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18/01/2018 | FRANCE | N°17/2955

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Ct0146, 18 janvier 2018, 17/2955


Grosse + copie
délivrées le
à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1ère Chambre A

ARRET DU 18 JANVIER 2018

Numéro d'inscription au répertoire général : 17/02955

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 10 MAI 2017
PRESIDENT DU TGI DE PERPIGNAN No RG 16/01049

APPELANTE :

OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT [Localité 1] MEDITERRANEE
et pour lui son représentant légal domicilié ès qualités
[Adresse 1]
[Localité 1]
représenté par Me Guillaume CALVET de la SCP BECQUE DAHAN PONS SERRADEIL CALVET REY, avocat au barreau des

PYRENEES-ORIENTALES

INTIMES :

Madame [Z] [Z] épouse [C]
née le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 2] (Maroc) - de nationalité fra...

Grosse + copie
délivrées le
à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1ère Chambre A

ARRET DU 18 JANVIER 2018

Numéro d'inscription au répertoire général : 17/02955

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 10 MAI 2017
PRESIDENT DU TGI DE PERPIGNAN No RG 16/01049

APPELANTE :

OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT [Localité 1] MEDITERRANEE
et pour lui son représentant légal domicilié ès qualités
[Adresse 1]
[Localité 1]
représenté par Me Guillaume CALVET de la SCP BECQUE DAHAN PONS SERRADEIL CALVET REY, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES

INTIMES :

Madame [Z] [Z] épouse [C]
née le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 2] (Maroc) - de nationalité française
[Adresse 2]
[Localité 1]
représentée par Me Stéphane BONAFOS substituant la SCP GIPULO DUPETIT MURCIA, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES

Monsieur [D] [C]
né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 3] (Maroc )- de nationalité française
[Adresse 2]
[Localité 1]
représenté par Me Stéphane BONAFOS substituant la SCP GIPULO DUPETIT MURCIA, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES

MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
et pour elle son représentant légal domicilié ès qualités
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Philippe LIDA de la SCP LIDA CARRIERE, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 21 Novembre 2017

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 NOVEMBRE 2017, en audience publique, Madame Caroline CHICLET, Conseiller ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de procédure civile, devant la cour composée de :
Madame Nadia BERGOUNIOU-GOURNAY, Président
Madame Caroline CHICLET, Conseiller
Madame Brigitte DEVILLE, Conseiller
qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Elisabeth RAMON

ARRET :

- Contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile
- signé par Madame Nadia BERGOUNIOU-GOURNAY, Président, et par Madame Elisabeth RAMON, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********** EXPOSE DU LITIGE :

[Z] [Z] épouse [C] et [D] [C] ont acquis de l'office public de l'habitat [Localité 1] Roussillon (l'OPH) une maison neuve située à [Localité 1] (66) moyennant le prix de 130.000 ?.

Invoquant divers désordres et infiltrations, les époux [C] ont régularisé une déclaration de sinistre auprès de la société MMA Iard assurances mutuelles, assureur dommages ouvrage du vendeur, le 2 avril 2012.

La société MMA a mandaté un expert et a refusé de garantir les désordres qualifiés d'esthétiques.

Les époux [C] ont sollicité l'instauration d'une expertise judiciaire en référé au contradictoire de l'assureur DO et de l'OPH qui a appelé en cause tous les constructeurs.

L'expert [F] a déposé son rapport le 30 janvier 2016.

En lecture de ce rapport, les époux [C] ont fait citer l'OPH et la société MMA Iard, par actes d'huissier en date du 22 décembre 2016, devant le président du tribunal de grande instance de Perpignan statuant en référé afin d'obtenir le versement d'une indemnité provisionnelle à valoir sur la réparation de leurs préjudices.

