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délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1ère Chambre A
ARRÊT DU 07 SEPTEMBRE 2017
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/04204
Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 MAI 2014
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN
No RG 12/04558
APPELANTE :
MUTUELLES DU MANS ASSURANCES I.A.R.D.
[...]
représentée par la SCP BRUGUES LASRY, avocat au barreau de MONTPELLIER, postulant
et par Me Véronique X... de la Y... , avocat au barreau de NIMES, plaidant
INTIMES :
Monsieur Guy Z...
né le [...] à Ambérieu en Bugey
de nationalité Française
[...]
représenté par Me Séria A... substituant Me Matthieu B..., avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES
SCI LA TRIBU
prise en la personne de son représentant légal domicilié
[...]
représentée par Me Bernard C... de la SCP C... F...-DE- LACLAUSE ESCALE KNOEPFFLER, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES
ORDONNANCE DE CLÔTURE du 02 Mai 2017
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de Procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 MAI 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE Président, et Madame Brigitte DEVILLE Conseiller, chargée du rapport
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE, Président de chambre
Madame Caroline CHICLET, Conseiller
Madame Brigitte DEVILLE, Conseiller
Greffier, lors des débats : Madame Elisabeth RAMON
le délibéré prononcé au 06/07/2017 est prorogé au 07/09/2017
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile ;
- signé par Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE, Président, et par Madame Elisabeth RAMON greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
**********
EXPOSE DU LITIGE :
Les époux Z... ont vendu à la SCI La Tribu une maison d'habitation située au 2 bis rue El Carrero à Llupa suivant acte authentique du 7 janvier 2008, dressé en l'étude de Maître Jean-Marc D..., notaire chargé de la vente.
A l'acte authentique de vente était annexé un diagnostic technique dressé par l'EURL CEEP Patrick Salvat qui excluait la présence d'amiante dans l'habitation.
Néanmoins, à l'occasion de travaux consistant en l'installation d'une fenêtre en toiture, la SCI La Tribu a décelé la présence d'amiante au niveau des plaques ondulées en fibre de ciment rouge et gris sous la toiture, ce qui a été confirmé par la suite dans un procès-verbal d'analyse du laboratoire Eurofins-Lem réalisé sur un échantillon desdites plaques de ciment.
Dès lors, par assignation en date du 22 février 2011, la SCI La Tribu a saisi le juge des référés afin d'obtenir la désignation d'un expert judiciaire et, suivant assignation d'appel en cause du 5 avril 2011, Guy Z... a demandé au juge des référés que soit déclarées communes et opposables à l'EURL CEEP Patrick Salvat et à son liquidateur judiciaire, désigné par un jugement rendu par le tribunal de commerce de Perpignan du 10 mars 2010, les opérations d'expertise judiciaire.
Dans son ordonnance du 27 avril 2011, le juge des référés a désigné Fabrice E... en qualité d'expert judiciaire.
La société Mutuelles du Mans Assurances (MMA), assureur en responsabilité civile professionnelle de l'EURL CEEP Patrick Salvat, est intervenue volontairement à l'instance.
L'expert judiciaire a rendu son rapport le 13 décembre 2011 aux termes duquel il a constaté la présence de plaques en ciment amianté sous les tuiles.
En lecture de ce rapport, la SCI La Tribu a assigné, par acte d'huissier du 27 novembre 2012, Guy Z... et la société MMA, ès qualités d'assureur de l'EURL CEEP Patrick Salvat, devant le tribunal de grande instance de Perpignan sur le fondement des articles 1382 et 1641 et suivant du code civil afin d'obtenir la réparation des préjudices subis.
Par jugement en date du 13 mai 2014, ce tribunal a :
- condamné Guy Z... à payer à la SCI La Tribu la somme de 15.000 € et in solidum avec la SA Mutuelles du Mans Assurances à hauteur de 7.500 € en déduction du prix de vente correspondant aux travaux nécessaires pour la réfection de la toiture et au surcoût lié au désamiantage ;
- dit que la condamnation sus-prononcée emportera intérêts au taux légal à compter du jugement ;
- condamné la SA Mutuelles du Mans Assurances à relever et garantir Guy Z... à hauteur de 50 % de la somme de 15.000 € due à la SCI La Tribu ;
- débouté la SCI La Tribu du surplus de ses demandes indemnitaires ;
- débouté la SA Mutuelles du Mans Assurances de sa demande tendant à l'application de la franchise contractuelle ;
- prononcé l'exécution provisoire du jugement ;
- condamné in solidum Guy Z... et la SA Mutuelles du Mans Assurances à payer à la SCI La Tribu la somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit que l'intégralité des dépens sera supportée in solidum par Guy Z... et la SA Mutuelles du Mans Assurances.
