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15/06/2017 | FRANCE | N°13/02672

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Ct0146, 15 juin 2017, 13/02672


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délivrées le
à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1ère Chambre A

ARRET DU 15 JUIN 2017

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/02672

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 FEVRIER 2013
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER
No RG 10/06365

APPELANT :

Monsieur Philippe Fernand X...
né le [...]            à Montpellier (34070)
de nationalité Française
[...]                         
représenté par la SCP NEGRE, PEPRATX-NEGRE, avocat au barreau de MONTPEL

LIER, postulant
et par Me GUERS de la SCP VERBATEAM, avocat au barreau de MONTPELLIER, plaidant

INTIMES :

Monsieur Pierre Louis Z...
né le [...] à Montpellier ...

Grosse + copie
délivrées le
à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1ère Chambre A

ARRET DU 15 JUIN 2017

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/02672

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 FEVRIER 2013
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER
No RG 10/06365

APPELANT :

Monsieur Philippe Fernand X...
né le [...]            à Montpellier (34070)
de nationalité Française
[...]                         
représenté par la SCP NEGRE, PEPRATX-NEGRE, avocat au barreau de MONTPELLIER, postulant
et par Me GUERS de la SCP VERBATEAM, avocat au barreau de MONTPELLIER, plaidant

INTIMES :

Monsieur Pierre Louis Z...
né le [...] à Montpellier (34070)
de nationalité Française
[...]                            
représenté par la SCP ARGELLIES, APOLLIS, avocat au barreau de MONTPELLIER, postulant
et par Me Thierry VERNHET de la SCP SCHEUER VERNET et Associés, avocat au barreau de MONTPELLIER, plaidant

Madame Catherine Adèle C... veuve Z...
née le [...]           à SIDI BEL ABBES
de nationalité Française
[...]                            
représentée par la SCP ARGELLIES, APOLLIS, avocat au barreau de MONTPELLIER, postulant
et par Me Thierry VERNHET de la SCP SCHEUER VERNHET et Associés, avocat au barreau de MONTPELLIER, plaidant

Monsieur Joris Z...
né le [...]         à Montpellier (34070)
de nationalité Française
[...]                              
représenté de Me SERRE de la SCP LEVY BALZARINI SAGNES SERRE, avocat au barreau de MONTPELLIER

Monsieur Jérôme Z...
né le [...]           à Montpellier (34070)
de nationalité Française
[...]                              
représenté par Me SERRE de la SCP LEVY BALZARINI SAGNES SERRE, avocat au barreau de MONTPELLIER

Madame Valérie Z... née F...
née le [...]        à ALGER
de nationalité Française
[...]                              
représentée de Me SERRE de la SCP LEVY BALZARINI SAGNES SERRE, avocat au barreau de MONTPELLIER

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 11 Avril 2017

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 MAI 2017, en audience publique, Caroline CHICLET, Conseiller ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de procédure civile, devant la cour composée de :
Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE, Président de chambre
Madame Caroline CHICLET, Conseiller
Madame Brigitte DEVILLE, Conseiller
qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Elisabeth RAMON

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE, Président, et par Madame Elisabeth RAMON, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE :

Le 27 août 2001, Philippe X... a acquis de Jean-Pierre Z... (aux droits duquel viennent Catherine C... veuve Z... et Pierre Z...) et de Michel Z... (aux droits duquel viennent Valérie F... veuve Z..., Joris et Jérôme Z...) deux parcelles de terre situées sur la commune de [...]   (34) sous la condition suspensive de leur reclassification en zone constructible.

Reprochant à ses vendeurs de n'avoir pas réitéré les actes authentiques malgré la classification des terrains en zone constructible intervenue le 12 octobre 2009, Philippe X... a fait citer leurs ayants droits, par acte d'huissier en date du 8 novembre 2010, devant le tribunal de grande instance de Montpellier à l'effet de voir déclarer les ventes parfaites.

