100488,75 euros ;
Attendu que la Cour ne discerne pas dans ce contexte, et si des travaux n'avaient pas été effectués à hauteur de 40000 €, pourquoi dès le 30 octobre 2007 Mme X... acceptait les nouveaux travaux proposés par Habitat concept (pièce numéro 13) sans élever aucune protestation à l'encontre de Top Rénov ;
Attendu que la cour estime donc que la seule demande justifiée, qui soit en lien direct avec la faute stricto sensu de la banque, est celle reconnue par le médiateur de cet organisme, à savoir le nombre de jours d'intérêts courus, selon le calcul qui apparaît dans son courrier du 30 janvier 2012, pour un montant de 596 € ;
Attendu que l'appel prospérera donc pour le reste, sans qu'il soit fait application de l'article 700 devant la Cour de renvoi, et Mme X... devant supporter les dépens exposés depuis la saisine de la Cour de renvoi par la banque, qui se révèle pour l'essentiel justifiée ;
PAR CES MOTIFS, LA COUR statuant contradictoirement sur renvoi de la Cour de Cassation ;
Tenant la cassation partielle prononcée par la Cour de Cassation;
Statuant uniquement sur les conséquences dommageables de l'exécution du prêt de 250000 € numéro [...],
Réforme le jugement de premier ressort, et statuant à nouveau de ce seul chef,
Condamne le Crédit agricole mutuel du Languedoc à payer à Mme X... la somme de 596 €;
Condamne Mme X... à supporter les dépens exposés devant la Cour de renvoi, qui seront recouvrés au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
MM/GT