La société Mutuelles du Mans Assurances a interjeté appel de ce jugement suivant déclaration d'appel du 5 juin 2014.
Vu les conclusions de l'appelante remises au greffe le 12 février 2015,
Vu les conclusions de la SCI La tribu remises au greffe le 13 février 2015,
Vu les conclusions de Monsieur Z... , appelant incident, remises au greffe le 22 décembre 2014,
Vu l'ordonnance de clôture du 2 mai 2017,
MOTIFS
Sur la garantie des vices cachés :
La clause exonératoire de garantie des vices cachés figurant dans l'acte de vente de l'immeuble par Monsieur Z... à la SCI La tribu ne peut recevoir application si la mauvaise foi du vendeur est démontrée.
L'expert judiciaire a constaté que des plaques sous tuiles en fibrociment recouvertes de tuiles-canal, couvrant une surface de 160 m² environ sur un pan de couverture, sont visibles au niveau de l'égout en façade principale arrière.
Ces plaques sous tuiles sont en amiante ciment dont les fibres sont réputées cancérigènes en cas d'inhalation.
Lors des opérations d'expertise Monsieur Z... a produit une facture du 18 mars 1991 correspondant à l'acquisition de 160 plaques PST. Or à cette date ces plaques étaient systématiquement chargées en fibres d'amiante. Elles ont servi à la couverture de
l'immeuble réalisée par Monsieur Z... lui-même dans le courant de l'année 1992.
Cependant le rapport de repérage amiante réalisé par le diagnostiqueur, la société CEEP, mentionne que ces plaques ondulées en fibrociment ont été commandées et posées en 2004, date à laquelle ce matériau n'était plus réputé amianté.
Monsieur Z... soutient que le diagnostiqueur a commis une erreur sur la date d'acquisition des plaques, mais dans cette hypothèse, il lui appartenait de rectifier cette erreur lorsque le rapport établi à sa demande lui a été adressé.
Cette erreur était aisément visible pour Monsieur Z... qui avait lui-même acquis et posé les plaques amiantées en 1991.
Il avait donc un devoir de loyauté et une obligation d'information vis-à-vis de l'acquéreur et devait donc l'informer de l'erreur contenue dans le rapport de repérage amiante.
Le manquement par le vendeur à ses devoirs a eu pour conséquence l'existence d'un vice caché affectant l'immeuble puisqu'en l'absence de rectification de l'erreur de date, l'acquéreur ne pouvait avoir connaissance du fait que les plaques sous tuiles contenaient de l'amiante.
La toiture recouverte par ces plaques amiante est impropre à sa destination puisque la moindre intervention sur le toit disperserait les fibres d'amiante réputés cancérigènes exposant les occupants de l'immeuble à un risque grave pour leur santé.
Ce risque grave diminue de manière importante l'usage de l'immeuble de sorte que l'acquéreur en aurait donné un moindre prix s'il l'avait connu.
Monsieur Z... ne peut donc arguer de sa bonne foi et la clause d'exonération de garantie des vices cachés ne peut trouver application.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur la responsabilité du diagnostiqueur :
Le diagnostiqueur exécutait sa mission conformément à la norme NF X 46–020 et l'annexe 13–9 du code de la santé publique applicables en 2007 : recherche systématique dans les éléments intérieurs de l'immeuble de présence de matériaux susceptibles de contenir de l'amiante, visibles et accessibles sans destruction.
Le diagnostiqueur a parfaitement rempli sa mission puisqu'il n'a détecté, au jour de sa visite, aucune présence de matériaux ou produits sur les parties visibles et accessibles, à l'intérieur de la construction, susceptibles de contenir de l'amiante.
La seule difficulté provient du fait que dans le chapitre « constatations diverses » le diagnostiqueur a précisé que les plaques ondulées en fibrociment avaient été commandées et posées en 2004 et qu'à cette date ce matériau n'était plus réputé amianté.
