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11/04/2018 | FRANCE | N°15/05580

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Ct0063, 11 avril 2018, 15/05580


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délivrées le
à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1o Chambre B

ARRET DU 11 AVRIL 2018

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/05580

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 MAI 2015
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER
No RG 13/01739

APPELANT :

Monsieur José X...
né le [...] à PARIS (75)
de nationalité Française
[...]
représenté par Me Emmanuelle MASSOL de la SELARL AUBY MASSOL, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Me Florence AUBY, avocat au barreau de MONTPELLIERr>
INTIMEES :

Madame Marie Christine B...
représentée par sa curatrice Mme Christiane C...
(Jugement de Curatelle renforcée du 27 janvi...

Grosse + copie
délivrées le
à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1o Chambre B

ARRET DU 11 AVRIL 2018

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/05580

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 MAI 2015
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER
No RG 13/01739

APPELANT :

Monsieur José X...
né le [...] à PARIS (75)
de nationalité Française
[...]
représenté par Me Emmanuelle MASSOL de la SELARL AUBY MASSOL, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Me Florence AUBY, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEES :

Madame Marie Christine B...
représentée par sa curatrice Mme Christiane C...
(Jugement de Curatelle renforcée du 27 janvier 2012 TGI Montpellier)
née le [...] à SAINT REMY (13)
de nationalité Française
chez Mme C... Christiane [...]
représentée par Me Bernard BERAL, avocat au barreau de MONTPELLIER
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2015/17519 du 23/12/2015 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

SA SOCIETE MARSEILLAISE DE CREDIT
Prise en la personne de son représentant légal domicilié [...]
représentée par Me Nicolas BEDEL DE BUZAREINGUES de la SCP BEDEL DE BUZAREINGUES, BOILLOT, avocat au barreau de MONTPELLIER
ORDONNANCE DE CLOTURE DU 19 Février 2018

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 MARS 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre, chargé du rapport

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre
Madame Chantal RODIER, Conseiller
M. Christian COMBES, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Nadine CAGNOLATI

ARRET :

- Contradictoire.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre, et par Mme Nadine CAGNOLATI, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Les Faits, la procédure et les prétentions :

Vu le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Montpellier en date du 28 mai 2015 ;

Vu l'appel relevé par M. X... en date du 22 juillet 2015 ;

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions de l'appelant en date du 17 février 2018 ;

Vu les conclusions de la société marseillaise de crédit en date du 15 février 2018 ;

Vu les conclusions de Mme B... en date du 22 février 2016;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 19 février 2018;
SUR CE :

Attendu que le jugement de premier ressort est définitif s'agissant de Monsieur H..., qui n'est pas intimé en cause d'appel ;

Attendu que l'appelant conteste la condamnation prononcée en premier ressort, au visa de l'acte de cautionnement qu'il a souscrit, et que la banque sollicite confirmation de ce chef ;

Attendu que l'appelant invoque à titre principal le manquement de la banque à son obligation d'information, en ce qu'elle ne l'a pas averti de ce qu'il s'agissait d'un cautionnement à caractère substitutif, et non pas d'un cautionnement complémentaire ;

Attendu qu'il s'en déduit selon lui la nullité du cautionnement au visa de l'article 1127-deux du Code civil;

Mais attendu que la banque produit une pièce numéro cinq qui est l'acte de cession de parts sociales, l'intéressé étant cessionnaire, qui comporte au chapitre des conditions particulières la mention dénuée d'ambiguïté selon laquelle :
« les parties au présent acte avaient subordonné la réitération de la cession à la levée de la caution consentie par le cédant au profit de la société marseillaise de crédit dans le cadre d'un prêt de 180000 € octroyé par cette dernière à la société patiss café [
] La société marseillaise de crédit et OSEO garantie sollicitées par le cessionnaire afin qu'ils se substituent à M. K... ont accepté cette substitution par acte du 9 septembre 2010 pour la société marseillaise de crédit et celle du 26 août 2010 pour Oseo. Les copies de l'acte de cautionnement et de la notification demeureront annexées aux présentes » ;

Attendu que la cour constate que tel est le cas, la copie de l'acte de cautionnement litigieux étant annexée, ainsi que la notification rectificative en date du 26 août 2010 par Oseo;