Par ordonnance contradictoire en date du 10 mai 2017 le juge des référés a :
?condamné l'OPH [Localité 1] Méditerranée venant aux droits de l'OPH [Localité 1] Roussillon à payer aux époux [C] la somme de 18.817,68 ? à titre de provision à valoir sur la réparation des désordres de nature décennale affectant leur villa ;
?dit n'y avoir lieu à référé pour toutes les autres demandes ;
?dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
?condamné l'OPH aux dépens en ce compris les frais d'expertise avec recouvrement dans les conditions de l'aide juridictionnelle.

L'OPH a relevé appel de cette ordonnance le 24 mai 2017 à l'encontre de toutes les parties.

Vu les conclusions de l'appelante remises au greffe le 6 septembre 2017 ;

Vu les conclusions des époux [C], appelants à titre incident, remises au greffe le 10 novembre 2017 ;

Vu les conclusions de la société MMA Iard Assurances Mutuelles remises au greffe le 4 octobre 2017 ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 21 novembre 2017 ;

MOTIFS :

Sur la recevabilité des demandes de provision dirigées contre l'assureur dommages ouvrage :

Les époux [C], formant appel incident, concluent à l'infirmation de l'ordonnance en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé pour leur demande de garantie dirigée contre la société MMA.

La société MMA oppose la prescription biennale de l'article L.114-1 du Code des assurances.

La déclaration de sinistre a été régularisée le 2 avril 2012 et la société MMA a notifié son refus de garantie le 31 mai 2012.

Le délai de prescription biennal a commencé à courir, au plus tôt, à la date de cette déclaration de sinistre qui détermine le moment où les époux [C] ont eu connaissance de certains désordres.

Il résulte des dispositions de l'article 38 du décret du 19 décembre 1991 dans sa version applicable que lorsqu'une action en justice doit être intentée devant la juridiction du premier degré avant l'expiration d'un délai, l'action est réputée avoir été intentée dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle est adressée au bureau d'aide juridictionnelle avant son expiration et si la demande en justice est introduite dans un nouveau délai de même durée à compter de la notification de la décision d'admission provisoire, ou de la date à laquelle la décision d'admission ou de rejet est devenue définitive ou, lorsqu'un auxiliaire de justice a été désigné, à compter de la date de sa désignation.

Or, les époux [C] ont sollicité le bénéfice de l'aide juridictionnelle pour exercer une action contre la société MMA le 30 juillet 2012, dans le délai de deux ans de l'article L.114-1 du code des assurances.

La décision d'admission leur a été notifiée au plus tôt le 12 décembre 2012 (date de son prononcé) ce qui a eu pour effet de faire courir un nouveau délai de deux ans qui expirait le 12 décembre 2014.

Le fait que cette décision d'admission soit devenue caduque (pour n'avoir pas été utilisée dans le délai d'un an) n'a d'effet qu'en ce qui concerne le bénéfice de l'aide juridictionnelle et n'a pas eu d'incidence sur l'interruption des délais résultant de l'aide.

Il est donc inopérant que la présente action ait été engagée sur la base d'une autre décision d'admission.

L'assignation en référé ayant été délivrée à la société MMA le 11 septembre 2014, avant l'expiration du délai de deux ans précité, l'action dirigée par les époux [C] contre l'assureur dommages ouvrage est recevable, contrairement à ce que soutient l'intimée.

Sur les demandes de provision :

L'OPH conclut à l'infirmation de l'ordonnance en ce qu'il l'a condamnée à indemniser les désordres 1, 2, 13 et 14 en invoquant une contestation sérieuse tirée de l'absence de nature décennale de ces désordres.

Les époux [C], formant appel incident, demandent à la cour de condamner l'OPHLM à leur payer le coût de reprise du désordre no 6 non retenu par le premier juge.

Nul ne discute que l'ouvrage a été réceptionné par l'OPHLM le 30 octobre 2009 en sa qualité de maître d'ouvrage et aucune des parties n'invoque l'existence de réserves à la réception.