Il ajoutait qu'il appartenait au propriétaire d'en apporter les éléments par la production de devis, de factures ou de bons de commande.
Cette information erronée a été soit donnée par Monsieur Z..., soit mal retranscrite par le diagnostiqueur.
En tout état de cause il n'a pas failli à ses obligations contractuelles vis-à-vis de Monsieur Z... dans la mesure où ce dernier qui avait lui-même acquis et posé les plaques litigieuses en 1991 devait rectifier l'information erronée et où il lui appartenait, ainsi que le mentionne expressément le rapport, de produire tous les justificatifs de l'achat de ces éléments. Par ailleurs il a parfaitement réalisé sa mission conformément aux textes applicables.
Il n'a pas non plus engagé sa responsabilité délictuelle vis-à-vis de l'acquéreur dès lors que, même si les plaques étaient visibles depuis l'extérieur de l'immeuble et qu'il aurait pu, même en dehors de sa mission limitée à l'intérieur de l'immeuble, signaler leur existence, il a pris la précaution de préciser qu'en 2004 ce matériau n'était plus réputé amianté et mais qu'il appartenait au propriétaire d'apporter tous éléments utiles.
Ainsi, si la SCI La tribu avait exigé du vendeur la production des devis et factures d'achat conformément à la préconisation du diagnostiqueur, l'information aurait été rétablie dans sa réalité.
En conséquence, en prenant la précaution d'ajouter que le propriétaire devait justifier de la date d'acquisition des plaques sous tuiles, le diagnostiqueur n'a pas failli à sa mission et n'a commis aucun manquement tant vis-à-vis du vendeur que de l'acquéreur.
Tant l'action en responsabilité délictuelle de la SCI La tribu que l'appel en garantie de Monsieur Z... à l'encontre de la société mutuelle du Mans assurances, assureur du diagnostiqueur, doivent donc être rejetés et le jugement sera infirmé sur ces points.
Sur le montant des réparations :
Les travaux de dépose et de reconstitution de la couverture ne sont pas obligatoires même si la couverture est amiantée.
En effet la réfection complète de la toiture n'est pas nécessaire puisqu'elle est en bon état, ne subit aucune infiltration et que les occupants de l'immeuble ne sont pas exposés à un risque pour leur santé puisque l'amiante est inerte et ne libère aucune fibre dangereuse.
Cependant toute reprise ponctuelle (nécessitée par un dégât des eaux ou un accident sur la toiture) ou réfection totale imposent un désamiantage, c'est-à-dire la dépose et l'évacuation de la totalité des plaques en amiante ciment puisqu' aucune entreprise ne pourra intervenir sur ce type de couverture sans la démonter totalement y compris pour une réparation ciblée ainsi qu'il résulte des conclusions de l'expertise judiciaire.
La SCI La Tribu est donc en droit de réclamer, au titre de la restitution d'une partie du prix de vente, le montant qu'elle devra supporter dans le cas d'une réfection partielle ou totale de la toiture pour la plus-value spécifique à la présence d'amiante, soit la somme de 5000 € telle qu'évaluée par l'expert.
Le jugement sera infirmé de ce chef.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement en toutes ses dispositions.
Et statuant à nouveau,
Dit que l'immeuble acquis par la SCI La Tribu auprès de Monsieur Z... par acte du 7 janvier 2008 est affecté d'un vice caché.
Dit n'y avoir lieu à application de la clause d'exclusion de garantie des vices cachés contenue dans l'acte du 7 janvier 2008.
Condamne Monsieur Z... à payer à la SCI La Tribu la somme de 5000 € en restitution d'une partie du prix de vente avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance.
Déboute la SCI La Tribu de son action en responsabilité délictuelle à l'encontre de la société les Mutuelles du Mans assurances.
Déboute Monsieur Z... de son appel en garantie formé à l'encontre de la société les Mutuelles du Mans assurances.
Condamne Monsieur Z... à payer à la SCI La Tribu et à la société Mutuelles du Mans assurances la somme de 2000 € chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés tant en première instance qu'en cause d'appel.
Condamne Monsieur Z... aux dépens de première instance et d'appel y compris le coût du référé et de l'expertise judiciaire.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
BD