Attendu que le manquement aux prescriptions de l'article 1127-deux du Code civil, à le supposer applicable à l'espèce dans sa rédaction antérieure sous le numéro 1369-cinq, ne procède donc que des seules affirmations de l'appelant, qui feint d'oublier les mentions précises de l'acte de cession de parts sociales, outre le fait qu'il est évidemment logique que le cédant n'ait plus voulu conserver la charge du cautionnement, ce qui conditionnait précisément la réitération de la cession ;

Attendu que s'agissant du devoir de mise en garde et de la disproportion alléguée, et à admettre que M. X... soit un profane non averti, alors même qu'il ne conteste pas (pièce numéro 14 de la banque) être commerçant depuis 1979 en matière de location de terrains et d'autres biens immobiliers, il n'en demeure pas moins qu'il a rempli une fiche de renseignements le 20 juillet 2010, à l'attention de la société marseillaise de crédit, dont il résulte qu'il exerce une activité de loueur depuis le 1er janvier 1993, avec des revenus de 23211 € par an et des charges de 8040 €, et un patrimoine immobilier d'une valeur actuelle qu'il estime lui-même à 650000 €;

Attendu qu'ainsi, et en toute hypothèse, la banque n'a pu commettre aucune faute qui soit susceptible d'ouvrir droit à dommages-intérêts, puisqu'elle a pris le soin de recueillir des renseignements qui démontrent que la caution consentie limitée à 27000 € n'était manifestement pas disproportionnée, bien au contraire, si l'on se réfère aux éléments déclarés qui sont parfaitement opposables par la banque à la caution, cette dernière n'ayant pas à s'immiscer dans les affaires de son client ;

Attendu que contrairement à ce qu'il énonce, en se référant uniquement à des revenus qu'il qualifie de faibles, la cour estime que l'intéressé n'a été privé d'aucune chance de renoncer à souscrire l'acte de cautionnement litigieux ;

Attendu que l'acte de cautionnement doit par conséquent trouver son plein et entier effet, par confirmation sur ce volet du jugement de premier ressort, puisque le caractère limité du cautionnement rend superfétatoire la discussion sur le défaut d'information annuelle des cautions, compte tenu du montant de la créance sans tenir compte des intérêts dont le calcul par la banque dans ses conclusions n'est pas autrement commenté ni a fortiori contesté ;

Attendu que la banque ne réclame pas l'intérêt au taux contractuel, mais l'intérêt au taux légal depuis la déclaration de créance (14 mars 2013) sur le montant limité de la caution, sachant que l'assignation est en date du 20 mars 2013 ;

Attendu que s'agissant de Mme B..., la cour est saisie par ses écritures au dispositif de ses conclusions, selon l'article 954 du code de procédure civile ;

Attendu qu'elle fonde son argumentation uniquement sur l'article 464 du Code civil, dont la simple lecture aurait dû inciter à tout le moins le premier juge à une autre motivation, car la réduction par preuve de l'inaptitude à défendre ses intérêts, par suite d'une altération des facultés personnelles du cocontractant, est soumise à la condition que cette altération soit notoire ou connue en l'espèce de la banque, à l'époque où les actes ont été passés ;

Attendu que la question est donc d'établir si à la date du 20 septembre 2010, effectivement moins de deux ans avant la mesure de curatelle renforcée du 27 janvier 2012, l'affection de l'intéressée était notoire ou connue de la banque, et non pas, comme le retient le premier juge, si « elle subit aujourd'hui un préjudice incontestable à se voir réclamer la somme de 27000 € au titre d'un engagement de caution dont elle n'aurait manifestement pas mesuré les risques, pas plus qu'elle n'avait pu mesurer quelques jours avant les risques d'un apport en compte courant associé d'un montant de 38000 €, certes hors débat, mais révélateur de la vulnérabilité de l'intéressée et de son caractère influençable » ;

Attendu que c'est en quelques mots faire fi du principe du consensualisme, ce que n'excuse nullement l'empathie sous-jacente envers le débiteur ;

Attendu qu'en d'autres termes, l'opinion du juge motivée en 2015 sur l'état de l'intéressée en septembre 2010, n'est pas susceptible d'éluder les dispositions précises de l'article 464 du Code civil, au motif que la caution subirait un préjudice du fait d'avoir à satisfaire à ses obligations ;