Conformément aux dispositions de l'article 1792-1, 2o du code civil, l'acte de vente intervenu entre l'OPHLM et les époux [C] le 6 octobre 2009 stipule, en page 21, que le vendeur-constructeur est tenu envers l'acquéreur des garanties prévues par les articles 1792 et suivants du code civil.

Les époux [C] sont donc en droit de solliciter de leur venderesse des provisions à valoir sur le coût de reprise des désordres de nature décennale affectant l'immeuble vendu.

1) Le désordre no 1 consiste en un défaut d'étanchéité à l'eau de la porte-fenêtre droite du côté salon ainsi qu'en un défaut d'étanchéité à l'air de la porte-fenêtre du côté salle à manger causés par un défaut de jointoiement et par une pose défectueuse sur le rejingot du dormant PVC.

S'il est exact que les désordres affectant les menuiseries extérieures relèvent en principe de la garantie de bon fonctionnement, il en va autrement lorsqu'ils rendent l'ouvrage impropre à sa destination.

Or, il n'est pas sérieusement contestable que des entrées d'eau et d'air dans les principales pièces de vie de la maison d'habitation portent atteinte à la destination de l'immeuble et relèvent de la garantie décennale, contrairement à ce qui est soutenu.

L'ordonnance sera confirmée en ce qu'elle a condamné l'OPHLM à payer aux époux [C] une provision de 803 ? TTC correspondant au coût de reprise arrêté par l'expert en page 61 du rapport.

2) Le désordre no 2 consiste en un défaut d'étanchéité entre les façades mitoyennes qui permet à l'eau et à l'air de s'infiltrer entre les deux bâtiments en raison de l'absence de mise en oeuvre d'un couvre-joint sur le joint de dilatation en partie basse de l'immeuble.

L'expert judiciaire indique que l'eau qui s'infiltre dans cet interstice va entraîner, à plus ou moins long terme, de l'humidité dans les pièces mitoyennes sans préciser, toutefois, si ce dommage surviendra dans le délai de la garantie décennale alors que huit années se sont écoulées depuis la réception d'octobre 2009 et que les époux [C] n'invoquent toujours aucune trace d'humidité, ainsi que le fait valoir l'appelante.

La nature décennale de ce désordre se heurte à une contestation sérieuse en l'absence d'impropriété à la destination ou d'atteinte à la solidité caractérisée clairement par l'expert et il n'y a pas lieu à référé de ce chef.

L'ordonnance sera infirmée sur ce point.

3) Le désordre no 6 consiste en des aciers apparents de part et d'autre des deux fenêtres du séjour à l'extérieur.

Selon l'expert judiciaire, ces aciers auraient dû être supprimés ou « passivés » avant l'exécution des enduits extérieurs car ils peuvent être à l'origine de pénétration d'humidité dans le séjour et l'expert précise que ce désordre, s'il survient, sera évolutif.

Mais aucune trace d'humidité dans le séjour n'a été relevée par l'expert lors de ses opérations et ce dernier ne précise pas si ce désordre va survenir dans le délai de la garantie décennale.

Les époux [C] n'invoquent d'ailleurs aucune humidité actuelle alors que l'ouvrage a été réceptionné il y a plus de 8 ans.

Tenant l'imprécision des conclusions de l'expert sur ce point, la demande de provision se heurte à une contestation sérieuse et l'ordonnance sera confirmée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur ce point.

4) Le désordre no 13 consiste en une insuffisance de hauteur de l'échappée des escaliers entraînant un risque de blessures pour les usagers mesurant plus de 1,65 m concernant l'escalier d'accès au second étage et plus d'1,76 mètre concernant l'escalier d'accès du rez-de-chaussée vers le premier étage alors que les règles fixées par le DTU préconisent une hauteur minimale d'1,90 mètre.

Il est indifférent que ce défaut ait été apparent lors de la vente aux époux [C] puisque le caractére apparent ou caché du vice doit s'apprécier en la personne du maître de l'ouvrage, et non de l'acquéreur.