Par jugement contradictoire en date du 12 février 2013 ce tribunal a :
• débouté Philippe X... de l'ensemble de ses demandes ;
• condamné Philippe X... aux dépens et à payer sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile les sommes de :
- 2000 € à Catherine C... veuve Z... et Pierre Z...,
- 2000 € à Valérie F... veuve Z..., Joris et Jérôme Z...
• dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire.

Philippe X... a relevé appel de ce jugement le 5 avril 2013 l'encontre de toutes les parties.

Par ordonnance sur requête en date du 23 novembre 2016 rectifiée le 26 avril 2017, le conseiller de la mise en état a rejeté l'incident de péremption d'instance.

Vu les conclusions de l'appelant remises au greffe le 1er juillet 2013 ;

Vu les conclusions de Catherine C... veuve Z... et de Pierre Z... remises au greffe le 30 août 2013 ;

Vu les conclusions de Valérie F... veuve Z..., Joris et Jérôme Z..., appelants à titre incident, remises au greffe le 30 août 2013 ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 11 avril 2017 ;

MOTIFS :

Sur la demande d'annulation de la promesse de vente consentie par Michel Z... :

Valérie F... veuve Z..., Joris et Jérôme Z..., formant appel incident, demandent à la cour de prononcer la nullité du compromis de vente du 27 août 2001.

Philippe X... leur oppose la prescription quinquennale et, subsidiairement, conclut au débouté.

1) Sur la nullité pour insanité d'esprit :

Ils fondent leur demande d'annulation sur l'état d'insanité d'esprit du défunt.

Le contrat ayant été signé le 27 août 2001, ce sont les dispositions de l'ancien article 489-1 du Code civil qui s'appliquent ainsi que que celles des articles 1304, dans sa version issue de la loi du17 juin 2008, et 2224 du même Code, le procès ayant été introduit le 8 novembre 2010.

S'agissant d'une action en nullité intentée après la mort de Michel Z... lequel, de son vivant, n'était pas placé sous tutelle ni sous curatelle, la prescription quinquennale a commencé à courir à compter du jour où ses héritiers ont eu connaissance de l'acte litigieux.

Les consorts Z... démontrent, par la production de l'attestation notariée de propriété en date du 6 juin 2002, qu'ils n'avaient pas connaissance de la vente sous seing privée signée par Michel Z..., seul, et portant sur la parcelle [...] puisque celle-ci était incluse dans l'actif successoral du défunt.

Les consorts Z... n'ont eu connaissance de cet acte sous-seing privé que par la lettre recommandée que leur a envoyée Philippe X... le 22 décembre 2009.

Dès lors qu'ils ont sollicité la nullité de la vente, au plus tard le 31 mai 2012 (date de leurs dernières conclusions devant le premier juge), c'est à dire dans les cinq ans suivant la réception de la lettre recommandée précitée, leur action en nullité n'est pas prescrite et la fin de non-recevoir sera rejetée.

Selon l'ancien article 489-1 du Code civil les actes faits par un individu, autres que la donation entre vifs ou le testament, ne peuvent être attaqués pour trouble mental, après sa mort, que dans les cas ci-dessous énumérés :
1o Si l'acte porte en lui-même la preuve d'un trouble mental ;
2o S'il a été fait dans un temps où l'individu était placé sous la sauvegarde de justice ;
3o Si une action avait été introduite avant le décès aux fins de faire ouvrir la tutelle ou la curatelle.

Or, les consorts Z... n'allèguent ni ne démontrent l'existence de l'une des trois conditions précitées et leur moyen de nullité ne peut qu'être rejeté.

2) Sur la nullité pour vices du consentement :

Les consorts Z... concluent ensuite à la nullité de la vente pour vices du consentement au visa de l'ancien article 1109 du Code civil en faisant valoir que Michel Z... a commis une erreur sur le prix des terrains en raison de son état de santé psychologique et physique très altéré dont Philippe X... aurait tiré profit. Ils concluent en outre à une extorsion du consentement du défunt par violence.

Ces demandes de nullité ne sont pas davantage prescrites que la précédente, contrairement à ce que soutient à tort Philippe X....