Attendu qu'il n'est pas soutenu que la banque connaissait l'état de santé de l'intéressée en septembre 2010, encore moins qu'elle ait eu connaissance des documents médicaux produits dans le présent débat à l'appui de l'altération des facultés personnelles ;

Attendu que la pièce numéro 14 est une attestation de séjour au centre psychiatrique de[...]en date du 19 mars 2006;

Attendu que les éléments contenus au récapitulatif de son dossier médical, à le considérer comme tel puisqu'il ne comporte aucune signature, datent de 2006 ;

Attendu que l'admission au statut d'adulte handicapé date du 13 juillet 2007 (pièce numéro 15), sans que rien ne démontre que la banque était au courant, pareillement pour l'allocation aux adultes handicapés du 18 mai 2009 ;

Attendu que la pièce numéro 17, reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, date de novembre 2012 ;

Attendu que le certificat du docteur Z..., en pièce numéro 18, date de septembre 2011, et atteste de troubles de santé contre indiquant dorénavant tout travail dans la restauration, ce qui indique a contrario ce que l'intéressée travaillait dans la restauration jusque-là ;

Attendu que le deuxième certificat du même docteur établissant des troubles psychiatriques de type bipolaire depuis l'adolescence avec prédominance dépressive date du 29 mars 2013;

Attendu qu'au-delà des dates fort éloignées en amont ou en aval de la date du 20 septembre 2010, rien ne démontre que ce qui est établi après examen ou suivi par un médecin traitant ou un médecin spécialiste a un caractère notoire au moment de l'établissement de la caution face à un préposé de l'établissement bancaire ;

Attendu que les certificats du docteur I... en pièce numéro 22 et en pièce numéro 23 méritent la même motivation, car ils datent de mars 2011 et de mars 2013;

Attendu que l'examen exhaustif des pièces régulièrement communiquées par Mme B... ne permet donc pas de retenir le caractère notoire de l'affection susceptible de permettre l'application de l'article 464 du Code civil ;

Attendu qu'il sera donc fait droit à l'appel incident de la banque, dont le quantum de la demande n'est nullement commenté ni a fortiori contesté ;

Attendu que l'appel incident de la banque prospérera par conséquent, l'appelant supportant les dépens exposés en appel et une juste application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS , LA COUR statuant contradictoirement :

Déclare l'appel principal infondé ;

Déclare l'appel incident partiellement fondé ;

statuant à nouveau de ce chef,

Condamne Marie-Christine B... à payer à la société marseillaise de crédit la somme de 27000 €, avec intérêts au taux légal depuis le 14 mars 2013, et capitalisation des intérêts dus depuis au moins un an à compter de l'assignation initiale;

Confirme pour le surplus le jugement de premier ressort ;

Condamne l'appelant aux dépens exposés en appel, qui seront recouvrés au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile, outre le paiement à la société marseillaise de crédit d'une somme de 1500 € au titre des frais inévitablement exposés en appel

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

NC/GT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Ct0063
Numéro d'arrêt : 15/05580
Date de la décision : 11/04/2018

Analyses

1ère B, 11 avril 2018 ¿ RG 15.05580 Il résulte de l'article 464 du Code civil que la réduction d'un engagement de caution pris par une personne protégée moins de deux ans avant la publicité du jugement d'ouverture de la mesure de protection, sur preuve de son inaptitude à défendre ses intérêts, par suite d'une altération de ses facultés personnelles, est soumise à la condition que cette altération ait été notoire ou connue de la banque cocontractante à l'époque où l'acte a été passé. La seule constatation par le juge que l'état de santé de la caution l'empêchait de mesurer les risques de son engagement ne lui permet donc pas d'éluder les dispositions précises de l'article 464 au motif qu'elle subirait un préjudice du fait d'avoir à satisfaire à ses obligations, dès lors que les pièces communiquées ne démontrent pas le caractère notoire de l'affection - seul susceptible de permettre l'application de ce texte - au moment où elle a établi l'acte face à un préposé de la banque.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Montpellier, 28 mai 2015


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2018-04-11;15.05580 ?
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