En revanche, et ainsi que le soutient justement la société MMA, la hauteur anormalement basse de ces échappées n'a pu échapper à la vigilance de l'OPHLM lors de la réception, nonobstant l'absence de réserve formée sur ce point par le maître de l'ouvrage, et la qualification décennale de ce désordre se heurte, dans ces conditions, à une contestation sérieuse.

L'ordonnance sera par conséquent infirmée en ce qu'elle a accueilli la demande des époux [C].

5) Le désordre no 14 consiste en une absence d'isolation thermique en sous-face du plancher de la chambre à l'origine d'une déperdition de chaleur et d'une surconsommation de chauffage.

L'expert judiciaire évoque un « préjudice de confort et financier » s'agissant d'une « impression de froid » sans dire si cet inconfort est de nature à rendre la chambre située au-dessus du porche impropre à sa destination.

La nature décennale de ce désordre se heurte par conséquent à une contestation sérieuse tenant l'insuffisance de constatations de

l'expert judiciaire et ses conclusions imprécises et l'ordonnance sera infirmée de ce chef.

Sur la demande de passerelle des époux [C] :

La cour étant tenue de vider sa saisine sur l'appel dont elle est saisie, elle n'a pas le pouvoir de renvoyer la connaissance de ce litige directement au juge du fond ainsi que le réclament les époux [C] dont la demande sera rejetée.

Sur la demande de garantie de l'OPH :

La société MMA, prise en sa qualité d'assureur dommages ouvrage, sera condamnée à garantir l'OPH du montant des condamnations prononcées contre elle par le présent arrêt en principal, frais, intérêts et dépens.

PAR CES MOTIFS :

La cour ;

Infirme partiellement l'ordonnance déférée ;

Statuant à nouveau sur le tout pour une meilleure compréhension ;

Reçoit l'action dirigée par les époux [C] contre la société MMA ;

Condamne l'OPH [Localité 1] Méditerranée venant aux droits de l'OPH [Localité 1] Roussillon et la société MMA in solidum à payer aux époux [C] la somme de 803 ? TTC à titre de provision à valoir sur le coût de reprise du désordre no 1 ;

Dit n'y avoir lieu à référé pour le surplus ;

Rejette la demande des époux [C] fondée sur l'article 811 du code de procédure civil ;

Condamne la société MMA à garantir la société OPH [Localité 1] Méditerranée du montant des condamnations prononcées contre elle par le présent arrêt en principal, frais, intérêts et dépens ;

Condamne la société OPH [Localité 1] Méditerranée et la société MMA aux dépens de première instance et d'appel qui comprendront les frais taxés de l'expertise judiciaire ;

Dit n'y avoir lieu au bénéfice de l'article 700 du code de procédure civile en première instance comme en cause d'appel et déboute toutes les parties de leurs demandes de ce chef.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

CC


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Ct0146
Numéro d'arrêt : 17/2955
Date de la décision : 18/01/2018

Analyses

Selon l'article 38 du décret du 19 décembre 1991 dans sa version applicable, lorsqu'une action en justice doit être intentée avant l'expiration d'un délai, elle est réputée l'avoir été dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle est adressée au bureau d'.A.J. avant son expiration et si la demande en justice est introduite dans un nouveau délai de même durée à compter de la notification de la décision d'admission provisoire, ou de la date à laquelle la décision d'admission ou de rejet est devenue définitive ou, lorsqu'un auxiliaire de justice a été désigné, à compter de la date de sa désignation. Pour l'application de ces dispositions, le fait qu'une décision d'admission à l'aide juridictionnelle soit devenue caduque pour n'avoir pas été utilisée dans le délai d'un an n'a d'effet qu'en ce qui concerne le bénéfice de l'aide juridictionnelle et n'a pas eu d'incidence sur l'interruption des délais résultant de l'aide.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Perpignan, 10 mai 2017


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2018-01-18;17.2955 ?
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