En effet, il est établi que les consorts Z... sont restés dans l'ignorance de cette vente après le décès du défunt puisque l'attestation notariée de propriété faisait ressortir la parcelle [...] dans l'actif successoral.

Les héritiers n'ont été en mesure de découvrir l'erreur prétendument commise par le défunt ainsi que la violence dont il aurait été victime qu'à compter du jour où ils ont été informés de l'existence de la vente c'est à dire lors de la réception du courrier recommandé de Philippe X... en décembre 2009.

Or, leurs demandes de nullité ont été formées devant le premier juge au plus tard le 31 mai 2012, soit dans le délai de cinq ans suivant la réception de la lettre recommandée susvisée, et la fin de non-recevoir tirée de la prescription doit être rejetée.

Sur le fond, l'erreur sur la contre valeur de la chose vendue n'étant jamais une cause de nullité de la convention, les consorts Z... ne peuvent invoquer une erreur sur le prix pour obtenir la nullité de la vente et ce moyen sera rejeté.

Et aucune des pièces produites par les consorts Z... ne vient démontrer l'existence d'une contrainte morale qui aurait été exercée par Philippe X... sur Michel Z... aux fins d'obtenir sa signature et ce moyen de nullité sera également rejeté.

3) Sur la nullité pour vileté du prix :

Un contrat de vente conclu pour un prix dérisoire ou vil est nul pour absence de cause et cette nullité, fondée sur l'intérêt privé du vendeur, est une nullité relative soumise au délai de prescription de cinq ans et non une nullité absolue soumise au délai de prescription trentenaire.

L'action en nullité pour absence prix sérieux n'est pas prescrite, contrairement à ce que soutient à tort Philippe X..., dès lors que les consorts Z... n'ont eu connaissance de l'acte sous seing privé signé par Michel Z..., seul, qu'en décembre 2009 et qu'ils ont sollicité son annulation, au plus tard, le 31 mai 2012.

Sur le fond, la promesse de vente signée par Michel Z... a été consentie en août 2001 au prix de 145 francs du m2 (22,11 €) soit 483.140 francs (73.654,22 €) pour un terrain constructible de 3332 m2.

Les consorts Z... ne produisent aucun élément permettant de connaître le prix des terrains constructibles et comparables au terrain litigieux à l'époque de la signature du contrat alors que la vileté du prix s'apprécie au jour de la vente.

Ils se bornent à verser aux débats deux annonces immobilières parues douze années plus tard, en 2013, faisant ressortir le prix d'un terrain de 300 m2, viabilisé et raccordé aux réseaux électricité, téléphone et eau, et situé à proximité des commerces et commodités à 167.000 ou 168.000 €.

Mais dès lors qu'il n'est pas démontré que ces terrains ont des caractéristiques comparables avec le terrain litigieux, ces deux seules pièces ne peuvent faire la preuve des caractéres dérisoire et inexistant du prix de 481.140 francs étant rappelé que la vente n'est pas annulable pour la seule raison que le prix ne correspond pas à la valeur réelle de l'immeuble.

Ce moyen de nullité sera par conséquent rejeté.

Au total, les consorts Z... échouent à démontrer l'existence d'une quelconque cause de nullité de la promesse de vente du 27 août 2001 et ils doivent être déboutés de leur demande d'annulation de la vente.

Sur la demande de Philippe X... visant à voir déclarer parfaites les promesses de vente consenties par Michel et Jean-Pierre Z... :

Philippe X... conclut à l'annulation du jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes visant à voir déclarer les ventes parfaites et il demande à la cour de dire que les promesses ne contenaient pas de terme extinctif et qu'aucune caducité ne peut, par conséquent, être encourue.

Les consorts Z... opposent la caducité des promesses.

Les promesses ont été consenties par Michel et Jean-Pierre Z... sous la même condition suspensive de "l'obtention d'un certificat d'urbanisme assurant la constructibilité de la parcelle (...) après rectification par modification ou révision du POS de la commune de [...]  . Alors que cette parcelle n'est plus impactée par la zone inondable de la [...] , à la suite du rapport de la SIEE résultant de l'étude hydraulique, son classement actuel en zone ND est injustifié. De son côté, Monsieur X..., propriétaire de la parcelle [...], située dans le même secteur et classée également en zone ND a déjà introduit dans les délais légaux de recevabilité un recours pour excès de pouvoir sur la base des mêmes motifs que ci-dessus exposés. Il s'engage à joindre et englober dans cette action la parcelle objet des présentes et à prendre en charge les frais éventuels relatifs aux démarches utiles jusqu'à la l'aboutissement de la procédure."

Elles contiennent en outre une clause de "délais" rédigée en des termes identiques et selon laquelle les parties sont convenues que "la validité de cet acte est limitée à dix-huit mois à date de ce jour. Ce délai pourra être prorogé en cas de nécessité valablement justifiée et jusqu'à la publication du nouveau POS rectifié et opposable aux tiers ainsi que l'obtention du certificat d'urbanisme positif visé supra. En cas de décision négative, les présentes seront alors considérées comme nulles et non avenues et les parties seront déliées de tout engagement sans pouvoir prétendre à aucune indemnité de part et d'autre."

Il résulte de l'articulation de ces deux clauses que les parties ont subordonné la vente à la rectification préalable du POS, dont Philippe X... devait faire son affaire pour la parcelle vendue, et que les promesses ont été consenties pour une durée de 18 mois à compter du 27 août 2001.

Elles expiraient par conséquent le 26 février 2003 à minuit.

Il existe donc un terme extinctif à chacune de ces promesses, contrairement à ce que soutient à tort Philippe X....

Il n'y a pas de clause de prorogation automatique puisque la prorogation n'est envisagée que comme une simple faculté pour le vendeur ("ce délai pourra") et qu'elle requiert, de surcroît, la preuve auprès de ce dernier "d'une nécessité" qui doit en outre être "valablement justifiée".

Philippe X... ne démontre pas que ses vendeurs, qui sont décédés tous les deux des suites d'une maladie avant l'expiration du terme extinctif (le 3 janvier 2002 pour Michel Z...), ou leurs héritiers, lui auraient accordé une prorogation expresse ou tacite du terme.

Le délai d'expiration des promesses étant arrivé à échéance sans qu'il soit justifié d'une prorogation du terme de la part des vendeurs ou de leurs héritiers, elles sont devenues caduques depuis le 26 février 2003 à minuit.

Philippe X... doit être débouté de ses prétentions et le jugement sera confirmé sur ce point.

PAR CES MOTIFS :

La cour ;

Confirme le jugement entrepris et y ajoutant ;

Rejette les fins de non-recevoir opposées par Philippe X... et tirées de la prescription ;

Déboute Valérie F... veuve Z..., Joris et Jérôme Z... de leur demande d'annulation de la promesse de vente signée par Michel Z... ;

Dit que les promesses de vente signées par Michel et Jean-Pierre Z... le 27 août 2001 sont caduques depuis le 26 février 2003 à minuit ;

Condamne Philippe X... aux dépens de l'appel et à payer à Valérie F... veuve Z..., Joris et Jérôme Z... pris ensemble d'une part, et à Catherine C... veuve Z... et Pierre Z... pris ensemble d'autre part, une indemnité de 1.500 € chacun pour leurs frais engagés en cause d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

CC


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Ct0146
Numéro d'arrêt : 13/02672
Date de la décision : 15/06/2017

Analyses

Une promesse de vente subordonnant la vente à la rectification préalable du POS, consentie pour une durée de 18 mois, ne comportant pas de clause de prorogation automatique et n'envisageant cette prorogation que comme une simple faculté pour les vendeurs, est devenue caduque dès lors qu'ils sont décédés l'un et l'autre avant l'expiration de ce terme extinctif et qu'il n'est pas justifié d'une prorogation du terme de la part des vendeurs ou de leurs héritiers.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Montpellier, 12 février 2013


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2017-06-15;13.02672 ?
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